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21/01/2014 | FRANCE | N°12/00197

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre sociale, 21 janvier 2014, 12/00197


COUR D'APPEL DE NOUMÉA
4
Arrêt du 21 Janvier 2014

Chambre sociale

Numéro R. G. : 12/ 197

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Avril 2012 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG no : 10/ 279)

Saisine de la cour : 14 Mai 2012

APPELANT

LA SOCIETE SARD NOUVELLE CALEDONIE, dite SARD NC, représentée par ses dirigeants en exercice
Siège social 7, rue Rose Beaumont-BP. 2462-98874 PONT-DES-FRANÇAIS (MONT-DORE)

Représentée par la SELARL JEAN-JACQUES DESWARTE, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ
r>Mme Sylvia X...
née le 03 Novembre 1969 à LE NOUVION EN THIERACHE (02170)
demeurant ...

Représentée par la SELARL MILLI...

COUR D'APPEL DE NOUMÉA
4
Arrêt du 21 Janvier 2014

Chambre sociale

Numéro R. G. : 12/ 197

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Avril 2012 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG no : 10/ 279)

Saisine de la cour : 14 Mai 2012

APPELANT

LA SOCIETE SARD NOUVELLE CALEDONIE, dite SARD NC, représentée par ses dirigeants en exercice
Siège social 7, rue Rose Beaumont-BP. 2462-98874 PONT-DES-FRANÇAIS (MONT-DORE)

Représentée par la SELARL JEAN-JACQUES DESWARTE, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉ

Mme Sylvia X...
née le 03 Novembre 1969 à LE NOUVION EN THIERACHE (02170)
demeurant ...

Représentée par la SELARL MILLIARD-MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 9 Décembre 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Jean-Michel STOLTZ, Conseiller,
M. Christian MESIERE, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Jean-Michel STOLTZ.

Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Yves ROLLAND, président, et par M. Stéphan GENTILIN, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Selon contrat à durée indéterminée en date du 10 avril 2009, Mme Sylvia X... a été engagée par l'association Comité pour le contrôle du tabagisme, de la tuberculose et des maladies respiratoires (CCTTMR) en qualité de directrice à compter du 27 mars 2009 pour un salaire brut mensuel d'un montant de 600 000FCFP.

Par acte du 27 mars 2009, le président du CCTTMR lui a délégué une partie de ses pouvoirs dont celui de nommer et révoquer les employés, fixer leurs traitements, salaires et gratifications, percevoir les sommes dues à l'association, contracter des emprunts, endosser et souscrire tous les chèques.

Au cours d'une assemblée générale extraordinaire en date du 16 juillet 2009, il a été décidé que le CCTTMR devenait l'association pour la prise en charge des insuffisants respiratoires en Nouvelle-Calédonie (AIR NC) et que celle-ci serait associée unique de la société par action simplifiée SARD Nouvelle-Calédonie (société SARD NC) qui serait constituée pour l'activité commerciale concernant l'appareillage respiratoire.

Mme X... a été nommée directrice de l'association AIR NC, chargée de la partie prévention et est devenue directrice générale de la société SARD NC le 13 août 2009.

Le président de AIR-NC et de la société SARD NC était le Dr. Y....

Le 8 décembre 2010, ce dernier convoquait Mme X... et lui exposait qu'il avait été informé de ce qu'elle aurait demandé à des salariés d'établir des fausses demandes d'ententes préalables et de ce qu'elle n'avait pas désappareillé un patient parti en métropole.

Niant formellement ces faits Mme X... demandait à être reçue par les membres du conseil d'administration et contestait les faits par courrier.

Le 15 décembre 2010 une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement avec mise à pied conservatoire, fixé le 20 décembre, lui était notifiée ainsi qu'un courrier lui notifiant sa révocation de ses fonctions de directrice générale de la société SARD NC.

Elle était licenciée pour fautes graves le 22 décembre 2010.

