RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/02354 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICVS
LM
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON
18 mai 2021
RG:11.20.0680
[J]
C/
[S]
Grosse délivrée
le
à Selarl Lamy Pomies Richaud
Me Tartanson
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section C
ARRÊT DU 11 JUILLET 2024
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 18 Mai 2021, N°11.20.0680
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre,
Mme Laure MALLET, Conseillère,
Madame Sandrine IZOU, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Avril 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Juin 2024 prorogé au 12 septembre 2024 puis avancé à ce jour..
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Mme [D] [P] , [W] [J]
née le 20 Octobre 1943 à [Localité 5] (06)
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/006149 du 09/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
INTIMÉ :
M. [K] [S]
né le 12 Mai 1940 à [Localité 4] (84)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Jacques TARTANSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON
Statuant après décision de réouverture des débats (arrêt n° 30)
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre, le 11 juillet 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 1er juillet 2013, M. [K] [S] a donné à bail à Mme [D] [J], un bien à usage d'habitation et une cour privative sis [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel de 670 € dont 20 € au titre de la provision sur charges, pour une durée de trois ans renouvelables.
M. [U] [J], aujourd'hui décédé, s'était porté caution solidaire des engagements de Mme [D] [J].
Par lettre redemandée avec accusé de réception du 19 juin 2020, M. [K] [S] a adressé à Mme [D] [J] une mise en demeure de payer la somme de 2'485 € au titre des loyers et des charges non payés entre les termes de mars 2019 et juin 2020.
Par exploit d'huissier de justice du 23 juillet 2020, M. [K] [S] a fait assigner Mme [D] [J] devant le tribunal judiciaire d'Avignon aux fins de voir notamment prononcer la résiliation judiciaire du contrat pour manquement par le locataire à son obligation de paiement des loyers et charges, l'expulsion de la locataire et la condamnation de cette dernière au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant égal au loyer, à compter de la date du prononcé de la résiliation du contrat jusqu'à la libération effective des lieux.
Par jugement contradictoire en date du 18 mai 2021, assorti de l'exécution provisoire de droit, le tribunal judiciaire d'Avignon a :
-déclaré recevable la demande de résiliation formée par M. [K] [S] concernant le contrat de bail consenti à Mme [D] [J] le 1er juillet 2013 pour le local d'habitation et la cour privative sis [Adresse 2]';
-condamné Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] au titre des loyers et charges impayés, la somme de 8'073 € décompte arrêté en 05 avril 202l et terme d'avril 2021 inclus ;
-prononcé la résiliation judiciaire du contrat de bail précité pour violation, par Mme [D] [J], de son obligation contractuelle de paiement des loyers et des charges aux termes convenus ;
-autorisé l'expulsion de Mme [D] [J] et de tous occupants de son chef des locaux précités, et dit qu'à défaut de départ volontaire, l'intéressée pourra être contrainte à l'expulsion avec, si besoin est, l'assistance de la force publique et d'un serrurier à la suite du délai légal de deux mois suivant la délivrance d'un commandement délivré par huissier de justice d'avoir à quitter les lieux ;
-dit qu'en cas d'expulsion il sera procédé en tant que de besoin à l'enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux, dont le sort sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-l et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
-condamné Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] une indemnité d'occupation mensuelle de 692 € somme forfaitaire charges comprises due à compter du 06 avril 202l et du terme de mai 2021 et jusqu'à, la libération définitive et effective des lieux par restitution des clés, payable sauf meilleur accord des parties le 5 de chaque mois';
-condamné M. [K] [S] à payer à Mme [D] [J] la somme de 545.90 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, correspondant au remboursement de la facture du 10 novembre 2016 à l'enseigne de [E] [C] et des chèques énergie pour les années 2018 et 2019';
-condamné Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] la somme de 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et ainsi que le commande l'équité';
-condamné Mme [D] [J] aux dépens.
