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27/06/2024 | FRANCE | N°22/03579

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 27 juin 2024, 22/03579


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS































ARRÊT N°



N° RG 22/03579 -

N° Portalis DBVH-V-B7G-ITUI



AG



TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NÎMES

22 octobre 2022

RG : 22/01099



[D]



C/



[R]









































Grosse délivrée

le 27/06/2024

à Me Philippe Hilaire-Lafon











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre





ARRÊT DU 27 JUIN 2024





Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 22 octobre 2022, N°22/01099



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/03579 -

N° Portalis DBVH-V-B7G-ITUI

AG

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NÎMES

22 octobre 2022

RG : 22/01099

[D]

C/

[R]

Grosse délivrée

le 27/06/2024

à Me Philippe Hilaire-Lafon

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 27 JUIN 2024

Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 22 octobre 2022, N°22/01099

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,

Mme Delphine Duprat, conseillère,

Mme Audrey Gentilini, conseillère,

GREFFIER :

Mme Nadège Rodrigues, greffière, lors des débats, et Mme Audrey Bachimont, greffière, lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 juin 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

M. [C] [D]

né le 29 novembre 1995 à [Localité 9]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Philippe Hilaire-Lafon, avocat au barreau de Nîmes

INTIMÉ :

M. [Z] [R]

né le 26 mai 1991 à [Localité 7]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Assigné par PV 659 du code de procédure civile le 4 janvier 2023

Sans avocat constitué

ARRÊT :

Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 27 juin 2024, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Suivant acte reçu le 27 novembre 2020 par Me [V], notaire à [Localité 8], M. [Z] [R] a vendu à M. [C] [D] :

- un immeuble à usage de rapport de 4 logements 1 rue Tournante, cadastré section BH n°[Cadastre 2],

- une maison à usage d'habitation [Adresse 4], cadastrée section BH n°[Cadastre 3],

tous deux situés à [Localité 8], moyennant le prix de 293 000 euros.

L'acquéreur excipant du mauvais état de l'installation électrique et d'infiltrations en toiture, a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Nîmes qui, par ordonnance du 5 mai 2021, a instauré une mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [N].

L'expert a déposé son rapport définitif le 17 mars 2022.

Par acte du 8 mars 2022, il a ensuite assigné le vendeur afin de :

- voir prononcer la résolution du contrat de vente pour dol, vices cachés et exécution déloyale des conventions

- le voir condamner au paiement des sommes de :

- 293 000 euros au titre du prix de vente des immeubles avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2020,

- 16 355 euros au titre de l'impôt sur la mutation avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2020,

- 30 000 euros en réparation du préjudice complémentaire (perte de revenus locatifs, frais de fonctionnement, impôts, préjudice moral et matériel),

- 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

devant le tribunal judiciaire de Nîmes qui par jugement réputé contradictoire du 17 octobre 2022 l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et condamné aux dépens.

Par déclaration du 07 novembre 2022, M. [D] a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 17 janvier 2023, la procédure a été clôturée le 7 mai 2024 et l'affaire fixée à l'audience du 21 mai 2024.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions notifiées par voie électronique le 2 décembre 2022, M. [C] [D] demande à la cour

- d'annuler le jugement rendu le 17 octobre 2022 par le tribunal judiciaire de Nîmes,

et après évocation

- de juger nul pour dol, vices cachés et exécution déloyale le contrat de vente conclu le 27 novembre 2020,

- de prononcer la résolution de ce contrat,

- de condamner M. [Z] [R] à lui payer les sommes de :

- 293 000 euros au titre du prix de vente des immeubles avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2020,

- 16 355 euros au titre de l'impôt sur la mutation avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2020,

- 30 000 euros en réparation du préjudice complémentaire (perte de revenus locatifs, frais de fonctionnement, impôts, préjudice moral et matériel),

- 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

- de le condamner aux dépens.

L'appelant soutient :

- que le premier juge a commis un déni de justice en rejetant l'ensemble de ses demandes,

- que le vendeur a fait des déclarations mensongères constitutives de dol,

- que l'immeuble est atteint de vices cachés que le vendeur ne pouvait ignorer dès lors qu'il l'a construit lui-même,

- qu'il a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle de droit commun, l'annulation étant encourue sur le fondement des articles 1217 et suivants du code civil.

