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07/07/2023 | FRANCE | N°23/00024

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 07 juillet 2023, 23/00024


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 23/00024 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IVJ2



AL



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

20 décembre 2022

RG:22/00361



S.C.P. [B] [Z] [S] [P][C] [J]



C/



[I]





Grosse délivrée

le

à















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème

chambre section B





ARRÊT DU 07 JUILLET 2023





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 20 Décembre 2022, N°22/00361



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corin...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/00024 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IVJ2

AL

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

20 décembre 2022

RG:22/00361

S.C.P. [B] [Z] [S] [P][C] [J]

C/

[I]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 07 JUILLET 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 20 Décembre 2022, N°22/00361

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Mai 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.C.P. [B] [Z], [S] [P], [C] [J], [G] [I]

Huissiers de Justice Associés Société civile professionnelle,

immatriculée au RCS de MARSEILLE sous le n° 316 319 185

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Elodie PELLEQUER de l'AARPI PERRYMOND-PELLEQUER, Plaidant, avocat au barreau de TOULON

INTIMÉE :

Madame [G] [I]

née le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Jonathan SOUFFIR de l'AARPI EVY Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représentée par Me Guillaume ANFFREY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 9 mai 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 07 Juillet 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 19 avril 2017, M. [W] [L], huissier de justice associé, a cédé à Mme [G] [I], huissier de justice, les 247 parts sociales qu'il détenait dans la SCP [W] [L] - [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J], au prix de 1.000.000 EUR avec effet au 20 avril 2018.

Mme [G] [I], huissier de justice, est en arrêt d'activité professionnelle depuis le 13 juillet 2021.

Par lettre recommandée avec avis de réception de son conseil du 23 juin 2022, Mme [G] [I] a mis en demeure la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] de procéder sous huitaine au remboursement de l'intégralité de son compte courant d'associé correspondant aux exercices 2020 et 2021.

Il n'a pas été donné suite à cette demande et, par acte du 27 juillet 2022, Mme [G] [I] a fait assigner la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] devant le président du tribunal judiciaire d'Avignon, statuant en référé, aux fins d'obtenir le remboursement de son compte courant d'associé et la communication de pièces comptables.

Par ordonnance contradictoire du 20 décembre 2022, le président du tribunal judiciaire d'Avignon a :

- débouté la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] de ses moyens de contestation,

- l'a condamnée à payer la somme provisionnelle de 208.406,13 EUR sous astreinte provisoire de 150 EUR par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification de la présente décision,

- l'a condamnée à communiquer par lettre recommandée avec accusé de réception à Mme [G] [I] les pièces suivantes, et ce, sous astreinte provisoire de 120 EUR par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification de la présente décision :

' la balance générale au 31/10/2022,

' le tableau de bord au 31/10/2022,

' les rapprochements bancaires des comptes de gestion et du compte affecté au 31/10/2022,

' les bulletins de salaire des salariés depuis janvier 2021,

' l'extrait du compte courant de Me [I] à la date la plus récente,

' l'extrait des comptes courants des autres associés sur les exercices 2021 et 2022 (arrêtés au 31/10/2022),

' le détail des charges passées en comptabilité par les associés de la SCP,

' le grand livre des comptes sur l'exercice 2021 et 2022,

' le détail des provisions pour risque,

' les documents relatifs à l'approbation des comptes des exercices clos le 31/12/2019, le 31/12/2020 et le 31/12/2021 (convocation de Mme [G] [I], texte des résolutions, procès-verbal des décisions régularisé, bilan détaillé, rapports du Commissaire aux comptes...),

' les convocations, feuilles de présence, procès-verbaux des assemblées générales de la SCP des trois dernières années,

' l'ensemble des éléments relatifs aux contentieux prud'hommaux, et notamment le détail des condamnations de la SCP depuis le 20 avril 2018 et jusqu'à ce jour, et le détail des sommes réglées/à régler,

' les rapports du commissaire aux comptes de la SCP depuis l'entrée au capital de Me [G] [I] (20 avril 2018),

' le détail des relevés de dépenses de cartes bancaires de Me [B] [Z], [S] [P] et [C] [J], correspondant au compte détenu par la SCP auprès du Crédit Agricole n° [XXXXXXXXXX05], depuis l'entrée en capital de Me [G] [I], soit le 20 avril 2018,

- ordonné une expertise et commis pour y procéder M. [N] [U], notamment pour procéder à l'évaluation de la valeur des parts sociales de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] détenues par Mme [G] [I] au regard notamment des statuts de la SCP, et évaluer la garantie à octroyer sur le prix de vente des parts sociales de Me [G] [I],

- définir la position du compte courant de Me [G] [I] dans la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I],

- condamné la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] à payer à Mme [G] [I] la somme de 3.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration du 28 décembre 2022, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], autrement encore dénommée SCP GMBG, a formé appel de cette ordonnance.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par RPVA le 9 mai 2023 auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] ' [G] [I], appelante, demande à la cour, au visa de l'article 834 du code de procédure civile, de :

Sur le fond,

- infirmer l'ordonnance du 20 décembre 2022 en ce qu'elle :

