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07/07/2023 | FRANCE | N°22/03693

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 07 juillet 2023, 22/03693


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/03693 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IT57



NG



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

17 octobre 2022

RG:



[H]



C/



[G]

[L]

S.A.S. [S] [Y] ET [R] [L], NOTAIRES ASSOCIÉS





Grosse délivrée

le

à















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B





ARRÊT DU 07 JUILLET 2023





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 17 Octobre 2022, N°



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mm...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/03693 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IT57

NG

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

17 octobre 2022

RG:

[H]

C/

[G]

[L]

S.A.S. [S] [Y] ET [R] [L], NOTAIRES ASSOCIÉS

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 07 JUILLET 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 17 Octobre 2022, N°

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Mai 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [A] [H]

née le 05 Mars 1975 à [Localité 6] (CAMBODGE)

'[Adresse 2]

[Adresse 2]

CAMBODGE

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Laurence MIARA BENADIBA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Monsieur [K] [O] [Z] [G]

né le 17 Octobre 1972 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Carine REDARES de la SELARL RS AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON, substituée par Me Sarah GIGANTE, avocat au barreau d'AVIGNON

Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [R] [L]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Romain LEONARD de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Barthélemy LACAN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. [S] [Y] ET [R] [L], NOTAIRES ASSOCIÉS

immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 752 670 539

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Romain LEONARD de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Barthélemy LACAN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture du 9 mai 2023, révoquée sur le siège sur demande conjointe des parties et clôturée à nouveau au jour de l'audience avant l'ouverture des débats,

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 07 Juillet 2023,par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

M. [K] [G], de nationalité française, et Mme [A] [H], originaire du Cambodge, ont vécu en concubinage sous le régime d'un pacte civil de solidarité et sont parents de deux enfants, [P] [G], né le 5 février 2007, et [T] [G], né le 9 octobre 2011. Suite à leur séparation, plusieurs procédures ont été engagées pour mettre fin à leur indivision patrimoniale et organiser la vie des enfants entre leurs deux parents.

Ainsi, la résidence des enfants a été fixée au domicile de la mère par un jugement du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Avignon du 24 janvier 2017, puis transférée au domicile du père à compter de l'été 2018, avec l'exercice d'un droit de visite et d'hébergement pour l'autre parent. Estimant que les enfants étaient en danger chez le père, Mme [H] a vainement réclamé la résidence de ceux-ci au printemps 2020 et a saisi le juge des enfants, qui a ouvert une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert.

Durant l'été 2022, Mme [H] est partie en congé au Cambodge emmenant ses enfants avec l'autorisation du père pour un séjour d'un mois, mais elle ne les a pas ramenés en France depuis.

M. [K] [G], ignorant tout du lieu et des conditions de vie de ses enfants, a entre autres procédures, par exploit d'huissier de justice du 9 septembre 2022, fait assigner Mme [A] [H], Maître [R] [L] et la SCP [Y]-[L], notaires associés, devant le président du tribunal judiciaire d'Avignon, statuant en référé, afin de voir :

-ordonner la communication, sous astreinte, des actes de vente en cours de publication, passés aux intérêts de Mme [A] [H], ainsi que du compromis de vente du bien situé à [Localité 7],

-ordonner la communication de l'adresse actuelle de Mme [A] [H],

-ordonner le séquestre des fonds, détenus par le notaire, provenant de la vente des biens immobiliers appartenant à Mme [A] [H], entre les mains de Me [R] [L] ou auprès de la Caisse des dépôts et consignations,

-condamner Mme [A] [H] au paiement d'une somme de 2 500 €, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance réputée contradictoire du 17 octobre 2022, le président du tribunal judiciaire d'Avignon a :

Au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront,

Mais dès à présent,

-autorisé Maître [R] [L] et la SCP [Y]-[L] à remettre à M. [K] [G], dans les quinze jours de la notification de la présente décision et aux frais de Mme [A] [H], copie de l'ensemble des actes de vente reçus en leur étude et portant sur les biens immobiliers appartenant ou ayant appartenu à Mme [A] [H],

-ordonné, à défaut, cette remise dans le délai indiqué,

-ordonné le séquestre de la totalité des fonds, détenus ou à détenir par l'étude notariale [Y]-[L], entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations,

-rejeté toutes autres demandes,

-condamné Mme [A] [H] à payer à M. [K] [G] la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Mme [A] [H] aux entiers dépens.

