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30/08/2012 | FRANCE | N°11/00137

France | France, Cour d'appel de Nouméa, Chambre civile, 30 août 2012, 11/00137


Arrêt du 30 Août 2012

Chambre Civile

Numéro R. G. : 11/ 137

Décision déférée à la cour : rendue le : 24 Janvier 2011 par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 18 Mars 2011
PARTIES DEVANT LA COUR
APPELANT
M. Philippe Marcel X... né le 16 Janvier 1973 à NOUMEA (98800) demeurant...

représenté par la SELARL LOMBARDO
INTIMÉS
M. Claude Marcel Charles Y... né le 12 Février 1951 à NOUMEA (98800) demeurant...

représenté par la SELARL ETUDE BOISSERY-DI LUCCIO
Mme Colette Gilda Annie Lé

onie Y... épouse A... née le 27 Mars 1953 à NOUMEA (98800) demeurant...

représentée par la SELARL AGUILA-MORESCO
COMPO...

Arrêt du 30 Août 2012

Chambre Civile

Numéro R. G. : 11/ 137

Décision déférée à la cour : rendue le : 24 Janvier 2011 par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 18 Mars 2011
PARTIES DEVANT LA COUR
APPELANT
M. Philippe Marcel X... né le 16 Janvier 1973 à NOUMEA (98800) demeurant...

représenté par la SELARL LOMBARDO
INTIMÉS
M. Claude Marcel Charles Y... né le 12 Février 1951 à NOUMEA (98800) demeurant...

représenté par la SELARL ETUDE BOISSERY-DI LUCCIO
Mme Colette Gilda Annie Léonie Y... épouse A... née le 27 Mars 1953 à NOUMEA (98800) demeurant...

représentée par la SELARL AGUILA-MORESCO
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 Juillet 2012, en audience publique, devant la cour composée de :
Christian MESIERE, Conseiller, président, Anne AMAUDRIC DU CHAFFAUT, Conseiller, François BILLON, Conseiller, qui en ont délibéré, Christian MESIERE, Conseiller, ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats : Corinne LEROUX
ARRÊT :- contradictoire,- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,- signé par Christian MESIERE, président, et par Mikaela NIUMELE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Marcel Y... est né à NOUMÉA le 02 mars 1933 et y est décédé le 04 octobre 2003, laissant pour recueillir sa succession les héritiers suivants :
* Claude Y..., son fils issu de son union avec Gilda C..., * Colette Y..., sa fille issue de son union avec Gilda C..., * Philippe X..., son fils adoptif suivant jugement du 21 septembre 1999.

Maître D..., Notaire à NOUMEA, saisi pour procéder au partage de la succession de Marcel Y..., a établi un projet d'état liquidation.
Aucun accord n'ayant pu être trouvé entre les héritiers sur le partage, le Notaire a dressé un procès-verbal de difficultés le 07 novembre 2008.
Par acte du 07 avril 2009, Mr Claude Y... a fait citer Mme Colette Y... et Mr Philippe X... devant le Tribunal de Première Instance de NOUMEA, section détachée de KONE, afin de voir homologuer le procès-verbal de liquidation de la succession de Marcel Charles Robert Y... établi par Maître D..., dire qu'il doit être exécuté en ses forme et teneur, et obtenir la condamnation de Mr Philippe X... à lui payer la somme de 200. 000 FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par une ordonnance rendue le 30 juin 2009, le juge chargé de la Section détachée de KONE s'est déclaré incompétent territorialement au motif que les biens visés dans la requête sont situés en Province Sud et a renvoyé le dossier devant le Tribunal de Première Instance de NOUMEA.
Par un jugement rendu le 24 janvier 2011 auquel il est renvoyé pour l'exposé de l'objet du litige, le rappel des faits et de la procédure, les prétentions et les moyens des parties, le Tribunal de Première Instance de NOUMEA, a :
* donné acte aux parties de ce qu'elles s'entendent sur l'attribution de zones foncières à chacune d'elles (la zone " Marianne " pour Colette, la zone " L'île " pour Philippe et les zones " Daly " et " Porwy " pour Claude) d'une part, et sur l'évaluation de la propriété agricole sise à POYA au prix de 43. 617 FCFP l'hectare, d'autre part,
* homologué le projet d'état liquidatif de la succession de Marcel Y... établi par Maître D..., Notaire à NOUMEA, avec toutes conséquences de droit, * dit que l'état liquidatif homologué sera exécuté en ses forme et teneur, * débouté Mr Philippe X... de l'ensemble de ses demandes,