- l'a déboutée de ses moyens de contestation,

- l'a condamnée à payer la somme provisionnelle de 208.406,13 EUR sous astreinte provisoire de 150 EUR par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification de la présente décision,

- l'a condamnée à communiquer par lettre recommandée avec accusé de réception à Mme [G] [I] les pièces sollicitées, et ce, sous astreinte provisoire de 120 EUR par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification de la présente décision,

- l'a condamnée à payer à Mme [G] [I] la somme de 3.000 EUR en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et rejeté la demande relative au constat du retrait de Mme [I],

- la confirmer pour le surplus et statuant à nouveau,

- juger que la demande de condamnation au versement d'une provision au titre du compte courant excède les pouvoirs juridictionnels du juge des référés car nécessitant un arrêté comptable et pouvant compromettre l'activité de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I],

- juger qu'il existe des contestations sérieuses faisant obstacle à la demande de condamnation provisionnelle,

- juger que la demande de communication de pièces ne repose sur aucun motif légitime et qu'en toutes hypothèses, l'intégralité des pièces ayant été communiquées, cette demande devient sans objet de même que l'astreinte fixée,

En conséquence,

- débouter Mme [G] [I] de sa demande de provision,

- la débouter de sa demande de communication de pièces sous astreinte,

- constater et prendre acte de l'exercice du droit de retrait par Mme [G] [I],

- constater et prendre acte de l'accord de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] sur l'exercice du droit de retrait par Mme [G] [I],

A titre subsidiaire,

- juger qu'il existe des contestations sérieuses faisant obstacle à la demande de condamnation provisionnelle et au chiffrage d'une provision,

- ordonner le sursis à statuer de l'instance en cours dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise,

En toutes hypothèses,

- débouter Mme [G] [I] de sa demande de condamnation de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] au paiement de la somme de 10.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance,

- la débouter de sa demande de condamnation de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] au paiement de la somme de 10.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel et des dépens,

- la condamner à lui verser une somme de 10.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Au soutien de son appel, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] soutient que l'obligation à paiement de la somme de 208.406,13 EUR est sérieusement contestable.

Elle explique que le fonctionnement du compte courant d'associé d'une SCP est différent de celui d'une société commerciale. Elle précise que celui-ci est mouvementé au crédit par l'affectation de la quote-part des résultats des associés et au débit par les charges payées pour son compte, et souligne que si les qualités d'associé et de créancier sont en principe indépendantes, la créance de remboursement de l'avance en compte courant peut se compenser avec diverses obligations que le contrat de société fait peser sur l'associé.

Elle indique qu'au mois d'août 2022, Mme [G] [I] avait un solde débiteur vis-à-vis de la SCP, et que la provision allouée sur la base d'un montant arrêté au 31 décembre 2021 est donc une erreur puisque la position du compte courant a évolué depuis, étant précisé que cette position débitrice sera également à retraiter en fonction de sa quote-part de bénéfices pour l'année 2022 qui n'est pas encore connue. Elle ajoute que l'intéressée continue par ailleurs à utiliser le véhicule Smart de la SCP, ce qui génère des frais pris en compte par la SCP qui devront être retraités, et précise qu'en tout état de cause, il n'existe aucune somme au crédit de son compte car elle n'exerce plus depuis juillet 2021.

L'appelante expose encore que Mme [G] [I] est en arrêt maladie depuis le 13 juillet 2021, ce qui ouvre nécessairement droit au versement d'indemnités journalières en application du régime général, à la prise en charge du remboursement des mensualités du prêt contracté auprès de la Caisse d'Épargne pour l'acquisition des parts de la SCP via l'assurance de prêt Metlife, ainsi qu'au versement des indemnités prévoyance de la compagnie Groupama, et précise qu'il appartient à l'intimée de justifier du montant des garanties perçues à ce titre ou du refus exprès de prise en charge des garanties contractuelles. Sur ce point, elle constate que Mme [G] [I] ne justifie pas de l'intégralité de ses arrêts de travail d'une part, ni des montants perçus au titre de la prévoyance d'autre part. Elle note également que Mme [G] [I] étant associée de la SCP, elle doit être informée des montants versés à titre de rente ou d'indemnités par la compagnie Groupama, de façon à pouvoir les retraiter comptablement. Elle ajoute que l'absence d'information sur la situation de Mme [G] [I] constitue pour elle une source de désorganisation de l'étude et observe que cette dernière ne justifie pas d'un refus de prise en charge par la compagnie Groupama, restant par ailleurs taisante en ce qui concerne l'assurance emprunteur souscrite auprès de la compagnie Metlife.

