La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2023 | FRANCE | N°21/01940

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 29 juin 2023, 21/01940


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/01940 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IBSY



LM



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

06 avril 2021 RG :17/02188



S.A. CNP ASSURANCES



C/



[Z]

[W]

Caisse CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANC















Grosse délivrée

le

à SCP Fortunet

Me Tartanson

SCP Gasser Pue

ch...











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 29 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 06 Avril 2021, N°17/02188



COMPOSITION DE LA COUR LOR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/01940 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IBSY

LM

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

06 avril 2021 RG :17/02188

S.A. CNP ASSURANCES

C/

[Z]

[W]

Caisse CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANC

Grosse délivrée

le

à SCP Fortunet

Me Tartanson

SCP Gasser Puech...

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 29 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 06 Avril 2021, N°17/02188

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Laure MALLET, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Mme Laure MALLET, Conseillère

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Mars 2023 prorogé à ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.A. CNP ASSURANCES immatriculée au RCS de Paris sous le n° 341 737 062, poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Jean-philippe DANIEL de la SCP FORTUNET ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉS :

Madame [O] [V] [Z] agissant en qualité d'ayant droit de Madame [D] [I] [W] née [X], décédée le 27 mars 2017.

née le 29 Mai 1984 à [Localité 10]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Jacques TARTANSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Monsieur [P] [H] [R] [W] agissant en qualité d'ayant droit de son épouse Madame [D] [I] [W] née [X], décédée le 27 mars 2017.

né le 22 Décembre 1942 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté par Me Jacques TARTANSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE

Banque coopérative régie par les articles L.512-85 et suivants du Code Monétaire et Financier, SA à directoire et Conseil de Surveillance au capital de 2.375.000.000 € inscrite au RCS de Paris sous le n° 382 900 942 prise en la personne de son représentant légal en exercice audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Vincent PUECH de la SCP GASSER-PUECH-BARTHOUIL-BAUMHAUER, Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Représentée par Me Valérie DESFORGES de la SARL ADEMA AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 24 Novembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 29 juin 2023,

EXPOSE DU LITIGE

M. [P] [W] et son épouse ont souscrit fin 2010 deux prêts auprès de la Caisse d'épargne Ile-de France, étant alors respectivement âgés de 73 ans et de 58 ans, à savoir :

- un prêt immobilier n° 8773050, pour la somme de 150 000 €, au titre duquel la CNP assurances fera parvenir le 29 octobre 2010 à M. [W] son adhésion au contrat d'assurance de groupe pour la garantie décès et, le même jour à Mme [W] pour la garantie décès et PTIA (Perte Totale et Irréversible d'Autonomie), contrat qui fera l'objet d'un avenant accepté le 12 août 2012 (sur le montant des échéances),

- un prêt pour travaux n° 41129539299002, pour la somme de 27 000 €, dont la partie adhésion à l'assurance mentionne la souscription de la garantie décès, pour M. [W], et des garanties décès/PTIA/ITT pour Mme [W].

Le 12 août 2015, Mme [W] s'avérait atteinte d'un cancer l'amenant à solliciter la garantie de la CNP au titre du risque PTIA, accordée pour le prêt travaux, cette garantie était, après revirements de la CNP, finalement refusée par courrier du 5 août 2016 pour le prêt immobilier, en raison de l'âge de 62 ans de Mme [W] à la déclaration de ce sinistre, le point 9.2 de la notice d'information relative à l'assurance de ce prêt prévoyant que la PTIA n'était garantie qu'en cas de survenance du sinistre avant le 60ème anniversaire.

Contestant que leur soit opposable une telle clause, dont ils n'auraient pas eu connaissance, les consorts [W], s'agissant alors de M. [W] et Mme [Z], leur fille, Mme [W] étant décédée le 27 mars 2017, ont fait assigner devant le tribunal judiciaire d'Avignon la CNP par acte d'huissier du 8 juin 2017, puis la Caisse d'épargne en intervention forcée par acte du 20 août 2018, afin de voir, principalement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, après jonction des deux instances par ordonnance du 13 décembre 2018, annuler la décision de refus de garantie de la CNP du 5 août 2016 et condamner la CNP à prendre en charge la totalité de la quote-part de 70%, applicable à Mme [W], au titre du remboursement de prêt (capital et intérêts) n°8773050 souscrit auprès de la Caisse d'épargne, et ce à compter du 12 août 2015, date de la reconnaissance de la PTIA de Mme [W], soit la somme de 94 086,95 euros, en deniers ou quittances, et condamner la CNP et la Caisse d'épargne in solidum à leur verser ès qualités d'ayants droit de Mme [D] [I] [W] née [X] notamment la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Par jugement contradictoire du 6 avril 2021, le tribunal judiciaire d'Avignon a :