Par déclaration du 18 juin 2021, Mme [D] [J] a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt contradictoire du 1er février 2024, la cour d'appel de Nîmes a':
-rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 10 août 2023,
-déclaré irrecevables les conclusions et pièces (pièces 49 à 64) de Mme [D] [J] notifiées le 31octobre 2023,
-annulé le jugement prononcé par le tribunal judiciaire d'Avignon du 18 mai 2021,
-dit que la dévolution s'opère pour le tout,
Avant dire droit sur le fond,
-ordonné la réouverture des débats,
-invité les parties à reformuler leurs prétentions au fond suite à l'annulation du jugement du tribunal judiciaire d'Avignon du 18 mai 2021,
-dit que la réouverture des débats est strictement limitée à la reformulation des demandes des parties en conséquence de l'annulation du jugement du 18 mai 2021 à l'exclusion de toute autre communication de pièces et de tout autre développement,
-fixé la clôture de la procédure au'7 mars 2024,
-renvoyé à l'audience collégiale de plaidoiries du 4 avril 2024 à 08h45,
-réservé les frais et les dépens.
Au terme de ses conclusions récapitulatives et sur réouverture des débats notifiées par RPVA le 1er mars 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, Mme [D] [J], appelante, demande à la cour, au visa de l'article 6 de la CEDH, de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 et des articles 1345-5 et 1240 du code civil,
Vu l'appel interjeté par Mme [J] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon le 18 mai 2021.
Vu l'arrêt rendu par la cour d'appel de Nîmes le 1er février 2024 prononçant l'annulation dudit jugement,
Statuant à nouveau,
-dire et juger que Mme [J] est débitrice malheureuse et de bonne foi.
Vu la proposition de règlement, et de garantie des membres de la famille de Mme [J] en proposant de réduire la durée du remboursement de 36 mois à 30 mois, portant ainsi les mensualités à 269 € outre un solde de 275 €.
Vu la nouvelle et dernière proposition de règlement, et de garantie des membres de la famille de Mme [J] en proposant de réduire la durée du remboursement à 24 mois,
Vu l'absence d'aggravation de la dette locative du fait de la reprise régulière du paiement des loyers depuis le mois de mai 2021,
-accorder à Mme [J] des délais de paiement dans la limite de 24 mois afin de régler l'arriéré de la dette locative fixée à 8 073 € avec une mention expresse qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à la date prévue le solde de la dette deviendra immédiatement exigible.
-dire que les virements seront effectués entre les mains de M. [S] le 1er de chaque mois,
-dire et juger n'y avoir lieu à prononcer la résiliation judiciaire du bail et à prononcer l'expulsion de Mme [J] avec les conséquences de droit.
-condamner M. [S] à payer à Mme [J] une somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.
-condamner en outre M. [S] à payer à Mme [J] la somme de 545.90 € correspondant au remboursement de la facture du plombier et des chèques Energie pour les années 2028 et 2019, cette créance étant non contestée et acceptée par M. [S] ;
-ordonner la compensation entre les créances respectives.
-écarter des débats l'attestation de M. [M] [V].
-à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour venait à prononcer la résiliation du bail et l'expulsion et la condamnation de Mme [J], pour les motifs ci-dessus développés accorder à Mme [J] des délais de paiements sur 30 mois pour apurer sa dette,
-de plus lui accorder un délai d'un an pour retrouver un logement et quitter les lieux au regard de la conjoncture et de l'absence de logements sociaux.
En tout état de cause,
-débouter M. [S] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
-dire qu'il serait inéquitable de condamner Mme [J] sur le fondement de l'article 700 compte tenu de sa situation actuelle ; la décharger de toute condamnation à ce titre,
-condamner M. [S] aux dépens qui seront recouvrés comme en matière d'Aide juridictionnelle ;
Mme [D] [J] soutient, à l'appui de ses écritures, être débitrice malheureuse de bonne foi invoquant notamment l'absence d'aggravation de la dette locative, ayant repris depuis mai 2021 le paiement du loyer'.
Elle explique avoir mis en place un ordre de virement permanent du loyer et avoir relancé son propriétaire, à plusieurs reprises pour la signature d'un plan d'apurement, sans jamais obtenir son accord.