Par déclaration du 18 novembre 2022, Mme [A] [H] a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a débouté M. [G] de sa demande de condamnation provisionnelle à son encontre.

Par ordonnance du président de la chambre, sur incident, en date du 17 avril 2023, les conclusions déposées par l'appelante ont été déclarées irrecevables, à défaut d'indication de son domicile actuel au Cambodge, où elle réside avec ses enfants.

Par des écritures transmises par RPVA en date du 9 mai 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, Mme [A] [H], appelante, demande à la cour, au visa de l'article 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de l'article 544 du code civil et de l'article 835 du code de procédure civile, de :

-infirmer l'ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire d'Avignon en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a débouté M. [G] de ses demandes de condamnation provisionnelle de Mme [H] et de communication de pièces sous astreinte,

Statuant à nouveau,

-juger que les conditions de l'article 835 du code de procédure civile ne sont pas réunies,

En conséquence,

-ordonner la restitution à Maître [R] [L] et la SCP [Y]-[L] de la copie de l'ensemble des actes de vente reçus en leur étude et portant sur les biens immobiliers appartenant ou ayant appartenu à Mme [A] [H],

-ordonner la levée du séquestre de la totalité des fonds, détenus ou à détenir par l'étude notariale [Y]-[L], entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations,

-condamner M. [G] à la somme de 5 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner M. [G] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Avoue Pericchi, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, Mme [A] [H] fait valoir que les conditions posées par l'article 835 du code de procédure civile ne sont pas réunies et qu'en conséquence, l'autorisation judiciaire de communication par Maître [R] [L] et la SCP [Y]-[L] à M. [G] de la copie de l'ensemble des actes de vente reçus en leur étude et portant sur les biens immobiliers lui appartenant ou lui ayant appartenu et l'autorisation de séquestre judiciaire du produit de la vente entreprise sont des mesures abusives qui devront être levées.

Elle explique dans un premier temps qu'aucun trouble manifestement illicite et qu'aucun dommage imminent ne sont établis, au mépris des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, étant donné qu'aucun trouble réel n'existe, qu'aucun lien de causalité n'est établi entre l'exercice des droits parentaux de M. [G] et la vente de ses biens, et qu'aucun motif impérieux ne justifie une atteinte au droit de propriété, droit fondamental et essentiel. Elle ajoute que le dommage imminent ne peut reposer sur de simples soupçons, ni sur de simples craintes et qu'il est indispensable d'administrer la preuve de données concrètes et tangibles qui révèlent une situation de risque irréversible. Elle soutient qu'aucun trouble réel n'existe, qu'aucun lien de causalité n'est établi et qu'aucun motif impérieux ne justifie une atteinte à ses droits fondamentaux.

Sur l'absence de bien-fondé de l'autorisation de communication ordonnée, elle expose qu'il résulte de la combinaison de l'article 20 du règlement national des notaires, de l'article 23 de la loi du 25 ventôse an XI et de l'article 835 du code de procédure civile, que la levée du secret professionnel au profit de tiers ne se justifie que sur la base de risque avéré de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite, qui ne sont pas établis dans le cas d'espèce.

