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25/03/2013 | FRANCE | N°11/00488

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre civile, 25 mars 2013, 11/00488


COUR D'APPEL DE NOUMÉA

42

Arrêt du 25 Mars 2013

Chambre Civile

Numéro R.G. :

11/00488

Décision déférée à la cour :

rendue le : 23 Mai 2011

par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 23 Septembre 2011

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

LA SARL MAISON DU RECHAPAGE, prise en la personne de son représentant légal

Siège Social : 33 rue Ampère - DUCOS - 98800 NOUMEA

représentée par la SELARL DESCOMBES et SALANS

INTIMÉ

LA SOCIETE ML DE B (28 rue AmpÃ

¨re - DUCOS - 98800 Nouméa), prise en la personne de son représentant légal

Siège Social : 12 Résidence du Golf de Tina - BP. 4622 - 98847 NOUMEA CEDEX

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COUR D'APPEL DE NOUMÉA

42

Arrêt du 25 Mars 2013

Chambre Civile

Numéro R.G. :

11/00488

Décision déférée à la cour :

rendue le : 23 Mai 2011

par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 23 Septembre 2011

PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

LA SARL MAISON DU RECHAPAGE, prise en la personne de son représentant légal

Siège Social : 33 rue Ampère - DUCOS - 98800 NOUMEA

représentée par la SELARL DESCOMBES et SALANS

INTIMÉ

LA SOCIETE ML DE B (28 rue Ampère - DUCOS - 98800 Nouméa), prise en la personne de son représentant légal

Siège Social : 12 Résidence du Golf de Tina - BP. 4622 - 98847 NOUMEA CEDEX

représentée par la SELARL AGUILA-MORESCO

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Février 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Christian MESIERE, Conseiller, président,

François BILLON, Conseiller,

Thierry LEFEVRE, Vice-Président placé désigné par ordonnance du Premier Président en date du 30 janvier 2013 pour composer l'audience civile de la cour d'appel du 18 février 2013 qui en ont délibéré,

François BILLON ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats: Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- signé par Christian MESIERE, président, et par Stephan GENTILIN, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par acte sous seing privé avec effet au 1er septembre 1994, la SCI ML DE B a donné à bail à la SARL la MAISON DU RECHAPAGE un local exclusivement destiné à l'usage d'entrepôt, situé rue Ampère à DUCOS, pour une durée de 02- 04- 06 ans, moyennant un loyer annuellement révisable de 165.000 F CFP.

Par exploit d'huissier de justice en date du 26 juin 2008, la bailleresse a fait délivrer à sa locataire un congé pour le 31 décembre 2008, avec offre de renouvellement de bail pour une période de neuf années entières et consécutives à compter du 1er janvier 2009, moyennant un loyer mensuel de 500.000 F CFP hors taxes, révisable annuellement selon l'indice BT 21.

Le locataire n'ayant pas fait connaître sa position, la SCI ML DE B a, par exploit d'huissier de justice en date du 24 novembre 2008, notifié un mémoire préalable sollicitant la fixation du montant du loyer du bail à renouveler à la somme mensuelle de 500 000 F CFP hors taxes à compter du 1er janvier 2009.

Par exploit d'huissier de justice en date du 03 mars 2009, la SCI ML DE B, dûment autorisée par ordonnance en date du 26 février 2009, a fait assigner à jour fixe la SARL Maison du Rechapage devant la présente juridiction aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la fixation du loyer du bail à renouveler, à la somme mensuelle de 500.000 F CFP, avec effet au 1er janvier 2009, ainsi que la condamnation de la défenderesse à lui payer la somme de 250.000 F CFP sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie et ce, en sus de la charge des entiers dépens de l'instance comprenant le coût de l'expertise éventuellement ordonnée et recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code précité.

La demanderesse sollicitait par ailleurs la fixation d'un loyer provisionnel mensuel à la somme de 500.000 F CFP à compter du 1er janvier 2009, dans le cas où une mesure d'instruction serait ordonnée.

Elle exposait que la surface des locaux loués et leur emplacement de premier ordre sur la route principale de Ducos, en zone industrielle, justifient l'augmentation du loyer.

