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21/03/2024 | FRANCE | N°23/02553

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 21 mars 2024, 23/02553


ARRÊT N°



2ème chambre section A



N° RG 23/02553 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I46K



AL



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON

11 juin 2019

RG:18/00367

S/RENVOI CASSATION



S.C.I. EKER

S.C.P. [K] & ASSOCIES



C/



S.C.P. [D] [T] & A.LAGEAT

S.A.S. LES MANDATAIRES





























Grosse délivrée

le

à Selarl Avouepericchi

Selarl LX NIMES


















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT DU 21 MARS 2024







APPELANTES :



S.C.I. EKER au capital social de 500 eurosinscrite au RCS de MARSEILLE sous le N° D 513 686 253 représentée par son gérant dom...

ARRÊT N°

2ème chambre section A

N° RG 23/02553 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I46K

AL

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON

11 juin 2019

RG:18/00367

S/RENVOI CASSATION

S.C.I. EKER

S.C.P. [K] & ASSOCIES

C/

S.C.P. [D] [T] & A.LAGEAT

S.A.S. LES MANDATAIRES

Grosse délivrée

le

à Selarl Avouepericchi

Selarl LX NIMES

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT DU 21 MARS 2024

APPELANTES :

S.C.I. EKER au capital social de 500 eurosinscrite au RCS de MARSEILLE sous le N° D 513 686 253 représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Lionel ALVAREZ de la SELARL ALVAREZ-ARLABOSSE, Plaidant, avocat au barreau de TOULON

S.C.P. [K] & ASSOCIES représentée par Maître [C] [K],pris en sa qualité d'administrateur judiciaireà la procédure de sauvegarde de la SCI EKERdomicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Lionel ALVAREZ de la SELARL ALVAREZ-ARLABOSSE, Plaidant, avocat au barreau de TOULON

INTIMÉES :

S.A.S. LES MANDATAIRES société par actions simplifiée, inscrite au RCS de Marseille sous le N°B 850 597 097 prise en la personne de Maître [S] es qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI MJD BAYLE

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Mélanie BRAUGE-BOYER de la SELEURL SELARL LEBOUCHER BRAUGE-BOYER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.C.P. [D] [T] & A.LAGEAT prise en la personne de Me [D] [T] agissant en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société EKER

Assigné à personne habilitée le 22/09/2023

[Adresse 6]

[Localité 4]

PARTIES INTERVENANTES

S.C.P. [K] & ASSOCIES prise en la personne de Me [C] [K] agissant en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société ECKER, désigné à cette fonction suivant jugement en date du 27 juin 2023

INTERVENANTE VOLONTAIRE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Lionel ALVAREZ de la SELARL ALVAREZ-ARLABOSSE, Plaidant, avocat au barreau de TOULON

Société [D] [T] ET A LAGEAT prise en la personne de Me [D] [T] agissant en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société EKER désigné à cette fonction suivant jugement en date du 27 juin 2023

INTERVENANTE VOLONTAIRE

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Lionel ALVAREZ de la SELARL ALVAREZ-ARLABOSSE, Plaidant, avocat au barreau de TOULON

Avis de fixation de l'affaire à bref délai suite à renvoi après cassation (art.1037-1 et s. du CPC)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Janvier 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Mars 2024.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 21 Mars 2024,, sur renvoi de la Cour de Cassation, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

En date du 20 novembre 2009, la SCCV MJD BAYLE, vendeur, a conclu avec la SCI EKER, acquéreur, un contrat portant sur la vente en l'état futur d'achèvement des lots 14 et 35 d'un bien immobilier sis à [Localité 12], [Adresse 11], au prix de 380.000 EUR.

La SCI EKER a réglé lors de la signature de l'acte la somme de 133.000 EUR, le solde, soit la somme de 247.000 EUR devant être réglée de la façon suivante :

15 % au plancher du 1er étage, soit la somme de 57.000 EUR,

10 % au plancher du 2ème étage, soit la somme de 38.000 EUR,

10 % au hors d'eau, soit la somme de 38.000 EUR,

10 % au hors d'air, soit la somme de 38.000 EUR,

10 % aux cloisons intérieures, soit la somme de 38.000 EUR,

5 % à l'achèvement, soit la somme de 19.000 EUR,

5 % à la mise à disposition du logement, soit la somme de 19.000 EUR.