Sur l'absence de bien-fondé de la mesure de séquestre ordonnée, elle soutient que la constitution d'un séquestre judiciaire portant sur le produit de la vente de ses biens viole à l'évidence le droit absolu de disposer, d'aliéner et de percevoir les produits ainsi que les fruits du bien dont elle est propriétaire. Elle rappelle, à ce titre, que la violation du droit de propriété, droit fondamental, traduit l'existence d'un trouble manifestement illicite qui doit impérativement cesser.

En réponse aux conclusions de M. [G], elle assure que les enfants ont exprimé leur volonté de ne pas retourner vivre en France à leur arrivée au Cambodge, raison pour laquelle elle a été contrainte de vendre des éléments de son patrimoine pour assainir sa situation financière et faire face aux charges qu'elle avait à assumer dans l'intérêt de ses enfants, avec lesquels elle entretient une proximité indéniable, alors que leur père a sur eux une influence négative attestée par les psychologues qu'elle a consultés. Elle considère que sa charge fiscale en France est trop importante et préfère opter pour un choix rationnel d'installation au Cambodge où les placements financiers sont plus attractifs. Ainsi, elle souligne qu'elle ne fuit pas au Cambodge mais y investit de manière adéquate.

M. [K] [G], en sa qualité d'intimé, par conclusions en date du 10 mai 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour de :

-juger les conclusions notifiées par Mme [H] irrecevables quant à l'absence de justification de son domicile,

-confirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a :

« - autorisé Me [R] [L] et la SCP [Y] à remettre une copie des actes de vente reçus par l'étude ;

- ordonné le séquestre de la totalité des fonds détenus ou à détenir ;

- condamné Mme [H] au paiement de la somme de 2.500 €, outre les dépens. »

-condamner Mme [H] à communiquer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au prononcé de la décision, les actes de vente des biens situés à [Localité 12], [Localité 8] et [Localité 13], ainsi que le compromis de vente de la maison de [Localité 7],

-infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la demande provisionnelle présentée et condamner Mme [A] [H] au paiement de la somme provisionnelle de 38 543,10 € au titre des frais engagés par le père pour rémunérer un détective et un avocat sur place,

-condamner Mme [A] [H] au paiement de la somme provisionnelle de

30 000  € au titre des préjudices moraux et d'anxiété.

-en tout état de cause, condamner Mme [A] [H] au paiement de la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles pour l'instance d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

Après avoir présenté sa version des faits concernant le départ de ses enfants qu'il qualifie d'enlèvement, l'intimé fait valoir tout d'abord l'irrecevabilité des dernières conclusions déposées par Mme [A] [H] arguant que le domicile dorénavant renseigné ne remplit pas les conditions requises par les articles 960 et 961 du code de procédure civile.

Il soutient ensuite qu'au visa des articles 10 du code civil, 138 et 139 du code de procédure civile, la demande de communication des actes de cession immobilière conclut par Mme [H] est légitime afin qu'il puisse établir auprès des juridictions familiales et pénales le dessein de Mme [A] [H] de s'installer définitivement au Cambodge, pays dans lequel les fonds recueillis sont progressivement virés, et démontrer l'élément intentionnel de l'infraction de soustraction frauduleuse de mineurs.

Il indique que la mesure de séquestre du produit de la vente de [Localité 7] est fructueuse puisqu'elle a incité Mme [H] à se défendre devant cette juridiction et qu'elle doit être maintenu le temps de la procédure pénale. Il considère qu'il s'agit d'une mesure conservatoire que le juge des référés peut prendre, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, lequel doit contrôler la proportionnalité entre la mesure prise et l'éventuel droit atteint, le juge restant souverain dans le choix de la mesure. A ce titre, en parallèle du droit de propriété invoqué par Mme [H], il rappelle disposer d'un droit au respect de sa vie familiale, en vertu de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ainsi qu'au respect des décisions judiciaires, protecteurs de ses droits paternels, que Mme [H] a bafoués.

