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29/06/2023 | FRANCE | N°22/00468

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 29 juin 2023, 22/00468


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/00468 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IKXV



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

27 janvier 2022

RG:20/03215



[B]



C/



[Z]







































Grosse délivrée

le

à Selarl Riviere Gault..

.

Me Pomies Richaud















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 29 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 27 Janvier 2022, N°20/03215



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Anne DA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/00468 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IKXV

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

27 janvier 2022

RG:20/03215

[B]

C/

[Z]

Grosse délivrée

le

à Selarl Riviere Gault...

Me Pomies Richaud

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 29 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 27 Janvier 2022, N°20/03215

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,

Mme Laure MALLET, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Mai 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 Juin 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [U] [B] épouse [G]

née le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 4]

[Adresse 6],

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric GAULT de la SELARL RIVIERE - GAULT ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :

Madame [X] [Z]

née le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me REDARES de la SELARL REDARES, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 13 Avril 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 29 Juin 2023.

Exposé :

Vu le jugement rendu le 27 janvier 2022 par le tribunal judiciaire d'Avignon, ayant statué ainsi qu'il suit :

' condamne Madame [B] à payer à Madame [Z] les sommes de 11'025 € en réparation de son préjudice de jouissance et 1000 € en réparation de son préjudice moral,

' rejette la demande de dommages et intérêts de Madame [B],

' condamne Madame [B] à payer à Madame [Z] la somme de 2500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

' rejette les demandes plus amples,

' condamne Madame [B] aux dépens, y compris les frais de l'expertise judiciaire,

' rappelle que l'exécution provisoire est de droit.

Vu l'appel interjeté par Madame [B], épouse [G] le 7 février 2022.

Vu les conclusions de l'appelante en date du 6 mai 2022, demandant de :

' infirmer le jugement et statuant à nouveau,

' rejeter toutes les demandes de Madame [Z],

' la condamner à lui payer la somme de 5000 € en réparation de son préjudice moral, celle de 2500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Vu les conclusions de Madame [Z] en date du 19 juillet 2022, demandant de :

' confirmer le jugement sur la condamnation à 11'025 € et à 1000 € à titre indemnitaire, le confirmer en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de Madame [B],

' infirmer en ce qu'il a rejeté sa demande au titre du préjudice subi par la perte de chance de vendre plus tôt son bien,

y ajoutant :

' condamner Madame [B] à lui verser la somme de 5438,60 € au titre de la perte de chance de vendre plus tôt son bien,

' condamner Madame [B] à lui verser la somme de 3000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Vu la clôture du 13 avril 2023.

Motifs

Madame [B] est propriétaire d'un appartement situé au premier étage dans une copropriété à [Localité 4]. Elle a entrepris des travaux en 2018 et Madame [Z], qui est copropriétaire au deuxième étage, s'est alors plainte de ce que ces travaux endommageaient son appartement.

Une expertise a été ordonnée au contradictoire du syndicat des copropriétaires, le rapport ayant été déposé le 6 avril 2020.

Madame [Z] a, ensuite, vendu son bien le 8 octobre 2020.

La présente instance a, dans ces conditions, été introduite par Madame [Z] sur le fondement du trouble anormal de voisinage.

Dans le jugement présentement déféré, le tribunal a retenu les désordres relatifs au garde corps et au plancher comme constituant un trouble anormal de voisinage et a alloué à Madame [Z] au titre de son préjudice de jouissance une indemnité correspondant à son départ des lieux, justifié par la crainte d'une atteinte à la solidité de l'immeuble jusqu'à la réception de l'étude du 7 novembre 2019 la rassurant sur la tenue du plancher, outre un préjudice moral.