* condamné Mr Philippe X... à payer à Mr Claude Y... et à Mme Colette Y..., chacun, une somme de 100. 000 FCFP (soit 2 x 100. 000), sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
* condamné Mr Philippe X... aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
PROCÉDURE D'APPEL
Par une requête enregistrée au greffe de la Cour le 18 mars 2011, Mr Philippe X... a déclaré relever appel de cette décision.

Dans son mémoire ampliatif d'appel il sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour :

* d'ordonner la réalisation d'un nouveau projet de liquidation-partage,
* de dire que la liquidation partage de la succession de Marcel Y... devra tenir compte des éléments suivants :
- d'une attribution de la créance détenue sur Mme Monique F... au profit de chacun des héritiers au prorata de ses droits,
- d'un rapport à la masse successorale des sommes perçues par Claude Y... à hauteur de 5 FCFP la tonne de minerai humide depuis le 20 mars 1990, réévaluées au jour du partage successoral,
- d'un rapport à la masse successorale du réemploi de la vente-donation du bien situé à MOINDAH POYA pour une valeur de 15. 000. 000 FCFP,
- en ce qui concerne la différence des biens donnés dans la donation de 1972, elle devra être reportée à la valeur du bien subrogé,
* de constater que Claude Y... a commis des recels successoraux au titre de l'absence de réemploi de la propriété située à MOINDAH POYA et de l'absence de déclaration de la donation des " royalties ",
* de condamner Claude Y... à lui payer la somme de 1. 000. 000 FCFP à titre de dommages et intérêts,
* de condamner Claude Y... à lui payer la somme de 500. 000 FCFP en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions datées du 26 septembre 2011, Mr Claude Y... sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la Cour :
* de constater que Philippe X... ne conteste pas le partage de la propriété de MOINDAH et en particulier des zones à chacune des parties,
* de constater que le jugement est définitif sur ce point,
* d'homologuer l'état liquidatif de la succession de Marcel Y... établi par Maître D..., Notaire à NOUMEA,
* de condamner Philippe X... à lui payer la somme de 500. 000 FCFP en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions datées du 02 novembre 2011, Mme Colette Y... sollicite la confirmation du jugement entrepris et demande le paiement de la somme de 250. 000 FCFP en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les ordonnances de clôture et de fixation de la date d'audience ont été rendues le 15 février 2012.
Le 22 mars 2012, Mr Philippe X... a déposé des conclusions.
Par courriers reçus les 22 mars et 12 avril 2012 puis par conclusions reçues le 18 avril 2012 en vue de l'audience du 19, le conseil le Mr Philippe X... a sollicité le rabat de l'ordonnance de clôture au motif que l'appelant a un conseil parisien et qu'il a rencontré des difficultés de coordination empêchant la réception en temps utile des conclusions.
Le 23 mars 2012, Mr Claude Y... s'est opposé à cette demande, ajoutant que dans l'hypothèse où la Cour déciderait le rabat de l'ordonnance, il solliciterait un délai pour déposer des conclusions en réplique.

Par un arrêt avant dire droit rendu le 19 avril 2012, la Cour a :

* ordonné la réouverture des débats,
* admis aux débats les conclusions de Mr Philippe X... déposées au greffe de la Cour le 19 avril 2012 (en fait le 22 mars 2012),
* fixé un calendrier de procédure selon les modalités suivantes :
- conclusions en réplique de Maître DI LUCCIO et de Maître MORESCO avant le 22 mai 2012,
- conclusions récapitulatives des parties avant le 22 juin 2012,
* fixé la clôture de la procédure à la date du 1 er juillet 2012,
* fixé l'examen de l'affaire à l'audience de la Cour d'Appel du jeudi 12 juillet 2012 à 08 heures.
Par conclusions datées du 22 mai 2012, Mr Claude Y... réplique aux conclusions de Mr Philippe X... en date du 22 mars 2012.