Elle invoque également l'existence de contestations sérieuses concernant le solde du compte courant d'associé de Mme [G] [I], au vu du chiffrage effectué par le cabinet d'expertise comptable AC Conseils, qui fixe à la date du 31 mars 2023 le solde débiteur de ce compte courant à la somme de ' 60.954,35 EUR. Elle ajoute que la position du compte courant d'associé évoluant de jour en jour jusqu'à la sortie de l'associé, il appartient à Mme [G] [I] de communiquer officiellement sur une date de sortie effective de la SCP. Elle précise sur ce point que Mme [G] [I] se contente de contester le rapport du cabinet AC Conseils, sans verser la moindre consultation comptable pouvant apporter une analyse éclairée et des observations techniques sur le calcul critiqué, et relève, au vu de ce rapport, que la provision allouée est à tout le moins surévaluée, devant être réduite a minima à la somme de 147.811,95 EUR.

La SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] soutient par ailleurs que du fait de la provision allouée, Mme [G] [I] a prélevé plus que ses associés et met en situation périlleuse la SCP dès lors notamment qu'elle ne concourt plus à ses résultats et que ses charges sociales sont prises en compte par la société. Elle précise que sa trésorerie est au plus bas et qu'elle ne peut plus payer ses charges courantes. Elle ajoute qu'il est donc nécessaire d'effectuer un retraitement comptable de la situation du compte courant d'associé de Mme [G] [I] et qu'il existe une incompatibilité entre la demande de l'intéressée et la capacité de remboursement de la SCP. Elle poursuit en soulignant que l'analyse des charges exposées par les associés de la SCP est sans intérêt de même que les contestations émises à leur propos.

En outre, elle rappelle que l'article 23 de ses statuts prévoit expressément une réduction des droits aux bénéfices et qu'ainsi, l'associé qui n'exerce plus pour une cause autre que pénale ou disciplinaire conserve son droit au bénéfice en sa totalité pendant six mois, perd 50 % au-delà de six mois sur la part en industrie et perd au-delà de douze mois 100 % de sa part en industrie, mais conserve sa part de bénéfices en rémunération de ses parts sociales.

Elle expose également que l'intimée a été révoquée de sa fonction de gérante de sorte qu'elle ne peut plus bénéficier à ce titre d'une rémunération et fait valoir que la demande de provision se heurte donc, en toutes hypothèses, à des contestations sérieuses sur le montant du compte courant et son remboursement intégral à un instant T, sans retraitement comptable. Elle ajoute que la détermination du compte courant ne pourra définitivement être réglée qu'au jour de la sortie de Mme [G] [I] de la SCP, cette dernière ayant exercé son droit de retrait, et note que l'intimé a conclu, à titre subsidiaire, à un sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'expertise comptable. A ce propos, elle soutient que le juge des référés ne pouvait trancher la demande présentée au titre du compte courant d'associé, et que c'est bien parce que son montant n'est pas défini et requiert l'intervention d'un expert-comptable qu'une expertise a été ordonnée, la somme de 208.406,13 EUR demeurant incertaine. Elle note sur ce point que Mme [G] [I] refuse de donner la date effective de son départ, ce qui constitue un obstacle à la réalisation de l'expertise qui a pour objet de déterminer le montant du compte courant d'associé.

Sur la communication de pièces, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] affirme avoir communiqué l'intégralité des pièces comptables dont la communication a été ordonnée par le juge des référés sous astreinte, soit près de 8.000 pages, outre le grand livre communiqué sous format numérique le 25 janvier 2023. Elle conteste les allégations de l'intimée selon lesquelles elle ne serait pas en possession de toutes les pièces et relève à ce propos que celle-ci n'indique pas les pièces qui manqueraient. Par ailleurs, elle soutient que les accusations de Mme [G] [I] pour détournements, abus de confiance et autres infractions pénales ne sont corroborées par aucune pièce, et indique, à ce propos, qu'elle est à l'origine de la demande d'expertise et que la comptabilité de la SCP est confiée à un cabinet comptable indépendant.

Par ailleurs, elle souligne que l'intimée a exercé son droit de retrait par courrier du 11 décembre 2018 et qu'il y a toujours été répondu favorablement par les associés qui ont privilégié, nonobstant la résolution de l'assemblée générale du 28 février 2022 les autorisant à ester en justice, la voie de la discussion. Elle ajoute qu'il existe un accord sur la chose et le prix, ce que la cour devra constater.

Enfin, sur les frais de procédure, elle fait valoir que Mme [G] [I] dispose d'une trésorerie suffisante pour régler près de 50.000 EUR d'honoraires au cabinet Qaban, et qu'en toutes hypothèses, celle-ci ne saurait lui faire supporter les honoraires réglés à ses trois conseils, le choix de multiplier les conseils étant un choix personnel qui ne permet pas de solliciter la multiplication par trois des frais alloués au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'inverse, elle expose que, depuis de nombreux mois, elle est fragilisée par l'absence d'un associé de mauvaise foi qui refuse de travailler et de négocier amiablement une cession de ses parts sociales, et qui multiplie les procédures judiciaires et plaintes dont la seule finalité est d'obtenir une valorisation à la hausse de ses parts sociales en instaurant une pression procédurale et financière sur la société. Enfin, elle soutient que ce comportement doit être sanctionné par l'allocation d'une somme au titre des frais irrépétibles qui lui permettra d'amortir les frais exposés pour sa défense.

