RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/01522 -
N° Portalis DBVH-V-B7E-HXOZ
DD
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NIMES
22 mai 2020
RG :19/05433
[X]
C/
[X]
[X]
Grosse délivrée
le 16/05/2024
à Me Christine Tournier Barnier
à Me Sonia Harnist
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 16 MAI 2024
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Nîmes en date du 22 mai 2020, N°19/05433
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Delphine Duprat, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,
Mme Delphine Duprat, conseillère,
Mme Audrey Gentilini, conseillère,
GREFFIER :
Mme Nadège Rodrigues, greffière, lors des débats, et Mme Audrey Bachimont, greffière, lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 26 mars 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
M. [H] [X]
né le [Date naissance 5] 1958 à [Localité 11]
[Adresse 8]
[Adresse 8]
Représenté par Me Christine Tournier Barnier de la Scp Tournier & Associés, avocate au barreau de Nîmes
INTIMÉS :
M. [F] [X]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 12]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
M. [M] [X]
né le [Date naissance 4] 1964 à [Localité 13]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
Représentés par Me Sonia Harnist de la Selarl Harnist Avocat, avocate au barreau de Nîmes
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 16 mai 2024, par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
[P] [W] est décédée le [Date décès 6] 2013 laissant pour lui succéder ses trois fils [F],[M] et [H].
De la succession dépend un immeuble à [Localité 14], cadastré section [Cadastre 10] et [Cadastre 3].
Par acte du 05 novembre 2019, MM.[F] et [M] [X] ont assigné leur frère [H] devant le tribunal de grande instance de Nîmes qui par jugement réputé contradictoire du 22 mai 2020 :
- a ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision successorale et la licitation de l'immeuble de [Localité 14]
- et a fixé sa mise à prix à la somme de 50 000 euros.
Le 1er juillet 2020, M.[H] [X] a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt contradictoire du 25 novembre 2021, cette cour :
- a confirmé le jugement en ce qu'il a :
- ordonné qu'il soit procédé à la licitation de l'immeuble situé [Localité 14] cadastré [Cadastre 10] et [Cadastre 3], laquelle répondra aux dispositions des articles 1271 et suivants du code de procédure civile à la barre du tribunal judiciaire de Nîmes, sur le cahier des conditions de la vente dressé et déposé au greffe par Me Sonia Harnist, avocat au barreau de Nîmes, [Adresse 2] après avoir rempli toutes les diligences prévues par la loi,
- fixé la mise à prix de cet immeuble à la somme de 50 000 euros avec faculté de baisse du quart puis de la moitié en cas de carence d'enchères jusqu'à ce que vente s'ensuive,
- dit que la publicité devra être diligentée comme en matière de saisie immobilière conformément aux dispositions des articles R.322-31 à R .322-36 du code de procédure civile d'exécution,
- désigné la Scp Pronet et Ott, huissiers de justice à [Localité 15] pour assurer la visite des biens mis en vente en se faisant assister si besoin est d'un serrurier et de la force publique,
- ordonné sa publication au service de la publicité foncière compétent,
- condamné M.[H] [X] à payer à MM.[F] et [M] [X] la somme totale de 800 euros au titre des frais irrépétibles,
- a rappelé que les autres dispositions du jugement n'ont pas été frappées d'appel,
Y ajoutant
- a dit que M.[M] [X] est redevable d'une indemnité d'occupation à l'indivision successorale depuis le 25 septembre 2015,
- a ordonné une expertise aux fins d'évaluer cette indemnité d'occupation [...],
- a débouté les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- a dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
L'expert a déposé son rapport le 25 novembre 2021.
Par ordonnance du 28 mars 2023, la procédure a été clôturée le 24 octobre 2023 et l'affaire fixée à l'audience du 07 novembre 2023, date à laquelle le conseiller de la mise en état a révoqué l'ordonnance du 24 octobre 2023, fixé la clôture de la procédure au 26 février 2024 et renvoyé l'affaire à l'audience du 26 mars 2024.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS
Par conclusions notifiées le 02 novembre 2023, M.[H] [X] demande à la cour :
- de dire que l'indemnité d'occupation revenant à l'indivision successorale sera due pour la période du 25 septembre 2015 jusqu'à la libération effective des lieux par [M] [X],
- de fixer l'indemnité d'occupation et de condamner celui-ci à payer à l'indivision successorale la somme de 48 520 euros pour la période du 25 septembre 2015 au 12 octobre 2022,
- de dire que l'indemnité d'occupation continuera à courir jusqu'à la libération effective des lieux moyennant la somme de 18,85 euros par jour à compter du 12 octobre 2022,
- de dire que les frais d'expertise seront à la charge de l'indivision successorale, lui-même ayant fait l'avance de la somme de 1 000 euros auprès de l'expert judiciaire,
- de condamner solidairement [F] et [M] [X] à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- de dire que les dépens seront utilisés en frais privilégiés de partage.
L'appelant fait valoir que l'occupation privative de son frère [M] porte sur l'intégralité du bien immobilier pour les parcelles cadastrées section [Cadastre 10] et [Cadastre 3] et considère que l'abattement de 25 % retenu par l'expert est injustifié.