Il fait valoir pour l'essentiel :
* s'agissant de la créance détenue par la succession à l'encontre de Mme Monique F... :
- que le projet de partage établi par le Notaire respecte l'égalité dans le partage,
- que la nature des attributions (créance par rapport à des terres) est sans incidence dès lors que l'égalité en nature est maintenue,
- que l'argumentation de Mr Philippe X... n'est pas sérieuse et la demande non fondée,
* s'agissant de la répartition de la redevance versée par la SMSP :
- que c'est par une interprétation et un mode de calcul personnels que Mr Philippe X... prétend que la redevance revenant à Claude Y... serait de 2 FCFP par tonne chargée,
- qu'il a amplement établi le bien fondé de la répartition opérée depuis la signature du premier contrat avec la SMSP le 20 mars 1990,
- que la répartition, telle qu'elle est appliquée, constitue la volonté de feu Marcel Y... afin de compenser les diligences effectuées par Claude Y..., seul et unique descendant s'occupant de la gestion de la propriété de MOINDAH,
- que pour contester la réalité de cette répartition, il lui appartient de démontrer l'existence d'un recel et d'en établir la preuve, preuve non rapportée aux débats,
- que Mme Colette Y... épouse A... confirme que leur père pratiquait cette répartition,
- que cette prétention n'est pas fondée,
* s'agissant du réemploi du produit de la vente de la propriété de MOINDAH :
- que Mr Philippe X... ne rapporte pas la preuve que c'est grâce au remploi du bien vendu à l'ADRAF que Claude Y... et son épouse Yasmina I... ont acquis un bien immobilier situé quartier de l'Anse Vata à NOUMEA,
- que cette acquisition a été réalisée au moyen d'une aide financière du père de son épouse, Mr Ismet I..., qui en atteste, et de ses revenus d'institutrice/ directrice d'école,
- que Mr Philippe X... n'établit pas la réunion de l'élément matériel et intentionnel nécessaire pour prouver l'existence d'un recel successoral,
* s'agissant du rapport à la succession de la donation partage de 1972 :
- que Mr Philippe X... reproche au Notaire d'avoir calculé le rapport à la donation de 1972 à la valeur au jour de la donation partage pour la partie faisant différence entre les biens donnés,
- qu'il soutient que ce calcul contreviendrait aux dispositions des articles 1077, 1077-2 et 1078 du Code civil,
- que ce moyen n'avait jamais été soulevé,
- que le premier juge n'a pas considéré que ce calcul était contestable ou contraire aux règles du partage applicable en la matière,
- que Mr Philippe X... ne démontre pas en quoi il serait lésé par ce calcul,
- que cette argumentation n'est pas sérieuse.
Par conclusions datées du 25 juin 2012, Mme Colette Y... épouse A... réplique également sur ces quatre points.
Elle fait valoir pour l'essentiel :
* s'agissant du rapport à la succession de la donation partage du 29 mai 1972 :
- que le Notaire a pris compte de la situation puisqu'il indique que si tous les enfants du défunt avaient participé à la donation partage, cette réunion fictive se serait faite en tenant compte de la valeur des biens donnés au jour de la donation partage, en application de l'article 1078 du Code civil,
- que tel n'étant pas le cas, le Notaire a rappelé que Mr Philippe X... n'avait pas seulement droit à sa réserve mais également à sa part héréditaire, en application de l'article 1077-2 du même code,
* s'agissant du réemploi du produit de la vente de la propriété rurale :
- que Mr Philippe X... ne rapporte pas la preuve que ce sont les fonds perçus lors de la vente de la propriété rurale à l'ADRAF qui auraient été réemployés pour l'acquisition par Claude Y... d'un bien immobilier situé quartier de l'Anse Vata à NOUMEA,
- que l'élément matériel du recel, qui résulte de tout procédé tendant à frustrer les cohéritiers d'un bien de la succession, fait donc défaut,