- déclaré recevables les demandes de [P] [W] et [O] [Z], ayants droit de feue Mme [W],

- annulé la décision de refus de garantie de la CNP du 05/08/16,

- condamné en conséquence la CNP à prendre en charge la totalité de la quote-part de 70% applicable à Mme [W] au titre du remboursement de prêt (capital et intérêts) n°8773050 souscrit auprès de la Caisse d'épargne et ce à compter du 12/08/15, date de la reconnaissance de la PTIA de Mme [W] soit la somme de 94 086,95 € en deniers ou quittances,

- condamné in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] la somme de 2 000 € de dommages et intérêts,

- condamné in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la CNP et la Caisse d'épargne aux dépens, outre en cas d'exécution forcée, le paiement des sommes correspondant à l'application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12/12/96 modifié par décret 2001/212 du 08/03/2001,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration du 18 mai 2021, la SA CNP assurances a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 22 novembre 2022, auxquelles il est expressément référé, la SA CNP assurances demande à la cour de :

Vu les articles 1134, 1315 et 1322 du code civil ancien,

Vu l'article L113-5 du code des assurances,

Vu l'article 564 du code de procédure civile,

Vu les pièces produites,

- infirmer le jugement rendu le 6 avril 2021 par le tribunal judiciaire d'Avignon en ce qu'il :

* annule la décision de refus de garantie de la CNP du 05/08/16,

* condamne en conséquence la CNP à prendre en charge la totalité de la quote-part de 70% applicable à Mme [W] au titre du remboursement de prêt (capital et intérêts) N° 8773050 souscrit auprès de la Caisse d'épargne et ce à compter du 12.08.15, date de la reconnaissance de la PTIA de Mme [W] soit la somme de 94 086.95 euros en deniers ou quittances,

* condamne in solidum CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] la somme de 2 000.00 euros de dommages et intérêts,

* condamne in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] la somme de 2 000.00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamne in solidum CNP et la Caisse d'épargne aux dépens outre en cas d'exécution forcée le paiement des sommes correspondant à l'application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12/12/96 modifié par décret du 08/03/2001,

* ordonne l'exécution provisoire,

- déclarer irrecevable comme étant nouvelle la demande de M. [W] et de Mme [Z] visant à obtenir la restitution de la somme de 12 319.33 euros,

Statuant à nouveau,

- débouter M. [W] et Mme [Z] de l'ensemble de leurs prétentions, fins et demandes,

Reconventionnellement,

- condamner solidairement M. [W] et Mme [Z] à verser à la SA CNP assurances une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel,

A titre infiniment subsidiaire,

- ordonner que toute prise en charge s'effectuera dans les termes et conditions contractuels et que la SA CNP assurances ne saurait être tenue de supporter les échéances du prêt au-delà de la quotité assurée de 70%,

- déduire de la somme allouée l'arriéré de primes impayées soit 12.319,33 € et la prise en charge effectuée à la suite du décès de Mme [W] soit 75 340,49 €,

- infirmer le jugement pour le surplus et débouter M. [W] et Mme [Z] du surplus de leurs demandes,

- dans l'hypothèse où la cour estimerait que le préjudice allégué par M. [W] et Mme [Z] est démontré, limiter le quantum des dommages et intérêts à la somme de 2 000 € retenue par les premiers juges.

Dans leurs dernières conclusions formant appel incident remises et notifiées le 15 novembre 2022, auxquelles il est expressément référé, M. [P] [W] et Mme [O] [Z] demandent à la cour de :

- déclarer l'appel interjeté par la CNP assurances à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon le 6 avril 2021 recevable mais mal fondé et en conséquence,

- débouter la Caisse d'épargne et la CNP de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- les débouter de leurs appel principal et appel incident,

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle :

* déclare recevables les demandes de [P] [W] et [O] [Z], ayants droit de feue Mme [W],

* annule la décision de refus de garantie de la CNP du 5 août 2016,

* condamne en conséquence la CNP à prendre en charge la totalité de la quote-part de 70 % applicable à Mme [W] au titre du remboursement de prêt (capital et intérêts) n° 8773050 souscrit auprès de la Caisse d'épargne et ce, à compter du 12 août 2015, date de la reconnaissance de la PTIA de Mme [W], soit la somme de 94 086,95 € en deniers ou quittances,

* condamne in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z], ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X], des dommages-intérêts,

* condamne in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z], ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamne in solidum la CNP et la Caisse d'épargne aux dépens, en cas d'exécution forcée, le paiement des sommes correspondant à l'application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 modifié par décret 2001/212 du 8 mars 2001,