Au soutien de son appel, Madame [B], épouse [G], fait essentiellement valoir que l'expert a considéré le léger affaissement du plancher comme normal en raison de sa nature et souligné que la maçonnerie du garde corps n'était certainement pas en très bon état ; que toutefois, les travaux réalisés en dessous avaient précipité sa dégradation ; qu'ainsi, les désordres ne résultaient pas exclusivement des travaux de Madame [B] et que la réparation était avant tout due à la vétusté du bâtiment en son entier dont elle n'est pas responsable ; que ces phénomènes ne présentent pas de caractère d'anormalité au regard de l'état du bâtiment dans lequel ils se sont produits ; qu'à aucun moment, l'expert n'a retenu l'existence d'un quelconque danger ; qu'il n'y a donc pas de trouble anormal du voisinage ; par ailleurs, elle conteste l'indemnisation telle qu'arbitrée par le tribunal et souligne que Madame [Z] n'a jamais fait référence, dans ses courriers annonçant qu'elle quittait l'immeuble, à une quelconque dangerosité ; qu'il ne lui revient donc pas de prendre en charge la réparation des préjudices résultant des choix et des croyances erronées de Madame [Z] ; qu'aucun autre copropriétaire n'a quitté les lieux précipitamment et que la seule argumentation de Madame [Z] repose sur les courriers adressés par son expert indiquant que les travaux avaient porté atteinte à la solidité de l'immeuble et l'obligation de faire exécuter les travaux sous la direction de l'architecte désigné par le syndic ; enfin, que la perte de chance de vendre son bien plus tôt qu'elle qualifie à hauteur de 40 % n'est pas justifiée dès lors qu'elle ne peut cumuler la réparation du préjudice de jouissance avec celle de la perte de chance de vendre le bien plus tôt.

Elle se voit opposer par Mme [Z] les conclusions expertales au titre du garde corps et du plancher ainsi que les préjudices dont elle demande réparation et ampliation.

Il résulte du rapport d'expertise l'existence de 3 types de désordres : fissures verticales dans les angles de l'appartement de Madame [Z], affaissement du plancher, dégradation du garde corps maçonné.

L'expert constate ainsi :

- la présence d'une fissure au niveau d'une jonction du mur du salon, d'une autre fissure dans la salle de bains au niveau des joints de carrelage à la jonction du mur de façade, mur de refend du logement, cette fissure se retrouvant sur le mur de façade à l'extérieur sur la terrasse,

- un jour sous les plinthes avec l'affaissement du plancher,

- la présence d'un garde corps dont la partie maçonnée est affecté d'une importante fissuration horizontale symptomatique d'un affaissement général de la maçonnerie, cette fissure se retrouvant sur le mur de façade.

Il affirme que la construction comporte des planchers à structure de bois qui présentent une certaine souplesse et qu'il est donc normal d'avoir des mouvements de flexion d'autant que l'étude réalisée par le BET Isoa met en évidence un sous dimensionnement du plancher.

Il précise, page 11 de son rapport, que les fissures verticales dans les angles de l'appartement ne sont pas en lien avec les travaux de Madame [B], mais résultent de l'ancienneté générale et vétusté du bâtiment ainsi que de son mode constructif de l'époque ; il affirme que le léger affaissement du plancher constaté peut être considéré comme normal, en revanche, que le phénomène a été amplifié par les travaux réalisés dans l'appartement du dessous, tout le faux plafond étant suspendu à ce plancher ; l'expert ne considère pas le mouvement de flèche comme un désordre, mais il précise, après avoir noté qu'aucun renfort n'a été réalisé en sous face du plancher, le faux plafond en plaques de plâtre étant directment fixé au plancher, que le système d'accroche du faux plafond de Madame [B] vient accentuer cette flèche et qu'il convient de modifier cette accroche, précisant à ce sujet qu'il aurait fallu mettre une structure primaire afin d'éviter de suspendre le faux plafond au plancher et en reporter ainsi le poids sur les murs périphériques compte tenu de l'étude réalisée par le BET ; que la dégradation du garde corps maçonné doit être considérée comme un aléa de chantier car il est courant, lors des travaux de gros 'uvre, que des éléments mitoyens soient impactés.

Les conclusions du rapport d'expertise qui n'ont pas été utilement combattues par les parties permettent donc de retenir :

-que s'il existe un léger affaissement normal du plancher à raison même de sa nature, le phénomène a néanmoins été accentué par les travaux de l'appartement en dessous, dont le faux plafond est entièrement suspendu audit plancher alors qu'il aurait fallu l'accrocher sur les murs périphériques compte tenu de la structure faible de l'immeuble et de son plancher ;

- que si le garde corps n'était pas en très bon état, les travaux ont également précipité sa dégradation.