A l'audience du 06 avril 2009, date à laquelle l'affaire a été retenue, la SCI ML de B a maintenu ses demandes.

La SARL LA MAISON DU RECHAPAGE a accepté le renouvellement du bail commercial mais proposé de fixer le montant du loyer à la somme mensuelle de 350.000 F CFP, eu égard aux prix habituellement pratiqués dans le voisinage.

Par jugement avant-dire droit en date du 08 juin 2009, auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé du litige, le tribunal de première instance de NOUMÉA a ordonné une expertise et a sursis à statuer sur les demandes de révision des loyers et indemnisation des frais irrépétibles dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

Ce rapport a été déposé au greffe du tribunal le 02 novembre 2009.

La SCI ML DE B sollicitait la fixation du loyer du bail commercial à la somme mensuelle de 855.000 F CFP à compter du 1er janvier 2009, avec variation annuelle en fonction de l'indice BT 21.

Elle sollicitait également, outre l'exécution provisoire de la présente décision, la condamnation de la défenderesse à lui payer une indemnité de 10.000.000 F CFP, ou subsidiairement la somme provisionnelle de 5.000.000 F CFP en cas de mesure d'instruction, outre celle de 600.000 F CFP sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle- Calédonie et ce, en sus de la charge des entiers dépens de l'instance comprenant les frais d'expertise et recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code précité.

Elle soutenait que la surface des lieux loués était plus importante que celle retenue par l'expert (570 m² au lieu de 370 m²), que l'évaluation du loyer faite par l'expert était incorrecte en ce qu'elle se fondait sur le prix au mètre carré d'une location à usage de dock et non d'une location à usage commercial, que la destination des lieux avait en effet été modifiée depuis 1998 et qu'enfin les facteurs de commercialité avaient considérablement évolué.

Elle ajoutait que le loyer avait été gelé depuis le renouvellement du bail le 1er septembre 1994, que les parties avaient entendu compenser ce gel de loyer par la prise en charge par le preneur de tous les travaux d'entretien et de réparations, y compris de gros oeuvre et que l'état de délabrement du bâtiment, résultant du non respect de cet engagement, justifiait une indemnisation de 10.000.000 F CFP.

La SARL la MAISON DU RECHAPAGE concluait au débouté de la demanderesse en toutes ses prétentions et sollicitait la fixation du loyer mensuel du bail commercial à la somme de 350.000 F CFP.

Elle soutenait que la bailleresse connaissait, pour l'avoir autorisée, l'activité de vente et de réparation de pneus de la société, que l'état de vétusté du bâtiment justifiait un loyer plus faible que pour des locaux de même taille dans le voisinage et que l'exploitation d'un fonds de commerce dans un dock ne suffisait pas à lui conférer les caractéristiques d'un local commercial.

Elle ajoutait qu'il ne saurait être déduit de l'absence d'indexation du loyer, l'existence d'un accord des parties portant sur la prise en charge par le preneur de l'entretien intégral des lieux loués.

Par jugement du 23 mai 2011, le tribunal de première instance de NOUMÉA a statué ainsi qu'il suit :

FIXE, à compter du 1er janvier 2009, le loyer de l'ensemble des locaux donnés à bail à la Maison du Rechapage (soit les deux docks), à la somme totale mensuelle de CINQ CENT SOIXANTE DIX MILLE F CFP (570.000 F CFP) ;

DIT que ce loyer variera chaque année en fonction de la variation de l'index du bâtiment de Nouvelle- Calédonie BT 21 ;

DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision ;

DÉBOUTE la SCI ML DE B de ses demandes en paiement d'une indemnité et indemnisation de ses frais irrépétibles ;

FAIT masse des dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaire et ordonne leur partage par moitié entre les parties ;

DIT que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile de Nouvelle- Calédonie.

PROCÉDURE D'APPEL

Par requête enregistrée le 23 septembre 2011, la MAISON DU RECHAPAGE a interjeté appel de la décision et déposé son mémoire ampliatif d'appel le 23 décembre 2011.