Elle considère être bien fondée à solliciter l'application des dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 eu égard à sa bonne foi, à sa situation financière, à celle du bailleur ainsi qu'aux garanties de paiement qu'elle présente, étant précisé qu'elle a sollicité auprès de la commission de médiation DALO du Vaucluse une demande de logement social qui a été régulièrement enregistrée, ainsi qu'une demande de logement social déposée au CCAS [Localité 4]. Elle ajoute qu'elle souffre de pathologies chroniques notamment une dépression qui est la conséquence directe du jugement d'expulsion du 18 mai 2021 prononcé à son encontre.
Elle indique enfin, à l'appui de sa demande de dommages et intérêts, qu'elle rapporte la preuve d'un comportement malveillant, diffamatoire, dénigrant et discriminatoire de M. [S] à son égard puisqu'elle est traitée différemment des autres locataires, notamment après le prononcé du jugement déféré.
M. [K] [S], en sa qualité d'intimé, par conclusions en date du 15 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, des articles 1345-5 et 1240 du code civil, et de l'article 1184 ancien du code civil, de':
-prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail pour violation par Mme [D] [J] de son obligation contractuelle de paiement des loyers et des charges aux termes convenus,
-ordonner l'expulsion de Mme [D] [J] et de tout occupant de son chef des locaux et juger qu'à défaut de départ volontaire, l'intéressée pourra être contrainte à l'expulsion avec si besoin est l'assistance de la force publique et d'un serrurier à la suite du délai légal de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à quitter les lieux.
-condamner Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S], au titre des loyers et charges impayés, la somme de 8 073 € selon décompte arrêté au 5 avril 2021.
-condamner Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] une indemnité d'occupation mensuelle de 692 € à compter du 6 avril 2021 jusqu'à la libération définitive effective des lieux par la restitution des clés, payable sauf meilleur accord des parties le 5 de chaque mois.
-condamner Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
-condamner Mme [D] [J] au paiement des dépens.
A l'appui de ses écritures, M. [K] [S] entend faire constater que les manquements de la locataire sont avérés et au surplus non contesté, justifiant la résiliation judiciaire du contrat de bail pour manquement par le preneur à son obligation de paiement du loyer et des charges.
S'agissant des demandes de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire, il indique que le bail litigieux ne contient pas de clause résolutoire et que les dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 ne peuvent donc trouver application.
Il fait valoir que l'article 1343-5 du code civil est dès lors applicable au cas d'espèce mais dont le bénéfice ne peut être accordé à Mme [J] puisque les délais de paiement ont pour objet de permettre au locataire d'apurer un arriéré de loyer né de difficultés ponctuelles de paiement alors que Mme [J] est confrontée à une réelle insuffisance de revenus.
Il explique qu'il est manifestement établi que Mme [J] ne dispose pas des revenus nécessaires pour s'acquitter du paiement du loyer, les délais de paiement susceptibles d'être accordés étant inopérants pour remédier à cette incapacité. Il précise à cet égard que la reprise du paiement des loyers n'est pas de nature à remettre en cause le montant conséquent de la dette locative, et ne démontre pas la capacité de la locataire à honorer l'arriéré locatif en sus du paiement du loyer et des charges courantes.
Il ajoute par ailleurs que les différents problèmes médicaux dont se prévaut Mme [J] ne peuvent la dispenser de son obligation principale de payer les loyers dont l'inexécution repose exclusivement sur une insuffisance de revenus.
Il indique qu'il n'a pas d'opposition de principe à établir pour la CAF un plan d'apurement de la dette locative mais refuse de signer un plan qui ne lui offre pas plus de garantie de règlement des loyers par la locataire que les précédentes propositions d'apurement de l'arriéré locatif.
Il conclut enfin au rejet de la demande de dommages et intérêts puisque Mme [J] ne démontre pas l'existence ni d'une quelconque faute à son encontre ni d'actes malveillants.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande résiliation judicaire du bail et ses conséquences,
M. [S] demande le prononcé de la résolution du bail pour défaut de paiement des loyers et non sa constatation par le jeu de la clause résolutoire après commandement de payer demeurer infructueux en application de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, d'autant que le bail liant les parties ne contient pas de clause résolutoire.
Dès lors, l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 n'est pas applicable.
Selon l'article 1184 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 applicable en l'espèce « la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas le contrat ne peut être résolu de plein droit, elle doit être demandée en justice. »
En application de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 et de l'article 1728 du code civil, les locataires sont obligés de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.
