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26/09/2012 | FRANCE | N°11/00438

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 11/00438


COUR D'APPEL DE NOUMÉAArrêt du 26 Septembre 2012

Chambre SocialeNuméro R.G. : 11/00438

Décision déférée à la cour :rendue le : 16 Août 2011par le : Tribunal du travail de NOUMEA

Saisine de la cour : 30 Août 2011
PARTIES DEVANT LA COUR
APPELANT
M. Richard X...né le 20 Mai 1969 à FAVERGUESdemeurant ... - 98800 NOUMEA

représenté par la SELARL AGUILA-MORESCO
INTIMÉE
LA SOCIETE LE NICKEL SLN, prise en la personne de son représentant légal2 rue Desjardins - Doniambo - BP. E5 - 98848 NOUMEA CEDEX

représentée par la SELARL LOUZIER-FA

UCHE-CAUCHOIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Août 2012, en audience publique, devant...

COUR D'APPEL DE NOUMÉAArrêt du 26 Septembre 2012

Chambre SocialeNuméro R.G. : 11/00438

Décision déférée à la cour :rendue le : 16 Août 2011par le : Tribunal du travail de NOUMEA

Saisine de la cour : 30 Août 2011
PARTIES DEVANT LA COUR
APPELANT
M. Richard X...né le 20 Mai 1969 à FAVERGUESdemeurant ... - 98800 NOUMEA

représenté par la SELARL AGUILA-MORESCO
INTIMÉE
LA SOCIETE LE NICKEL SLN, prise en la personne de son représentant légal2 rue Desjardins - Doniambo - BP. E5 - 98848 NOUMEA CEDEX

représentée par la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Août 2012, en audience publique, devant la cour composée de :Christian MESIERE, Conseiller, président,Anne AMAUDRIC du CHAFFAUT, Conseiller,François BILLON, Conseiller,qui en ont délibéré, Anne AMAUDRIC du CHAFFAUT, Conseiller, ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats: Mikaela NIUMELE
ARRÊT : contradictoire,- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,- signé par Christian MESIERE, président, et par Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Richard X... était engagé par la société LE NICKEL-SLN en qualité de tourneur, classification OS2 pour un salaire mensuel brut de 124 068FCFP.
Il était promu à plusieurs reprises.
Il faisait l'objet d'une rétrogradation à la suite d'une altercation avec son supérieur hiérarchique.
Selon requête enregistrée le 2 juin 2010, Richard X... faisait convoquer devant le tribunal du travail la société LE NICKEL-SLN aux fins suivantes :
- dire et juger que les sanctions disciplinaires de rétrogradation et de mutation prononcées par la société LE NICKEL-SLN à son encontre sont illégales,
En conséquence,
- les annuler purement et simplement,- condamner la société LE NICKEL-SLN à lui payer :

* le solde de salaire et ses accessoires qu'il aurait dû percevoir depuis le 10 novembre 2008, avec remise des bulletins de salaires, le tout sous astreinte de 50.000 FCFP par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
* la somme de 4.221.288 FCFP à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral distinct, avec intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- ordonner sa réintégration au poste de tourneur ou dans tout autre service lui assurant un revenu annuel identique à celui de 2008, dans le service au sein duquel il exerçait antérieurement aux sanctions injustifiées qu'il a subies, et au même traitement qu'avant lesdites sanctions, sous astreinte de 50.000 FCFP à compter de la notification de la décision à intervenir,
- ordonner l'exécution provisoire,
- condamner la société LE NICKEL-SLN à payer à Monsieur Richard X... la somme de 200 000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile applicable en Nouvelle-Calédonie.
La société LE NICKEL-SLN a conclu à l'entier débouté de Richard X....
Par jugement en date du 16 août 2012 auquel il est expressément référé, le tribunal du travail a :
- dit que la sanction de rétrogradation prononcée à l'encontre de Richard X... est légale et proportionnée aux faits qui lui sont reprochés,- débouté Richard X... de ses demandes de réintégration et indemnitaires,- débouté les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- dit n'y avoir lieu à dépens.