Par conclusions récapitulatives du 13 juillet 2012, elle fait valoir, pour l'essentiel :

- que la surface des locaux de 570 m2, incluant une mezzanine de 200 m2, retenue par le premier juge est inexacte et que la surface des locaux qui est en réalité de 370m2 comme l'expert l'a admis, doit conduire la juridiction à fixer le loyer mensuel à la somme de 370.000 F CFP ; que la mezzanine, structure amovible qui a été financée par le preneur, ne peut en effet être considérée comme une surface locative supplémentaire ;

- que la société ML DE B n'est pas fondée à soutenir que le bail serait en réalité de nature commerciale pour revendiquer la fixation du prix à 855.000 F CFP (570 x1.500 CFP) ; que la demande de la société ML DE B tendant à faire interdire à la société MAISON DU RECHAPAGE toute activité commerciale dans les locaux loués, demande manifestement nouvelle en cause d'appel, doit être rejetée ;

- que le rejet de l'indemnisation demandée par la propriétaire (10.000.000 FCFP) pour défaut d'entretien des lieux par le locataire, qui a été décidée par le premier juge, est parfaitement justifié ; que les parties ont en effet clairement exprimé leur volonté de laisser à la charge de la bailleresse les grosses réparations et qu'on ne saurait en déduire le contraire au motif que le loyer n'a pas fait l'objet de révisions annuelles.

En conséquence, la MAISON DU RECHAPAGE demande à la Cour de statuer ainsi qu'il suit :

VU le rapport d'expertise judiciaire de M. X... ;

DECLARER recevable l'appel formé par la société MAISON DU RECHAPAGE à l'encontre du jugement rendu le 23 mai 2011 par le Tribunal de Première instance de Nouméa ;

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a fixé à 570.000 F CFP le loyer mensuel du bail renouvelé à compter du 1er janvier 2009 ;

Et jugeant à nouveau :

CONSTATER que la surface des locaux loués est égale à 370 mètres carrés ;

FIXER le loyer mensuel du bail commercial de la société MAISON DU RECHAPPAGE à une somme de 370.000 F CFP ;

CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la société ML DE B ;

REJETER la demande de la société ML DE B tendant à faire interdire à la société MAISON DU RECHAPAGE toute activité commerciale dans les locaux loués, cette demande étant manifestement une demande nouvelle en cause d'appel ;

CONDAMNER la société ML DE B à la somme de 200.000 F CFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de Nouvelle- Calédonie.

***************************

Par conclusions des 17 avril et 1er octobre 2012, la société ML DE B fait valoir, pour l'essentiel :

- que la fixation du prix du loyer doit se faire sur la base de 570 m2 incluant la mezzanine de 200 m2 ;

- que la mezzanine a été réalisée par ses soins et non par le locataire ;

- qu'en dépit des conclusions de l'expert selon lequel le dock ne saurait être assimilé à un local commercial, en réalité le dock ne sert pas qu'au stockage mais constitue bien un local commercial, ainsi que l'huissier a pu le constater en relevant auprès d'un des employés que : "l'entreprise a pour vocation la vente, le remplacement immédiat des pneumatiques usagés sur les véhicules des clients qui se présentent à l'atelier" ; qu'en conséquence le prix au m2 doit être fixé à 1.500 F CFP, et le loyer arrêté à la somme de 855.000F CFP (570 x1.500 F CFP) ;

- que dans l'hypothèse où la société MAISON DU RECHAPAGE n'utiliserait le dock que comme entrepôt , le loyer devrait être fixé à la somme de 570.000 F CFP (570 x1.000 F CFP) ;

- que l'expert a relevé que la bailleresse a accepté de ne pas augmenter le loyer depuis quinze années à la condition que le preneur prenne à sa charge les réparations de quelque nature que ce soit, afin de maintenir le dock en parfait état ; que le preneur a ainsi bénéficié d'une économie de 4.500.000 F CFP, en réalité bien supérieure, l'expert s'en étant tenu dans ses calculs à la période de 2000 à 2009 ; qu'en conséquence une indemnisation à hauteur de 10.000.000 F CFP est justifiée.