- qu'il en va de même de l'élément intentionnel, à savoir la volonté de s'approprier indûment des éléments de la succession pour nuire à ses cohéritiers, les frustrer de tout ou partie de ce qui doit leur revenir dans le partage et rompre à son profit l'équilibre de celui-ci,
* s'agissant de la répartition de la redevance de passage versée par la SMSP :
- que les sommes versées à Claude Y... par la SMSP sont la contrepartie contractuelle d'une prestation, à savoir l'autorisation de passer sur sa propriété pour le transport, le stockage et le chargement de minerai, et non les fruits d'une prétendue donation occulte,
- qu'il ne saurait, quinze années après, remettre en cause le protocole d'accord qui n'était pas soumis, concernant la répartition de la redevance, à une condition relative à la longueur des routes concédées à la SMSP,
- que cette répartition existe depuis 1990 et n'a jamais été contestée par feu Marcel Y...,
- qu'il n'y a donc pas lieu de rapporter ces sommes à la succession,
* s'agissant de l'attribution à Mr Philippe X... de la créance détenue par la succession à l'encontre de Mme Monique F... :
- que dans un premier temps Mr Philippe X... a soutenu que la créance litigieuse avait été réglée à la succession,
- qu'en cause d'appel il abandonne cet argument et vient prétendre que cette attribution heurterait le principe d'égalité entre les héritiers,
- que la variation de l'argumentation de Mr Philippe X... démontre qu'elle n'est pas sérieuse,
- qu'enfin, il ne démontre pas qu'il serait lésé par cette attribution,
- qu'il n'avait d'ailleurs soulevé aucune contestation à ce sujet (cf. page 4 du procès-verbal de difficulté du 07/ 11/ 2008).
MOTIFS DE LA DECISION
1) Sur la recevabilité de l'appel :
Attendu que l'appel, formé dans les délais légaux, doit être déclaré recevable ;
2) Sur les critiques formulées par Mr Philippe X... à l'encontre du projet de partage successoral établi par Maître D..., Notaire à NOUMEA :
Attendu qu'il résulte des pièces versées et des débats que Mr Marcel Y... est né le 02 mars 1933 à NOUMEA et qu'il y est décédé le 04 octobre 2003, laissant pour lui succéder trois héritiers, à savoir :
1) Claude Y..., né le 12 février 1951 à NOUMEA,
2) Colette Y... épouse A..., née le 27 mars 1953 à NOUMEA,
son fils et sa fille, issus de son union avec Mme Gilda C...,
3) Philippe X..., né le 16 janvier 1973 à NOUMEA, son fils adoptif suivant un jugement rendu par le Tribunal de Première Instance de NOUMEA le 21 septembre 1999 ;
Que l'acte de notoriété constatant la dévolution successorale a été dressé par Maître D..., Notaire à NOUMEA, le 30 juillet 2004, après dépôt de l'inventaire le 20 du même mois ;
Que par un acte établi le 29 mai 1972 par Maître J..., Notaire à NOUMEA, les époux Y.../ C... ont consenti une donation partage aux termes de laquelle il a été attribué :
* à Claude Y... la moitié indivise d'une maison située à BOURAIL et la nue-propriété pour y réunir l'usufruit au jour du décès de Mr Marcel Y... d'une propriété rurale située à MOINDAH POYA périmètre 18 d'une superficie de 247 hectares 40 ares,
* à Colette Y... l'autre moitié indivise de la maison située à BOURAIL et la nue-propriété pour y réunir l'usufruit au jour du décès de Mme Gilda C... d'une propriété rurale située à MOINDAH POYA périmètre 18 d'une superficie de 200 hectares 40 ares ;
Que cette donation ayant été consentie par les deux époux, seule la moitié donnée par Mr Marcel Y... concerne le présent partage ;
Qu'il convient de noter que cette donation-partage a bénéficié aux deux enfants issus du mariage, à l'exclusion de Philippe X... qui n'était pas encore né ;
Qu'en ce qui concerne sa moitié indivise de la maison située à BOURAIL, Mme Colette Y... l'a cédée par acte du 21 février 1991 à son frère Claude Y... qui, en échange, lui a cédé un immeuble bâti comprenant un terrain de 11 hectares 67 ares situé à POYA, formant le lot 27 section MOINDAH ;

