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12/07/2021 | FRANCE | N°20/000515

France | France, Cour d'appel de Nouméa, 05, 12 juillet 2021, 20/000515


No de minute : 64

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 12 juillet 2021

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 20/00051 - No Portalis DBWF-V-B7E-RBD

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 avril 2020 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG no :17/562)

Saisine de la cour : 4 juin 2020

APPELANT

SARL NC3IS, prise en la personne de son représentant légal en exercice,
Siège social : [Adresse 1]
Représentée par Me Nathalie LEPAPE, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.C.I. BROC'H, prise en la per

sonne de son représentant légal en exercice,
Siège social : [Adresse 2]
Représentée par Me John LOUZIER de la SELARL LFC AVOCA...

No de minute : 64

COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 12 juillet 2021

Chambre commerciale

Numéro R.G. : No RG 20/00051 - No Portalis DBWF-V-B7E-RBD

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 avril 2020 par le tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG no :17/562)

Saisine de la cour : 4 juin 2020

APPELANT

SARL NC3IS, prise en la personne de son représentant légal en exercice,
Siège social : [Adresse 1]
Représentée par Me Nathalie LEPAPE, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

S.C.I. BROC'H, prise en la personne de son représentant légal en exercice,
Siège social : [Adresse 2]
Représentée par Me John LOUZIER de la SELARL LFC AVOCATS, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 7 juin 2021, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseiller,
Mme Zouaouia MAGHERBI, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.

Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCEDURE DE PREMIERE INSTANCE

La société Broc'h qui était propriétaire dans le lotissement « [Localité 1] » à [Localité 2] d'un local commercial qu'elle entendait aménager en restaurant, a chargé la société NC3IS d'aménager une cuisine de restaurant. Celle-ci a établi un devis no 2014/2015 en date du 17 juillet 2015, d'un montant de 6.474.316 FCFP TTC.

Par ordonnance en date du 17 octobre 2016, le juge des référés a, à la requête des sociétés Broc'h et BN, confié à M. [Z] une expertise destinée à vérifier si les aménagements réalisés étaient affectés de désordres et de non-conformités.

L'expert a déposé un rapport en date du 26 mai 2017.

Par jugement en date du 30 avril 2020, la juridiction saisie a :
- condamné la société NC3IS à payer à la société Broc'h les sommes suivantes :
86.222 FCFP au titre d'un trop payé sur « devis no 2014/2015 155 mod » du 17 juillet 2015,
588.750 FCFP au titre des désordres et prestations non exécutées au titre du même devis,
- débouté chacune des parties du surplus de ses demandes principales ou reconventionnelles,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement en toutes ses dispositions, hors celles ayant trait aux dépens et frais d'expertise,
- condamné la société NC3IS à payer à la société Broc'h une indemnité de 200.000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance, en ce compris les frais et honoraires de l'expert judiciaire.

Les premiers juges ont principalement retenu :
- que la société Broc'h était recevable à se plaindre des désordres ou non-finitions, apparents ou non-apparents puisqu'aucun procès-verbal de réception n'avait été établi et que peu après la prise de possession des lieux, elle avait émis diverses réserves ;
- que l'expert avait quantifié les reprises nécessaires à la somme de 300.000 FCFP;
- que la société NC3IS qui avait facturé des prestations de maîtrise d'oeuvre qu'elle reconnaissait ne pas avoir réalisées, devait en rembourser le coût ;
- que le coût des travaux restant dus par la société Broc'h devait être arrêté en fonction des stipulations du devis du 17 juillet 2015.

PROCEDURE D'APPEL

Selon déclaration déposée le 4 juin 2020, la société NC3IS a interjeté appel de cette décision. La société Broc'h a formé un appel incident.

Aux termes de ses conclusions transmises le 29 mars 2021, la société NC3IS demande à la cour de :
- débouter l'intimée de toutes ses demandes ;
à titre subsidiaire,
- condamner la SCI Broc'h au titre du marché à forfait à lui verser la somme de 310.753 FCFP majorée des intérêts de retard et de la taxe sur les services de 5% ;
- ordonner la compensation des sommes mises à la charge de la société NC3IS avec la somme due par la SCI Broc'h ; à titre encore plus subsidiaire,
- ordonner la compensation des sommes mises à la charge de la société NC3IS avec la somme due par la SCI Broc'h ; en tout état de cause,
- rejeter toutes les demandes de l'intimée ;
- condamner la SCI Broc'h au paiement de la somme de 350.000 FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance et de 350.000 FCFP au titre des frais irrépétibles d'appel outre les entiers dépens.