En conséquence, la société ML DE B demande à la Cour de statuer ainsi qu'il suit :

CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a retenu une superficie de 570 m2 de dock loué ;

L'INFIRMER en revanche sur le prix au mètre carré dès lors qu'il apparaît sans contestation possible à ce jour que la SARL MAISON DU RECHAPAGE ne l'utilise pas en tant que dock de stockage mais bien à titre commercial ;

Par voie de conséquence,

FIXER le montant du loyer révisé à la somme 855.000 F.CFP,

Dans l'hypothèse où la Cour fixerait à la somme de 570.000 F.CFP par mois, correspondant à la location d'un dock de stockage, faire interdiction dès lors à la SARL MAISON DU RECHAPAGE d'exploiter un fonds de commerce et ce sous astreinte de 100.000 F. CFP par infraction constatée,

DIRE que ces loyers fixés s'entendront à compter du 1er janvier 2009, hors taxe,

DIRE qu'ils varieront chaque année en fonction de la variation de l'indice BT 21 ou de tout autre indice légal qui lui serait substitué,

CONDAMNER la SARL MAISON DU RECHAPAGE à payer à la SCI ML DE B une indemnisation de 10.000.000 F.CFP pour les défauts d'entretien, cette indemnisation ne pouvant être moindre à la somme fixée par l'expert à hauteur de 4.500.000 F.CFP,

CONDAMNER la SARL MAISON DU RECHAPAGE à payer à la SCI ML DE B la somme de 300.000 F.CFP au titre des frais irrépétibles d'appel,

LA CONDAMNER aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SELARL AGUILA-MORESCO, avocats sur ses offres de droit.

***************************

Les ordonnances de clôture et de fixation de la date de l'audience ont été rendues le 3 décembre 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION

De la demande de révision du montant du loyer

De la superficie des locaux

Attendu que pour fixer le montant du loyer, les parties s'opposent, pour l'essentiel, quant à la prise en compte d'une mezzanine de 200 m2 susceptible de porter la superficie des lieux de 370m2 à 570m2, chacun revendiquant l'avoir construite sans cependant en apporter la preuve ;

Attendu qu'il est nécessaire de rappeler les textes applicables à la Nouvelle-Calédonie, en l'occurrence la délibération no 94 du 08 août 2000 relative à la révision des loyers des baux d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal ; que l'article 6 de cette délibération prévoit, qu'à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux articles 1 à 4, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation de l'index du bâtiment de Nouvelle-Calédonie BT 21 publié par l'institut territorial de la statistique et des études économiques intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré ; que pour la détermination du montant des loyers des baux à renouveler, il est tenu compte, en application des articles 1 à 4 de la délibération :

- des caractéristiques du local considéré lesquelles incluent la surface des locaux,

- de la destination des lieux,

- des obligations respectives des parties,

- des facteurs locaux de commercialité,

- des prix couramment pratiqués dans le voisinage ;

Attendu que l'article 3 de la délibération précise, par ailleurs, que :

"les améliorations apportées aux lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, directement ou indirectement, notamment par l'acceptation d'un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge" ;

Attendu que les pièces versées par les parties établissent que, par acte authentique du 30 décembre 1987, la SCI ML DE B a acquis un terrain bâti désigné comme suit :

"Un immeuble bâti sis à NOUMEA, Ducos, 28, rue Ampère, consistant en :

1o- un terrain de dix ares (10 a) formant le lot 182 bis du lotissement industriel, deuxième zone ; 2o- un dock de 300 m², avec soubassement en maçonnerie, coffré et couvert en tôles, avec deux bureaux et sanitaires à l'extérieur ;

3o- un dock de 70 m² entièrement en maçonnerie" ;

Attendu qu'il est également établi que la SCI ML DE B a donné en location à la MAISON DU RECHAPAGE le dock principal, objet du bail du 1er septembre 1994, puis le petit dock entièrement en maçonnerie à compter du 1er août 2001 ;

Attendu que M. X..., expert judiciaire, a ainsi constaté, dans son rapport du 27 octobre 2009, que les lieux loués étaient constitués de deux corps de bâtiments attenants :