Il lui était reproché les faits suivants :

- un management du personnel particulièrement perfectible entraînant une dégradation importante de l'ambiance de travail,
- d'être à l'origine de faux documents de visite chez des parents appareillés,
- l'existence de faux avec l'utilisation de faux tampon encreur au nom d'un médecin pour valider les documents administratifs et de falsifications de signatures de médecins sur ces mêmes documents,
- d'avoir sollicité un salarié pour qu'il établisse un faux compte rendu de visites,
- d'avoir commandé du matériel et procédé à des embauches de personnel sans autorisation ni information du président ou du conseil d'administration,
- d'avoir augmenté son salaire d'une manière très significative et s'être allouée des primes non autorisées sans l'accord ni du président ni du conseil d'administration.

**********************

Selon requête enregistrée le 31 décembre 2010, complétée par conclusions postérieures, Mme X... a fait convoquer la société SARD NC devant le tribunal du travail aux fins de voir :

- dire son licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner la défenderesse à lui payer les sommes suivantes :

* dommages-intérêts pour rupture abusive8. 285. 720 FCFP
* dommages-intérêts pour rupture vexatoire4. 000. 000 FCFP
* salaires144. 230 FCFP
* préavis3. 450. 000FCFP
* congés-payés afférents au préavis 345. 000 FCFP
* dommages-intérêts pour procédure irrégulière. 150. 000 FCFP
* frais irrépétibles350. 000 FCFP

Elle a exposé que, contrairement à ce que la lettre de licenciement mentionnait, elle s'était rendue à l'entretien préalable avec une collègue Mme Z...mais que celui ne s'était pas tenu en l'absence du président et des membres du conseil d'administration et que le licenciement était donc irrégulier.

Elle a soutenu que, contrairement à ce qu'affirmait la SARD NC, elle cumulait un contrat de travail et un mandat social, étant la directrice bénévole de AIR NC, associée unique de la société SARD NC, son contrat de travail du CCTTMR ayant été transféré à la société SARD NC.

Ainsi, elle a fait valoir :

- qu'elle avait perçu des salaires chaque mois, reçu des bulletins de paie, été déclarée à la CAFAT en qualité de salariée et considérée comme un salarié soumis au pouvoir disciplinaire de l'employeur puisque licenciée après une convocation à un entretien et ayant perçu des congés-payés,

- que le salaire qu'elle percevait n'était pas la contrepartie de son mandat social qu'elle exerçait bénévolement et qu'elle accomplissait au sein de la société SARD NC des fonctions techniques distinctes de celles d'un mandat de directrice générale de société (mise en oeuvre d'un logiciel, relations avec la CAFAT, recouvrement des factures impayées, suivi des patients et de leur appareillage et désappareillage, mise en place des normes de la société) sous la subordination du président et du conseil d'administration (CA),

- qu'elle ne prenait aucune décision concernant la gestion de la société qui ressortissait exclusivement du CA et du président et rendait compte de ses décisions (primes, difficultés avec certains salariés),

- que n'étant pas associée, elle ne décidait pas des orientations de la société,

Elle a affirmé que le tribunal du travail était donc compétent pour connaître de ses demandes.

Elle a soutenu que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement étaient prescrits et, en tout état de cause, non établis.

Elle a formellement contesté les faits de faux reprochés et nié une quelconque responsabilité dans les faits dénoncés par l'employeur en relevant que son employeur ne produisait aucune pièce à l ¿ appui de ce grief et ne précisait pas l'intérêt de la salariée d'effectuer de tels faux.

En tout état de cause, elle a fait valoir qu'elle ne pouvait être responsable de faits délictueux qu'elle n'avait pas commis et dont elle n'avait pas eu connaissance.

Elle a soutenu par ailleurs :

- que le recrutement d'un salarié et la commande de matériel faisaient partie de ses attributions et que les membres du conseil d'administration en avaient été informés,

- que la prime qui lui a été versée en avril 2010 avait été autorisée par le conseil d'administration et que son augmentation de salaire pouvait être effectuée dans le cadre de ses fonctions.

Elle a considéré en conséquence son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'il était vexatoire ce qui justifiait l'intégralité de ses demandes salariales et indemnitaires.