PROCÉDURE D'APPEL :
Par requête enregistrée le 30 août 2011, Richard X... a régulièrement interjeté appel de la décision notifiée le 22 août 2011.
En son mémoire ampliatif du 23 novembre 2011, il demande à la cour après infirmation du jugement déféré de :
- annuler les sanctions prononcées, - condamner la société LE NICKEL-SLN à lui payer le solde des salaires et accessoires qu'il aurait dû percevoir, - la condamner à lui remettre ses bulletins de salaire rectifiés à peine d'astreinte de 50.000 FCFP par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt, - la condamner à lui payer la somme de 4.221.2888 FCFP à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral avec intérêts au taux légal, - ordonner sa réintégration au poste de tourneur ou à un poste équivalent à compter de la signification de l'arrêt à peine d'astreinte, - condamner la société LE NICKEL SLN à lui payer la somme de 200.000 FCFP en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.

Il fait valoir que :
- il était l'objet d'un véritable harcèlement moral de la part de la hiérarchie et plus particulièrement de M. Z..., - le 15 octobre 2008, ce dernier avait fait débrancher les machines sur lesquelles il travaillait, tout en lui reprochant de ne pas faire son travail, - une altercation était alors intervenue alors qu'il lui demandait de les rebrancher, - au cours de la discussion, malencontreusement M. Z... trébuchait sans qu'il en fût en aucune manière à l'origine, - la sanction était sans fondement s'agissant d'un acte accidentel.

Il soutient comme en première instance que la rétrogradation avec déplacement n'est pas fondée mais bien plus est illégale puisqu'elle constitue en fait deux mesures distinctes violant la règle du non-cumul des sanctions. Il indique par ailleurs que les sanctions prononcées n'étaient pas prévues par le règlement intérieur en ce cas.
Il fait ensuite valoir que l'employeur n'a pas respecté la procédure de licenciement en se faisant assister par 4 personnes lors de l'entretien préalable et à titre surabondant en contradiction avec le règlement intérieur. La sanction encourt de ce seul fait la nullité par application des dispositions de l'article Lp132-8 du code du travail.
Il considère que les demandes salariales et indemnitaires sont parfaitement justifiées.
Il affirme qu'en cas de rétrogradation qui constitue une modification du contrat de travail l'employeur est dans l'obligation de notifier la proposition de sanction et d'inviter le salarié à prendre partie dans un délai raisonnable ; que la SLN n'a pas respecté cette règle.
Il ajoute que depuis il est dans une grande difficulté psychologique et que sa santé est précaire ce qui justifie l'indemnité sollicitée.
Par conclusions du 24 janvier 2012 complétées par celles du 12 avril 2012, la Société Le Nickel SLN conclut à la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'elle a été déboutée de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.
Elle sollicite à ce titre la somme de 200.000 FCFP au titre de frais irrépétibles d'appel et 150.000 FCFP pour ceux de première instance.
Elle fait valoir pour l'essentiel que :
- la sanction est justifiée au regard des faits non contestés par le salarié devant le juge conciliateur et relatés dans l'attestation de M. Z..., - Richard X... ne rapporte pas la preuve du harcèlement moral,- le salarié produit des attestations dactylographiées et données à la signature lesquelles doivent être qualifiées de complaisantes, - la décision du tribunal est parfaitement justifiée d'autant que le salarié encourait le licenciement qui n'a pas été prononcé compte tenu de sa situation familiale.