Il considère donc subir un trouble manifestement illicite du fait de ladite rétention, constituant une violation par Mme [A] [H] de ses droits paternels, soulignant qu'aucun des reproches formulés à son encontre n'est étayé et qu'il a assumé la résidence de ses enfants pendant plusieurs années.

Il forme un appel incident pour solliciter la communication par Mme [H] des actes de vente de quatre biens immobiliers, sous astreinte de 100€ par jour de retard, qui permettra de confirmer l'organisation du départ de France, ainsi que la condamnation de l'appelante à une première indemnité provisionnelle au titre des frais engagés pour retrouver ses enfants à l'international et une seconde au titre des préjudices moraux et d'anxiété causés par cette situation.

M. [R] [L] et la SAS [S] [Y] et [R] [L], notaires associés, en leur qualité d'intimés, par conclusions en date du 20 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demandent à la cour de :

-donner acte aux concluants et juger de leur rapport à justice sur la demande d'irrecevabilité de l'appel formée par M. [G],

-donner acte aux concluants et juger de leur rapport à justice sur les demandes dont la Cour est saisie, d'infirmation ou de confirmation de l'ordonnance entreprise en ses divers chefs,

-condamner in solidum Mme [A] [H] et M. [K] [G] à payer aux concluants la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner in solidum Mme [A] [H] et M. [K] [G] aux entiers dépens, de première instance et d'appel, et dire que la Selarl Leonard, avocat postulant, pourra, en application de l'article 699 du code de procédure civile, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont elle déclarera avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.

Les intimés indiquent s'en rapporter à la justice sur la demande de communication des actes de vente et sur la demande de séquestre de fonds.

Ils rappellent toutefois que cette communication d'actes sollicitée, qui se heurte au secret professionnel auquel les notaires sont tenus, ne peut s'envisager et être décidée au visa des articles 145 et 835 du code de procédure civile, la demande ne pouvant se fonder que sur l'article 23 de la Loi de Ventôse.

Ils expliquent que le secret professionnel leur interdit en principe de délivrer des copies d'actes dressés en leur étude, communication qui leur est en principe interdite à toute personne autre que les parties à ces actes, leurs représentants ou ayants-droits. Ils ajoutent que ce principe d'interdiction est tempéré par le pouvoir reconnu par la loi au président du tribunal de délier le notaire de ce devoir et de l'autoriser à communiquer un acte dont il est dépositaire, c'est-à-dire un acte notarié dressé en l'étude au sein de laquelle il exerce, à toute personne qui justifie d'un motif légitime à sa connaissance.

La clôture de la procédure est intervenue le 15 mai 2023, jour de l'audience, avant l'ouverture des débats. Mme [H] a été autorisée à communiquer en cours de délibéré un justificatif de l'adresse mentionnée dans ses dernières conclusions. L'affaire a été mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 7 juillet 2023.

Mme [H] a adressé par RPVA le justificatif attendu le 17 mai 2023.

Par note en délibéré du 3 juillet 2023, M. [G] a sollicité le rejet de toutes les conclusions de Mme [H], au motif que la domiciliation qu'elles mentionnent serait inexacte, preuves à l'appui.

En réponse, le 4 juillet 2023, Mme [H] a réclamé une prorogation du délibéré pour pouvoir y répondre.

MOTIFS DE LA DECISION :

-Sur les notes en délibéré :

Une procédure n'est retenue à l'audience que lorsqu'elle est en état. Aucune des parties n'a sollicité le report de cette affaire à l'audience du 15 mai 2023.

Les notes en délibéré ne sont recevables que si elles ont été autorisées par la cour avant la clôture des débats. La note transmise par Mme [H] le 17 mai 2023 était autorisée et est donc recevable.

Les notes transmises ultérieurement n'ont pas été autorisées, alors que des réserves auraient pu être formulées lors des débats.

Dans ces conditions, les conclusions, pièces et notes communiquées par RPVA postérieurement au 18 mai 2023 doivent être déclarées irrecevables.