**********************

La société SARD NC a soutenu en réplique :

- que Mme X... avait été salariée du CCTMR du 27 mars 2009 au 15 juillet 2009 puis, à compter du 16 juillet 2009, de AIR NC et ce jusqu'au 12 août 2009, date à laquelle elle avait été désignée directrice générale de la société SARD NC mais qu'elle n'avait jamais eu la qualité de salariée de la société SARD NC, exerçant uniquement en qualité de directrice générale au sein de celle-ci,

- que Mme X... n'avait jamais été soumise à un quelconque pouvoir hiérarchique, ayant les pouvoirs identiques à ceux du président, prenant seule les décisions sans rendre compte, ne recevant aucun ordre,

- qu'ainsi Mme X... ne justifiait pas avoir cumulé un contrat de travail avec son mandat social, n'établissant pas qu'elle avait un emploi effectif exercé dans un état de subordination distinct de ses fonctions de mandataire et une rémunération distincte de sa rémunération de gérance, le fait qu'elle recevait un bulletin de salaire et qu'elle ait été licenciée n'étant pas des éléments suffisants pour établir le lien de subordination alors qu'elle concentrait tous les pouvoirs du président.

Elle a conclu au débouté de toutes ses demandes et sollicité le versement de la somme de 300 000FCFP au titre des frais irrépétibles.

Ultérieurement, elle a sollicité le sursis à statuer dans l'attente des suites données à la plainte déposée en novembre 2011 contre Mme X... pour abus de confiance, faux et usage de faux.

**********************

Par un jugement rendu le 17 avril 2012 auquel il est renvoyé pour plus ample exposé de l'objet du litige, des faits et de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, le tribunal du travail de Nouméa a :

- dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer,

- dit que les parties étaient liées par un contrat de travail,

- dit que le licenciement de Mme X... par la société SARD NC était sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société SARD NC à lui payer les sommes suivantes :

DEUX MILLIONS DEUX CENT CINQUANTE MILLE (2. 250. 000) FCFP au titre de l'indemnité de préavis,

DEUX CENT VINGT CINQ MILLE (225. 000) FCFP au titre des congés sur préavis,

CENT QUARANTE QUATRE MILLE DEUX CENT TRENTE (144. 230) FCFP au titre du salaire dû (mise à pied),

TROIS MILLIONS SEPT CENT CINQUANTE MILLE (3. 750. 000) FCFP à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice causé par le caractère abusif du licenciement,

- dit que lesdites sommes produiraient intérêt au taux légal avec capitalisation en vertu de l'article 1154 du code civil à compter du jugement à venir s'agissant des créances indemnitaires et à compter du dépôt de la requête en ce qui concerne les créances salariales,

- fixé à la somme de 750 000 FCFP la moyenne des trois derniers salaires,

- rappelé que l'exécution provisoire était de droit sur les créances salariales dans les conditions prévues par l'article 886-2 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision à hauteur de 50 % des sommes octroyées à titre de dommages-intérêts,

- rejeté les autres demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société SARD NC à payer à Mme X... la somme de CENT TRENTE MILLE (130. 000) FCFP au titre des frais irrépétibles,

- dit n'y avoir lieu à dépens.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête déposée au greffe le 14 mai 2012, la société SARD NC a interjeté appel de cette décision notifiée le 19 avril 2012.

Par mémoire ampliatif déposé le 14 août 2012, complété par des conclusions enregistrées au greffe de la cour les 1er février et 31 juillet 2013, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, la société SARD NC sollicite de la cour :

- d'infirmer la décision rendue,

- de dire les demandes de Mme X... infondées,

- de débouter Mme X... de toutes ses demandes fins et conclusions,

En tant que de besoin,

- de faire application de la règle " le criminel tient le civil en état ",

- de juger que dans un souci de bonne administration de la justice, il y a lieu d'attendre les suites qui seront données aux poursuites diligentées par le procureur de la République à l'encontre de Mme X...,

- de constater que les faits qui ont conduit à la révocation et au licenciement de Mme X... sont visés dans la plainte déposée par la requérante et seront jugés à l'audience du tribunal correctionnel de NOUMEA du 23 août 2013 à 8 heures,

- de condamner Mme X... à lui verser la somme de 300. 000 F CFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.