Outre la somme de 133.000 EUR, la SCI EKER a réglé le 10 janvier 2011 la somme de 17.000 EUR et le 26 juillet 2011 celle de 20.000 EUR.

Les locaux ont été livrés à la SCI EKER le 5 octobre 2011, nonobstant l'absence de paiement du solde du prix de vente.

Par jugement du 5 mars 2015, la SCI MJD BAYLE a été placée en liquidation judiciaire et Me [A] [J] a été désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Suivant un acte d'huissier du 1er août 2016, Me [A] [J], ès qualités, a assigné la SCI EKER en paiement de la somme de 210.000 EUR représentant le solde du prix de vente.

Par jugement du 11 juin 2019, le tribunal de grande instance d'AVIGNON a :

condamné la SCI EKER à payer à Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE la somme de 210.000 EUR avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2011,

autorisé Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE, à inscrire une hypothèque judiciaire d'un montant de 210.000 EUR sur les lots 14 et 35 dépendant d'un ensemble immobilier sis à [Localité 12] [Adresse 11],

rejeté les demandes plus amples ou contraires,

condamné la SCI EKER à payer à Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE, la somme de 2.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SCI EKER aux entiers dépens, avec distraction au profit de Me Tanguy BERTHOUIL,

ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par arrêt du 3 juin 2021, la cour d'appel de NÎMES a :

confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

condamné la SCI EKER à payer à Me [A] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, la somme de 3.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SCI EKER aux dépens d'appel.

La SCI EKER a été placée sous sauvegarde de justice par un jugement du tribunal judiciaire de MARSEILLE du 14 juin 2022 puis en redressement judiciaire suivant un jugement de ce même tribunal du 27 juin 2023.

La SCI EKER, M. [C] [K], ès qualités d'administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde de la SCI EKER, et la SCP [D] [T] et A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, ont formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt.

Par arrêt du 25 mai 2023, la Cour de cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2021 et a renvoyé les parties devant la cour d'appel de NÎMES autrement composée.

Pour casser l'arrêt rendu par la cour d'appel de NÎMES, la Cour de cassation énonce :

« (')

Vu les articles 2224 et 1601-3 du code civil, l'article R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 :

6. Aux termes du premier de ces textes, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

7. Il résulte des trois derniers que l'acquéreur d'un immeuble en l'état futur d'achèvement est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux, selon l'échéancier prévu au contrat et dans les limites de l'échelonnement réglementaire.

8. Pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription, l'arrêt retient que l'action en paiement du solde du prix restant dû en matière de vente en état futur d'achèvement se prescrit à compter de la mise à disposition du logement, qui emporte son exigibilité, sauf si le vendeur a entendu se prévaloir antérieurement de l'exigibilité des sommes réclamées.

9. Il ajoute que chaque appel de fonds reprenait le solde restant dû, sans que les précédents appels de fonds aient fait l'objet d'une autre réclamation et il en déduit que c'est seulement à la date de la mise à disposition du logement que la dette de l'acquéreur correspondant au total cumulé des appels de fonds non réglés est devenue exigible.

10. En statuant ainsi, alors que la prescription de l'action en paiement du prix de vente courait à l'égard de chacune des fractions du prix à compter de la date d'exigibilité prévue au contrat et non à compter du jour où le vendeur décidait d'exiger un paiement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

(') »

A la suite de cet arrêt, la SCI EKER et la SCP [K] & ASSOCIES ont saisi la cour de céans statuant comme cour de renvoi, suivant une déclaration de saisine déposée le 25 juillet 2023.

Aux termes des dernières conclusions de la SCI EKER et de la SCP [K] & ASSOCIES, ès qualités d'administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde de la SCI EKER, appelants, et de la SCP [K] & ASSOCIES, ès qualités d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI EKER, et de la société [D] [T] et A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI EKER, intervenantes volontaires, notifiées par RPVA le 5 décembre 2023, il est demandé à la cour de :

vu l'article 2224 du code civil,

vu les articles 328 et suivants du code de procédure civile,

vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 25 mai 2023,

déclarer la SCP [K] & ASSOCIES prise en la personne de Me [C] [K] agissant en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI ECKER, recevable et bien fondée en son intervention volontaire en cause d'appel,