Mme [G] [I], en sa qualité d'intimée, par conclusions notifiées par RPVA le 9 mai 2023 et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, 514-3, 834, 835, 47, 377 et suivants, 700 du code de procédure civile, de :

- dire et juger que le paiement du compte courant d'associé de Me [G] [I] arrêté au 31 décembre 2022 pour un montant de 208.406,13 EUR ne souffre d'aucune contestation sérieuse,

- dire et juger que la demande de communication des pièces comptables et sociales ne souffre d'aucune contestation sérieuse ;

En conséquence :

- confirmer l'ordonnance du 20 décembre 2022 en ce qu'elle a condamné la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] à lui payer la somme provisionnelle de 208.406,13 EUR,

- confirmer l'ordonnance du 20 décembre 2022 en ce qu'elle a condamné la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] à la communication sous astreinte des pièces précisément désignées dans l'ordonnance,

- infirmer l'ordonnance du 20 décembre 2022 en ce qu'elle n'a accordé à Mme [G] [I] qu'une somme de 3.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau :

- condamner la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] au paiement de la somme de 10.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- ordonner le sursis à statuer de l'instance en cours dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise,

En tout état de cause :

- débouter la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] de l'intégralité de ses demandes,

- la condamner au paiement de la somme de 10.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre du remboursement des frais engagés pour la présente procédure d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

A l'appui de ses prétentions, Mme [G] [I] soutient que le paiement de son compte courant d'associé arrêté au 31 décembre 2022 pour un montant de 208.406,13 EUR ainsi que la demande de communication des pièces comptables et sociales ne souffrent d'aucune contestation sérieuse. Elle rappelle que le compte courant d'associé est remboursable à tout moment, en l'absence de convention particulière ou statutaire, sur simple demande de l'associé, et que la société ne peut limiter le remboursement à la somme que peut supporter la trésorerie dès lors qu'aucune clause n'autorise cette limitation. Elle ajoute que les sociétés civiles et plus particulièrement les SCP de commissaires de justice n'échappent pas à cette règle, et que l'obligation à paiement n'est pas sérieusement contestable dès lors que la créance est inscrite dans les comptes de la société.

Par ailleurs, elle fait valoir que le blocage du compte courant d'associé constitue un trouble manifestement illicite dans la mesure où, dans une SCP, le montant du compte courant d'un associé n'est autre que le solde du revenu imposable non prélevé au titre du dernier exercice, de sorte qu'il doit être débloqué à première demande. Elle précise que pour calculer le montant du solde d'un compte courant, il convient de déterminer le montant de la quote-part de bénéfices nette (quote-part brute ' charges professionnelles) de l'associé au titre d'un exercice donné, puis de déduire les prélèvements qu'il a effectués au cours de cet exercice. Elle précise, la concernant, que le solde du compte courant d'associé s'élève, selon le tableau de l'expert comptable de l'appelante, à la somme de 208.406,13 EUR arrêtée au 31 décembre 2021, ladite somme correspondant à la partie de la rémunération imposable mais non prélevée avant la fin de la clôture de l'exercice, de sorte qu'elle peut prétendre à son paiement.

Contestant l'analyse de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] au sujet du retraitement des charges, Mme [G] [I] expose qu'il n'y a pas lieu, s'agissant de l'exercice 2021, de déduire du solde du compte courant arrêté au 31 décembre 2021 les prélèvements et charges afférents à l'exercice 2022 qui n'est pas clôturé. Elle souligne que c'est à tort qu'il est soutenu qu'elle devrait être privée du moindre bénéfice au motif qu'elle est en arrêt maladie depuis le mois de juillet 2021. Ainsi, elle relève que les statuts lui garantissent a minima le maintien de la totalité de sa rémunération en capital qui représente 60 % de la rémunération totale, selon l'article 23 des statuts, et qu'elle a droit à l'intégralité de son compte courant d'associé arrêté au 31 décembre 2021. Elle note encore que les prélèvements des autres associés au titre de cet exercice sont largement supérieurs aux siens, selon la liasse fiscale de l'année 2021, au point d'ailleurs que les positions de deux des associés se sont trouvées au 31 décembre 2021 débitrices. Elle précise qu'à cette date du 31 décembre 2021, le solde de son compte courant d'associé présentait un caractère certain, contrairement à ce qui est soutenu, et souligne qu'à la date à laquelle le juge des référés a statué, la somme de 208.406,13 EUR correspondait au dernier solde de compte courant connu, lequel avait vocation à être prélevé, les charges de l'exercice 2022 n'ayant pas à être imputées sur l'exercice 2021 mais sur l'exercice 2022. Elle fait encore valoir que la réduction de ses droits en 2022 est sans incidence sur le montant de ce solde et indique, s'agissant des charges de l'exercice 2022, que ce n'est que dans l'hypothèse où celles-ci seraient supérieures aux bénéfices de ce même exercice qu'il pourrait y avoir une imputation sur le solde de l'exercice 2021, précisant sur ce point qu'il est impossible de le savoir dès lors que l'exercice 2022 n'a pas été clôturé. Elle relève à ce propos que le chiffrage du cabinet AC Conseils arrêté à la somme de ' 60.594,35 EUR au 31 mars 2023, après prélèvement de la somme de 208.406,13 EUR en janvier 2023, est trompeur, au regard notamment de ce prélèvement, et ne peut constituer une contestation sérieuse faisant obstacle au déblocage du compte courant d'associé, ce solde négatif ayant vocation à se résorber largement et rapidement quand les résultats des mois suivants auront été comptabilisés. Elle soutient qu'en tout état de cause, le chiffrage opéré ne peut être de nature à remettre en cause l'ordonnance de référé du 20 décembre 2022 dans la mesure où la contestation sérieuse doit être appréciée au jour où le juge statue et non sur la base de circonstances nouvelles apparues postérieurement.