Sur le non-cumul des sanctions disciplinaires, elle soutient que le tribunal a justement retenu que cette sanction était justifiée dans la mesure où il n'était pas contesté qu'il n'existait pas de poste correspondant à la nouvelle qualification dans son secteur d'activité initial.
Elle fait valoir que l'employeur est toujours libre de prononcer une sanction de son choix alors qu'elle n'aurait pas été inscrite dans le règlement intérieur mais à la condition qu'elle ne soit pas interdite. Elle ajoute que le règlement en cas de faute grave prévoit le licenciement et que l'on ne saurait lui reprocher, compte tenu de la nature de la faute commise, d'avoir appliqué une sanction moins sévère.
S'agissant du moyen selon lequel Richard X... n'aurait pas accepté la sanction disciplinaire de rétrogradation, elle observe qu'en cas de non-acceptation, l'employeur est autorisé à licencier le salarié. Elle rappelle que le contrat de travail est un contrat à la fois consensuel et commutatif qui n'est soumis à aucune forme. Elle souligne que le salarié avait accepté la rétrogradation et que l'action a été engagée 20 mois après la notification de la mesure de sorte qu' il n'est pas fondé à soulever ce moyen.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'annulation de la sanction et sur la demande de réintégration ainsi que sur ses conséquences
Il est constant que la prohibition des amendes ou autres sanctions disciplinaires n'interdit pas à l'employeur de prévoir dans le règlement intérieur une sanction de rétrogradation entraînant une diminution de la rémunération du salarié dès lors qu'une telle sanction consiste à affecter le salarié à une fonction ou à un poste différent et de niveau inférieur à celui qu'occupait l'intéressé.
Cependant, cette sanction emportant modification du contrat de travail ne peut être imposée au salarié. L'employeur doit l'informer de sa faculté d'accepter ou de refuser cette modification. L'accord est nécessaire, il doit être clair, précis et non équivoque. Par conséquent, il ne peut résulter de la seule poursuite du contrat de travail aux conditions modifiées et, en cas de refus, l'employeur doit renoncer à son projet et engager une procédure de licenciement.
En l'espèce, aucun document ne permet de vérifier si la procédure a été respectée. En tout état de cause, la lettre de licenciement ne fait pas mention de l'information de l'employeur. Les simples mentions "remis en main propre contre décharge" ou "lu et approuvé" portées sur la lettre notifiant la sanction ne caractérisent pas d'avantage l'assentiment explicite du salarié.
Par ailleurs le moyen selon lequel Richard X... n'a formalisé pendant 20 mois aucun grief à l'encontre de l'employeur en acceptant de travailler dans sa nouvelle affectation doit être écarté .
Il en résulte que la mesure de rétrogradation qui a entraîné une modification du contrat de travail, en ce qu'elle emportait un déclassement de sa position ramenée à la classification OP1 mais également une diminution de son salaire, n'a pas été acceptée expressément par le salarié, une telle acceptation ne pouvant en effet résulter de la seule poursuite du contrat de travail aux conditions modifiées et des mentions portées sur la lettre de rétrogradation.
En conséquence, l'annulation de la sanction doit être prononcée, sans nécessité d'examiner le bien fondé ou non de la sanction prise. L'annulation d'une sanction disciplinaire de rétrogradation entraînant le rétablissement du salarié dans ses droits, il convient de faire droit à la demande de réintégration de Richard X... dans un poste de classification identique à celui qu'il occupait avant le 10 novembre 2008 avec condamnation de la SLN à lui verser un rappel de salaire et accessoires à compter de cette date comme il sera dit dans le dispositif de la présente décision. La décision doit donc être infirmée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct
En l'espèce, l'annulation de la sanction a été prononcée en raison de son irrégularité formelle. Le premier juge, par des motifs que la cour adopte, a exactement qualifié de fautif le comportement de Richard X... lequel n'établissait pas en outre le harcèlement de M. Z.... De plus les pièces médicales produites aux débats ne démontrent pas que l'affection dont souffre le salarié ait un lien direct avec la sanction prononcée.Il ne peut dès lors se prévaloir d'un préjudice moral suffisamment étayé. Par conséquent, il doit être débouté de sa demande en dommages et intérêts.

Sur les frais irrépétibles
L'équité commande d'accorder à Richard X... la somme de 150.000 FCFP en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire déposé au greffe :Déclare l'appel recevable ; Infirme la décision en toutes ses dispositions ; et statuant à nouveau, Annule la sanction prononcée à l'encontre de Richard X... par la société LE NICKEL-SLN ;Ordonne la réintégration de Richard X... dans un poste de classification comme antérieurement avant la mise en oeuvre de la sanction de rétrogradation et dit qu'il devra bénéficier du même niveau de rémunération à compter du 10 novembre 2008;Ordonne à la société LE NICKEL-SLN de remettre à Richard X... les bulletins de salaire rectifiés ; Dit que ces mesures devront intervenir dans le mois de signification de la présente décision et à défaut sous peine d'une astreinte de dix mille ( 10.000) FCFP par jour de retard passé ce délai et pendant une durée de 60 jours, et dit qu'ensuite il appartiendra au créancier de ressaisir la juridiction pour qu'il soit à nouveau statué;Y ajoutant,

Déboute Richard X... de sa demande en dommages et intérêts ; Condamne la société LE NICKEL-SLN à payer à Richard X... la somme de cent cinquante mille (150.000) FCFP en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00438
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2012-09-26;11.00438 ?
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