Que par un acte du 04 janvier 1995, Mr Claude Y... a vendu la maison de BOURAIL pour le prix de 4. 000. 000 FCFP qu'il dit ne pas avoir réemployé ;

Qu'en ce qui concerne la propriété rurale située à MOINDAH POYA périmètre 18 d'une superficie de 247 hectares 40 ares, elle a été vendue conjointement par Mr Marcel Y... et Mr Claude Y... à l'Agence de Développement Rural et d'Aménagement Foncier (ADRAF) à concurrence de 235 hectares 72 ares suivant acte administratif du 20 août 1990 moyennant le prix de 6. 900. 000 FCFP ;
Que le surplus de 11 hectares 67 ares a été cédé à Mme Colette Y... comme il vient d'être indiqué " supra " ;
Que celle-ci a fait donation d'une parcelle d'un hectare à son fils et conservé le surplus ;
Qu'en ce qui concerne la propriété rurale située à MOINDAH POYA périmètre 18 d'une superficie de 200 hectares, Mme Colette Y... épouse A... l'a conservée mais elle fait observer qu'elle est toujours grevée par l'usufruit de sa mère ;
Que par un acte établi le 03 mai 2002 par Maître K..., Notaire à NOUMEA, Mr Marcel Y... a donné à Philippe X... la nue-propriété pour y réunir l'usufruit au jour du décès, par préciput et hors part, d'une propriété rurale située à POYA formant les lots 41 et 50 de la section MOINDAH d'une superficie de 251 hectares 90 ares ;
Que par un acte établi le 08 janvier 2003 par Maître K..., Notaire à NOUMEA, Mr Marcel Y... a donné à Philippe X... la nue-propriété pour y réunir l'usufruit au jour du décès, en avancement d'hoirie, d'un terrain nu situé à POYA formant le lot 75 de la section MOINDAH d'une superficie de 15 hectares 88 ares ;
Que les parties ont convenu d'évaluer ce terrain sur la base de 47. 317 FCFP l'hectare, soit 751. 394 FCFP ;
Que par un acte établi le 1 er octobre 2003 par Maître K..., Notaire à NOUMEA, Mr Marcel Y... a donné à Mme Colette Y... épouse A..., en avancement d'hoirie, une propriété située à POYA formant les lots 76 et 58 de la section MOINDAH d'une superficie de 235 hectares 82 ares ;
Que les parties ont convenu d'évaluer cette propriété sur la base de 47. 317 FCFP l'hectare, soit 11. 158. 295 FCFP ;
Qu'en application de l'article 922 du Code civil et au regard de la déclaration de succession, le Notaire a procédé au calcul de la réserve et de la quotité disponible, soit :
* biens existant au décès : 137. 709. 098 FCFP,
* déduction du passif : 150. 000 FCFP au titre de la déclaration de succession,
* réunion fictive des donations : au titre de la donation-partage de 1972 (Claude et Colette Y...), au titre des donations consenties à Philippe X... (en 2002 et 2003) et au titre de la donations consentie à Mme Colette Y... épouse A... (en 2003),
portant ainsi la masse à la somme de 169. 964. 395 FCFP, la quotité disponible à la somme de 42. 491. 098 FCFP (1/ 4), la réserve globale à la somme de 127. 473. 296 FCFP (3/ 4) et la réserve individuelle de chacun des héritiers à la somme de 42. 491. 098 FCFP (1/ 4) ;
Que le Notaire a procédé à l'imputation des libéralités sur la base des éléments suivants :
* la donation-partage consentie en 1972 à Claude et Colette Y... n'est pas réductible,
* la donation (préciputaire) consentie en 2000 à Philippe X... s'impute à concurrence de 11. 919. 152 FCFP sur le reliquat de quotité disponible sans l'excéder et n'est donc ni rapportable ni réductible,
* la donation (avancement d'hoirie) consentie en 2003 à Philippe X... s'impute sur sa part de réserve sans l'excéder et est donc rapportable mais non réductible ;
* la donation (avancement d'hoirie) consentie en 2003 à Colette Y... épouse A... s'impute sur le reliquat de sa part de réserve sans l'excéder et est donc rapportable mais non réductible ;
Qu'en ce qui concerne les droits héréditaires, le Notaire a rappelé que Mr Philippe X..., en tant qu'enfant non conçu au jour de la donation partage, comme Mr Claude Y... et Mme Colette Y... épouse A..., a droit à sa part héréditaire c'est à dire au tiers (1/ 3) d'une masse évaluée au jour du partage, formée des biens existant sous déduction du passif restant à acquitter, masse à laquelle on ajoute l'ensemble des donations en avancement d'hoirie, en revanche, les donations préciputaires, en l'occurrence non réductibles, restant acquises à leurs bénéficiaires ;