La déclaration d'appel a été signifiée à l'intimé défaillant, par acte du 4 janvier 2023.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande d'annulation du jugement

Les règles prescrites à peine de nullité du jugement sont énoncées par l'article 458 du code de procédure civile et comprennent notamment l'obligation de motivation édictée par l'article 455 du même code.

Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs.

Toutefois, le juge n'est pas tenu de répondre à des moyens formulés de manière imprécise.

Pour débouter le requérant de l'intégralité de ses demandes, le tribunal, au visa des articles 4 et 5 du code de procédure civile, a noté qu'articulant ses prétentions tout à la fois sur le dol, la garantie des vices cachés et l'exécution déloyale des conventions il n'avait pas précisé sur quel fondement juridique il agissait à titre principal.

Il a considéré que ces fondements étaient différent, n'avaient pas la même portée juridique et ne pouvaient être invoqués tous à la fois sans être hiérarchisés.

Il a jugé que la demande était imprécise et ne lui permettait pas de connaître l'objet du litige qui lui était soumis.

L'appelant demande la résolution de la vente, en soutenant trois moyens différents, expressément visés dans ses écritures.

Aucune disposition textuelle n'impose aux parties de hiérarchiser les moyens développés au soutien d'une demande.

Lorsqu'une partie choisit de les hiérarchiser, il incombe au juge de respecter cette hiérarchisation.

Si elle ne les hiérarchise pas, le juge doit tous les examiner et dans l'hypothèse où ils seraient tous de nature à justifier la résolution demandée, il doit choisir celui qui lui paraît le mieux à même de régler le litige.

Dès lors, il ne pouvait être reproché à M. [D] une quelconque imprécision de sa demande faute de hiérarchisation de ses moyens.

L'objet du litige était circonscrit par ses prétentions et le premier juge, en le déboutant de ses demandes sans examiner les moyens développés à leur soutien, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Le jugement doit en conséquence être annulé et il revient à la cour, en application de l'article 562, alinéa 2, du code de procédure civile, de statuer de nouveau sur le tout.

Sur la demande de nullité de la vente pour dol

Selon l'article 1137 du code civil, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.Il peut également résulter du silence conservé par une partie, dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter.

L'appelant reproche à son vendeur d'avoir faussement et mensongèrement :

- déclaré ne pas avoir réalisé des travaux de gros 'uvre,

- déclaré que l'un des immeubles était composé de quatre appartements alors qu'il n'en avait déclaré qu'un seul au service de l'urbanisme

- déclaré que l'autre appartement était intégralement rénové et qu'il avait fait procéder à son aménagement intérieur.

Sur le premier point, l'acte de vente stipule page 14

« le VENDEUR déclare qu'à sa connaissance :

aucune construction ou rénovation n'a été effectuée dans les dix dernières années

aucun élément constitutif d'ouvrage ou équipement indissociable de l'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil n'a été réalisé dans ce délai. »

Le paragraphe suivant intitulé « Existence de travaux » mentionne que le vendeur « déclare que des travaux de plomberie, électricité, isolation, aménagement intérieur ont été effectués par

- le VENDEUR lui-même.

- Le VENDEUR déclare qu'il n'y a pas eu de travaux effectués sur le gros 'uvre, qu'il n'y a pas de ce fait de garantie décennale ».

L'expert désigné en référé a conclu que les deux immeubles objet de la vente sont situés dans le centre historique remarquable de la ville de [Localité 8], qui fait l'objet de protections patrimoniales et architecturales particulières. Il a constaté « la réalisation de travaux récents modifiant l'aspect extérieur de la construction (terrasse créée en toiture, menuiseries PVC) » et « la réalisation de travaux touchant la structure de l'immeuble (création de mezzanine soutenue par des piliers) et qualifié cette création de « travaux de gros 'uvre ».

La preuve est ainsi rapportée que des travaux de gros 'uvre ont été réalisés par l'intimé, contrairement aux allégations de celui-ci.

Toutefois, il s'agit de travaux apparents, et l'acheteur a nécessairement pu constater la réalisation de ces ouvrages lors des visites effectuées avant l'acquisition, de sorte qu'aucun mensonge constitutif de dol ne peut être reproché au vendeur à ce titre.