Par conclusions notifiées le 23 février 2024, MM.[F] et [M] [X] demandent à la cour :
- de débouter [H] [X] de ses demandes, fins et conclusions,
- de juger que l'indemnité d'occupation due par [M] [X] à l'indivision successorale ne portera que sur la parcelle cadastrée [Cadastre 3] et ne pourra excéder la somme journalière de 15,62 euros fixée par l'expert,
- de rappeler que le notaire en charge du partage devra faire les comptes entre les parties,
- de condamner [H] [X] au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage.
Les intimés répliquent que l'indemnité doit être cantonnée à la seule occupation du mazet présent sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 3] et considèrent que la précarité de son occupation justifie l'application d'une décote de 25 % telle que retenue par l'expert.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
La demande de révocation de l'ordonnance de clôture est devenue sans objet en l'état de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 7 novembre 2023.
La cour, statuant après expertise, n'est saisie que de demandes relatives à l'assiette et au montant de l'indemnité d'occupation due par [M] [X] à l'indivision successorale.
Les parties ne contestent en effet ni son principe ni la date à compter de laquelle elle est due.
Sur l'assiette de l'indemnité d'occupation
Selon l'article 815-9 du Code civil l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. La jouissance privative d'un immeuble indivis résulte de l'impossibilité de droit ou de fait, pour les indivisaires, d'user de la chose.
Selon l'article 1353 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
En l'espèce, [H] [X] soutient que son frère [M] occupe l'ensemble du bien indivis y compris le terrain composant la parcelle cadastrée section [Cadastre 10].
Cependant l'expert a constaté que du matériel lui appartenant était entreposé sur ce terrain (page 24 rapport d'expertise).
Ayant assisté aux opérations d'expertise, [H] [X] ne conteste pas que ce matériel est le sien mais prétend qu'il a été entreposé du vivant de leur mère et que son frère est depuis lors seul à occuper cette parcelle dont il lui interdit l'accès (annexe 8 rapport d'expertise).
Pour autant, alors que cette preuve lui incombe, il ne produit aucune pièce de nature à démontrer une telle occupation privative du terrain par son frère [M].
L'expert relève en page 24 que [H] [X] occupe partiellement la parcelle [Cadastre 10], sur laquellle il a entreposé deux motos, une vieille voiture, un chalet en bois, une calèche et du matériel de maçonnerie dont il a admis auprès de l'expert, qu'ils lui appartenaient.
L'occupation privative du terrain par son frère n'est donc pas caractérisée.
La condition nécessaire à la mise en oeuvre des dispositions de l'article 815-9 du Code civil faisant défaut, il sera débouté de ses demandes relatives à l'occupation du terrain et l'indemnité d'occupation portera uniquement sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 3].
Sur le montant de l'indemnité d'occupation
L'indemnité est calculée sur la base de la valeur locative du bien immobilier à la date la plus proche du partage.
Le droit de l'occupant étant plus précaire que celui d'un locataire protégé par un statut légal, il peut être opéré de réfaction de la valeur locative pour déterminer son montant.
L'expert a fixé la valeur locative journalière de la parcelle cadastrée [Cadastre 3] à la somme de 15,62 euros, soit 40 206 euros pour la période du 25 septembre 2015 au 12 octobre 2022, date de dépôt du pré-rapport valant rapport définitif.
Cette évaluation n'est pas contestée par les parties.
[M] [X] sollicite l'application d'un abattement de 25 % tel que préconisé par l'expert, pour tenir compte du caractère précaire de son occupation. L'appelant en conteste l'application exposant que son frère occupe depuis plus de dix ans le bien indivis.
L''indivision en tant que telle prive l'occupant de la protection accordée au locataire, et crée nécessairement une certaine précarité, ici caractérisée puisque l'expert a constaté que [H] [X] détenait les clés du garage ce que celui-ci, présent lors des opérations d'expertise, n'a pas contesté.
En conséquence il sera fait application d'un abattement de 25 % sur la valeur locative du bien pour tenir compte de ce caractère précaire.
La créance de l'indivision successorale sur [M] [X] à ce titre sera en conséquence fixée à la somme de 15,62 euros par jour à compter du 13 octobre 2022 et jusqu'à la libération effective des lieux, ramenée en tenant compte l'abattement de précarité de 25 % à la somme de 11,72 euros calculée comme suit :
15,62 - (15,62 x 25) /100 = 15,62- 3,90 = 11,72
soit pour la période du 25 septembre 2015 ay 12 octobre 2022 la somme de 30 154 euros à titre d'indemnité d'occupation de la parcelle cadastrée [Cadastre 3] à [Localité 14] pour la période allant du 25 septembre 2015 au 12 octobre 2022 sans préjudice de l'indemnité due jusqu'à la libération des lieux.
Sur les autres demandes
Les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
L'équité ne commande pas de faire ici application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rappelle les dispositions de l'arrêt du 25 novembre 2021 selon lesquelles M.[M] [X] est redevable d'une indemnité d'occupation à l'indivision successorale depuis le 25 septembre 2015,
Complétant cet arrêt et y ajoutant,
Fixe la créance de l'indivision successorale à l'égard de M. [M] [X] à la somme de 30 154 euros au titre de l'occupation de la parcelle cadastrée [Cadastre 3] à [Localité 14] pour la période allant du 25 septembre 2015 au 12 octobre 2022,
Dit que cette indemnité continuera à courir jusqu'à la libération effective des lieux moyennant la somme de 11,72 euros par jour à compter du 13 octobre 2022,
Dit que les frais d'expertise sont à la charge de l'indivision successorale,
Dit que les dépens de l'instance seront employés en frais privilégiés de partage,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par le présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,