Selon conclusions déposées le 9 novembre 2020, la société Broc'h prie la cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société NC3IS aux dépens de première instance, et au paiement des sommes de :
588.750 FCFP au titre des désordres et des prestations non exécutées vis-à-vis du devis no 2014/2015 155 mod du 17 juillet 2015,
200.000 FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance ;
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société NCSIS à payer à la société Broc'h la somme de 86.222 FCFP au titre d'un trop payé sur le devis précité ;
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande présentée par « la société NCBIS » (sic) au titre de son préjudice moral ;
- condamner la société NC3IS à payer à la société Broc'h la somme de 125.556 FCFP au titre d'un trop payé sur le devis du 17 juillet 2015 ;
- condamner la société NC3IS à payer à la société Broc'h une somme de 400.000 FCFP en réparation de son préjudice moral ;
- condamner la société NC3IS aux dépens d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 350.000 FCFP en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 avril 2021.

SUR CE, LA COUR,

1) La société Broc'h, qui poursuit la confirmation du jugement déféré sur ce point, met en compte une indemnité de 300.000 FCFP au titre des travaux de reprise. Elle réclame également le paiement de :
- 288.750 FCFP représentant le coût de prestations de maîtrise d'oeuvre indûment payées,
- 122.556 FCFP au titre d'un trop -perçu.

2) La société NC3IS s'oppose à la prise en charge des désordres invoqués en faisant valoir qu'ils étaient tous apparents et qu'ils ont été purgés par une réception tacite de l'ouvrage, dont elle ne précise pas la date.

Toutefois, dès lors qu'un solde non négligeable du prix des travaux demeurait impayé (513.563 FCFP sur 6.163.563 FCFP, soit plus de 8 % selon les termes de la mise en demeure du 1er mars 2016), c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la thèse d'une réception tacite en observant que les travaux avaient pris fin au mois de février 2016 et que dès le 20 avril 2016, le conseil de la société Broc'h avait sollicité « l'organisation d'une réunion de réception » en se plaignant de « nombreux » défauts qu'il décrivait. Les désordres apparents dont se plaint la société Broc'h n'ont pas été couverts.

L'expert judiciaire, dont les conclusions ont été entérinées par les premiers juges, a pris en considération les désordres suivants :
a - Réseau gaz : Fixation de l'arrêt coup de poing
b - Plinthes : finitions à réaliser autour des tuyaux de plomberie
dépose des plinthes au droit des sorties de dalle
confection de sept plots en béton
pose des plinthes et finitions autour des plots en béton
fourniture et pause d'abouts de plinthes
d -Faux aplomb de la cloison séparant la réserve séche de la zone de décartonnage
e -Remplacement de la porte de la réserve, dont le sens d'ouverture n'était pas conforme au plan fourni par la société NC3IS
dépose et évacuation de la porte
fourniture et pose d'une nouvelle porte coupe feu
f - Impact sur la protection inox de la porte va-et-vient de l'entrée cuisine
fourniture et pose d'une tôle inox
k- Non-conformité de la table chauffante à la commande
réparation de la porte (y compris dépose et repose)
remplacement de la crédence.

Le désordre a, imputable à la mise en oeuvre d'une cheville de dimension insuffisante, engage la responsabilité contractuelle de la société NC3IS.

Il en est de même du désordre b dans la mesure où la fourniture et la pose de plinthes constituent un poste spécifique du devis établi par la société NC3IS, du désordre d puisque le devis prévoit la fourniture et la pose de cloisons isothermes pour une surface de 158 m², du désordre e dans la mesure où M. [Z] a constaté que le sens d'ouverture de la porte n'est pas conforme au « plan de distribution ... seul plan commercial liant NC3IS à son client » et où il n'est pas démontré que l'expert judiciaire aurait fait une erreur en lisant le plan, et du désordre k, dont la réalité est admise par la société NC3IS.

En revanche, il ne peut être affirmé que l'impact présenté par la protection inox de la porte d'entrée de la cuisine, évoqué pour la première fois dans le procès-verbal de constat de Me [S] du 26 mai 2016, soit plusieurs semaines après l'ouverture du restaurant, existait lorsque la société Broc'h a pris possession des lieux, cet impact pouvant avoir été occassionné durant l'exploitation du restaurant.

En conséquence, la créance de la société Broc'h s'établit, au vu des évaluations retenues par l'expert judiciaire, à 5.400 + 35.000 + 42.000 + 28.000 + 20.411 + 5.000 + 92.500 + 10.000 + 25.000 = 263.311 FCFP HT soit 277.793 FCFP TTC.