Les désordres ainsi subis par Madame [Z] caractérisent suffisamment, compte tenu de leur nature et siège, compte tenu de leur origine et caractéristiques telles que décrites par l'étude technique sus citée, l'existence d'un trouble anormal de voisinage consécutif aux travaux de Madame [B], indépendant de létat et de la vétusté de l'immeuble, la dégradation du garde corps ayant, en effet, été retenue comme une conséquence des travaux, et l'affaissement actuel du plancher comme la conséquence du mode constructif du nouveau faux plafond sur un plancher sous dimensionné.

Les experts amiablement diligentés sur les lieux pendant le temps de travaux ont, au demeurant, eux-mêmes, présenté des observations sérieusement alarmantes pour la sécurité de Madame [Z] dans des courriers réitérés au printemps 2018, tant de la part de l'expert de la compagnie d'assurances de Madame [Z] que de l'expert de la compagnie d'assurances de Madame [B], ces courriers relevant que les travaux portent atteinte à la solidité de l'ouvrage sur des éléments immobiliers, qu'il existe par ailleurs des fragilités acquises d'éléments de structure de la terrasse nécessitant l'intervention d'un bureau d'études structure pour définir une solution de confortement et demandant l'interruption des travaux entrepris à l'intérieur du corps principal ou aux droits de la terrasse de Madame [Z].

Ces éléments, même si l'expert judiciaire n'a finalement pas retenu d'élément structurel ayant un caractère d'urgence, ont pu légitimement inquiéter Madame [Z], l'inciter à la fois à ne plus habiter dans les lieux et à mettre en suspens son projet de vente, étant à cet égard relevé qu'elle justifie avoir donné mandat le 12 décembre 2017 et avoir ensuite suspendu ce mandat le 14 mars 2018.

Il en résulte le bien-fondé de la demande de Madame [Z] au titre d'un préjudice de jouissance à partir du mois de février 2018 et au moins jusqu'à la date du 7 novembre 2019, peu important le prix modique des travaux de réparation.

Dans la mesure où Madame [Z] ne justifie de ce chef d'aucun frais engagés pour l'occupation d'un autre appartement, affirmant, elle même, qu'elle a été logée par sa famille, ce préjudice ne peut être évalué par le seul calcul mathématique du nombre de mois de relogement multipliés par la valeur locative alléguée de son bien ; il sera donc arbitré et compte tenu des désagrément à la fois liés à l'abandon justifié de son domicile et à ses conditions de vie ainsi contraintes, l'ayant conduit à revenir chez ses parents, à la somme de 7000 €.

Le préjudice invoqué au titre de la perte de chance de vendre plus tôt, qui résulte suffisamment des éléments produits sur le mandat de vente en date du 12 décembre 2017 et sur l'état de l'appartement au cours de l'année 2018, est distinct du préjudice de jouissance.

Il convient, pour son appréciation, de prendre en compte les conditions de la vente finalement passée le 8 octobre 2020 moyennant un prix de 88'000 € et après un délai de plus d'une année suivant le 7 novembre 2019 et également, la circonstance tenant à ce que la libre disponibilité du prix lui a donc échappé sur cette période et à ce que le coût du crédit a du être supporté plus longtemps.

Les dépenses dont Mme [Z] fait également état au soutien de cette demande au titre de l'assurance de son logement et des abonnements en eau et électricité, sont liées à la propriété du bien et n'ont pas à être retenues au titre de l'indemnisation de cette perte de chance.

Il en résulte que la perte de chance sera, dans ces conditions, considérée comme une perte de chance très moyenne et évaluée, au vu des pièces versées par Mme [Z], à la somme de 2500 €.

Le jugement sera, enfin, confirmé sur le préjudice moral tenant aux tracas et stress provoqués par la situation de travaux sur près de 2 années .

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile et la succombance de principe de Madame [B], épouse [G], privant de fondement ses demandes indemnitaires qui seront rejetées.

Par ces motifs

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme le jugement sur le montant de l'indemnisation et statuant à nouveau sur l'ensemble des préjudices revendiqués par Madame [Z] :

Condamne Madame [B] à verser à Madame [Z] au titre de son préjudice de jouissance la somme de 7000€, au titre de la perte de chance de vendre son bien plus tôt la somme de 2500 €, au titre de son préjudice moral la somme de 1000 €,

y ajoutant :

Rejette les demandes plus amples,

Condamne Madame [B] à verser à Madame [Z] par application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 1000 €,

Condamne Madame [B] aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 22/00468
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;22.00468 ?
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