En l'espèce, il ressort des décomptes produits par M. [S], que Mme [J] ne conteste pas, que celle-ci est redevable à son égard de la somme de 8 073 €, terme d'avril 2021 inclus et décompte arrêté au 5 avril 2021 au titre des loyers et charges impayées, somme reconnue par l'appelante.
En conséquence, Mme [J], pendant de nombreux mois, a manqué à son obligation de payer les loyers engendrant une dette locative conséquente.
Ces manquements graves et répétés du locataire à son obligation de payer le loyer justifient la résiliation du bail qui sera prononcée à compter du présent arrêt.
Mme [J] étant occupante sans droit ni titre à compter du présent arrêt, son expulsion sera ordonnée et une indemnité d'occupation égale à 692 €, montant de l'actuel loyer, sera fixée à compter du présent arrêt et cela jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clefs, payable le 5 de chaque mois, M. [S] ne justifiant pas du motif le conduisant à solliciter la date du premier de chaque mois d'autant que le contrat de bail stipulait le 5 de chaque mois.
Sur l'arriéré locatif,
Comme indiqué ci -avant, Mme [J] est redevable de la somme de 8073 €, terme d'avril 2021 inclus et décompte arrêté au 5 avril 2021 au titre des loyers et charges impayées.
Elle ne conteste pas la dette.
Elle sera en conséquence condamnée à payer à M. [S] cette somme.
Il y lieu de rappeler que Mme [J] s'acquitte de ses loyers depuis mai 2021.
Sur la demande de Mme [J] au titre de son préjudice matériel correspondant au remboursement de la facture du 10 novembre 2016 à l'enseigne de [E] [C] et des chèques énergie pour 2018 et 2019,
Mme [J] justifie des frais de plomberie qu'elle a avancés pour M. [S] et qui correspondent au devoir d'entretien du bailleur, par la production de la facture du 10 novembre 2016 à l'enseigne de [E] [C] d'un montant de 207,90 € non contestée par l'intimé.
Par ailleurs M. [S] ne conteste pas plus et accepte de rembourser la somme de 338 € au titre du non- encaissement de ses chèques énergie des années 2018 et 2019.
En conséquence, M. [S] sera condamné à payer à Mme [J] la somme de 545,90 € (207,90 + 338 ) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel causé à celle-ci.
La compensation sera ordonnée entre cette somme et celle due par Mme [J] au titre de l'arriéré locatif.
Sur la demande de délais de paiement,
Selon l'article 1343-5 du code civil «'compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut dans la limite de 2 années échelonner le paiement des sommes dues.'»
En l'espèce, même si la dette est conséquente (7527,10 € après compensation), il convient de noter que Mme [J] a, à plusieurs reprises, proposé à M. [S] un plan d'apurement mais surtout a repris le paiement du loyer courant depuis mai 2021, soit depuis plus de 3 ans sans incident.
Par ailleurs, les membres de sa famille se sont engagés à venir en aide à l'appelante par des versements mensuels réguliers de 336 € et la mise en place d'un virement permanent.
Dans ces circonstances et en l'état de l'expulsion ci-avant ordonnée, le montant de la dette ne peut s'aggraver.
Il sera en conséquence fait droit à la demande de délai de paiement sur 24 mois selon les modalités décrites au présent dispositif mais il sera précisé qu'à défaut de règlement d'une mensualité à son échéance, l'intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible.
Sur la demande de délai pour quitter les lieux,
Selon l'article L 412-3 du code des procédures civiles d'exécution'«'Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.'»
Selon l'article L 412-4 du même code «'La durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.'»
En l'espèce, Mme [J] est âgée de 80 ans et son état de santé est fragile.
Par ailleurs, Mme [J] a entamé des diligences afin de pouvoir se reloger et ses moyens financiers demeurent limités.
En effet, elle a déposé une demande de logement social le 4 juin 2021 et est assistée dans ses démarches par le CCAS [Localité 4].
Enfin il convient de rappeler que l'appelante s'acquitte du loyer courant.
Ces circonstances justifient de lui accorder un délai de 6 mois pour quitter les lieux à compter de la signification de la présente décision.
