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29/07/2021 | FRANCE | N°20/000825

France | France, Cour d'appel de Nouméa, 05, 29 juillet 2021, 20/000825


No de minute : 69

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 26 Juillet 2021

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 20/00082 - No Portalis DBWF-V-B7E-RHT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juin 2020 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG no :19/532)

Saisine de la cour : 07 Août 2020

APPELANT

M. [Y] [I],
demeurant [Adresse 2]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/001542 du 30/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représenté par Me Grégory MARCHAIS de l

a SELARL D'AVOCATS LUCAS MARCHAIS, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.A BNP PARIBAS NOUVELLE CALEDONIE
demeurant [Ad...

No de minute : 69

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 26 Juillet 2021

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 20/00082 - No Portalis DBWF-V-B7E-RHT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juin 2020 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG no :19/532)

Saisine de la cour : 07 Août 2020

APPELANT

M. [Y] [I],
demeurant [Adresse 2]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/001542 du 30/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représenté par Me Grégory MARCHAIS de la SELARL D'AVOCATS LUCAS MARCHAIS, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.A BNP PARIBAS NOUVELLE CALEDONIE
demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Philippe REUTER de la SELARL D'AVOCATS REUTER-DE RAISSAC-PATET, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Juin 2021, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,
M. Charles TELLIER, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Marie-Claude XIVECAS.

Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT
Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 26 juillet 2021,date à laquelle le délibéré a été prorogé au 29 juillet 2021, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, Greffier auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Selon offre préalable du 16 août 2016, la S.A BNP PARIBAS NC a consenti à M. [Y] [I] commerçant exerçant à l'enseigne LCND un prêt dénommé RAPIDITE no 16001840, d'un montant de 2 000 000 Fcfp destiné à l'achat de diverses fournitures et d'un fourgon pour son activité professionnelle, remboursable en 36 mensualités de 58 485 Fcfp si réescomptable ou de 62 068 Fcfp si non réescomptable à compter du 02/10/2016.

A compter d'octobre 2017, les mensualités prélevées sur le compte courant ont cessé d'être payées, faute de provision suffisante et la banque par courrier recommandé avec accusé réception en date du 09 janvier 2018 a prononcé la déchéance du terme et en l'absence d'apurement de la dette a prononcé la clôture du compte à l'expiration d'un délai de 60 Jours.

Puis, par requête déposée le 25/10/2019, la S.A BNP PARIBAS NC a fait assigner M. [Y] [I] en paiement devant le Tribunal Mixte de Commerce.

Par jugement prononcé le 12 juin 2020,le Tribunal Mixte de Commerce de Nouméa a rendu la décision suivante :

etlt;etlt; CONDAMNE M. [Y] [I] à payer à la S.A BNP PARIBAS NC les sommes suivantes :

1/au titre du solde débiteur du compte courant no 09118202433000055 : 86459 F CFP avec intérêt au taux légal à compter du 30/09/2018 ;

2/ au titre du cérdit RAPIDITE no16001840

- 1 313 996 Fcfp à titre principal avec intérêt au taux contractuel de 8,056% l'an à compter du 09/01/2018 ;

- 131 399 Fcfp au titre de la clause pénale avec intérêt au taux légal à compter du jugement ;

DIT que les intérêts échus pour une année entière porteront eux-mêmes intérêts, aux mêmes taux respectifs conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

DÉBOUTE la BANQUE du surplus de ses demandes ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision ;

CONDAMNE M. [Y] [I] aux entiers dépens.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête du 07/01/2020, M. [Y] [I] a fait appel de la décision signifiée le 26/06/2020 et demande à la Cour, dans son mémoire ampliatif du 13/11/2020 et ses dernières écritures du 05/03/2021, d'infirmer la décision et statuant à nouveau de dire que :
- M. [Y] [I] est un emprunteur novice,

- constater que M. [Y] [I] n'a pas bénéficié des informations dues par la banque,

- constater qu'il entend vendre le bien immobilier financé par la S.A BNP PARIBAS NC aux fins de solder les capitaux du prêt,

- décharger M. [Y] [I] des pénalités et intérêts produits par la somme prêtée,

- octroyer à M. [Y] [I] un report de deux ans pour payer le capital restant dû soit la somme de 1 400 455 Fcfp ( 1 312 996 Fcfp + 86 459 Fcfp) ,

condamner la S.A BNP PARIBAS NC à payer à M. [Y] [I] la somme de 250 000 F cfp sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par écritures responsives du 27/01/2021, la S.A BNP PARIBAS NC soulève l'irrecevabilité des demandes nouvelles de M. [Y] [I] tenant à la déchéances des pénalité et intérêts contractuels

A titre principal, elle sollicite la confirmation du jugement et le rejet de la demande de délais de paiement; en tout état de cause, elle sollicite condamnation de M. [Y] [I] à lui payer la somme de 250 000 Fcfp sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation aux dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur l'irrecevabilité

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile etlt;etlt;à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.etgt;etgt;

L'article 565 du code de procédure civile dispose que etlt;etlt;les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.etgt;etgt;

L'article 566 du même code autorise cependant, les parties à former en appel etlt;etlt; des demandes qui, quoique nouvelles, sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la demande originaire soumise aux premiers juges.etgt;etgt;

Il convient donc d'examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés si la demande est nouvelle.

En l'espèce, devant le Tribunal Mixte de Commerce 1ère juge, M. [Y] [I] n'a soulevé aucun moyen de défense se contentant de dire qu'il " aurait aimé se rapprocher de la banque" ce qui se comprend comme le souhait du débiteur d'obtenir des modalités de paiement amiable. Il n'a donc opposé aucun moyen de défense. En cause d'appel, il est par conséquent toujours recevable à soulever tout moyen propre à faire écarter les prétentions adverses conformément à l'article 564 du code civil. Il n'y a pas lieu d'écarter le moyen soulevé pour la 1ère fois devant la cour.