* ordonne l'exécution provisoire,

- réformer la décision entreprise sur le quantum des dommages-intérêts et la restitution des sommes indûment retenues,

en conséquence, statuant à nouveau,

- condamner in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z], ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X], des dommages-intérêts à hauteur de 10 000 €

- condamner in solidum la CNP et la Caisse d'épargne à verser à [P] [W] et [O] [Z], ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X], la somme de 12 319,33 € indûment prélevée sur le capital décès (versé à hauteur de 75 340,49 € au lieu de la somme de 87 659,82 €),

Subsidiairement, en cas de réformation,

- dire et juger qu'en tout état de cause, la CNP aurait dû prendre en charge les échéances du prêt au titre de la garantie décès souscrite à compter du 27 mars 2017,

en conséquence,

- condamner la CNP à prendre en charge la totalité de la quote-part de 70 %, applicable à Mme [W], au titre du remboursement de prêt (capital et intérêts) n° 8773050 souscrit auprès de la Caisse d'épargne, et ce à compter du 27 mars 2017, date du décès de l'assurée et ce, sans qu'aucune retenue ne puisse être appliquée au titre d'échéances d'assurance impayées, soit la somme de 87 659,82 euros, en deniers ou quittances,

En tout état de cause,

- condamner la CNP et la Caisse d'épargne in solidum à verser à M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de Mme [D] [I] [W] née [X] les sommes de :

* 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

* outre la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel, outre les entiers dépens d'appel,

- voir ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant toutes voies de recours.

Dans ses dernières conclusions formant appel incident remises et notifiées le 3 novembre 2022, auxquelles il est expressément référé, la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France demande à la cour de :

Vu l'article L.110-4 du code de commerce,

Vu les articles 1134 et 1147 anciens du code civil,

Vu les pièces versées au débat,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 avril 2021 par le tribunal judiciaire d'Avignon,

Et statuant à nouveau :

A titre principal,

- déclarer M. [W] et Mme [Z] irrecevables en leurs demandes telles que dirigées contre la Caisse d'épargne, leur action étant prescrite,

A titre subsidiaire,

- débouter M. [W] et Mme [Z] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la Caisse d'épargne,

A titre plus subsidiaire,

- débouter M. [W] et Mme [Z] de leur demande de réparation au titre d'un prétendu préjudice moral, et à titre infiniment subsidiaire, limiter le quantum de cette demande à la somme de 2.000 euros telle que retenue en première instance,

- déclarer M. [W] et Mme [Z] irrecevables en leurs demandes de restitution de la somme de 12.319,33 euros dès lors qu'une telle prétention constitue une demande nouvelle en cause d'appel,

- débouter M. [W] et Mme [Z] de leur demande de restitution de la somme de 12.319,33 euros dès lors qu'une telle demande est mal fondée et ne peut concerner la Caisse d'épargne qui n'est pas l'assureur des emprunteurs,

En tout état de cause,

- rejeter toutes demandes de condamnation, ainsi que toutes prétentions, fins et conclusions, notamment afin d'appel incident, qui seraient dirigées à l'encontre de la Caisse d'épargne,

- condamner tout succombant à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Vincent Puech, avocat en application des dispositions de l'article 696 et suivants du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces du dossier d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

Il convient de noter que le présent litige est circonscrit à la prise en charge du prêt immobilier n° 8773050 d'un montant de 150 000 €.

Sur les fins de non recevoir,

Sur la qualité à agir de M. [P] [W] et Mme [O] [Z],

En cause d'appel, il y a lieu de constater que la SA CNP ne reprend pas cette fin de non recevoir tandis que la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France se contente de demander l'infirmation sur ce point mais ne formule aucune critique à l'encontre du jugement déféré de ce chef.

Par ailleurs, il ressort des pièces produites aux débats, et notamment de l'acte de notoriété et la déclaration d'acceptation de succession, que M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ont bien qualité pour agir.

Adoptant les motifs du jugement déféré, ce dernier sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de M.[P] [W] et de Mme [O] [Z], ayants droit de feue Mme [W],

Sur la prescription,

La Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France soulève la prescription de l'action de M. [P] [W] et Mme [O] [Z] en application de l'article L110-4 du code des assurances, l'assurance ayant été souscrite par bulletin d'adhésion du 3 novembre 2010 alors que l'assignation a été délivrée le 20 août 2018.

Selon l'article L110-4 du code des assurances « Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.»

M.[P] [W] et Mme [O] [Z] fondent leur action sur le manquement de la banque à son obligation pré contractuelle d'information et à son obligation de conseil lors de la souscription.

Or, le dommage né d'un manquement aux obligations d'information et de conseil dues à l'assuré sur l'adéquation de la garantie souscrite à ses besoins se réalise au moment du refus de garantie opposé par l'assureur.