Poursuivant ses explications, Mme [G] [I] fait valoir que la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] s'est rendue coupable de man'uvres pour détourner une partie du résultat de l'étude de façon à réduire artificiellement le montant de son compte courant d'associé. A ce sujet, elle relève notamment un écart de trésorerie important pour la période comprise entre le 1er janvier et le 13 juillet 2022 (279.600 EUR), la réalisation d'une opération tendant à faire remonter une partie importante du résultat de l'étude sur l'exercice 2022 au niveau de la SCI AGPALA, ainsi que des dépenses de cartes bancaires exorbitantes effectuées par les trois autres associés. Elle indique encore que des prélèvements ont été passés à tort sur son compte courant, et note, en réponse aux observations de l'appelante, qu'il est normal que ses prélèvements effectués entre janvier 2022 et janvier 2023 aient été supérieurs à ceux des autres associés puisqu'ils comprennent le versement de la somme de 208.406,13 EUR réalisé en janvier 2023, précision étant faite que jusque là, les prélèvements effectués par les autres associés étaient largement supérieurs aux siens, comme le démontrent les tableaux de répartition au titre des exercices 2020, 2021 et 2022 (compte arrêté au 31 août 2022).

Ensuite, elle indique avoir toujours justifié de sa situation auprès de la SCP et fait valoir qu'elle n'a jamais perçu la moindre somme de la part de l'assurance Groupama ou de l'assurance emprunteur, le syndrome dépressif dont elle souffre n'étant pas couvert par les polices souscrites. Elle relève qu'en toutes hypothèses, aucun texte légal ou statutaire ne prévoit la moindre suppression de la rémunération en cas de défaut de justification de l'indisponibilité ou de perception de l'indemnité d'assurance, la rémunération en capital demeurant garantie en tout état de cause.

Enfin, elle soutient qu'outre le fait que le refus de débloquer son compte courant constitue un trouble manifestement illicite, il est à l'origine d'un dommage imminent. Ainsi, elle fait valoir que le déblocage de son compte courant d'associé lui a permis de régler la somme de 117.352 EUR au titre de ses impôts dus pour l'exercice 2021, ce qu'elle n'aurait pas pu faire sans ce déblocage, et que si elle devait rembourser la somme de 208.406,13 EUR, elle serait confrontée à des difficultés financières considérables qui l'empêcheraient de faire face à ses charges personnelles et professionnelles ainsi qu'au paiement de son impôt.

Sur la communication des documents comptables et sociaux de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], l'intimée expose que sa demande répond aux différents critères puisqu'elle est formulée avant tout procès au fond et est justifiée par la perspective d'un litige futur et un motif légitime, conformément à l'article 145 du code de procédure civile.

Elle précise que les documents communiqués sous la menace d'une astreinte font apparaître d'importantes anomalies comptables et que le grand livre comptable met notamment en évidence des « détournements » constitutifs d'abus de confiance. Elle indique encore que si la quasi-totalité des documents ont été communiqués, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] s'obstine à ne pas communiquer les relevés de cartes bancaires des associés au titre de l'exercice 2022, alors même que le grand livre comptable fait apparaître des dépenses exorbitantes et suspectes, de sorte qu'elle a intérêt à la confirmation de l'ordonnance déférée concernant la communication de pièces.

Aux termes de ses écritures, Mme [G] [I] soutient encore que la demande de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] aux termes de laquelle il est demandé à la cour de « constater et prendre acte de l'exercice de son droit de retrait » constitue une demande nouvelle au sens de l'article 563 du code de procédure civile qui ne peut donc prospérer. Elle ajoute que cette demande nouvelle constitue en tout état de cause une man'uvre pour la contraindre à régulariser un protocole de cession totalement disproportionné qu'elle ne peut accepter puisqu'il est assorti d'un ensemble de clauses visant à réduire sensiblement le prix de cession, et ce s'agissant notamment de la question du compte courant d'associé et de la présence d'une clause de garantie de passif couvrant des contentieux prud'homaux relatifs à des procédures pour harcèlement de salariés auxquelles elle est totalement étrangère.

A titre subsidiaire, elle se prévaut des articles 378 et 379 du code de procédure civile pour solliciter un sursis à statuer dans l'attente de l'expertise ordonnée par la décision de référé du 20 décembre 2022 qui permettra de déterminer la position de son compte courant d'associé à la date de sa sortie, après la prise en compte des réintégrations qui s'imposeront.