-Sur la recevabilité des dernières conclusions de Mme [H] :

Il résulte des articles 960 et 961 du code de procédure civile que, devant la cour d'appel, les conclusions d'une partie au procès ne sont recevables que si elles mentionnent un certain nombre d'indications et notamment le domicile de l'intéressé.

Les conclusions antérieures à celles du 9 mai 2023 transmises par l'appelante ont été déclarées irrecevables par le président de la chambre, par une ordonnance en date du 17 avril 2023, dans la mesure où Mme [H] se domiciliait à [Localité 7], alors qu'un faisceau d'éléments concordants établissait qu'elle résidait au Cambodge avec ses enfants.

Dans ses dernières écritures, Mme [H] se domicilie à [Localité 10], à une adresse précise, confirmée par une attestation, régulièrement traduite, de M. [F] [I], chef du quartier de [Adresse 11], et de M. [X] [I], chef du village de [Localité 9], en date du 15 mai 2023.

Il suffit que cette adresse, régulièrement attestée comme étant celle de son domicile, soit communiquée pour que la procédure soit régularisée et que la sauvegarde des droits de M. [G] soit assuré.

Dès lors, les dernières conclusions transmises par Mme [H] le 9 mai 2023 seront déclarées recevables.

-Sur la communication des actes reçus par l'étude notariale, partie à la procédure :

M. [G] a obtenu en première instance que Me [L] et la SCP [Y]-[L] soient déliés de leur secret professionnel attaché aux actes passés par l'étude notariale afin qu'ils lui remettent copie de l'ensemble des actes de vente reçus par eux portant sur des biens immobiliers appartenant ou ayant appartenu à Mme [H].

Cette disposition est contestée en appel par l'appelante, au visa de l'article 20 du règlement des notaires, l'article 23 de la loi du 25 ventôse an XI et de l'article 835 du code de procédure civile, à défaut de trouble manifestement illicite ou de risque avéré de dommage imminent.

Il s'avère que les dispositions des articles 138 et 142 du code de procédure civile relatives à la production en justice des actes authentiques détenus par une partie ou des tiers ne peuvent déroger à l'article 23 de la loi du 25 ventôse an XI, modifié par l'ordonnance du 19 septembre 2000 organisant une procédure spéciale pour la divulgation des actes des notaires, suivant laquelle le président du tribunal judiciaire a pouvoir de statuer sur la dérogation sollicitée sans avoir à rechercher si les conditions de l'article 835 du code de procédure civile sont réunies.

En effet, les notaires ne peuvent, sans une ordonnance du président du tribunal judiciaire, délivrer d'expédition ni donner connaissance des actes à d'autres qu'aux personnes intéressées en nom direct, héritiers ou ayants droit, à peine de dommages et intérêts et d'une amende.

Ainsi, le juge civil a le pouvoir d'ordonner à un notaire de déroger au secret professionnel, qui s'impose à lui, notamment lorsque les actes dont il dispose recèlent des renseignements indispensables à la manifestation de la vérité, à l'exécution d'une décision de justice ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Or, tel est le cas en l'espèce, puisque lors de l'engagement de la procédure en septembre 2022, M. [G] pouvait se prévaloir d'une décision de justice fixant la résidence de ses enfants à son domicile, mais il était sans aucune nouvelle de ceux-ci après la rentrée scolaire alors qu'il les avait autorisés à partir en juillet avec leur mère au Cambodge pour un séjour touristique au sein de leur famille maternelle. Il ignorait et ignore toujours leur lieu d'habitation. Il n'a plus de contact direct avec eux. Ses droits de parent sont bafoués en violation des décisions du juge aux affaires familiales en date des 26 juillet 2018, 5 mai 2020 et 29 novembre 2022.

