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13/06/2024 | FRANCE | N°23/03707

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 13 juin 2024, 23/03707


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

































ARRÊT N°



N° RG 23/03707 -

N° Portalis DBVH-V-B7H-JANB



ID



TJ DE NIMES

26 octobre 2023

RG:21/03761



Association [48]



C/



[Z]

[HL]

[HL]

[B]

[CY]

[B]

[CY]

[B]

[B]













Grosse délivrÃ

©e

le 13/06/2024

à Me Georges Pomies Richaud

à Me Romain Floutier













COUR D'APPEL DE NÃŽMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre





ARRÊT DU 13 JUIN 2024





Décision déférée à la cour : ordonnance du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 26 octobre 2023, N°21/03761



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Isa...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/03707 -

N° Portalis DBVH-V-B7H-JANB

ID

TJ DE NIMES

26 octobre 2023

RG:21/03761

Association [48]

C/

[Z]

[HL]

[HL]

[B]

[CY]

[B]

[CY]

[B]

[B]

Grosse délivrée

le 13/06/2024

à Me Georges Pomies Richaud

à Me Romain Floutier

COUR D'APPEL DE NÃŽMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 13 JUIN 2024

Décision déférée à la cour : ordonnance du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 26 octobre 2023, N°21/03761

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,

Mme Delphine Duprat, conseillère,

Mme Audrey Gentilini, conseillère,

GREFFIER :

Mme Nadège Rodrigues, greffière, lors des débats, et Mme Audrey Bachimont, greffière, lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

L'association [48]

Association Loi 1901 enregistrée sous le N° Siret [N° SIREN/SIRET 34] prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité

[Adresse 29]

[Localité 31]

Représentée par Me Georges Pomies Richaud de la Selarl Cabinet Lamy Pomies-Richaud avocats associés, postulant, avocat au barreau de Nîmes

Représentée par Me Louis Sayn Urpar, plaidant, avocat au barreau de Tarascon

INTIMÉS :

Mme [XS] [PE] [OZ] [AC] [Z] épouse [WE]

née le [Date naissance 30] 1947 à [Localité 14]

[Adresse 43]

[Localité 14]

M. [K] [O] [HL]

né le [Date naissance 40] 1983 à [Localité 14]

[Adresse 56]

[Adresse 56]

[Localité 38]

M. [L] [U] [IU] [SP] [HL]

né le [Date naissance 28] 1980 à [Localité 14]

[Adresse 2]

[Localité 32]

Mme [KC] [LF] [G] [B] épouse [TT]

née le [Date naissance 41] 1949 à [Localité 52]

[Adresse 17]

[Localité 42]

Mme [GI] [GD] [LF] [CY] épouse [WJ]

née le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 51]

[Adresse 49]

[Localité 21]

Mme [F] [FY] [LF] [B] épouse [TN]

née le [Date naissance 16] 1953 à [Localité 52]

[Adresse 18]

[Localité 37]

M. [YV] [N] [JX] [CY]

En qualité d'ayant-droit de Mme [ZA] [CY] née [E] - décédée

né le [Date naissance 7] 1955 à [Localité 51]

[Adresse 39]

[Localité 13]

M. [O] [IU] [EV] [B]

né le [Date naissance 36] 1956 à [Localité 52]

[Adresse 35]

[Localité 1]

Mme [J] [LF] [VG] [B]

née le [Date naissance 19] 1958 à [Localité 52]

[Adresse 46]

[Localité 37]

Représentés par Me Romain Floutier de la Scp Fontaine et Floutier associés, avocat au barreau de Nîmes

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 13 juin 2024,par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

[RC] [TY]-[V], aumônier militaire, est décédé le [Date décès 24] 1960, alors qu'il avait consenti au visa de l'article 112 de la loi de finances du 29 avril 1926 à l'attribution à l'association [48] :

- par acte notarié des 12 avril et 14 mai 1927 de la propriété d'une villa à [Localité 31], jardin de [Adresse 53] et d'un domaine à [Localité 45] (Gard) dit [Adresse 50] 'sous la condition résolutoire expresse et spéciale que les immeubles ci-dessus désignés continueront de servir à perpétuité à usage de maison de campagne et d'agrément à Monseigneur l'Évêque de [Localité 31]',

- par acte authentique du 09 décembre 1927, de la propriété d'un immeuble sis à [Localité 47] (83) 'sous la condition résolutoire expresse et spéciale que l'immeuble désigné ci-dessus continuera de servir à perpétuité à usage de presbytère pour les ministres de l'Église catholique apostolique et romaine'.