Sur le deuxième point, l'annonce afférente à l'immeuble [Adresse 1] le décrit comme « composé de quatre appartements » et l'acte de vente comme « un bâtiment à usage de rapport de quatre logements ».

Le fait que cet immeuble a été déclaré comme constituant un seul logement au service de l'urbanisme de la commune n'a aucune influence sur ses caractéristiques réelles, qui étaient connues de l'acheteur.

S'il en résulte que le vendeur a modifié ces caractéristiques sans les déclarer aux services fiscaux et sans en informer l'acheteur de ce fait, l'appelant ne démontre pas en quoi cette information, seulement susceptibles d'avoir des répercussions fiscales, a été déterminante de son consentement.

Aucun dol ne peut être retenu de ce chef.

Sur le troisième point, l'annonce afférente à l'immeuble [Adresse 4] le décrit comme « une maison de village (') rénovée en totalité ».

L'expert désigné a conclu à l'existence de travaux récents et à la présence d'une installation électrique inachevée.

Toutefois, l'acheteur a pu se convaincre précisément de l'état de cet immeuble lors des visites préalables à la vente. En effet, les photographies prises par l'expert montrent des câbles électriques et des gaines sortant du compteur, ainsi que des murs et plafonds.

Ainsi, le fait que la rénovation n'était pas totalement achevée était clairement visible et il n'est pas établi, ni même d'ailleurs allégué, que le vendeur aurait dissimulé ces inachèvements pour tenter de tromper son acheteur.

Sur le dernier point, le vendeur a effectivement déclaré dans l'acte de vente avoir réalisé des aménagements intérieurs, aménagements qui sont réels, ce dont l'acheteur a pu se convaincre lors des visites préalables à l'acquisition. Le dol n'est pas davantage établi sur ce point.

L'acquéreur et appelant ne rapporte donc pas la preuve que le vendeur et intimé, par des man'uvres ou des mensonges, lui a dissimulé l'état réel des immeubles vendus ou leurs caractéristiques pour déterminer son consentement à la vente.

Sur la garantie des vices cachés

Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il incombe à l'acquéreur de rapporter la preuve de l'existence d'un vice inhérent à la chose, non apparent au moment de la vente et antérieur à celle-ci, et suffisamment grave pour rendre la chose impropre à son usage.

Aux termes de l'article 1643 du même code le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

En l'espèce, l'acte de vente stipule page 10 au paragraphe « état du bien »

« l'ACQUEREUR prend le BIEN dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le VENDEUR pour quelque cause que ce soit notamment en raison :

des vices apparents,

des vices cachés.

S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas :

si le VENDEUR a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, sauf si l'ACQUEREUR a également cette qualité,

ou s'il est prouvé par l'ACQUEREUR, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du VENDEUR ».

Ainsi, l'appelant doit-il ici prouver, outre que les quatre conditions nécessaires à la garantie des vices cachés sont réunies, que le vendeur avait connaissance des défauts invoqués ou qu'il avait la qualité de professionnel.

Il soutient à cet effet que les désordres relevés par l'expert sont constitutifs de vices cachés.

Ces désordres constatés sont :

« - l'absence de compteur individuel électrique et d'eau et des piquages non réglementaires ;

- une installation électrique inachevée et présentant de nombreuses anomalies ;

- la réalisation de travaux récents modifiant l'aspect extérieur de la construction (terrasse créée en toiture, menuiserie PVC) et vraisemblablement incompatibles avec les mesures de protection du centre historique ;

- la non-conformité des garde-corps ;

- la réalisation de travaux touchant la structure de l'immeuble (création de mezzanine soutenue par des piliers,'). »

Il ajoute que « le dernier désordre apparu est un grave problème sur bac à douche situé dans l'appartement [Adresse 10]. La structure bois le portant s'est avérée très dégradée et il a constaté :

- l'absence d'étanchéité du bac

- le pourrissement de la structure bois le portant

- la présence d'une plaque de plâtre non hydrofuge et non jointée

- la présence d'évacuation non-conforme (rupture de pente des écoulements). »

Les conclusions de l'expertise sont qu'il a été constaté :

« - un grand nombre de malfaçons, de non façons et de désordres ;

- que des travaux récents ne pourraient être régularisés vu les contraintes de ce site remarquable ;

- que des travaux récents concernent le gros 'uvre et affectent la stabilité des ouvrages ;

- que la plupart des vices étaient difficilement visibles pour un non-professionnel ».