Qu'ensuite, le Notaire a procédé aux opérations de liquidation et de partage, lesquelles ont abouti aux projections ou propositions suivantes :
* actif à partager : 163. 427. 258 FCFP,
* passif de la succession : 5. 404. 460 FCFP,
* balance : 158. 022. 798 FCFP,
* droits des parties :
1) Claude Y... = 53. 209. 266 FCFP,
2) Colette Y... épouse A... = 53. 209. 266 FCFP,
3) Philippe X... = 53. 058. 726 FCFP,
* attributions :
1) Claude Y... :
- le montant de son allotissement dans la donation-partage, pour la partie constituant une avance d'hoirie = 3. 126. 456 FCFP,
- une fraction du solde du compte d'administration = 1. 690. 887 FCFP,
- une parcelle de terrain (à déterminer) d'une superficie approximative de 1. 022 hectares située à MOINDAH = 48. 391. 923 FCFP,
soit un montant égal à ses droits de 53. 209. 266 FCFP,
2) Colette Y... épouse A... :
- le montant de son allotissement dans la donation-partage, pour la partie constituant une avance d'hoirie, mais compte tenu de la revalorisation de la nue propriété = 3. 599. 626 FCFP,
- le montant de son rapport au titre de la donation rapportable du 1 er octobre 2003 = 11. 158. 295 FCFP,
- une fraction du solde du compte d'administration = 1. 690. 887 FCFP,
- une parcelle de terrain (à déterminer) d'une superficie approximative de 777 hectares située à MOINDAH = 36. 760. 458 FCFP,
soit un montant égal à ses droits de 53. 209. 266 FCFP,
3) Philippe X... = 53. 058. 726 FCFP,
- le montant de son rapport au titre de la donation rapportable du 08 janvier 2003 = 751. 394 FCFP,

- la créance de la succession sur Mme Monique F... correspondant à la moitié des avoirs au décès figurant sur les comptes joints = 1. 156. 726 FCFP,