Sa demande de communication des actes de vente diligentés par Mme [H] concernant son patrimoine immobilier en France se justifie par les renseignements qu'ils recèlent permettant à M. [G] de parvenir à la caractérisation de l'infraction d'enlèvement d'enfants, délit faisant depuis l'objet d'une instruction pénale et ayant justifié qu'un mandat d'arrêt soit émis à l'encontre de Mme [H].

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge a levé le secret professionnel notarial et ordonné la communication des actes authentiques passés dans cette étude. Cette disposition sera donc confirmée.

-Sur la communication des actes ou compromis de vente conclus par Mme [H]:

Cette demande, précisée en appel et déclarée irrecevable en première instance, se fonde à juste titre sur les articles 10 du code civil, 138 et 139 du code de procédure civile. Elle porte sur quatre actes relatifs à la cession de biens immobiliers appartenant à l'appelante. Elle entre dans les pouvoirs du juge des référés par référence aux dispositions de l'article 145 du code de procédure civile.

Il résulte des conclusions et des pièces de M. [G] que celui-ci a déjà obtenu par le service de la publicité foncière l'identification des biens immobiliers en cause, la date de ces actes et même pour certains le montant de la transaction. De plus, l'enquête pénale suivant son cours, des investigations sont menées par les officiers de police judiciaire sur les comptes bancaires dont Mme [H] est titulaire, desquelles il résulte des transferts d'argent conséquents de la France vers le Cambodge, que Mme [H] ne conteste pas.

Monsieur [G] soutient pour sa part que la mère de ses enfants organise ainsi la subsistance de sa famille au Cambodge et que la communication des actes qu'il sollicite permettra de confirmer l'organisation du départ de l'appelante de France. Mme [H] lui rétorque qu'elle souhaite investir dorénavant dans son pays d'origine.

La problématique ainsi présentée devra être tranchée par une autre juridiction, mais, au cas d'espèce, la production des actes de vente sollicitée n'apportera aucune preuve supplémentaire exploitable, en l'état des investigations diligentées. Cette mesure n'est donc pas fondée sur un motif légitime.

M. [G] sera donc débouté de cette demande.

-Sur le séquestre des fonds détenus ou à détenir par l'étude notariale [Y]-[L] :

Sur le fondement de l'article 835 du code de procédure civile, le premier juge a ordonné la séquestration des fonds issus de la vente du bien immobilier situé à [Localité 7] à la Caisse des Dépôts et Consignations, retenant l'existence d'un péril imminent. Il a considéré que l'encaissement de ce prix de vente par Mme [H] condamnerait M. [G] à ne plus jamais revoir ses enfants.

L'analyse de la situation familiale s'avère cependant bien plus complexe qu'il n'y paraît au premier abord, notamment en considération de l'âge des enfants. Sans qu'il y ait lieu de développer les relations intrafamiliales résultant notamment des pièces du dossier du juge des enfants, versées aux débats, il sera observé qu'[P] et [T] sont au Cambodge depuis bientôt une année, que leur domiciliation dans ce pays est pour lors un fait, en infraction aux droits reconnus au profit de leur père.

Même si Mme [H] est responsable de cette situation, l'encaissement par l'appelante d'un capital provenant d'un bien lui appartenant en propre ne crée aucun péril imminent, d'autant qu'elle a perçu depuis plusieurs mois des sommes issues de la cession d'autres biens qu'elle possédait en France.

Dans ces conditions, il n'est rapporté la preuve d'aucun péril imminent, ni même d'un trouble manifestement illicite, justifiant cette mesure conservatoire pendant la durée de la procédure pénale, ainsi que le soutient M. [G], raison pour laquelle la mesure de séquestre ordonnée sera réformée.

-Sur les demandes en paiement d'indemnités provisionnelles :

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

Monsieur [G] sollicite paiement, à titre provisionnel, des sommes suivantes :

-5 542.10 euros correspondant aux frais engagés auprès d'un détective privé au Cambodge pour localiser ses enfants,

-33 000 euros au titre des honoraires d'un avocat cambodgien afin d'obtenir l'exéquatur des décisions françaises,

-30 000 euros au titre des préjudices moraux et d'anxiété.