Le cabinet de recherche d'héritiers et de généalogie [M] [FA] a ensuite été chargé par Me [NW] [WO], notaire à [Localité 31], de retracer la dévolution successorale de [RC] [TY]-[V] aux fins de lui permettre d'entreprendre le réglement de la succession de celui-ci.

L'association [48] a par actes des 9, 13, 14, 19, 20, 21 et 26 septembre 2016, assigné, après qu'ils ont ainsi été identifiés, Mmes et MM. [D] [Z], [RH] [T], [S] et [IU] [C], [LA] [X], [BP] [P], [MI], [SK] et [IU] [Y], [J], [O] et [CT] [B], [HG] [I], [DH] [IO], [LK] [NR], [LF] [CY], [KC] [TT], [R] [JS], [F] [TN], [H] et [DS] [VB], [EP] [HL], (qui s'est révélée être décédée le [Date décès 23] 2016), [XS] [WE] et le procureur de la République de Nîmes, aux fins d'être autorisée sur le fondement des articles 900-2 à 900-5 du code civil à élargir les activités initialement prévues pour l'usage de la villa de Nîmes et à vendre celle-ci si les circonstances venaient à l'exiger, et à vendre le bien immobilier situé à [Localité 47] aux fins de financer l'amélioration des presbytères et la création et l'aménagement de maisons paroissiales du ressort du doyenné Vallée du Rhône ou l'amélioration des logements au bénéfice des prêtres en retraite, devant le tribunal de grande instance de Nîmes, qui par jugement réputé contradictoire du 5 décembre 2019, seuls Mme [KC] [TT], Mme [F] [TN] et M. [O] [B] ayant comparu :

- a ordonné la révocation des deux actes notariés portant donation en dates des 12 avril et 14 mai 1927 et du 9 décembre 1927,

- a ordonné à l'association [48] de faire retour aux ayants droit de [RC] [TY]-[V] des biens immobiliers légués par actes notariés des 12 avril 1927, 14 mai 1927, et 9 septembre 1927 dont elle est encore propriétaire, à savoir :

- l'immeuble dit '[Adresse 62]', sis [Adresse 20] ;

- l'immeuble dit 'Presbytère de [Localité 47]', sis [Adresse 12] à [Localité 47] ;

- a ordonné la publication de la décision à intervenir au service de la publicité foncière conformément aux dispositions de l'article 28 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière,

- a condamné l'association [48] à payer à M. [O] [B] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée à payer à l'ensemble des concluants la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux entiers dépens.

L'association [48] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 25 février 2020.

Par arrêt de défaut du 31 mars 2022, cette cour d'appel :

- a déclaré recevables les interventions volontaires de Mmes et M. [W] [CY] épouse [MN], [YV] [CY] et [GI] [CY] épouse [WJ],

- a déclaré irrecevables les deux prétentions figurant aux conclusions signifiées le 22 juillet 2021 tendant à voir autoriser l'association [48] à élargir et à affecter à l'ensemble de ses activités définies par son objet social l'usage des biens immobiliers sis à [Localité 31] et à [Localité 47] objets des actes d'attribution des 12 avril, 14 mai et 9 décembre 1927,

- a infirmé le jugement sauf en ce qu'il a débouté cette association de sa demande principale tendant à juger que sont réputées non écrites les clauses de retour litigieuses,

Statuant à nouveau,

- a débouté Mmes et MM. [O] [B], [L] et [K] [HL] en leur nom propre et en qualité de tuteurs de Mme [DM] [HL], [KC] [TT], [XS] [WE], [H] [VB], [IU] [Y], [MI] [Y], [BB] [T], [SK] [Y], [LA] [X], [A] [NR], [F] [TN], [J] et [CT] [B], [R] [JS], intimés, ainsi que [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ] et [W] [CY] épouse [MN] de leur demande tendant à la révocation des actes notariés des 12 avril et 14 mai 1927 et du 9 décembre 1927 et au retour à leur profit des biens immobiliers sis [Adresse 20] à [Localité 31] et [Adresse 12] à [Localité 47],

Y ajoutant,

- les a condamnés à payer à l'association [48] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les a condamnés aux dépens.