Sur la qualité de l'emprunteur et sur le devoir de conseil de la banque

Le banquier est tenu à une obligation générale de conseil, de prudence et de vigilance qui varie en fonction de la qualité de emprunteur . A l'égard d'un emprunteur non averti, il doit le mettre en garde sur les risques financiers de l'opérations de crédit envisagée s'il a connaissance du caractère compromis de la situation financière de l'emprunteur, sur la situation patrimoniale du débiteur, sur la finalité de l'emprunt contracté et sur l'éventuelle disproportionnalité du projet.

Le banquier doit en effet s‘assurer que l'emprunteur a conscience et appréhende le risque d'endettement auquel il souscrit. Le devoir du banquier est alors, s'il constate que emprunteur est profane et non averti, de le mettre en garde ou même de refuser son engagement.

Afin de déterminer si M. [Y] [I] était ou non un emprunteur averti, il doit être recherché in concreto si les spécificités de l'opération de crédit, notamment son niveau de complexité et de risque étaient facilement appréhendés par l'intéressé au regard de son âge, formation, profession et expérience.

En l'espèce, il ressort du compte rendu d'‘entretien établi par la BNP PARIBAS NC avant l'octroi du crédit que M. [Y] [I] avait été salarié de 2008 à 20011 puis débauché par la société FAC NORD pour être représentant en pièces détachées de 2011 à 2014; qu'à la suite du désengagement de son employeur, il avait pris le relais en se mettant à son compte et avait crée à cette occasion, une société en nom propre qui s'était spécialisée en revente de pièces détachées et livraison immédiate. Qu'il était le seul à exercer cette activité en Province Nord. La banque relevait que la demande de crédit était liée à des difficultés passagères de trésorerie que M. [Y] [I] rencontrait à la suite d'un gros impayé ( 1 000 000 Fcfp ) de son principal client mis en liquidation judiciaire.

Au 16/08/2016 , date de son engagement auprès de la S.A BNP PARIBAS NC M. [Y] [I] était âgé de 53 ans comme étant né en 1962 et disposait d'une expérience professionnelle certaine.

Sa formation était certes éloignée du secteur bancaire mais ses compétences acquises au moins depuis 2014 (2 ans auparavant) et son implication dans son entreprise lui permettait d'appréhender aisément l'opération envisagée d'autant qu'il s'agissait d'un simple crédit d'un montant raisonnable puisque remboursable par mensualités de 62 068 Fcfp ( si non re-escomptables). Dès lors, sa qualité d'emprunteur averti doit être retenue.

A titre surabondant, l'emprunt souscrit n'était manifestement pas disproportionné avec les ressources de l'intéressé. A l'époque, le CA annuel s'élevait à 22 166 KF et même si le résultat net (2977 KF) était en légère diminution par rapport à 2014 ( 3.429KF), la banque relevait que ce recul était lié principalement à l'impossibilité de répondre à la demande des clients par manque de trésorerie disponible .La BNP notait également un taux d'endettement global un peu élevé ( 42,40 %) mais considérait que le reste à vivre était convenable.

La situation de M [I] était la suivante : il avait souscrit un emprunt immobilier en 2013 pour lequel il restait dû un capital de 653 KF à amortir. Son épouse travaillait et le couple avait 2 enfants à charge. Le prêt de 2 millions accordé était le seul prêt professionnel.

Au vu du montant limité du prêt RAPIDITE souscrit, le risque de non remboursement de la somme de 2 millions était faible et nullement disproportionné au regard de la situation alors déclarée par M. [Y] [I].

La BNP n'a pas failli à son obligation de conseil en octroyant le prêt à l'intéressé.

Sur le montant de la dette.

Il reste dû les sommes de :

- au titre du capital restant dû : 1 135 944 Fcfp outre intérêt au taux contractuel de 8, 056 % l'an à compter du 05/12/2017 date de la dernière mise en demeure ;

- au titre des échéances impayées : 178 052 Fcfp ;

- au titre de l'indemnité de 10% ( clause pénale) : 131399 Fcfp outre intérêt au taux légal à compter du jour de la requête introductive d'instance ;

- au titre du solde débiteur du compte courant : 86 459 Fcfp outre intérêt au taux légal à compter du 30/09/2018 date d'arrêté de compte ;

M. [Y] [I] sera condamné à payer ces montants et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur l'anatoscisme

Les intérêts échus produiront eux mêmes intérêts pourvus qu'ils soient dûs pour une année entière, et ce, conformément à l'article 1154 du code civil.

Sur la demande de délais

Les impayés datent de 2017. M. [Y] [I] s'étant de lui même octroyé de larges délais, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de ce chef.

Sur l'article 700

Eu égard à l' indemnité légale de défaillance dont l'objet est justement de prévenir la banque contre le recours en justice, la demande de ce chef présentait par l'intimée qui fait double emploi avec la clause pénale sera rejetée.

Sur les dépens

M. [Y] [I] succombant supportera les dépens de la procédure d'appel .

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme la décision en toutes ses dispositions ;

Y Ajoutant,

Ecarte le moyen soulevé de l'irrecevabilité,

Rejette la demande de délais présentée par M. [Y] [I]

Déboute la S.A BNP PARIBAS NC de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [Y] [I] aux dépens de l'appel

Le greffier,Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : 05
Numéro d'arrêt : 20/000825
Date de la décision : 29/07/2021
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2021-07-29;20.000825 ?
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