Il se fonde sur la responsabilité quasi-délictuelle de Mme [H], qui s'est vue décerner un mandat d'arrêt à son encontre le 25 novembre 2022 pour soustraction d'enfants et qui ne respecte pas le jugement exécutoire prononcé le 29 novembre 2022 par le tribunal judiciaire d'Avignon qui accorde l'autorité parentale exclusive à M. [G] et maintient leur résidence chez le père.

Toutefois, les frais qu'il invoque ne sont pas dûment justifiés puisqu'ils sont fondés :

-sur un échange de SMS avec une personne non identifiée concernant le détective privé et

-sur une note échangée avec un cabinet d'avocats cambodgien faisant état d'une proposition d'honoraires.

Il n'est produit aucune facture que M.[G] aurait réglée concernant ces postes de dépenses.

Concernant le préjudice moral, M. [G] ne produit aucune pièce à l'appui de sa demande, à l'exception des différents courriers et messages dont il est l'auteur. Celui-ci n'est donc pas suffisamment caractérisé pour qu'il soit fait droit à cette demande provisionnelle.

La demande en paiement de M. [G] sera donc rejetée.

-Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le sort des dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile ont été justement appréciés par le premier juge dont les dispositions sur ces points seront confirmés.

En cause d'appel, Mme [H] et M. [G] succombent pour partie dans le soutien de leurs prétentions respectives. Aussi, les dépens d'appel seront partagés par moitié entre eux.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile entre ces parties. En revanche, Me [Y] et la SAS [Y] [S] et [L] [R] se verront attribuer une somme de 1 500 euros, ensemble, au titre des frais irrépétibles qu'ils ont dû engager dans l'instance d'appel. Cette somme sera à la charge de Mme [H] et M. [G], in solidum.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare irrecevables les conclusions, notes et pièces communiquées par RPVA les 3 et 4 juillet 2023,

Déclare recevables les dernières conclusions transmises par Mme [H] le 9 mai 2023, ainsi que sa note en délibéré, autorisée, en date du 17 mai 2023,

Confirme l'ordonnance de référé en date du 17 octobre 2022 prononcée par le président du tribunal judiciaire d'Avignon en ce qu'elle a :

-autorisé Maître [R] [L] et la SCP [Y]-[L] à remettre à M. [K]-[G], dans les quinze jours de la notification de la présente décision et aux frais de Mme [A] [H], copie de l'ensemble des actes de vente reçus en leur étude et portant sur les biens immobiliers appartenant ou ayant appartenu à Mme [A] [H], et ordonné, à défaut, cette remise dans le délai indiqué,

-condamné Mme [A] [H] à payer à M. [K] [G] la somme de 2 500 €, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

L'infirme pour le surplus et y ajoutant,

Déboute M. [G] de sa demande tendant à condamner Mme [H] à communiquer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au prononcé de la décision, les actes de ventes des biens situés à [Localité 12], [Localité 8] et [Localité 13], ainsi que le compromis de vente de la maison de [Localité 7],

Déboute M. [G] de sa demande de séquestre des fonds détenus par l'étude notariale [Y]-[L] et provenant de la vente des biens immobiliers appartenant à Mme [A] [H] à la Caisse des dépôts et consignations, et en tant que de besoin, en ordonne la mainlevée,

Déboute M. [G] de ses demandes en paiement dirigées contre Mme [H],

Déboute Mme [H] et M. [G] de leur demande réciproque en paiement fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [G] et Mme [H] à payer à Me [Y] et la SAS [Y] [S] et [L] [R], ensemble, la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles qu'ils ont dû engager dans l'instance d'appel,

Condamne M. [G] et Mme [H] au paiement des dépens, par moitié chacun, et ordonne leur distraction par référence à l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/03693
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;22.03693 ?
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