Sur la demande de dommages et intérêts,
Selon l'article 1240 du code civil «'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.'»
Mme [J] soutient que M. [S] a un comportement malveillant et discriminatoire à son égard et est traitée différemment des autres locataires en ce que M. [S] lui a refusé après trois ans d'utilisation l'accès à l'eau du puits pour arroser son jardin'; qu'elle a subi sept crevaisons successives dans la cour commune pourtant fermée par une grille et dont seuls trois locataires disposent du bip'; et enfin que l'intimé a un comportement diffamatoire et dénigrant à son égard depuis le prononcé du jugement de première instance.
Elle sollicite que soit écartée l'attestation de M. [M] [V], cette attestation ne respectant pas les conditions de l'article 202 du code de procédure civile et ce dernier n'ayant pas les capacités de rédiger à son initiative et de son plein gré une attestation quelle qu'elle soit.
Cependant, Mme [J] n'explique pas en quoi l'irrégularité constatée constitue l'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
Par ailleurs, il appartient à la cour d'apprécier si l'attestation non conforme à l'article 202 du code de procédure civile présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction.
Or, Mme [J] contente de procéder par affirmation sur les capacités de M. [M] [V] alors même que les termes de l'attestation sont simples et objectifs.
Il n'y a donc pas lieu d'écarter cette attestation des débats.
Concernant l'accès à l'eau, le bail ne prévoyant pas ce droit, le bailleur pouvait mettre fin à cette tolérance sans commettre de faute.
Concernant les crevaisons, elles sont effectivement établies par l'attestation de M. [I] et les factures des réparations produites aux débats mais leur imputabilité à M. [S] ne repose que sur des suppositions sans aucun élément de preuve objectif.
Enfin, les écarts de langage de M. [S] et le comportement de Mme [J] résultant de l'attestation de M. [Y] s'inscrivent dans un contexte conflictuel de litige locatif et de proximité ne pouvant caractériser une faute.
En conséquence, Mme [J] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires,
En application de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [D] [J] supportera les dépens de première instance et d'appel.
Il n'est pas inéquitable de laisser supporter à M. [K] [S] leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel. Il sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile, et en dernier ressort,
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 1 er février 2024 qui a annulé le jugement prononcé par le tribunal judiciaire d'Avignon du 18 mai 2021 et dit que la dévolution s'opère pour le tout,
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de bail du 1er juillet 2013 à compter du présent arrêt,
Constate que Mme [D] [J] est sans droit ni titre,
Ordonne l'expulsion de Mme [D] [J] ainsi que celle de tous occupants de son chef, le cas échéant, avec l'assistance de la Force Publique et d'un serrurier,
Accorde un délai de 6 mois à Mme [D] [J] à compter de la signification du présent arrêt pour quitter les lieux,
Condamne Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] une indemnité d'occupation mensuelle de 692 € à compter du présent arrêt et jusqu'à la libération définitive et effective des lieux par restitution des clés, payable, sauf meilleur accord des parties, le 5 de chaque mois ;
Condamne Mme [D] [J] à payer à M. [K] [S] la somme de 8.073 €, décompte arrêté au 5 avril 2021 et terme d'avril 2021 inclus, au titre des loyers et charges impayés,
Condamne M. [K] [S] à payer à Mme [D] [J] la somme de 545,90 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, correspondant au remboursement de la facture du 10 novembre 2016 à l'enseigne de [E] [C] et des chèques énergie pour les années 2018 et 2019,
Ordonne la compensation entre ces deux sommes,
Autorise Mme [D] [J] à se libérer de sa dette par 24 versements mensuels de 336 €, le premier devant intervenir le 1er du mois suivant la signification de la présente décision et le dernier étant augmenté ou minoré du solde de la dette en principal, intérêts et frais,
Dit qu'à défaut de règlement d'une mensualité à son échéance, l'intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible,
Dit n'y avoir lieu à écarter des débats l'attestation de M. [M] [V],
Déboute Mme [D] [J] de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne Mme [D] [J] aux dépens de première instance et d'appel, étant précisé qu'elle bénéficie de l'aide juridictionnelle totale.
Déboute M. [K] [S] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,