COUR D'APPEL DE NOUMÉA
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Arrêt du 21 Janvier 2014
Chambre Civile
Numéro R. G. : 12/ 00529
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Novembre 2012 par le Juge aux affaires familiales de NOUMEA (RG no : 12/ 2047)
Saisine de la cour : 21 Décembre 2012
APPELANT
Mme Céline Mireille X...
née le 28 Mars 1970 à VENDOME (41100)
demeurant ...
Faisant élection de domicile chez son conseil
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 1686 du 01/ 02/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représentée par Me Karine LACROIX, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉ
M. Eric Y...
né le 17 Septembre 1964 à PERPIGNAN (66000)
demeurant ...
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 1168 du 29/ 11/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représenté par Me Lisa KIBANGUI, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 7 Janvier 2014, en chambre du conseil, devant la cour composée de :
M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Jean-Michel STOLTZ, Conseiller,
M. Christian MESIERE, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Jean-Michel STOLTZ.
Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé en chambre du conseil, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Yves ROLLAND, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Des relations entre M. Eric Y...et Mme Céline X... est né Etienne le 9 janvier 2002.
Les parents se sont séparés en 2012.
Par requête du 17 octobre 2012, M. Y...a introduit une demande d'organisation des modalités d'exercice de l'autorité parentale sur Etienne sous le régime d'une résidence alternée.
Mme X..., faisant valoir que la résidence alternée mise en place ne convenait pas à l'enfant, a sollicité la résidence habituelle de l'enfant et l'autorisation de pouvoir quitter la Nouvelle-Calédonie.
Par jugement du 27 novembre 2012 auquel il est référé pour le rappel de la procédure ainsi que l'exposé des faits, moyens et demandes, le tribunal de première instance de Nouméa a :
- débouté Mme X... de sa demande relative à la résidence habituelle de l'enfant,
- fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile du père ;
- fixé le droit de visite et d'hébergement du père librement et, en cas de difficultés, pendant les grandes vacances scolaires, la totalité les années impaires et les 3/ 4 les années paires, à charge pour la mère de prendre en charge l'intégralité du coût de transport aller/ retour entre l'Océanie et l'Europe,
- invité M. Y...à maintenir l'enfant scolarisé dans l'école privée bilingue James Cook,
- donné acte à M. Y...de ce qu'il ne sollicitait pas la fixation d'une contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,
- interdit aux parents de quitter la Nouvelle-Calédonie avec leur fils sans l'accord exprès de l'autre parent,
- dit que chaque parent supportera ses propres dépens.
PROCÉDURE D'APPEL
Par requête en date du 21 décembre 2012, Mme X... a interjeté appel de cette décision non signifiée.
Le mémoire ampliatif a été déposé le 22 mars 2013.
Par conclusions récapitulatives déposées au greffe le 25 septembre 2013, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des prétentions et des moyens, Mme X... demande à la cour, sur infirmation, :
à titre principal,
- de fixer la résidence habituelle de l'enfant à son domicile,
- de l'autoriser à fixer sa résidence en Europe avec son fils à compter de décembre 2013,
- de fixer ainsi le droit de visite et d'hébergement du père, à défaut d'accord :
totalité des grandes vacances scolaires de l'académie du lieu de résidence de l'enfant, celui-ci devant être de retour au domicile de la mère 5 jours au moins avant la rentrée scolaire,
lors des passages du père au lieu de résidence de l'enfant, à charge pour lui de prévenir la mère 2 mois à l'avance d'une part et de respecter la scolarité de l'enfant d'autre part,
- de fixer la contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant à la somme de 80 000 F CFP indexée,
à titre subsidiaire, si la résidence était maintenue auprès du père,
Ajoutant au jugement,
- de dire que son droit de visite et d'hébergement s'exercera également lors de ses passages au lieu de résidence de l'enfant à charge pour elle de prévenir le père 2 mois à l'avance d'une part et de respecter la scolarité de l'enfant d'autre part,
En tout état de cause, de dire que chaque partie supportera ses dépens.
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Par conclusions déposées le 19 juillet 2013 complétées par des conclusions enregistrées au greffe de la cour le 31 octobre 2013, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, M. Y...sollicite de la cour :
- de confirmer la décision rendue à l'exception de l'interdiction faite aux parents de quitter la Nouvelle-Calédonie avec leur fils sans l'accord exprès de l'autre parent,
- de juger que les parents pourront voyager et quitter leurs lieux de résidence respectifs avec leur fils sans qu'il soit nécessaire d'obtenir au préalable l'accord exprès de l'autre parent,
- de condamner Mme X... à lui payer la somme de 300 000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.
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Etienne a été entendu le 4 septembre 2013 par un conseiller à la cour.