La Cour de cassation a été saisie d'un pourvoi à l'encontre de cet arrêt.

Mme [W] [CY] épouse [MN] s'est désistée de l'instance et de son action.

Par acte du 16 septembre 2021, Mmes et MM. [J] et [O] [B], [W] [CY] épouse [MN], [GI] [CY] épouse [WJ], [YV] [CY], [KC] [B] épouse [TT], [F] [B] épouse [TN], [L] et [K] [HL], et [XS] [Z] épouse [WE], agissant en qualité d'ayants- droit de [RC] [TY]-[V], ont assigné l'association [48] devant le tribunal judiciaire de Nîmes aux fins de voir celle-ci, sur le fondement de l'article 1134 ancien du code civil, condamnée à leur payer la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Mme [W] [CY] épouse [MN] s'est désistée de l'instance et de son action le 21 novembre 2022.

Par conclusions d'incident notifiées le 13 septembre 2023, Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL] ont saisi le juge de la mise en état du tribunal aux fins de voir :

- ordonner le sursis à statuer dans le cadre de la présente instance jusqu'à l'arrêt de la Cour de cassation à intervenir dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt de cette cour du 31 mars 2022,

- débouter l'association [48] de toutes ses demandes,

- condamner cette association au paiement d'une indemnité de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure outre les dépens de l'instance.

L'association [48] a soulevé les fins de non-recevoir tirées de la prescription de l'action de l'ensemble des ayants-droits supposés de [RC] [V], et de l'absence de chiffrage, par chacun d'entre eux, de leur préjudice allégué résultant de leur perte de chance personnelle.

Par ordonnance contradictoire du 26 octobre 2023, le juge de la mise en état :

- a donné acte à Mme [W] [CY] de son désistement de l'instance et de l'action,

- a dit que l'action n'est pas prescrite et l'a déclarée recevable,

- a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pendante devant la Cour de cassation au pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Nîmes le 31 mars 2022,

- a dit que l'instance reprendra son cours à l'initiative de la partie la plus diligente à l'issue du sursis,

- a réservé les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 28 novembre 2023, l'association [48] a interjeté appel de cette décision.

Par avis du 12 décembre 2023, la procédure a été clôturée le 30 avril 2024 et l'affaire fixée à l'audience du 7 mai 2024.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions notifiées le 16 février 2024, l'association [48] demande à la cour :

- de réformer l'ordonnance déférée,

- de juger les demandes des ayants droit de [RC] [TY]-[V] prescrites et irrecevables,

- de dire n'y avoir lieu à sursis à statuer,

- de débouter les ayants droit de [RC] [TY]-[V] de leur appel incident et de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de les condamner solidairement à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 18 janvier 2024, Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL], intimés, demandent à la cour :

- de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a réservé leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et y ajoutant

- d'ordonner le sursis à statuer dans le cadre de l'instance inscrite au répertoire général du tribunal sous le n° 21/03761 jusqu'à l'arrêt à intervenir de la Cour de cassation saisie d'un pourvoi à l'encontre de l'arrêt rendu le 31 mars 2022 par la cour d'appel de Nîmes dans le cadre de l'affaire inscrite au répertoire général sous le n° 20/00736,

- de débouter l'association [48] de l'ensemble de ses demandes,

- de la condamner à leur payer la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.

MOTIVATION

*sur la prescription de l'action

Pour déclarer non prescrite l'action en indemnisation de leur perte de chance des ayants-droits de [RC] [V] le juge de la mise en état a jugé que ceux-ci n'avaient été informés de leurs droits que suite à la délivrance de l'assignation du 19 septembre 2016 par l'association [48].

L'appelante soutient que l'article 2224 du code civil issu de la loi n° 2007-561 du 17 juin 2008 n'a pas vocation à s'appliquer de manière rétroactive ; que l'article 26 de cette loi prévoit qu'il soit tenu compte du délai déjà écoulé afin que la durée totale du délai de prescription ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; que le fait générateur de l'action des intimés est un acte notarié du 7 novembre 1980 date à laquelle la prescription en la matière était de 30 ans ; qu'ainsi, la prescription était acquise à la date du 7 novembre 2010.