Enfin, elle forme un appel incident concernant l'indemnité allouée en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les frais engagés lors de la procédure de première instance étant en réalité largement supérieurs, et relève, s'agissant de la procédure d'appel, qu'en plus des honoraires de ses propres conseils, elle doit supporter à hauteur de sa quote-part le coût des honoraires des conseils adverses qui sont inscrits en charges dans la comptabilité de la SCP.

La clôture de la procédure est intervenue le 9 mai 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 15 mai 2023, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, le 7 juillet 2023.

MOTIFS

SUR LA DEMANDE DE PROVISION AU TITRE DU COMPTE COURANT D'ASSOCIE

L'article 834 du code de procédure civile dispose : ' Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en justice toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. '

Par ailleurs, l'article 835 de ce même code énonce : ' Le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation, même s'il s'agit d'une obligation de faire.'

La SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], appelante, conclut au rejet de la demande en paiement de Mme [G] [I] formée à titre provisionnel en visant dans le dispositif de ses écritures l'article 834 du code de procédure civile, indiquant dans ce même dispositif : ' juger que la demande de condamnation au versement d'une provision au titre du compte courant excède les pouvoirs du juge des référés car nécessitant un arrêté comptable et pouvant compromettre l'activité de la SCP GMBG '.

Toutefois, il sera noté qu'elle ne développe aucune argumentation concernant l'application de ces dispositions, ne faisant pas notamment référence à la notion d'urgence, mais soutient en réalité que la demande de provision de Mme [G] [I] se heurte à des contestations sérieuses. Aussi, sa demande d'infirmation de l'ordonnance déférée trouve son fondement dans l'article 835 alinéa 2 précité, le fait que celui-ci ne soit pas mentionné dans le dispositif de ses écritures important peu.

Pareillement, il sera observé que si Mme [G] [I] vise également les dispositions de l'article 834 du code civil dans le dispositif de ses écritures, les moyens développés dans le corps de ses conclusions démontrent que ce sont les dispositions de l'article 835 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile qui constituent le fondement de sa demande.

Aussi, il convient, étant encore observé que les dispositions de l'article 834 du code de procédure civile n'ont pas vocation au cas d'espèce à s'appliquer dès lors qu'il ne s'agit pas de prononcer une mesure conservatoire, que la demande de provision doit, en premier lieu, être appréhendée au regard des dispositions de l'article 835 alinéa 2 précité dont le premier juge a fait application.

Il est constant, en application de ces dispositions, que le montant de la provision en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée. Aussi, la condamnation provisionnelle ne doit pas excéder le montant non sérieusement contestable de l'obligation mais il doit dans le même temps être fait droit à la demande de condamnation provisionnelle pour son montant non sérieusement contestable, même si une partie seulement de la somme demandée peut être ainsi qualifiée.

Par ailleurs, il est de principe qu'une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Dans le cas présent, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] font valoir, pour conclure à l'infirmation de l'ordonnance déférée, que la demande en paiement formée par Mme [G] [I] au titre de son compte courant d'associé se heurte à des contestations sérieuses, s'agissant plus particulièrement de la détermination de son solde.

Les parties s'accordent pour convenir qu'au sein d'une SCP, le compte courant des associés correspond à l'affectation de leur quote-part de bénéfices. Dans le cas présent, si l'existence du compte courant d'associé n'est pas expressément citée dans les statuts de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], ce sont les stipulations des statuts de la SCP consacrées aux résultats sociaux (titre IV) qui permettent d'en circonscrire les contours et le régime.

L'article 20 ' EXERCICE SOCIAL énonce : ' Chaque exercice social a une durée d'une année qui commence le 1er janvier et finit le 31 décembre. '

Par ailleurs, l'article 21 ' ETABLISSEMENT DES COMPTES dispose : ' A la fin de chaque exercice, la gérance établit l'inventaire de l'actif et du passif, les comptes sociaux et le bilan.

('.).'

L'article 22 ' BENEFICES prévoit encore : 'Le bénéfice net est constitué par l'excédent des recettes sur les dépenses telles que stipulées à l'article précédent.

Le bénéfice distribuable est constitué par le bénéfice net de l'exercice, diminué des pertes antérieures et augmenté du report bénéficiaire.'

L'article 23 ' REPARTITION DES BENEFICES complète ces stipulations en fixant les modalités de répartition des bénéfices. Il édicte que 60 % des bénéfices sont répartis entre les associés et leurs ayants droit proportionnellement au nombre de parts en capital qu'ils détiennent et que les 40 autres % sont répartis entre les huissiers de justice en fonction de leurs parts en industrie, les droits en industrie pouvant être soumis à réduction puis à suppression selon des modalités précisément définies en cas d'indisponibilité de l'associé empêché d'exercer ses fonctions. Enfin, l'article 25 ' ACOMPTES SUR LES BENEFICES instaure un mécanisme d'acompte mensuel sur la part distribuable à chaque associé en fin d'exercice.

La SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] a effectué, sous la signature de Me [B] [Z], en date du 9 mai 2022, la déclaration du résultat fiscal de l'exercice 2021. Cette déclaration établie sur la base des comptes dressés par le cabinet d'expertise comptable AC Conseils, fait mention d'un résultat fiscal de 1.633.275 EUR et précise la répartition des bénéfices entre les associés, le montant du bénéfice attribué à Me [G] [I] (autrement désigné sous la dénomination 'résultat net de l'associé') s'élevant au titre de l'exercice 2021 à la somme de 303.181 EUR. C'est d'ailleurs sur la base de cette somme déclarée à l'administration fiscale que Mme [G] [I] a été imposée pour un montant de 117.352 EUR, selon l'avis d'imposition de l'année 2022 pour les revenus de l'année 2021.

Ce compte est définitif au titre de l'année considérée et n'est au demeurant pas remis en cause par les parties. Le tableau de répartition du résultat établi par le cabinet AC Conseils transmis à Mme [G] [I] par mail du 12 mai 2022 précise, sur la base du résultat de trésorerie de l'année 2021 et après imputation du compte courant d'associé existant au 31 décembre 2021, des charges sociales personnelles à cette date et des acomptes perçus au cours de ce même exercice, le solde revenant à chaque associé et figurant sur son compte courant d'associé, avec la mention 'solde à prélever au 31 décembre 2021'. Selon ce tableau de répartition, la somme à prélever correspondant au compte courant d'associé de l'intimée était à la date du 31 décembre 2021 de 208.406,13 EUR.

Ce chiffrage, s'agissant des éléments comptables afférents à l'exercice 2021 retenus par le cabinet AC Conseils, n'est pas contesté de sorte qu'il y a lieu de le tenir pour exact.

Aux termes de ses écritures, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] fait cependant valoir que Mme [G] [I] ne peut prétendre au paiement à titre provisionnel de cette somme, motif pris, en substance, que ce compte courant d'associé a évolué depuis le 31 décembre 2021, devra faire l'objet d'un retraitement et ne pourra en définitive être arrêté qu'à la date du retrait de l'intimée, après l'expertise mise en oeuvre, l'ensemble de ces éléments devant conduire à retenir l'existence de contestations sérieuses.

Ce moyen n'est toutefois étayé par aucune disposition légale ou statutaire et apparaît en réalité contraire aux modalités d'attribution et de répartition des bénéfices telles que résultant des statuts. Ainsi, il s'évince des statuts que chaque associé qui a droit à sa quote-part de bénéfices peut, à cette fin et sans que les statuts ne soumettent l'exercice de ce droit à des conditions particulières ou à une procédure spécifique, revendiquer le prélèvement du solde lui revenant au titre de l'exercice considéré dès lors que les comptes sont définitifs. A cet égard, il n'est pas sans intérêt de relever que la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] ne soutient pas qu'elle se serait opposée à l'exercice par ses autres membres de ce droit, n'alléguant pas davantage que ces derniers seraient soumis, chaque année, à une procédure de retraitement ou devraient attendre leur retrait pour profiter de leurs quote-parts de bénéfices. En outre, ainsi que le fait valoir Mme [G] [I], il n'y a pas lieu, au titre de l'exercice 2021, de prendre en compte l'existence de charges dont elle serait le cas échéant redevables au titre de l'exercice 2022, voire de l'exercice 2023, qui ne se rapportent pas à l'exercice objet du litige. Et comme elle le souligne à juste titre, il ne peut être tenu compte en tout état de cause d'éléments comptables qui ne sont que provisoires et par voie de conséquence incertains, étant eux-même susceptibles d'évoluer. A cet égard, il sera observé que le solde déficitaire de ' 60.594,35 EUR arrêté au 31 mars 2023 n'a aucune pertinence dès lors qu'il inclut le versement de la somme de 208.406,13 EUR effectué en janvier 2023. En outre, il sera noté que seul l'établissement définitif des comptes pour l'année 2022, dont il n'est pas justifié à ce jour, permettra de déterminer le résultat fiscal de la SCP pour cette année-là et, le cas échéant et sans que cela n'ait aucune incidence sur les exercices passés pour lesquels les associés ont procédé à un prélèvement, les droits des associés à une répartition des bénéfices au titre de cet exercice. De plus, il sera souligné que c'est de manière erronée que l'appelante soutient que Mme [G] [I] ne pourrait plus prétendre à aucune rétribution du fait de son absence de travail, les statuts prévoyant, ainsi que cela a été rappelé, que l'associé peut toujours prétendre à la répartition des bénéfices résultant de sa participation au capital social de la SCP, seul le droit aux bénéfices résultant de son industrie étant soumis à réduction, puis suppression.