- l'un de 80 m², comprenant une pièce bureau de 17 m², un espace atelier de 50,56 m² ainsi qu'un couloir étroit et profond de 12 m²,

- l'autre contenant un espace utile de 293 m²,

soit un ensemble offrant globalement une superficie de 370 m² ;

Attendu que le bailleur produit une estimation de l'agence immobilière Caillard et Kaddour établie le 12 juillet 2007 et un constat d'huissier dressé le 27 octobre 2009 à sa demande, attestant que :

"le dock comprend aussi une mezzanine dont le plancher est en bois avec traverses métalliques, non aménagée, qui sert d'aire de stockage, d'une surface de 197,5 m2" pour l'agence immobilière ou de l'ordre de 200 m2 pour l'huissier ;

Attendu qu'en cause d'appel, le bailleur soutient que, contrairement aux dispositions du premier juge qui relevaient que le locataire avait "manifestement créé une mezzanine dans l'un des bâtiments", c'est en réalité la SCI ML DE B qui a construit cette mezzanine, ce que le preneur conteste assurant avoir personnellement financé cette structure amovible ; que cependant aucune des parties ne produit de justificatifs de nature à démontrer ses dires ;

Attendu que la jurisprudence (Cass.3ème Civ. 30 octobre 1990) a ainsi pu rappeler que :

"Justifie légalement sa décision de fixer, selon la règle du plafonnement, le loyer du bail commercial renouvelé, la cour d'appel qui retient que si une mezzanine a été créée et si une salle de soins a été aménagée, il n'est pas établi que la bailleresse ait, directement ou indirectement, participé au financement des travaux nécessaires à ces aménagements" ;

Attendu qu'il peut être également relevé que dans l'hypothèse où l'adjonction d'une mezzanine aurait été réalisée au cours du bail, cette amélioration apportée aux lieux loués n'a pas, selon les dispositions de l'article 3 de la délibération précitée, à être prise en considération pour la fixation du loyer dans la mesure où le bailleur ne démontre pas qu'il en a assumé la charge, directement ou indirectement, notamment par l'acceptation d'un loyer réduit ;

Attendu que la Cour est enfin conduite à relever que l'expert judiciaire, qui a conduit ses travaux postérieurement à la constatation de l'existence de la mezzanine par l'agence immobilière Caillard et Kaddour et qui a remis son rapport à la même date que le constat d'huissier faisant état de la mezzanine, a retenu contradictoirement la superficie de 370 m2, sans que des dires aient été produits par le bailleur qui n'aurait pas manqué de relever cette omission, a fortiori s'il avait été à l'origine de la construction de la mezzanine comme il l'affirme ;

Attendu qu'il n'est par conséquent pas établi que la société bailleresse ait, directement ou indirectement, participé au financement des travaux nécessaires à la construction de la mezzanine dont elle ne saurait tirer argument pour prétendre que la révision du loyer doit prendre en compte cette surface locative supplémentaire consistant en un aménagement dont le caractère amovible n'est en outre pas contesté ;

Attendu qu'au vu de ces éléments pris en leur ensemble, il y a lieu de retenir la superficie de 370m2 retenue par l'expert ;

De la nature commerciale du local et du prix du mètre carré

Attendu que pour la fixation du loyer, le bailleur se prévaut de l'utilisation par le preneur des lieux comme un local commercial et non comme un simple entrepôt, pour prétendre à ce que le prix du mètre carré soit fixé à la somme de 1.500 F CFP , et non à celle de 1.000 F CFP ;

Attendu que l'expert souligne justement que les docks loués par la bailleresse ne peuvent être assimilés à un local commercial et indique qu'ils ne sont d'ailleurs pas exploités en tant que tel, puisqu'en réalité ils servent à un usage d'entrepôt de pneus et d'atelier de montage et de démontage et qu'il convient ainsi de ne pas confondre de véritables locaux commerciaux conçus et aménagés pour une destination résolument commerciale et ceux classés dans la catégorie dock/ entrepôt/ atelier ;