Les intimés répliquent qu'au jour de l'entrée en vigueur de la loi de 2008 le délai de prescription de leur action n'avait pas commencé à courir puisque c'est seulement à compter de l'assignation délivrée 20 septembre 2016 qu'ils ont eu connaissance des faits leur permettant d'agir, en l'espèce de l'existence de la vente effectuée le 7 novembre 1980 ; qu'ainsi leur action introduite le 16 septembre 2021 n'est pas prescrite.

L'action ici engagée est une action indemnitaire par nature personnelle et soumise à la prescription quinquennale (Cass. civ. 3, 28 janvier 2014, n° 12-24.453).

Selon l'article 2224 du code civil en vigueur depuis le 19 juin 2008 les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Selon l'article 26 II. de la loi n° 2007-561 du 17 juin 2008 les dispositions de cette loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Le I. du même article invoqué par les intimés selon lequel 'les dispositions de la présente loi qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.' n'a ici pas vocation à s'appliquer puisqu'il concerne les dispositions allongeant et non réduisant, comme en l'espèce, la durée d'une prescription.

Selon l'article 2232 du code civil en vigueur depuis le 10 août 2016 le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.

Il en résulte que, sauf s'il est démontré qu'il a commencé à courir plus de 20 ans avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle le 19 juin 2008, soit avant le 19 juin 1988, le délai de prescription de l'action des ayants-droit de [RC] [TY] n'expirera que le 19 juin 2028.

Cette preuve incombe à l'appelante excipant de la prescription de l'action, qui soutient à cet égard que le fait générateur de son éventuelle responsabilité ici recherchée réside dans la vente d'un immeuble selon acte authentique du 7 novembre 1980 de sorte que la prescription de toute action découlant de cette vente est acquise depuis le 7 novembre 2010.

Les intimés répliquent qu'il est ainsi fait une appréciation erronée de l'article 26 de la loi n°2007-561 du 17 juin 2008 ; qu'au jour de l'entrée en vigueur de la loi le délai de prescription de leur action n'avait pas commencé à courir puisque c'est seulement à compter de l'assignation délivrée 20 septembre 2016 qu'ils ont eu connaissance de l'existence de la vente effectuée le 7 novembre 1980 de sorte que leur action engagée le 16 septembre 2021 n'est pas prescrite.

Toutefois, il résulte des énonciations du jugement du 5 décembre 2019 infirmé par l'arrêt de cette cour objet du pourvoi en cours que les actes introductifs de l'instance initiale ont été délivrés à des dates s'échelonnant entre le 9 et le 26 septembre 2016 aux ayants-droit de [RC] [TY]-[V] identifiés par l'association [48] et qu'à l'exception de Mme [KC] [TT], Mme [F] [TN] et M. [O] [B], ils ont tous été défaillants en première instance ; que l'acte de signification du 20 septembre 2016 de l'assignation initiale seul produit aux débats n'a concerné que Mme [J] [B], par dépôt de l'acte à l'étude de l'huissier, et que celle-ci a été déclaré défaillante à la première instance.

De son côté, l'association appelante produite la copie de l'acte d'enregistrement le 23 janvier 1981 au 1er bureau de la conservation des hypothèques de [Localité 31] de l'acte du 7 novembre 1980 selon lequel elle a vendu à la [60]

- diverses parcelles de terre sise à [Localité 45] (30) avec bâtiment d'habitation et de ferme figurant au cadastre de cette commune Section A lieudit '[Localité 61] n°[Cadastre 44], Section A lieudit '[Localité 58]' n° [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11], Section A lieudit '[Localité 54] ' n° [Cadastre 33], Section Y lieudit '[Localité 57]' n°[Cadastre 15], Section Z lieudit '[Localité 55]' n°[Cadastre 15], Section 7 lieudit'[Localité 59]' n° [Cadastre 6], [Cadastre 22], [Cadastre 25], [Cadastre 26] et [Cadastre 27]

- et les meubles de la salle à manger garnissant le bâtiment d'habitation

lui appartenant pour lui avoir été attribués aux termes d'un acte reçu par Me [XM], notaire à [Localité 31], les 12 avril et 14 mai 1927 par M. [IU] [V], aumonier militaire, en pleine propriété en conformité à l'article 112 de la loi du 29 avril 1926, sans aucune charge ni aucun prix.