**********************

Par conclusions déposées le 16 novembre 2012 contenant appel incident, complétées par des conclusions enregistrées au greffe de la cour le 13 mars 2013, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, Mme X... sollicite de la cour :

- de confirmer la décision rendue en ce que le tribunal s'est déclaré compétent, en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer formulée par la société SARD NC, en ce qu'il a déclaré son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, a déclaré sa mise à pied abusive, a constaté le non-respect de la procédure, et a condamné la société SARD NC à verser les sommes de :

2. 250. 000 Francs CFP au titre de l'indemnité de préavis,
225. 000 francs CFP au titre des congés payés sur préavis, `
144. 230 Francs CFP au titre du salaire dû à la suite de la mise à pied,

- de dire son appel incident bien fondé,
En conséquence,

- de condamner la société SARD NC à lui payer les sommes de :

6 000 000 Francs CFP à titre de dommages et intérêts du fait du caractère dépourvu de cause réelle et sérieuse du licenciement,
4 000 000 Francs CFP en réparation du préjudice subi du fait du caractère vexatoire du licenciement prononcé,
300 000 Francs CFP au titre de la prime d'intéressement,
350 000 Francs CFP au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que la cour doit, en premier lieu, définir la situation juridique de Mme X... à l'égard du CCTTMR, de AIR-NC et de la société SARD-NC puis, en second lieu, analyser les conditions de la rupture et statuer sur les demandes financières ;

Sur le transfert du contrat de travail de l'association AIR NC à la société SARD NC :

Attendu que la société SARD-NC soutient que le contrat de travail conclu initialement avec le CCTTMR a été transféré à AIR-NC lors du changement de nom et que Mme X... n'a jamais été sa salariée ;

Qu'elle fait valoir que Mme X... est devenue mandataire sociale de la société SARD-NC du 13 août 2009 au 15 décembre 2010, date de sa révocation de ses fonctions de directrice générale ; que si l'existence d'un contrat de travail était retenue, elle ne pourrait couvrir que la période du 15 décembre au 22 décembre 2010 ;

Attendu que Mme X... fait valoir en réplique que, salariée du CCTTMR, son contrat de travail s'est naturellement poursuivi avec AIR-NC, le changement de nom n'étant pas une modification de la situation juridique de l'employeur, puis que son contrat a été transféré comme celui de l'ensemble des salariés à compter du 1er janvier 2010 à la société SARD-NC laquelle, bien que déjà créée en juillet 2009, n'a commencé son activité qu'en janvier 2010 ;

Qu'elle observe ensuite que sa nomination (dont elle conteste les conditions) comme directrice générale n'est pas en contradiction avec l'existence d'un contrat de travail mais maintient qu'elle n'a pas été rémunérée à ce titre ;

Sur quoi,

Attendu que le tribunal du travail, par une motivation complète répondant aux moyens et arguments des parties, et que la cour adopte, a retenu à bon droit que Mme X... était, en plus de sa fonction de directrice générale bénévole, liée par un contrat de travail à la société SARD-NC ;

Attendu que la cour relève à titre complémentaire :

- qu'il n'est pas contesté que Mme X... a été successivement salariée du CCTTMR puis de AIR-NC, sans qu'il y ait à faire état d'un transfert, le simple changement de nom n'étant pas une modification de la situation juridique de l'employeur,

- que la création de la société SARD-NC a été engagée dès juin 2009 même si l'assemblée générale mixte du CCTTMR décidant de la filialisation de l'activité de prestation d'appareillage médical est du 16 juillet 2009 et que les statuts de la société SARD-NC sont du 13 août 2009, enregistrés le 20 août 2009,

- que dès juin 2009, Mme X... était considérée comme salariée " directrice du SARD-NC " puisque par acte du 28 juin 2009, le Dr Y...prolongeait le contrat de travail initial de Mme X... (désignée " directrice du SARD-NC ") sous forme d'un contrat de travail à durée indéterminée selon les mêmes modalités que le contrat initial,