Il s'ensuit que, s'il est constant qu'il devra être procédé à une nouvelle évaluation du compte courant d'associé de Mme [G] [I] à la date de son retrait, la demande de provision présentée par l'intéressée au titre de l'exercice 2021 ne se heurte, s'agissant de comptes qui ont été validés et ont donné lieu à déclaration auprès de l'administration fiscale, à aucune contestation sérieuse, le refus de paiement opposé par la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], qui s'inscrit de toute évidence dans le cadre du conflit qui l'oppose à Mme [G] [I] s'agissant notamment de son retrait, ne reposant sur aucune disposition légale ou statutaire. En outre, il sera souligné que les difficultés de trésorerie avancées de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] ne sont pas de nature à faire obstacle à la demande de provision, cette circonstance étant en tout état de cause inopérante. Enfin, il sera précisé, au regard des éléments qui précèdent, qu'il en est de même du surplus des observations développées par l'appelante, et relevé que la demande de sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise est ainsi dépourvue d'intérêt, s'agissant de l'exercice 2021.

Sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur les autres fondements invoqués par Mme [G] [I], l'ordonnance déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] à payer à titre provisionnel à Mme [G] [I] la somme de 208.406,13 EUR, sauf à préciser qu'il n'y a pas lieu au prononcé d'une astreinte.

SUR LA DEMANDE DE COMMUNICATION DE PIECES

L'article 145 du code de procédure civile dispose : ' S'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requete ou en référé.'

Ces dispositions supposent l'existence d'un motif légitime, c'est à dire d'un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet est suffisamment déterminé, qui n'est pas manifestement voué à l'échec et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Cette mesure d'instruction doit être pertinente et utile.

Dans le cas présent, il est acquis qu'une grave mésentente oppose Mme [G] [I] à la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], chaque partie reprochant à l'autre des griefs et fautes multiples pouvant engager sa responsabilité civile et/ou pénale. En outre, la question du retrait de Mme [G] [I] est source de difficultés, observation à ce propos étant faite que si le principe d'un retrait de l'intéressée est admis, les conditions de ce retrait font partiellement l'objet de désaccords, et ainsi que le souligne à juste titre l'intimée, la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] a été autorisée, lors de l'assemblée générale du 28 février 2022, à ester en justice pour obtenir ce retrait.

De ces éléments, il ressort que l'existence d'un procès à venir, qui n'est pas manifestement voué à l'échec, est plausible, et Mme [G] [I] justifie d'un motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile, la communication des pièces sollicitées devant lui permettre d'appréhender dans le détail la situation comptable et sociale de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], ce qui n'a pas été le cas jusqu'à présent suite à l'arrêt de son activité au sein de l'étude.

Aussi, l'ordonnance déférée sera confirmée de ce chef, sauf à dire que l'astreinte prononcée sera limitée à une durée de six mois en application des articles L. 131-1 et R. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution. En outre, il sera relevé qu'il a été procédé depuis à la transmission de la totalité ou quasi-totalité des pièces visées, précision étant faite qu'il appartient à Mme [G] [I], si elle estime que des pièces manquent, de saisir la juridiction compétente de toutes difficultés dans l'exécution de l'ordonnance.

SUR LA DEMANDE AU TITRE DU RETRAIT

Les demandes de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] tendant à 'constater et prendre acte de l'exercice de son droit de retrait par Mme [I]' et à 'constater et prendre acte de l'accord de la SCP GMBG sur l'exercice du droit de retrait par Mme [I]' ne constituent pas des demandes au sens de l'article 4 du code de procédure civile, n'ayant pas pour objet de trancher une question ou un litige qui au demeurant n'est pas vidé au cas d'espèce dès lors que les parties sont en désaccord sur les conditions du retrait, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer. Surabondamment, il sera noté, dans l'hypothèse où l'on considérerait qu'il s'agit bien de demandes au sens de ces dispositions, que celles-ci seraient nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile et partant, irrecevables.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE

Le premier juge a justement apprécié, en équité, le montant de l'indemnité allouée à Mme [G] [I] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En outre, c'est à bon droit, au regard de la décision rendue, qu'il a débouté la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] de sa demande présentée à ce titre.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande également, en cause d'appel, de faire application de ces dispositions en faveur de Mme [G] [I] qui obtiendra donc à ce titre la somme de 3.000 EUR.

La SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I], qui succombe, sera déboutée de sa demande en cause d'appel présentée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort :

Dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer,

Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour l'ordonnance de référé rendue le 20 décembre 2022, sauf à préciser qu'il n'y a pas lieu au prononcé d'une astreinte en ce qui concerne la condamnation provisionnelle au paiement de la somme de 208.406,13 EUR et que l'astreinte prononcée au titre de la condamnation à la communication de pièces sera limitée à une durée de six mois,

Et y ajoutant,

Dit que les demandes de la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] tendant à 'constater et prendre acte de l'exercice de son droit de retrait par Mme [I]' et à 'constater et prendre acte de l'accord de la SCP GMBG sur l'exercice du droit de retrait par Mme [I]' ne constituent pas des demandes au sens de l'article 4 du code de procédure civile,

Dit en conséquence que la cour n'est saisie d'aucune demande à ce titre,

Condamne la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] à payer à Mme [G] [I], en cause d'appel, la somme de 3.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] de sa demande présentée à ce titre,

Condamne la SCP [B] [Z] - [S] [P] - [C] [J] - [G] [I] aux entiers dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 23/00024
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;23.00024 ?
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