Attendu qu'en outre, il convient de relever que la bailleresse est malvenue de s'étonner de l'utilisation faite par le preneur des lieux, alors qu'elle a, par mention manuscrite apposée sur le courrier qui lui a été adressé par le preneur en date du 25 mai 1998, autorisé celui-ci à faire les "travaux d'agencement dans le dock sis rue Ampère à Ducos nécessaires à la réception de la clientèle pour le montage et la vente de pneus neufs et rechapés tourismes et 4 x 4 en particulier" ;

Attendu qu'en tout état de cause, il ne suffit pas qu'un fonds de commerce soit exploité dans un dock pour conférer à celui-ci les caractéristiques d'un local commercial et que l'expert a justement relevé dans son rapport que :

"La valeur locative que nous avons retenue correspond ni plus ni moins aux caractéristiques spécifiques du dock qui n'a d'ailleurs pas grand-chose à voir avec les docks de conception nouvelle génération, tant celui-ci est ancien, désuet et pas nécessairement pratique. Par ailleurs, la valeur locative que nous avons retenue résulte également des conditions qui caractérisent la situation du marché de l'immobilier pour ce qui concerne les docks et non les locaux commerciaux. Ce dock ne peut être assimilé à un local commercial, il n'est d'ailleurs pas exploité en tant que tel, puisqu'en réalité, il sert ni plus ni moins à usage d'entrepôt de pneus et d'atelier de montage et de démontage ; qu'au surplus, il est aussi important de distinguer les docks nouvelle génération qui se prêtent à de multiples fonctions et destinations y compris commerciales et les docks ancienne génération, conception stricte et austère reflétant généralement un caractère désuet et même parfois vétuste, le plus souvent exploités à usage d'atelier/entrepôt. C'est dire si besoin était que ce bâtiment avec tout ce qui le caractérise ne peut en aucun cas être assimilé à un local commercial" ;

Attendu qu'au vu de ces éléments, l'expert a donc bien pris en compte les caractéristiques des locaux pour déterminer la valeur locative à la somme de 1000 F CFP / m², évaluation au demeurant conforme à celle faite, en 2007, par l'agence Caillard et Kaddour ; que le premier juge, par des motifs que la présente décision entend se réapproprier, a justement pris en compte cette somme qui répond aux conditions prévues par la délibération du 8 août 2000 précitée ;

Attendu qu'en conséquence, il convient de fixer le loyer à la somme de 370.000 F CFP, compte-tenu de la superficie retenue par la présente juridiction ;

De l'appel incident tendant à l'interdiction faite au preneur d'exploiter un fonds de commerce

Attendu que le bailleur ne saurait demander à la juridiction, pour la première fois en appel, de faire interdiction à la société MAISON DU RECHAPAGE d'exploiter un fonds de commerce dans les locaux loués, d'autant plus qu'il a été rappelé précédemment que le bailleur a, par mention manuscrite apposée sur le courrier qui lui a été adressé par le preneur en date du 25 mai 1998, autorisé la société MAISON DU RECHAPAGE à faire les "travaux d'agencement dans le dock sis rue Ampère à Ducos nécessaires à la réception de la clientèle pour le montage et la vente de pneus neufs et rechapés tourismes et 4 x 4 en particulier" ; que cette demande doit être rejetée ; De l'appel incident tendant au paiement par la société MAISON DU RECHAPAGE d'une indemnité de 10.000.000 F CFP pour défaut d'entretien

Attendu que la société ML DE B soutient que l'absence d'indexation du loyer depuis la conclusion du bail souscrit en 1994 avait pour contrepartie le fait que les parties s'étaient accordées à laisser à la charge du preneur l'entretien intégral des lieux loués, en ce compris les grosses réparations ; qu'ainsi, compte-tenu de l'état des lieux constaté par l'expert judiciaire, une somme de 10.000.000 F CFP serait justifiée à titre d'indemnisation, à tout le moins celle de 4.500.000 F CFP représentant l'économie générée par la non révision du loyer telle que calculée par l'expert ;

Attendu que le bail conclu entre les parties, qui a pris effet à compter du 1er septembre 1994, a prévu, en son article 5-1, que :

"le preneur devra entretenir les lieux loués, pendant toute la durée de la location, et les rendre, en fin de bail, en bon état de réparations locatives et d'entretien lui incombant, notamment du fait des dégradations survenues de son fait ou du fait de personne à son service" ;