- une fraction du solde du compte d'administration = 1. 690. 887 FCFP,
- une parcelle de terrain (à déterminer) d'une superficie approximative de 1. 045 hectares située à MOINDAH = 49. 459. 719 FCFP,
soit un montant égal à ses droits de 53. 058. 766 FCFP ;
Attendu qu'aux termes de l'article 825 du Code civil, la masse partageable comprend les biens existant à l'ouverture de la succession, ou de ceux qui leur ont été subrogés, et dont le défunt n'a pas disposé à cause de mort, ainsi que les fruits y afférents ;
Qu'elle est augmentée des valeurs soumises à rapport ou à réduction, ainsi que des dettes des copartageants envers le défunt ou envers l'indivision ;
Qu'aux termes de l'article 826 du Code civil, l'égalité dans le partage est une égalité en valeur ;
Que chaque copartageant reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l'indivision ;
Que s'il y a lieu à tirage au sort, il est constitué autant de lots qu'il est nécessaire ;
Que si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d'égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte ;
A) sur l'attribution à Mr Philippe X... de la créance détenue par la succession à l'encontre de Mme Monique F... :
Attendu qu'il résulte des développements qui précède que la créance de la succession sur la mère de l'intéressé correspondant à la moitié des avoirs figurant sur les comptes joints bancaires du couple formé par feu Marcel Y... et par Mme Monique F..., soit la somme de 1. 156. 726 FCFP ;
Qu'il convient de rappeler que dans le cadre d'un projet de partage amiable, il appartient au Notaire de composer librement les lots ;
Qu'en l'espèce, force est de constater que le projet de partage établi par Maître D..., Notaire respecte l'égalité en valeur telle que définie par l'article 826 du Code civil ;
Que dès lors, l'attribution de l'intégralité de cette créance à un seul des copartageants, en l'espèce Mr Philippe X..., est sans incidence dès lors que l'égalité en valeur est respectée par le projet de partage litigieux ;
Que ce grief n'est pas fondé et sera donc écarté ;
B) sur le prétendu recel successoral résultant de la répartition de la redevance versée par la SMSP
Attendu qu'il résulte des pièces versées et des débats que le 20 mars 1990, messieurs Marcel et Claude Y... ont conclu un protocole d'accord avec monsieur Roger M..., exploitant minier, ayant pour objet le passage sur leurs propriétés pour le transport, le stockage et le chargement du minerai de nickel ;
Qu'en vertu de ce document, l'exploitant s'est engagé à verser à ses co-contractants une redevance de 20 FCFP par tonne humide chargée correspondant, pour 13 FCFP aux droits de passage sur la route d'accès de la RT. 1 à Porwy et pour 7 FCFP pour le stockage et le warf ;
Que le montant de ladite redevance était valable pour une période de trois ans et révisable au-delà de cette période ;
Qu'un autre protocole d'accord a été conclu le 13 août 1996 entre messieurs Marcel et Claude Y... et la Société Minière du Pacifique Sud dite SMSP ayant le même objet à savoir le passage sur lesdites propriétés pour le transport, le stockage et le chargement du minerai de nickel ;
Qu'en vertu de ce document, la SMSP s'est engagée à verser à ses co-contractants une redevance de 20 FCFP par tonne humide chargée comprenant 13 FCFP pour les droits de passage correspondant à l'utilisation de la surface sur laquelle est édifiée la route d'accès de la RT. 1 à Porwy et 7 FCFP pour l'utilisation de la zone de stockage et ses aménagements à venir, ainsi que l'aire de chargement en mer ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que l'assiette de la route utilisée par les exploitants miniers, initialement Mr M... puis par la suite la SMSP, se trouve pour partie sur la propriété de feu Marcel Y... et pour partie sur celle de Claude Y... ;
Que dans ces conditions, ce dernier peut légitimement prétendre à une part de la redevance, pour le moins au titre des droits de passage et de roulage sur sa propriété ;
Qu'enfin, force est de constater que les protocoles d'accord susmentionnés ne conditionnent pas la perception et la répartition de la redevance à une quelconque condition tenant au kilométrage parcouru sur l'une ou l'autre de ces deux propriétés ;
Qu'il n'est pas davantage contesté qu'à compter de 1990, feu Marcel Y... et son fils Claude Y... ont convenu d'une répartition de la redevance, soit 13 FCFP pour le premier et 7 FCFP pour le second ;
Que dès lors, les sommes ainsi perçues par Claude Y... constituent la légitime contrepartie d'une prestation contractuelle fournie ;
Que l'élément matériel du prétendu recel fait donc défaut et qu'il n'y a donc pas lieu de rapporter ces sommes à la succession ;
Que ce grief n'est pas fondé et sera donc écarté ;
C) sur le produit de la vente de la propriété de MOINDAH
Attendu que Mr Philippe X... prétend que les sommes perçues à la suite de la vente réalisée au profit de l'ADRAF ont été utilisées par Mr Claude Y... pour l'acquisition d'un bien immobilier situé dans le quartier de l'Anse Vata à NOUMEA ;