La clôture a été prononcée le 15 novembre 2013.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la résidence de l'enfant :
Attendu qu'il résulte des pièces produites que chaque parent est tout à fait apte à assurer l'entretien et l'éducation d'Etienne ;
Attendu qu'Etienne, âgé aujourd'hui de 12 ans, entendu il y a 4 mois par le magistrat de la mise en état en présence de son avocat, s'est exprimé sur sa situation actuelle, sur ses relations avec ses parents ainsi qu'avec la nouvelle compagne de son père, les enfants de celle-ci ;
Attendu que le juge doit prendre en compte l'intérêt supérieur de l'enfant et ne peut méconnaître les sentiments qu'il exprime dès lors qu'il est capable de discernement ;
Qu'Etienne a exprimé de manière claire et argumentée, dépourvue de toute ambiguïté, qu'il souhaitait vraiment vivre avec sa mère et qu'il avait été triste de la décision prise par le juge ; Que le magistrat de la mise en état a noté la profonde perturbation du mineur ;
Attendu qu'il est clair que la situation actuelle, avec le maintien de la résidence chez son père et le changement d'école, a créé chez Etienne une perturbation importante qu'il n'est pas de l'intérêt du mineur ou des parents de voir se poursuivre ;
Qu'en conséquence, la cour, sur infirmation, fixera la résidence habituelle d'Etienne au domicile de sa mère ;
Sur le droit de visite et d'hébergement :
Attendu que M. Y...n'a pas conclu sur les modalités de droit de visite et d'hébergement proposées par Mme X... ;
Que la cour considère que ces modalités respectent les droits du père ; qu'elles seront donc entérinées sauf à limiter à 1 mois le délai de prévenance lors des passages du père au lieu de résidence de l'enfant ;
Que le père prendra en charge les frais de transport aller/ retour de l'enfant entre l'Europe et la Nouvelle-Calédonie ;
Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant :
Attendu que la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant est fixée en fonction des besoins du mineur et des capacités contributives des parents ;
Que la cour, qui observe que M. Y...n'a pas cru devoir actualiser ses justificatifs de revenus pour 2013, retiendra, comme le premier juge, qu'il dispose d'un revenu de l'ordre de 650 000 F CFP, qu'il assume la charge du crédit du bien indivis de 230 000 F CFP (étant observé qu'au moment de la sortie de l'indivision, il en sera remboursé pour partie) ainsi que les pensions alimentaires pour ses autres enfants soit 47 000 F CFP ;
Que Mme X... a, certes, obtenu l'aide judiciaire mais dispose visiblement de revenus provenant de son activité en développement ;
Qu'en considération de ces données, la contribution du père à l'entretien et l'éducation d'Etienne sera fixée à la somme de 50 000 F CFP indexée ;
Sur les autres demandes :
Attendu qu'en l'état des résidences actuelles des parents et en l'absence de tout danger exprimé à cet égard, il n'apparaît pas utile d'imposer un accord préalable de l'autre parent pour les voyages d'Etienne ;
Qu'il sera fait droit à la demande du père sur ce point ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en chambre du conseil par arrêt contradictoire déposé au greffe, ;
Déclare l'appel recevable ;
Infirme la décision déférée en ses dispositions relatives à la résidence habituelle de l'enfant mineur Etienne Y...et au droit de visite et d'hébergement ;
Et statuant à nouveau,
Fixe au domicile de Mme Céline X... la résidence habituelle d'Etienne Y...;
Dit que Mme Céline X... est autorisée à fixer sa résidence en Europe avec son fils ;
Dit que le père pourra exercer son droit de visite et d'hébergement librement et, en cas de difficultés selon les modalités suivantes :
totalité des grandes vacances scolaires de l'académie du lieu de résidence de l'enfant, celui-ci devant être de retour au domicile de la mère cinq (5) jours au moins avant la rentrée scolaire,
lors des passages du père au lieu de résidence de l'enfant, à charge pour lui de prévenir la mère un (1) mois à l'avance d'une part et de respecter la scolarité de l'enfant d'autre part,
Dit le père prendra en charge les frais de transport aller/ retour de l'enfant entre l'Europe et la Nouvelle-Calédonie ;
Condamne M. Eric Y...à payer à Mme Céline X... la somme de cinquante mille (50. 000) F CFP à titre de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ;
Dit que cette somme variera à l'initiative du créancier chaque année à la date anniversaire de la présente décision et pour la première fois le 1er février 2015, en fonction de l'indice du coût de la vie en Nouvelle-Calédonie (Institut de la Statistique et des Etudes Economiques, 5 rue Galliéni, BP. 823-98845 NOUMÉA CEDEX-Tél. : 27. 54. 81) et qu'elle sera payable d'avance entre le 1er et le 10 de chaque mois, par mandat postal ou virement bancaire au domicile du créancier et sans frais pour lui ;
Déboute Mme Céline X... du surplus de ses demandes financières ;
Dit que les parents pourront voyager et quitter leurs lieux de résidence respectifs avec leur fils sans qu'il soit nécessaire d'obtenir au préalable l'accord exprès de l'autre parent ;
Déboute M. Eric Y...de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Fixe à cinq (5) les unités de valeur dues à Maître LACROIX, avocat désigné au titre de l'aide judiciaire ;
Condamne M. Eric Y...aux dépens d'appel qui seront recouvrés selon la réglementation en matière d'aide judiciaire.
Le greffier, Le président.