Attendu qu'il est ainsi manifeste qu'aucune disposition du bail ne mettait à la charge du preneur les grosses réparations incombant normalement au bailleur ;

Attendu qu'en outre, l'expert relève dans son rapport, qu'au regard des prix de l'époque :

"le prix du loyer (fixé à 165 000 F CFP par mois), n'a pas fait l'objet d'un tarif préférentiel au moment de l'établissement du bail en 1994",

ce qui ne permet pas, en tout état de cause, de retenir un éventuel transfert des charges de grosses réparations au preneur tel qu'allégué par le bailleur ;

Attendu que l'expert ajoute que le bâtiment n'a jamais fait l'objet de véritables travaux d'entretien et de réparations depuis son acquisition par la SCI ML DE B le 30 décembre 1987 et que le défaut de réparations n'est pas la seule cause de dégradation de l'immeuble, précisant que "sa construction semble avoir été improvisée au niveau de l'implantation et de la conception. Ce dernier point est important car cet état de fait a incontestablement aussi, singulièrement contribué à la détérioration du bâtiment" ;

Attendu qu'enfin, le courrier du 17 mai 1994, dont se prévaut la bailleresse et par lequel elle propose au preneur :

"de ne pas augmenter le loyer à condition que vous fassiez les travaux d'entretien de mon dock pour qu'il reste à neuf comme au premier jour où je vous l'ai loué",

n'établit nullement l'acceptation du preneur et se trouve par ailleurs contredit par le bail établi postérieurement, soit le 1er septembre 1994 ;

Attendu qu'ainsi l'existence d'un accord des parties quant à la prise en charge par le preneur de l'entretien intégral des lieux loués n'est pas démontrée et qu'en outre les éléments du dossier n'établissent nullement que l'état de vétusté de l'immeuble résulte d'un manquement du preneur à son obligation contractuelle d'entretien ;

Attendu qu'en conséquence, la preuve du bien- fondé de la demande en paiement d'une indemnité de 10 000 000 F CFP pour la dégradation de l'immeuble n'étant rapportée ni dans son principe ni dans son quantum, la SCI ML DE B sera déboutée de ce chef de demande ;

Des autres demandes des parties

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société MAISON DU RECHAPAGE les frais non compris dans les dépens qu'elle a été conduite à exposer ;

Attendu qu'il convient en conséquence de condamner la société ML DE B, pour l'entière procédure, à la somme de 200.000 F CFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle- Calédonie ;

Attendu qu'il y a lieu de faire masse des dépens de l'entière procédure qui comprendront les frais d'expertise judiciaire et d'ordonner leur partage par moitié entre les parties ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement, par arrêt contradictoire déposé au greffe ;

DÉCLARE recevable l'appel formé par la SARL MAISON DU RECHAPAGE ;

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a fixé à la somme de 570.000 F CFP le loyer mensuel du bail renouvelé à compter du 1er janvier 2009, et :

Statuant à nouveau :

CONSTATE que la surface des locaux loués est de 370 mètres carrés ;

FIXE le loyer mensuel du bail commercial de la société MAISON DU RECHAPPAGE à la somme de TROIS CENT SOIXANTE-DIX MILLE (370.000) F CFP ;

DIT que ce loyer variera chaque année en fonction de la variation de l'index du bâtiment de Nouvelle- Calédonie BT 21 ;

DÉBOUTE la SCI ML DE B de sa demande en paiement d'une indemnité pour défaut d'entretien et de sa demande destinée à faire interdire à la société MAISON DU RECHAPAGE d'exploiter un fonds de commerce ;

CONDAMNE la société ML DE B, pour la procédure d'appel, à la somme de DEUX CENT MILLE (200.000) F CFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle- Calédonie ;

FAIT masse des dépens de l'entière procédure qui comprendront les frais d'expertise judiciaire et ordonne leur partage par moitié entre les parties ;

DIT que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile de Nouvelle- Calédonie.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/00488
Date de la décision : 25/03/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2013-03-25;11.00488 ?
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