- que si la confusion entre les structures explique l'établissement des bulletins de salaires de Mme X... à l'en-tête de CCTTMR jusqu'à octobre 2009 puis à l'en-tête de AIR NC en novembre et décembre 2009, il est constant qu'à compter de janvier 2010 les bulletins de salaire ont été établis par la société SARD-NC avec reprise de la totalité de l'ancienneté depuis mars 2009,

- que sur le plan comptable, le salaire de Mme X... était enregistré dans les bilans de la société SARD-NC ce qui est logique, la quasi-totalité de son activité ayant trait aux prestations commerciales qui avaient justement conduit le CCTTMR a se scinder en deux structures pour des raisons fiscales,

- qu'à l'assemblée générale de AIR-NC du 29 avril 2010, Mme X... était présente et mentionnée comme directrice bénévole et non pas comme salariée de l'association,

- que la totalité de la procédure de licenciement a été engagée par la société SARD-NC ;

Attendu qu'il résulte ainsi suffisamment de ces éléments que le contrat de travail de Mme X... a bien été transféré à la société SARD-NC et que celle-ci qui pendant plus d'un an et demi a, tant dans la forme que sur le fond, fait bénéficier Mme X... de l'ensemble des attributs du contrat de travail (salaire, congés-payés, primes) n'est pas fondée à soutenir, pour les seuls besoins de la procédure, l'inexistence de tout contrat ;

Attendu, sur le cumul du contrat de travail et du mandat social affirmé à juste raison par le tribunal, que la cour relève :

- qu'il ne résulte d'aucune pièce que la société SARD-NC ait fixé une quelconque rémunération pour le mandat social exercé par Mme X... laquelle n'était pas associée ; que sa rétribution ne pouvait donc avoir pour cause que son contrat de travail,

- que la société SARD-NC a, par contre, prévu une rémunération pour la directrice générale qui a succédé à Mme X...,

- que Mme X... avait une partie de ses activités sans lien avec sa fonction de directrice générale, étant observé qu'au titre de l'article 12. 3 (b) des statuts, le conseil d'administration assurait seul l'administration et la gestion de la société,

- que le lien de subordination est suffisamment caractérisé par le tribunal et qu'en appel la société SARD-NC ne fait valoir aucune argumentation pertinente sur ce point,

- qu'il apparaît ainsi des pièces produites que Mme X... en référait régulièrement au conseil d'administration pour les questions touchant au fonctionnement de fond (adoption du règlement intérieur, projet d'accord d'intéressement, montant des primes de fin d'année...) ;

Attendu, en conséquence, que la cour confirmera la décision déférée en ce qu'elle a retenu que Mme X... cumulait un contrat de travail et un mandat social bénévole au sein de la société SARD-NC ;

Sur le bien fondé du licenciement :

Attendu que la société SARD-NC soutient d'une part que le management de Mme X... a entraîné une dégradation importante de l'ambiance de travail au sein de la société, d'autre part qu'il a été porté à sa connaissance des faits de faux, pour lesquels elle a déposé plainte ce qui justifie, le cas échéant, un sursis à statuer, ainsi qu'un comportement constitutif d'abus de confiance par des augmentations de salaires et des octrois de primes indus ;

Attendu que Mme X... reprend en réplique son argumentation sur la prescription d'une partie des griefs ainsi que sur le caractère non établi des griefs non prescrits ;

Sur quoi,

Attendu que la cour relève en premier lieu que l'employeur ne discute pas l'irrégularité de la procédure par absence d'entretien préalable du fait de la carence de l'employeur le 20 décembre 2010 ainsi qu'attesté par Mme Z...;

Que la cour relève en sus qu'il ressort des termes du mail du 9 décembre 2010 du Dr A..., membre du conseil d'administration, en réponse à la demande de rendez-vous de Mme X... " cela ne changera rien à notre décision concertée qui est irréversible ", que la décision de licenciement était préalablement arrêtée et que la convocation à l'entretien préalable était purement formelle ;

