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15/05/2014 | FRANCE | N°13/00017

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre sociale, 15 mai 2014, 13/00017


COUR D'APPEL DE NOUMÉA 27

Arrêt du 15 Mai 2014
Chambre sociale

Numéro R. G. : 13/ 17
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Janvier 2013 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG no : F 11/ 222)
Saisine de la cour : 20 Février 2013

APPELANT

LA SOCIETE LE NICKEL, prise en la personne de son représentant légal en exercice Siège social 2 rue Desjardins-Doniambo-BP. E5-98848 NOUMEA CEDEX
Représentée par la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS
M. Etualeto X...né le 23 Janvier 1933 à

LEAVA-SIGAVE (FUTUNA)
demeurant ...-98809 MONT-DORE
Représenté par la SELARL BOUQUET, avocat au barreau de...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA 27

Arrêt du 15 Mai 2014
Chambre sociale

Numéro R. G. : 13/ 17
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Janvier 2013 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG no : F 11/ 222)
Saisine de la cour : 20 Février 2013

APPELANT

LA SOCIETE LE NICKEL, prise en la personne de son représentant légal en exercice Siège social 2 rue Desjardins-Doniambo-BP. E5-98848 NOUMEA CEDEX
Représentée par la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS
M. Etualeto X...né le 23 Janvier 1933 à LEAVA-SIGAVE (FUTUNA)
demeurant ...-98809 MONT-DORE
Représenté par la SELARL BOUQUET, avocat au barreau de NOUMEA
La Caisse de Compensation des Prestations Familiales, des Accidents du Travail et de Prévoyance des Travailleurs de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances, dite C. A. F. A. T, représentée par son Directeur en exercice
Siège social 4, rue du Général Mangin-BP. L5-98849 NOUMEA CEDEX Représentée par la SELARL BOUQUET, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Avril 2014, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Jean-Michel STOLTZ, Conseiller,
M. Régis LAFARGUE, Conseiller, qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Jean-Michel STOLTZ.

Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,- signé par M. Jean Michel STOLTZ, conseiller le plus ancien de la cour en lieu et place de M. Yves ROLLAND, président empêché, et par M. Stéphan GENTILIN, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************
PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
M. Etualeto X...a été salarié au sein de l'usine de DONIAMBO de la Société LE NICKEL-SLN de décembre 1964 jusqu'au 30 septembre 1988. Il a travaillé aux fours ELKEM en qualité de manoeuvre tout d'abord de 1964 à décembre 1967 puis comme conducteur de TELPHERS de décembre 1967 à 1980, enfin aux fours DEMAG comme ouvrier de fusion " couleur scorie " de 1980 à 1988.

En 1987, les médecins ont diagnostiqué un cancer du poumon et il a été opéré en 1988 à SYDNEY.
La SLN a déposé auprès des services de la CAFAT une déclaration de maladie professionnelle le 30 juin 2009 suite au certificat médical du Dr Y..., pneumologue, qui avait constaté un adénocarcinome du poumon relevant, selon lui, du tableau des maladies professionnelles 30bis.
Suite à la reconnaissance par le Comité Territorial de Reconnaissance des maladies Professionnelles de ce que la maladie de M. X...résultait de son exposition à l'amiante, la CAFAT prenait celle-ci en charge au titre des maladies professionnelles.
Par lettre recommandée en date du 15 mars 2011, elle lui notifiait que son taux d'lPP était fixé à 80 % suite au rapport d'expertise du DR Z....
Selon requête enregistrée le 14 octobre 2011, complétée par des écritures ultérieures, M. X...a fait convoquer la SLN et la CAFAT devant le tribunal du travail aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur et ordonner la majoration de sa rente au maximum.
La CAFAT a demandé au tribunal de faire droit à la requête et a sollicité par ailleurs la condamnation de la SLN à lui payer la somme de 1 438 653 F CFP correspondant au capital de la majoration de la rente payable en un trimestre avec intérêts au taux légal à compter de la première demande, le 27 janvier 2012.
**********************
Par un jugement rendu le 29 janvier 2013 auquel il est renvoyé pour plus ample exposé, le tribunal du travail de Nouméa a :

- dit que M. X...avait été victime d'une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de la SLN, son employeur,
- dit que la majoration de la rente de M. X...devait être fixée au maximum,
- fixé le capital constitutif de la majoration de la rente servie à M. X...à la somme de 1 438 653 F CFP et la cotisation supplémentaire trimestrielle due par la SLN à un montant de 1 438 653 F CFP payable sur un trimestre,
en conséquence,
- condamné la SLN à payer à la CAFAT la somme de 1 438 653 F CFP à titre de cotisation supplémentaire outre les intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2012,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision,

- dit n'y avoir lieu à dépens.