3) La société NC3IS reproche aux premier juges d'avoir déduit de sa facture un montant de 288.750 FCFP au titre des prestations de maîtrise d'oeuvre.

Il ne résulte nullement de ses conclusions (paragraphe IV) qu'elle aurait accompli les prestations de maîtrise d'oeuvre qu'elle a facturées de sorte que cette disposition du jugement sera confirmée.

4) La société NC3IS réclame le paiement d'une somme de 513.536 FCFP représentant le solde de sa facture no 2015/201 BROC 4. Ce montant est obtenu au terme du décompte suivant :
montant TTC du devis initial révisé 6.163.563
acompte no 1 1.900.000
acompte no 2 2.000.000
acompte no 3 1.750.000
solde 513.536 FCFP.

Le tribunal mixte de commerce a déduit de ce montant :
- 425.927 FCFP au titre de la prestation « réseau gaz »
- 97.125 FCFP au titre de la prestation « menuiserie spécifique »
- 116.067 FCFP au titre de la prestation « accessoires spécifiques ».
La société NC3IS conteste ces déductions.

En premier lieu, ainsi que la cour l'a précédemment indiqué, une somme de 288.750 FCFP doit être déduite du montant des travaux TTC.

En second lieu, il sera observé que la société NC3IS n'ayant pas été chargée d'édifier un bâtiment mais de réaliser les aménagements d'un restaurant, la notion de marché à forfait au sens de l'article 1793 du code civil est étrangère au litige.

La prestation « menuiserie spécifique » correspond, selon les mentions de la facture, à la fourniture et à la pose d'une porte coupe-feu dans les WC du personnel qui n'étaient pas prévues par le devis ; la prestation « accessoires spécifiques » correspond à la fourniture et à la pose d'un passe-plats et à un encadrement inox pour la porte de la réserve sèche qui n'étaient pas prévus par le devis initial.

Il est admis que quelle que soit la qualification du marché, retenue, il est nécessaire de constater que des travaux supplémentaires dont un entrepreneur demande le paiement, ont été soit commandés avant leur exécution, soit acceptés sans équivoque après leur exécution.

La société NC3IS ne verse aucun élément attestant d'une commande de ces travaux supplémentaires par la société Broc'h. Elle ne justifie pas davantage d'une acceptation sans équivoque après leur exécution : il ne résulte nullement des conclusions déposées par la société Broc'h en première instance que celle-ci avait reconnu avoir « accepté un devis de 6.474.316 XPF puis 6.012.245 XPF puis 6.1616.563 XPF ». Dans ces conditions, la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a écarté les postes « menuiserie spécifique » et « accessoires spécifiques ».

Les prestations relevant du poste « réseau gaz » avaient été évoquées dans le devis no 2014/2015 en date du 17 juillet 2015 mais elles n'y avaient pas été chiffrées. Si le chiffre 0 a été porté en face des trois éléments de ce poste, il n'est pas possible d'inférer de ce constat, en l'absence de tout écrit contemporain du devis, que la société NC3IS avait entendu accorder à sa cliente une ristourne de plus de 400.000 FCFP HT.

Il n'est pas prétendu que le prix réclamé pour ce poste serait excessif.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de déduire le prix de ce poste de la créance de la société NC3IS.

En conséquence, la créance de la société NC3IS au titre du solde du marché s'établit à :
5.870.060 - (275.000 + 92.500 + 110.640) = 5.391.920 FCFP HT soit 5.661.516 FCFP TTC sur lesquels s'imputent les acomptes versés pour un montant global de 5.650.000 FCFP, d'où un solde en faveur de l'appelante de 11.516 FCFP.

La société Broc'h sera condamnée à payer cette somme.

5) Tant la société NC3IS que la société Broc'h seront déboutées de leurs demandes respectives au titre d'un préjudice moral qui n'est pas caractérisé.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société NC3IS à payer à la société Broc'h la somme de 277.793 FCFP à titre de dommages et intérêts en réparation des désordres ;

Condamne la société Broc'h à payer à la société NC3IS la somme de 11.516 FCFP au titre du solde du marché ;

Déboute les demandes présentées par les parties au titre de leur préjudice moral respectif ;

Condamne la société NC3IS à payer à la société Broc'h la somme de 200.000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société NC3IS de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société NC3IS aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les honoraires de l'expert judiciaire.

Le greffier,Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : 05
Numéro d'arrêt : 20/000515
Date de la décision : 12/07/2021
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2021-07-12;20.000515 ?
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