Que le caractère irrégulier du licenciement sera donc confirmé ;

Attendu, sur la légitimité du licenciement et de la mise à pied conservatoire, que la cour adopte également la motivation complète et parfaitement fondée du tribunal ;

Qu'elle observe à titre complémentaire :

- que la lettre de licenciement fixant les termes du litige, l'employeur n'est pas fondé à invoquer des griefs complémentaires (relations avec les fournisseurs, maintien d'une procédure judiciaire),

- que l'employeur ne conteste pas en appel que les faits à l'appui du grief tenant à des falsifications de documents et à leur usage ont été portés à sa connaissance plus de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire et avant toutes poursuites pénales et sont donc prescrits par application de l'article LP. 132-6 du code du travail,

- qu'étant observé que depuis la loi du 5 mars 2007 modifiant l'article 4 du code de procédure pénale, la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, le rejet de la demande de sursis à statuer sera donc confirmé, le résultat de la plainte étant sans influence sur la prescription des griefs,

- que le grief tenant à la responsabilité de Mme X... dans des dissensions au sein de la société se traduit par une affirmation générale en 6 lignes sans qu'il soit fait référence à un quelconque exemple précis ce qui le rend inopérant,

- que la cour ne peut que s'interroger sur le cynisme de l'employeur à vouloir faire porter à Mme X... la responsabilité d'une situation dont les attestations produites et non contestées établissent qu'elle est récurrente dans la structure depuis plusieurs années, qu'elle a conduit à la démission de plusieurs directrices successives et a nécessité la nomination d'un administrateur ad hoc en décembre 2008,

- qu'elle relève par ailleurs que lors de l'assemblée générale du CCTTMR du 16 juillet 2009, il était fait état de " l'ambiance de travail plus sereine " avec l'arrivée de Mme X... et s'étonne enfin que l'employeur ait pu, avant toute enquête, tenir pour avérés des griefs portés essentiellement par un salarié sanctionné à plusieurs reprises et qui apparaît comme le maître d'oeuvre des opérations de déstabilisation de toutes les directrices démissionnaires,

- que, s'agissant de l'activité pompe à insuline ou défibrillateurs, les mails des 7 et 12 octobre 2010 adressés au membres du conseil d'administration établissent d'une part que Mme X... était totalement transparente sur la poursuite de ces projets ce qui interroge sur la réalité du maintien du conseil d'administration dans sa volonté de non diversification, d'autre part que, même à retenir que Mme X... aurait, de sa seule initiative, décidé de maintenir ce projet-ce qui s'analyserait en un refus d'obéissance fautif-ce grief, connu plus de deux mois avant la procédure de licenciement est prescrit,

- s'agissant des salaires et des primes de Mme X..., que cette dernière disposait, au titre de l'article 12. 2 c des statuts, de la possibilité de fixer les traitements, salaires et gratifications, pouvoir identique à celui qui lui avait déjà été délégué le 27 mars 2009 par le Dr Y...lorsqu'elle était encore directrice du CCTTMR ; que les augmentations et primes que s'est octroyées Mme X... ont été ouvertement portées sur les bulletins de salaire et enregistrées dans les comptes sociaux accessibles en permanence au président et aux membres du conseil d'administration, que ceux-ci, qui ne sauraient se prévaloir de leur incompétence ou d'un désintérêt pour le fonctionnement social, ont nécessairement eu connaissance avec les comptes 2009 de l'augmentation de novembre 2009 et de la prime de décembre 2009 ; qu'il existe donc une incertitude sur l'acceptation implicite de ces modifications par l'employeur et donc sur la date à laquelle il en a eu connaissance,

- que faute pour la société SARD-NC de rapporter la preuve qu'elle n'a eu connaissance des faits fautifs que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire, ce grief doit être également considéré comme prescrit ;

Sur les demandes au titre de l'appel incident :

Attendu que Mme X... soutient que son salaire moyen doit être calculé à 1 035 715 F CFP et que son préjudice doit être indemnisé sur la base de 8 mois de salaire ;

Que la société SARD-NC n'a pas conclu sur ces points ;