déclarer la société [D] [T] et A. LAGEAT prise en la personne de Me [D] [T] agissant en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI EKER, recevable et bien fondée en son intervention volontaire en cause d'appel,

infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'AVIGNON en date du 11 juin 2019 en ce qu'il a :

condamné la SCI EKER à payer à Me [A] [J] ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE la somme de 210.000 EUR avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2011,

autorisé Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE, à inscrire une hypothèque judiciaire d'un montant de 210.000 EUR sur les lots suivants appartenant à la SCI EKER, à savoir : un ensemble immobilier situé à [Localité 12], [Adresse 11], dénommé « LA BASTIDE », devant comprendre à son achèvement :

Un bâtiment unique, élevé sur rez-de-chaussée de trois niveaux, composé :

Au rez-de-chaussée : dix-sept garages, local conteneurs, hall d'entrée avec ascenseur et escalier d'accès aux étages 

Au 1er étage : deux appartements de type 3, trois appartements de type 2, un appartement de type 1 ; au 2ème étage : deux appartements de type 3, trois appartements de type 2, un appartement de type 1 

Au 3ème étage : un appartement de type 2, un appartement duplex de type 2, un appartement duplex de type 6 ; trois parkings extérieurs dont un pour handicapé

Préfixe section [Cadastre 9] [Adresse 8], surface 00 ha 00 a 28 ca

Préfixe section [Cadastre 10] TRA DE BAYLE 00 ha 08 a 74 ca

Désignation des biens :

lot numéro 14

Au rez-de-chaussée un Box désigné « P14 » sur le plan

Et les 9/1000èmes de la propriété du sol et des parties communes générales.

Lot numéro 35

Au 3ème étage,

Un appartement en duplex de six pièces, désigné « 3.3 » sur le plan comprenant :

Au niveau bas : hall, séjour/cuisine avec escalier d'accès au niveau haut, deux chambres, salle de bains, WC indépendant, deux terrasses,

Au niveau haut : dégagement, trois chambres dont une avec douche, salle de bains, WC indépendant, deux terrasses,

Et les 151/1000èmes de la propriété du sol et des parties communes générales

rejeté les demandes plus amples ou contraires,

condamné la SCI EKER à payer à Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE, la somme de 2.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SCI EKER aux entiers dépens dont le montant pourra être recouvré directement par Me Tanguy BERTHOUIL, avocat à la cour, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

Statuant à nouveau,

déclarer partiellement prescrite l'action de Me [S], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI MJD BAYLE, tendant au paiement du solde du prix de vente du contrat VEFA signé par la SCI EKER pour toutes les fractions du prix exigible avant le 1er août 2011, soit un total de 209.000 EUR,

En toute hypothèse,

débouter Me [S], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI MJD BAYLE, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

dire que la SCI EKER n'est tenue qu'au paiement de la somme de 38.000 EUR représentant 10 % du prix contractuel de vente au titre de l'appel de fonds en date du 5 octobre 2011 au titre du poste « achèvement des travaux et mise à disposition des lots »,

condamner Me [S], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI MJD BAYLE, au paiement de la somme de 6.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SELARL AVOUEPERICCHI pour ceux exposés devant la cour de renvoi.

Les appelants font valoir, au visa des articles 2224, 1583 et 1601-4 du code civil (reproduit à l'article L. 261-4 du code de la construction et de l'habitation), que toute demande en paiement correspondant à des fractions du prix exigibles avant le 1er août 2011 est incontestablement prescrite, la prescription s'appliquant, au vu de l'arrêt de la Cour de cassation, au fur et à mesure de l'exigibilité des fractions de prix selon les prévisions du contrat. Ils précisent que toutes les sommes exigibles et exigées par l'appel de fonds du 27 juillet 2010 représentant 90 % du montant du prix de vente (soit 209.000 EUR) sont par voie de conséquence indéniablement prescrites, l'assignation étant en date du 5 août 2016.