PROCÉDURE D'APPEL
Par requête déposée au greffe le 20 février 2013, la SLN a interjeté appel de cette décision notifiée le 30 janvier 2013.
Par mémoire ampliatif déposé le 15 mai 2013 complété par des conclusions enregistrées au greffe de la cour le 16 octobre 2013, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, la SLN sollicite de la cour :
- de réformer le jugement,
- de débouter le demandeur et la CAFAT de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

**********************
Par conclusions en réplique déposées le 20 mars 2012, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, la CAFAT et M. X...sollicitent de la cour :
- de dire que M. X...bénéficie de la présomption d'imputabilité posée par l'article 1er de la délibération 395/ CP du 19 avril 1995,
- de débouter la SLN de son appel et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- de condamner la SLN à payer à M. X...et à la CAFAT, chacun, la somme de 300 000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- de condamner la SLN aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la faute inexcusable :
Attendu que la SLN fait valoir :
- que le salarié n'a pas été exposé au risque de l'amiante par ses activités et que s'il a été équipé d'une protection anti-feu ce n'est que pendant la période où cet équipement l'imposait soit pendant la période où il a été affecté aux fours DEMAG comme ouvrier fusion de quart et non pendant la période antérieure de 1980 à son départ de l'entreprise en 1988,
- que depuis 1980 et donc pendant cette période, aucun système de protection ou de sécurité individuel contre le feu métallurgique n'était à base d'amiante à la SLN Doniambo,
- que le fait qu'antérieurement des salariés aient pu être équipés de systèmes de protection individuels contenant de l'amiante n'avait rien d'exceptionnel dans la mesure où il s'agissait du seul système de protection agréé par les ministères de l'industrie et du travail,
- que si le fait d'exécuter une tache avec un tel système de protection emporte selon le tableau 30 présomption d'exposition et donc d'imputabilité d'une pathologie ultérieure liée à l'amiante, ce seul fait ne révèle pas, en lui-même, une faute inexcusable de l'employeur,

- que l'obligation juridique de sécurité, aujourd'hui obligation de résultat était antérieurement à 2002 une obligation de moyens et qu'il ne peut être tenu pour faute inexcusable le fait, pour la SLN, de s'être procurée, dans les années 1960 des équipements anti-feux à base d'amiante communément utilisés dans toutes les sidérurgies du monde,
- que l'appréciation de faute inexcusable apparaît, en conséquence, sévère au regard des pratiques métallurgiques et du droit positif en vigueur, qui a conduit le législateur à concevoir un système de réparation fondé sur la solidarité nationale ;
Attendu que la CAFAT et M. X...font valoir en réplique :
- qu'il résulte de la lettre du Dr A...à la CAFAT du 30 octobre 2009 que M. X..." a pu être exposé à l'amiante industrielle par l'intermédiaire de port d'équipements de protection (gants et vêtements d'amiante) entre l'année 1964, date de son embauche, et son affectation au service FB ",
- que la SLN affirme mais ne prouve pas que les protections en amiante ont été supprimées après 1980,
- que la SLN ne peut nier qu'elle avait une parfaite connaissance depuis plusieurs décennies des dangers liés à l'amiante, les premiers soupçons sur la dangerosité de l'amiante ayant été émis au début du XXème siècle et le tableau 30 relatif aux affections professionnelles consécutives à l'inhalation de l'amiante datant de 1950,
- que la SLN était tenue à son égard à une obligation de résultat, qu'elle ne justifie pas avoir pris les mesures nécessaires et suffisantes pour le préserver du danger auquel il était exposé, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable,
- que l'employeur ne saurait écarter sa responsabilité en invoquant la carence fautive de l'Etat ;
Sur quoi,

Attendu qu'il résulte de la lettre du Dr A...du service médical de la SLN, ci-avant rappelée, que M. X...a pu être exposé à l'amiante industrielle par l'intermédiaire de port d'équipements de protection entre l'année 1964, date de son embauche, et 1981 ;
Que la SLN a elle-même procédé le 30 juin 2009 à une déclaration de maladie professionnelle pour cause d'exposition à l'amiante ;
Que son affirmation actuelle contraire selon laquelle M. X..., entre 1964 et 1988, n'avait pas été exposé à l'amiante industriel en raison des postes qu'il occupait ou du retrait des systèmes de protection contenant de l'amiante n'est étayée par aucun document ou témoignage ;
Qu'en conséquence, la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que M. X...avait été exposé de manière habituelle à l'amiante de 1964 à 1988 et que sa maladie avait été normalement prise en charge au titre des maladies professionnelles ;
Attendu, s'agissant de la faute inexcusable, que le premier juge, par une motivation complète répondant aux moyens et arguments des parties, et que la cour adopte, a jugé à bon droit que la SLN, tenue d'une obligation de sécurité de résultat, qui avait une parfaite connaissance des dangers de l'amiante et n'ignorait pas que le travail dans un milieu exposé aux poussières d'amiante ainsi que l'usage de matériel de protection contenant de l'amiante exposaient ses salariés à un danger de maladie, n'a pris aucune mesure adaptée pour les en préserver et peut ainsi se voir reprocher un manquement à son obligation ;
Que la cour, comme le tribunal du travail, constate que la SLN se limite à des affirmations mais ne produit aucune pièce justifiant des mesures prises pour protéger M. X...des risques inhérents à l'exposition à l'amiante et confirmera, en conséquence, le jugement entrepris en ce qu'il a jugé caractérisée la faute inexcusable ;
Et attendu que ni le principe de la majoration de rente ni le montant de celle-ci ne sont discutées ; que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Attendu qu'il sera alloué à M. X...et à la CAFAT, chacun, la somme de 80 000 F CFP ;
Qu'il n'y a pas lieu à condamnation aux dépens en matière sociale, l'article 880-1 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie disposant que la procédure devant le tribunal du travail est gratuite ;

PAR CES MOTIFS
LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ;
Dit l'appel recevable ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Condamne Société LE NICKEL, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. X...et à la CAFAT, prise en la personne de son représentant légal, chacun, la somme de quatre vingt mille (80. 000) FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation aux dépens.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00017
Date de la décision : 15/05/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2014-05-15;13.00017 ?
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