Que l'intéressé le conteste formellement et justifie au moyen d'une attestation établie par Mr Ismet I..., son beau-père, que lui-même et son épouse ont bénéficié d'une aide financière familiale ;
Qu'enfin, il fait valoir, sans être démenti sur ce point, que son épouse disposait de revenus confortables en sa qualité d'institutrice et de directrice d'école ;
Qu'au vu de ces éléments, force est de constater que Mr Philippe X... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe ;
Que l'élément matériel du prétendu recel fait donc défaut et qu'il n'y a donc pas lieu de rapporter ces sommes à la succession ;
Que ce grief n'est pas fondé et sera donc écarté ;
D) sur le rapport à la succession de la donation partage de 1972 :
Attendu que Mr Philippe X... reproche au Notaire d'avoir calculé le rapport de la donation du 29 mai 1972 à la valeur au jour de la donation-partage (pour la partie faisant différence entre les biens donnés) alors qu'il n'était pas encore né, qu'il n'était donc ni présent ni représenté et qu'il n'a donc pu bénéficier d'un lot et l'accepter ;
Qu'il soutient que ce mode de calcul ne respecte pas les dispositions des articles 1077, 1077-2 et 1078 du Code civil ;
Que ces textes concernent les donations-partages faites aux héritiers présomptifs ;
Qu'aux termes de l'article 1077 du Code civil, les biens reçus à titre de partage anticipé par un héritier réservataire présomptif s'imputent sur sa part de réserve, à moins qu'ils n'aient été donnés expressément hors part ;
Qu'aux termes de l'article 1077-2 du Code civil, les donations-partages suivent les règles des donations entre vifs pour tout ce qui concerne l'imputation, le calcul de la réserve et la réduction ;
Qu'aux termes de l'article 1078 du Code civil, nonobstant les règles applicables aux donations entre vifs, les biens donnés seront, sauf convention contraire, évalués au jour de la donation-partage pour l'imputation et le calcul de la réserve, à condition que tous les héritiers réservataires vivants ou représentés au décès de l'ascendant aient reçu un lot dans le partage anticipé et l'aient expressément accepté, et qu'il n'ait pas été prévu de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent ;
Que la Cour de Cassation considère que l'article 1078 est un texte d'exception dont les dispositions concernent exclusivement l'imputation et le calcul de la réserve, et non l'action en réduction pour laquelle l'article 1077-2 renvoie aux règles des donations entre vifs, spécialement à celles édictées par l'article 868 " ancien " (indemnité calculée d'après la valeur des biens à l'époque du partage et de leur état au jour où la libéralité a pris effet) ;
Attendu qu'en l'espèce, il ne peut être contesté qu'au jour du décès de l'ascendant, feu Marcel Y..., tous les héritiers réservataires (vivants ou représentés) avaient reçu un lot dans le partage anticipé et l'avaient expressément accepté (Claude Y... par acte du 29 mai 1972, Colette Y... par actes du 29 mai 1972 et du 1 er octobre 2003, Philippe X... par actes du 03 mai 2002 et du 08 janvier 2003) et qu'il n'a pas été prévu de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent ;
Que les deux conditions posées par ces dispositions étant remplies, c'est à juste titre que le Notaire a procédé au calcul du rapport de la donation du 29 mai 1972 à la valeur au jour de la donation-partage ;
Qu'au vu de ces éléments, il apparaît que Mr Philippe X... a fait une lecture erronée de ces dispositions ;
Que ce dernier grief n'est pas fondé et sera donc écarté comme les trois autres ;
****************************** Attendu qu'au vu des développements qui précèdent, toutes les critiques formulées par l'appelant ayant été écartées comme mal fondées, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ;
Déclare l'appel recevable en la forme mais mal fondé ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 janvier 2011 par le Tribunal de Première Instance de NOUMEA ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires comme mal fondées ;
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile condamne Mr Philippe X... à payer à Mr Claude Y... la somme de deux cent cinquante mille francs CFP (250. 000 FCFP) ;
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile condamne Mr Philippe X... à payer à Mme Colette Y... épouse A... la somme de deux cent cinquante mille francs CFP (250. 000 FCFP) ;
Condamne Mr Philippe X... aux entiers dépens de la procédure d'appel avec distraction d'usage au profit de la selarl. d'avocats BOISSERY-DI LUCCIO et de la selarl. d'avocats AGUILA-MORESCO, sur leurs offres de droits ;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nouméa
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/00137
Date de la décision : 30/08/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.noumea;arret;2012-08-30;11.00137 ?
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