Ils indiquent encore :

que le dernier appel de fonds du 5 octobre 2021 concerne l'achèvement des travaux et la mise à disposition des lots, soit une somme de 38.000 EUR (10 % du prix) ;

qu'il ressort cependant du grand livre produit par Me [A] [J] que deux versements de 17.000 EUR et 20.000 EUR ont été effectués de sorte que la dette ne pourrait être en principe que de 1.000 EUR ;

qu'il n'y a eu, sur le paiement du solde du prix, aucune relance avant l'assignation d'août 2016 ;

qu'à cet égard, les pièces communiquées par les intimés comme étant des relances ne peuvent être retenues dès lors que la SCI EKER ne les a jamais reçues, aucune preuve matérielle de leur envoi ou de leur réception n'étant par ailleurs rapportée ;

Sur le fond, ils soutiennent :

que la comptabilité présentée comme élément de preuve du défaut de paiement a un caractère lacunaire et irrégulier pour ne respecter ni les règles élémentaires de rigueur et de prudence, ni les pièces justificatives de base ;

que la SCI EKER est une personne morale constituée à l'occasion de la vente par M. [R] [G], avocat, et ses enfants [B] et [O] ;

que M. [R] [G], qui n'a jamais été lié sentimentalement à la gérante de la partie venderesse, est intervenu dans le cadre de l'exercice de sa profession pour défendre les intérêts de la SCCV MJD BAYLE dans une procédure fiscale ;

que Me [A] [J], liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, reconnaît a minima que la SCI EKER a fait des versements de 133.000 EUR, 17.000 EUR et 20.000 EUR ;

que le prix de vente a été en réalité payé dans son intégralité par la SELARL [R] [G] & ASSOCIES au travers de différents règlements intervenus à des dates différentes mais qui n'ont pas été enregistrés par la SCCV MJD BAYLE ;

qu'il est justifié, sur ce point, de la cession par la SCCV MJD BAYLE à la SELARL [R] [G] & ASSOCIES d'une créance de 133.000 EUR que celle-ci détenait sur la SCI EKER ; que cette cession de créance doit venir en déduction des sommes réclamées ; que de plus, la gérante de la SCCV MJD BAYLE a reconnu dans un mail du 8 octobre 2013 qu'une somme complémentaire de 30.000 EUR avait bien été réglée par la SCI EKER.

Aux termes des dernières conclusions de la SAS LES MANDATAIRES prise en la personne de Me [S], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SCI MJD BAYLE, notifiées par RPVA le 19 janvier 2024, il est demandé à la cour de :

vu l'article 1315 du code civil et les pièces versées aux débats,

vu l'article 122 du code de procédure civile,

vu les pièces versées aux débats

vu les pièces visées au bordereau y annexé régulièrement communiquées,

Statuant sur renvoi de cassation,

juger que le juge commissaire a définitivement fixé la créance de la SCI MJD BAYLE à la somme de 350.000 EUR,

En conséquence :

juger que la demande de fixation de la créance de la SCI MJD BAYLE est devenue irrecevable,

A titre subsidiaire :

juger que les parties ont entendu repousser le paiement du solde du prix de 210.000 EUR à la livraison du bien conformément à l'article 1134 alinéa 2 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur,

juger par conséquent que la prescription de l'action en paiement n'est pas acquise,

confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'AVIGNON rendu le 11 juin 2019 en toutes ses dispositions,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 210.000 EUR,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 105.000 EUR à titre d'intérêts de retard sur la somme de 210.000 EUR,

A titre encore plus subsidiaire

-juger que conformément aux stipulations de l'acte authentique de vente du 20 novembre 2009, l'exigibilité des fractions du prix n'a pas commencé à courir à défaut de notification des événements à la SCI EKER,

juger que la SCI EKER ne conteste pas ne pas avoir reçu les appels de fonds de la SCI MJD BAYLE,

juger que la SCI MJD BAYLE n'a pas adressé d'appels de fonds correspondant aux situations par lettre recommandée avec accusé réception,

juger que la prescription de l'action en paiement des sommes dues a commencé à courir le 15 avril 2015 et que Me [A] [J], ès qualités, a assigné la SCI EKER le 1er août 2016,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 210.000 EUR,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 105.000 EUR à titre d'intérêts de retard sur la somme de 210.000 EUR,

A titre infiniment plus subsidiaire,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 38.000 EUR, avec intérêts au taux légal,

juger que le comportement du gérant de la SCI EKER a engendré un grave préjudice à la SCI MJD BAYLE,

fixer la créance de dommages et intérêts de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 210.000 EUR,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE, auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 216.600 EUR à titre d'intérêts de retard sur la somme de 38.000 EUR

Y ajoutant,

fixer la créance de la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI MJD BAYLE auprès de la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI EKER, à la somme de 10.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la SAS LES MANDATAIRES, ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE, ainsi qu'aux montants des entiers dépens, de première instance, d'appel exposés devant la première cour d'appel et devant la cour de céans,

débouter la SCI EKER, la SCP GILLIBERT, la SCP [D] [T] & A. LAGEAT, ès qualités, de toutes leur demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, outre appel incident.