Malgré ces constats peu précis de l'expert, qui use de termes très généraux sans détailler plus avant les « multiples non conformités réalisées », il s'avère que la création d'une mezzanine « portant sur un poteau béton récent dont la charge n'est pas reportée aux étages inférieurs génère un risque structurel », rend le bien impropre à sa destination comme l'affectant dans sa solidité.

Le vice affectant la douche diminue l'usage du bien, dès lors que celle-ci ne peut plus être utilisée, ce qui rend le bien inhabitable. Il ressort d'ailleurs du rapport d'expertise que l'appelant a été contraint de faire réaliser des travaux urgents afin de ne pas priver plus longtemps son locataire de cet équipement plus longtemps.

La non-conformité du garde-corps de la mezzanine, non décelable par un non-professionnel tel qu'en l'espèce M. [D], rend l'habitation du bien dangereuse et constitue également un vice caché.

La preuve de vices affectant les biens immobiliers est donc rapportée.

Ces vices résultant des travaux de rénovation réalisés par le vendeur sont antérieurs à la vente.

La clause d'exclusion de garantie prévue au contrat n'a ici pas vocation à s'appliquer, s'agissant de vices générés par des travaux réalisés par l'acheteur lui-même, qui est de ce fait réputé constructeur et donc en avoir eu connaissance.

En revanche, les travaux extérieurs modifiant l'aspect du bien ne constituent pas un tel vice, dès lors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'ils rendraient le bien impropre à son usage ou en diminueraient l'usage.

Les anomalies et non-conformités affectant l'installation électrique étaient pour la plupart apparentes, un simple examen visuel ayant permis à l'huissier de les constater.

Celles qui ne l'étaient pas étaient signalées dans le diagnostic de l'état de l'installation intérieure d'électricité fournie par le vendeur à l'acheteur avant la vente, ce qu'a relevé l'expert en concluant « les rapports de diagnostic remis à l'acheteur mentionnaient des non-conformités sur l'installation électrique » et « ce point aurait dû attirer l'attention de l'acheteur ».

Enfin, s'agissant des désordres décrits dans une attestation non datée et dactylographiée, non conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, relatifs :

- à une tache au plafond faisant penser à une infiltration de la toiture

- au compteur d'électricité caché et inaccessible

- au chauffe-eau inaccessible qui n'est pas dans l'appartement

- à un problème de prise de terre

- à une moisissure au niveau de la fenêtre

- à un problème de robinet dans la cuisine et dans la salle de bains,

ils ne peuvent être qualifiés de vices cachés, soit parce qu'ils étaient apparents lors de la vente ou en mesure de l'être à la lecture du diagnostic (tache au plafond, problèmes électriques, compteur et chauffe-eau non accessibles, moisissures), soit parce qu'ils ne sont pas suffisamment graves (robinets).

Enfin, l'expert n'a constaté aucun problème d'infiltration d'eau en toiture.

Sur l'exécution déloyale des conventions

Selon l'article 1217 du code civil, sur lequel l'appelant fonde sa demande, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut provoquer la résolution du contrat.

S'agissant d'un contrat de vente, le vendeur est tenu à une obligation de délivrance et à une obligation de garantie, résultant de l'article 1603 du code civil.

Les annonces publiées lors de la mise en vente des biens immobiliers litigieux les décrivaient ainsi :

'- un immeuble composé de quatre appartements dont un studio de 30 m2 loué, d'un T2 à rénover en totalité avec toit terrasse et d'un T4, d'un garage et d'une cour commune ;

- une maison de village rénovée en totalité en un appartement au 1er étage loué actuellement, un loft au 2ème étage et un garage et un atelier au rez-de-chaussée.'

Il ressort de l'acte de vente, du constat d'huissier et du rapport d'expertise que les biens vendus correspondent à cette description, et l'acheteur ne peut donc se prévaloir d'aucune non-conformité aux stipulations contractuelles, étant rappelé que si la maison n'était pas totalement rénovée, cette non-conformité était apparente.

La responsabilité contractuelle du vendeur intimé ne peut être engagée sur ce fondement, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'il n'a pas respecté son obligation de délivrance.