Sur quoi,

Sur la moyenne de salaire

Attendu que le tribunal a calculé la moyenne des trois derniers mois de salaires à la somme de 750 000 F CFP en rappelant que les primes exceptionnelles ne devaient pas être prises en compte dès lors qu'il ne s'agit pas d'un élément stable et constant de la rémunération ;

Attendu que comme en première instance, Mme X... n'explique pas son mode de calcul et ne fait valoir aucune critique sur la motivation du premier juge ;

Que la position du tribunal, fondée en droit, sera confirmée ;

Sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Attendu qu'aux termes de l'article LP. 122-35 du code du travail, lorsque l'ancienneté du salarié est inférieure à deux ans-ce qui est le cas de Mme X... avec une ancienneté de 21 mois, l'indemnité octroyée par le juge est fonction du préjudice subi et peut, de ce fait, être inférieure aux salaires des six derniers mois ;

Attendu qu'au regard de l'ancienneté dans l'emploi et de l'âge de Mme X... au jour du licenciement (41 ans) lui permettant, vu ses qualifications, de pouvoir raisonnablement retrouver un emploi dans un bref délai, de l'absence de toute précision sur sa situation d'emploi suite à son licenciement, indication qui aurait été de nature à mieux apprécier son préjudice réel, la cour estime fondée l'appréciation du premier juge et la confirmera ;

Sur le caractère vexatoire du licenciement :

Attendu que Mme X... soutient que les conditions de son licenciement ont été abruptes et vexatoires, que celui-ci était décidé d'avance et qu'elle est passée brutalement du statut de salariée modèle à celui de paria ;

Que la société SARD-NC n'a pas conclu sur ces points ;

Sur quoi,

Attendu qu'il résulte des pièces produites que brutalement, sans qu'aucun avertissement ne l'ait précédé ou qu'une demande d'explication n'ait été sollicitée sur son comportement ou sur les faits dénoncés par certains salariés dont l'impartialité devait pourtant être regardée avec prudence, l'employeur a décidé d'un licenciement pour faute avec mise à pied immédiate et n'a pas jugé utile de se présenter à l'entretien préalable ;

Qu'une telle décision dans ce contexte ne pouvait être que particulièrement humiliante pour la directrice générale ;

Que la cour, sur infirmation, dira la demande fondée et condamnera la société SARD NC à payer à Mme X... la somme de 1, 5 millions F CFP à titre de dommages-intérêts ;

Sur la prime d'intéressement :

Attendu que Mme X... sollicite en appel le versement de la prime prévue par l'accord d'intéressement du 13 avril 2010 ;

Que la société SARD-NC n'a pas conclu sur ce point ;

Sur quoi,

Attendu que l'accord d'intéressement du 13 avril 2010 prévoit, à partir de l'exercice 2010, le versement à chaque salarié dans les 6 mois de la clôture de l'exercice d'une prime d'intéressement répartie de manière égalitaire ;

Que Mme X... est fondée à réclamer le paiement de cette prime dont le montant n'est pas contesté par l'employeur ;

Qu'il sera fait droit à sa demande ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ;

Dit les appels recevables ;

Confirme le jugement déféré sauf en sa disposition déboutant Mme Sylvia X... de sa demande liée au caractère vexatoire de son licenciement ;

L'infirmant de ce chef ;

Dit que le licenciement de Mme Sylvia X... a revêtu un caractère vexatoire ;

Condamne la société SARD NC à payer à Mme Sylvia X... la somme de un million cinq cent (1 500 000) F CFP de ce chef ;

Y ajoutant,

Condamne la société SARD NC à payer à Mme Sylvia X... la somme de trois cent mille (300. 000) FCFP au titre de l'accord d'intéressement ;

Déboute Mme Sylvia X... de ses demandes plus amples au titre du salaire de référence et du montant de son indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Déboute la société SARD NC de toutes ses demandes ;

Condamne la société SARD NC à payer à Mme Sylvia X... la somme de trois cent mille (300. 000) FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00197
Date de la décision : 21/01/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2014-01-21;12.00197 ?
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