La SAS LES MANDATAIRES, représentée par Me [S] ès qualités, fait valoir à titre principal que par ordonnance du 4 mai 2023, le juge commissaire désigné dans le cadre de la procédure de sauvegarde de la SCI EKER, depuis convertie en procédure de redressement judiciaire, a fixé la créance de la SCI MJD BAYLE au passif de la procédure collective à la somme de 350.000 EUR à titre chirographaire. Elle ajoute que cette décision a été régulièrement notifiée et n'a pas fait l'objet d'un appel de sorte qu'elle est revêtue de l'autorité de la chose jugée, ce qui rend irrecevable la demande de fixation de créance qu'elle a présentée.

Par ailleurs, elle soutient à titre subsidiaire :

qu'elle a accepté de n'être payée du solde du prix, soit 210.000 EUR, qu'après la remise des clés dans la mesure où M. [R] [G] était son avocat et où celui-ci entretenait des relations sentimentales avec Mme [P] [M], sa gérante ;

qu'à la suite de sa mise en liquidation judiciaire, Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur, a tenté, suivant une mise en demeure du 15 avril 2015, de recouvrer le paiement de cette somme, mais s'est vu opposer un refus par la SCI EKER représentée par M. [R] [G] au motif que le solde du prix d'acquisition avait été réglé, ce qui est inexact ;

que la SCI EKER, à qui incombe la charge de la preuve en application de l'article 1315 du code civil, ne démontre pas avoir payé la somme de 210.000 EUR ;

que le paiement d'intérêts de retard est dû en application du contrat de vente ;

qu'aucune prescription n'est acquise au cas d'espèce dès lors que c'est à compter du 5 octobre 2011 correspondant à la date à laquelle la dernière échéance de 210.000 EUR a été appelée et à la remise effective des clés que le délai quinquennal de prescription a commencé à courir ;

que les règles de prescription en matière de crédit immobilier (Civ 1° 11/02/2016 n°14-27.143) selon lesquelles « à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance » ne peuvent trouver application dans le cas d'une vente en état futur d'achèvement, encore moins à une SCI, en l'absence par ailleurs d'incident de paiement ;

que l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2023 ne permet pas davantage de fixer le point de départ de la prescription à une autre date que celle du 5 octobre 2011 dès lors que la date d'exigibilité prévue au contrat et correspondant initialement aux différentes situations émises en fonction de l'avancée des travaux a été modifiée contractuellement par les parties et ne résulte pas du seul fait du vendeur mais d'une volonté commune, cet accord de paiement différé étant du reste favorable à l'acquéreur et non au vendeur ;

que cette volonté commune procédant d'une proximité professionnelle et sentimentale de voir fixer la date de paiement du solde à la remise des clés est démontrée au vu notamment des attestations produites contre lesquelles il n'est d'ailleurs pas justifié d'un dépôt de plainte ; que l'accord intervenu explique du reste qu'aucun commandement ou courrier n'ait été adressé à la SCI EKER lorsque celle-ci n'a pas payé la somme de 209.000 EUR correspondant à l'appel de fonds du 25 juillet 2010 mais seulement les sommes de 17.000 EUR le 10 janvier 2011 et de 20.000 EUR le 25 juillet 2011, les parties s'en tenant à l'accord intervenu valant modification qui n'est soumis, en application de l'article 1134 alinéa 2 ancien du code civil, à aucune condition de forme ;

que la SCI EKER ne rapporte pas la preuve d'une cession de créance de 133.000 EUR ; que les pièces produites par les appelants ne sont pas de nature à démontrer l'existence d'une telle cession de créance et pas davantage l'existence d'une signification de cession de créance ; qu'il n'y a en réalité jamais eu de cession de créance ;

que la somme de 210.000 EUR reste donc bien due par la SCI EKER, laquelle n'a d'ailleurs jamais contesté ce montant lorsqu'elle en a été destinataire.