Il résulte des articles 28 et 30 du décret du 4 janvier 1955, fixant les règles de la publicité foncière, que le transfert de propriété devient opposable aux tiers par la publication de l'acte authentique de cession au bureau des hypothèques (3e Civ., 22 octobre 1974, pourvoi n° 73-12.127 et 3èCiv, 1er octobre 2020 pourvoi n°19-17.549).

A compte du jour de la publication de l'acte de vente litigieux, les ayants-droit de [RC] [TY]-[V], dont certains des intimés tirent aujourd'hui leurs propres droits, disposaient d'un délai de 30 ans pour agir soit en annulation de cette vente (action réelle), soit en indemnisation d'un éventuel préjudice (action personnelle).

Toute action, réelle ou personnelle, à l'encontre de cet acte de vente est donc prescrite, quelle que soit la date à laquelle les intimés soutiennent en avoir eu connaissance.

En effet, si seul un délai de 27 années 4 mois et 27 jours s'était écoulé entre le 23 janvier 1981, date de publication de l'acte, et le 19 juin 2008, jour de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, le délai de trente ans prescrit par la loi ancienne n'a pas été allongé par l'effet de la loi nouvelle et a expiré le 23 janvier 2011.

L'ordonnance sera en conséquence infirmée et l'action en indemnisation à l'encontre de l'association [48] du préjudice de perte de chance résultant de la vente litigieuse du 7 novembre 1980 déclarée prescrite.

En conséquence, il n'y a pas lieu à sursis à statuer.

*sur la recevabilité de la demande globale d'indemnisation d'une perte de chance

Pour déclarer recevable l'action en indemnisation de leur préjudice le juge de la mise en état a jugé que les demandeurs agissaient en leurs qualités d'ayants-droit de [RC] [TY]-[V] et sollicitaient une indemnité chiffrée dans leur assignation.

L'appelante soutient que l'action en indemnisation d'une perte de chance est une action personnelle, et que la demande globale des désormais 9 membres allégués de l'hoirie [V], (au lieu de 25 dans la première procédure) issus de branches différentes, alors qu'ils n'ont forcément pas les mêmes droits pour être issus de branches différentes, est irrecevable.

Les intimés soutiennent que le fait qu'ils soient de branches différentes dans le cadre de la succession [RC] [TY]-[V] ne rend pas pour autant leurs prétentions irrecevables ; que l'appelante ne s'appuie sur aucun fondement de fait ou de droit, sauf à alléguer que nul ne plaide par procureur ; qu'elle n'explique pas en quoi sa demande constituerait une fin de non recevoir relevant du juge de la mise en état.

Selon les articles 31 l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

L'association appelante ne soutient pas à l'encontre des demandeurs de fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à agir en application de ces dispositions ; les 9 ayants-droit de [RC] [TY]-[V] ici concernés ne constituant pas à eux seuls l'indivision résultant de la succession de celui-ci pouvaient exprimer une demande d'indemnisation globale dont la répartition entre eux reste inopposable à l'appelante.

Toutefois, du fait de l'acquisition de la prescription, cette demande est devenue sans objet.

*autres demandes

Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL], qui succombent en leur appel devront supporter les dépens de la présente instance et seront condamnés in solidum à verser à l'association [48] la somme de 2 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nîmes du 26 octobre 2023 ( RG 21/03761) sauf en ce qu'elle a donné acte à Mme [W] [CY] de son désistement de l'instance et de l'action.

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable comme prescrite l'action en indemnisation de leur préjudice découlant de la vente du 7 novembre 1980 par l'association [48] d'un immeuble à [Localité 45] à la [60] de Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL],

Dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pendante devant la Cour de cassation suite au pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt rendu par cette cour le 31 mars 2022,

Déclare sans objet la demande relative à la recevabilité de la demande globale d'indemnisation formée par Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL],

Y ajoutant,

Condamne in solidum Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL] aux dépens de la présente instance.

Condamne in solidum Mmes et MM. [XS] [Z] épouse [WE], [J] et [O] [B], [F] [B] épouse [TN], [KC] [B] épouse [TT], [YV] [CY], [GI] [CY] épouse [WJ], [L] et [K] [HL] à payer à l'association [48] la somme de 2 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par le présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/03707
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.03707 ?
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