Quant à l'obligation de garantie, elle couvre la possession paisible de la chose vendue et les défauts cachés de la chose.

Il résulte des développements précédents que le vendeur intimé a ici manqué à cette obligation en livrant des immeubles affectés de vices caché, de sorte que sa responsabilité contractuelle est engagée.

Le manquement au devoir de loyauté invoqué, qui est une obligation générale dans la conclusion et l'exécution de tout contrat, n'est pas développé par l'appelant mais le fait d'avoir connaissance de vices affectant la chose vendue et de ne pas les révéler à l'acheteur constitue un manquement à ce devoir et l'une des conditions de la responsabilité du vendeur.

Sur la nullité du contrat et sa résolution

A titre liminaire, il est rappelé que la sanction du dol est la nullité du contrat et celle de la garantie des vices cachés, et plus largement des manquements aux obligations contractuelles, sa résolution éventuelle.

En l'absence ici de preuve de dol, la nullité du contrat ne peut être prononcée et l'appelant sera en conséquence débouté de sa demande à ce titre.

Aux termes de l'article 1644 du code civil, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

Le choix entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire lui appartient, sans qu'il ait à le justifier.

En l'espèce, l'acquéreur a ici fait le choix, au titre de la garantie des vices cachés, de solliciter la résolution du contrat, dans le cadre de l'action rédhibitoire.

La preuve de l'existence de vices cachés au sens de l'article 1641 étant rapportée, il sera fait droit à cette demande par voie d'infirmation du jugement et la résolution du contrat de vente conclu le 27 novembre 2020 sera prononcé, M. [R] étant par conséquent condamné à restituer à M. [D] le prix de vente du bien, soit la somme de 293 000 euros.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Aux termes de l'article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Sur la demande au titre de l'impôt sur la mutation

L'acte authentique de vente énonce que M. [D] a réglé au titre de l'impôt sur la mutation une taxe départementale de 12 675 euros, une taxe communale de 3380 euros et des frais d'assiette de 300 euros, soit au total la somme 16 355 euros.

En application de l'article 1961 alinéa 2 du code général des impôts, cette somme ne lui sera restituable qu'au jour où le présent arrêt sera passé en force de chose jugée, s'agissant de la résolution d'un acte de vente pour vice caché.

L'appelant ne peut donc aujourd'hui prétendre à être indemnisé à ce titre par le vendeur, en l'absence de caractère encore certain de ce préjudice.

Sur la demande au titre du préjudice complémentaire

L'appelant sollicite le paiement d'une somme au titre de la perte de revenus locatifs, de frais de fonctionnement, d'impôts, d'un préjudice moral et matériel « de toutes sortes », exposant que du fait de la mauvaise foi du vendeur, il a dû supporter les échéances de crédit sans pouvoir percevoir de loyer compte tenu de l'état de l'immeuble.

Il ne verse aux débats aucune pièce permettant d'étayer la réalité des préjudices allégués, et sera par conséquent débouté de sa demande.

Sur les autres demandes

L'intimé, qui succombe, devra supporter les dépens de l'entière procédure.

Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge de l'appelant les frais engagés par lui et non compris dans les dépens. M. [R] sera condamné à lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Annule le jugement rendu le 17 octobre 2022 par le tribunal judiciaire de Nîmes,

Vu l'effet dévolutif de l'appel

Déboute M. [C] [D] de sa demande de nullité du contrat de vente,

Prononce la résolution de la vente conclue le 27 novembre 2020 selon acte reçu par Me [F] [V], notaire à [Localité 8], entre M. [Z] [R] et M. [C] [D] portant sur les biens immobiliers situés à [Localité 8] :

- 1 rue Tournante cadastré section BH n°[Cadastre 2],

- et [Adresse 4] cadastré section BH n°[Cadastre 3].

Condamne M. [Z] [R] à payer à M. [C] [D] la somme de 293 000 euros au titre de la restitution du prix de vente,

Déboute M. [C] [D] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'impôt sur la mutation,

Déboute M. [C] [D] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice complémentaire,

Condamne M. [Z] [R] aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne M. [Z] [R] à payer à M. [C] [D] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par le présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/03579
Date de la décision : 27/06/2024
Sens de l'arrêt : Annulation

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;22.03579 ?
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