A titre plus subsidiaire encore, elle soutient pour l'essentiel :

que selon l'acte authentique de vente du 20 novembre 2009, les parties ont expressément conditionné l'exigibilité des fractions de prix à la formalité d'envoi d'une lettre recommandée ;

que dans le cas présent, aucun appel de fonds par lettre recommandée n'a été effectué de sorte que les dates inscrites sur les appels de fonds ne peuvent constituer, en l'absence de toute exigibilité des fractions de prix, le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement, la SCI EKER soutenant au demeurant ne pas avoir reçu les situations ;

que le point de départ de la prescription ne peut dès lors être fixé qu'au 15 avril 2015 correspondant à la date à laquelle Me [A] [J] a sollicité le paiement de la somme de 210.000 EUR, ce qui exclut toute prescription, l'assignation étant en date du 1er août 2016 ; que cela est conforme à l'arrêt de la Cour de cassation du 25 mai 2023 dès lors que le contrat conditionne cette exigibilité à l'envoi de lettres recommandées.

Enfin, la SAS LES MANDATAIRES fait valoir, à titre très infiniment subsidiaire, que si la prescription devait être retenue pour l'ensemble des sommes antérieures au 1er août 2011, il est constant cependant qu'en abusant du rapport de confiance qu'il avait mis en place avec Mme [P] [M], M. [R] [G] a permis à la SCI EKER de faire l'acquisition d'un bien sans le payer, lui causant ainsi un préjudice de 210.000 EUR.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient, par application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer à leurs dernières écritures notifiées par RPVA.

MOTIFS

Il convient de donner acte à la SCP [K] & ASSOCIES prise en la personne de Me [C] [K], agissant en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI EKER, et à la société [D] [T] et A. LAGEAT prise en la personne de Me [D] [T], agissant en qualité de mandataire judiciaire à cette même procédure de redressement judiciaire, de leur intervention volontaire en cause d'appel.

L'article 625 du code de procédure civile dispose : « Sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.

Elle entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

('.) »

Il ressort de l'ordonnance du 4 mai 2023 du juge commissaire à la procédure de sauvegarde judiciaire ouverte à l'encontre de la SCI EKER :

que par requête du 1er juillet 2022, Me [A] [J], ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI MJD BAYLE, a déclaré au passif de la SCI EKER, en vertu de l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de NÎMES du 3 juin 2021, une créance de 350.000 EUR à titre chirographaire ;

que cette créance a été contestée par le débiteur en raison du pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt du 3 juin 2021 ;

que toutefois, ce motif de contestation n'a pas été accueilli par le juge commissaire qui a admis ladite créance au passif de la SCI EKER pour la somme de 350.000 EUR à titre chirographaire.

Aussi, la réouverture des débats sera ordonnée à l'effet de permettre aux parties de fournir toutes explications utiles sur les éventuelles conséquences de l'arrêt de la Cour de cassation du 25 mai 2023 sur l'ordonnance du 4 mai 2023 du juge commissaire ainsi que, le cas échéant, sur toute incidence de la cassation prononcée sur la présente instance (Com 13/05/2003 ' n°00-16.012).

Dans l'attente, il sera sursis à statuer sur les demandes des parties et les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et avant dire droit :

DONNE ACTE à la SCP [K] & ASSOCIES prise en la personne de Me [C] [K], agissant en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI EKER, de son intervention volontaire en cause d'appel,

DONNE ACTE à la société [D] [T] et A. LAGEAT prise en la personne de Me [D] [T], agissant en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SCI EKER, de son intervention volontaire en cause d'appel,

ORDONNE la réouverture des débats à l'audience du 07 MAI 2024 à 8h45 à l'effet de permettre aux parties de fournir toutes explications utiles sur les éventuelles conséquences de l'arrêt de la Cour de cassation du 25 mai 2023 sur l'ordonnance du 4 mai 2023 du juge commissaire, ainsi que, le cas échéant, sur toute incidence de la cassation prononcée sur la présente instance,

SURSOIT à statuer sur les demandes des parties,

RESERVE les dépens.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 23/02553
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;23.02553 ?
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