En effet, comme l'a relevé pertinemment le premier juge, à la date de la souscription les époux [W] ne pouvaient mesurer l'existence d'un éventuel manquement de l'assureur à ses obligations en termes d'information et de conseil, lequel se manifeste en revanche dans toutes ses conséquences le jour du refus de garantie de l'assureur.

Ainsi, le refus de garantie de l'assureur étant intervenu par courrier du 5 août 2016, l'action de M.[P] [W] et Mme [O] [Z] a bien été engagée dans le délai quinquennal.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré leur action recevable comme non prescrite.

Sur le fond,

Sur la preuve de l'obligation,

Selon l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

L'assureur reproche aux consorts [W] de solliciter l'application d'une police d'assurance souscrite auprès de la SA CNP sans produire ladite police.

Or, l'assureur a envoyé le 29 octobre 2010 à Mme [W] son adhésion au contrat d'assurance de groupe pour la garantie décès et PTIA, acceptée le 3 novembre 2010.

Par ailleurs, il est produit aux débats les conditions particulières d'assurances en date du 10 novembre pour le prêt de 150 000 € .

Enfin, il résulte des propres courriers de la SA CNP qu'elle n'a jamais contesté l'existence de la police puisqu'elle en invoque l'application, à savoir la notice 7017C qu'elle produit aux débats.

Dès lors, le premier juge a justement apprécié que ce moyen est inopérant.

Sur la prise en charge du prêt au titre de la garantie PTIA,

La SA CNP refuse la prise en charge du prêt au titre de la garantie PTIA invoquant l'article 9.2 de la notice d'information relative au contrat n°7017C qui définit la perte totale et irréversible d'autonomie (PTIA) de la manière suivante :

« Un assuré est en état de PTIA lorsque les trois conditions suivantes sont remplies cumulativement :

1.L'invalidité dont il est atteint le place dans l'impossibilité totale et définitive de se livrer à toute occupation et à toute activité pouvant lui procurer gain ou profit ;

2.Elle le met dans l'obligation de recourir de façon permanente à l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les 4 actes ordinaires de la vie (se déplacer, se laver, s'habiller, se nourrir) ;

3.La PTIA reconnue par l'assureur doit être survenue avant le 60 ème anniversaire de l'assuré ».

En l'espèce, il n'est pas contesté que la reconnaissance de la PTIA est intervenue le 12 août 2015 alors que Mme [W] avait 62 ans.

En revanche, les consorts [W] soutiennent que cette notice ne leur a jamais été remise et qu'elle leur est donc inopposable et que s'agissant d'une clause d'exclusion, il appartient à l'assureur de rapporter la preuve de son opposabilité.

Ils ajoutent qu'ils n'ont reçu qu'une seule notice portant le n° 9885 qui couvre le risque jusqu'à 65 ans.

Il ressort de l'analyse de la notice n°7017C que la clause insérée à l'article 9-2 parfaitement claire et lisible, ne pouvant dès lors donner lieu à une interprétation, n'est pas une clause d'exclusion, les risques exclus étant listés à l'article 10, mais une clause délimitant dans le temps l'application de la garantie.

En conséquence, l'article L113-1 du code des assurances n'est pas applicable en l'espèce.

Pour autant, en assurance de groupe, les clauses prévues entre le souscripteur et l'assureur ne sont opposables à l'adhérent que dans la mesure où elles ont été portées, lors de son adhésion, à sa connaissance par la notice.

En l'espèce, dans le courrier de proposition d'admission de la SA CNP en date du 29 octobre 2010 il est clairement indiqué que le contrat d'assurance auquel adhère Mme [W] est le contrat groupe N°7017 C.

Mme [W] en acceptant le 3 novembre 2010 cette offre a apposé sa signature qu'elle n'a jamais désavouée sous la mention :

« Je déclare accepter d'être assurée pour le prêt et la garantie ci-dessus (PC/PTA) suivant les modalités du contrat d'assurance collectif souscrit par CE ILE DE France et dans les conditions notifiées par le présent document...Je certifie qu'il m'a été remis une notice des principales dispositions du contrat pour m'informer des modalités d'assurance ».

De même les conditions particulières d'assurances signées par Mme [W] le 10 novembre visent expressément le numéro de contrat 7017C et l'adhérente certifie encore qu'il lui a été remis un résumé du contrat pour l'informer des modalités d'assurance.

En apposant sa signature au bas d'un document précisant qu'elle reconnaît avoir reçu la notice, la preuve de sa remise est rapportée et les limitations de garantie qu'elle contient lui sont opposables, sans qu'il soit nécessaire de parapher chaque page de ladite notice.

Le formalisme dont a été entouré l'autre contrat d'assurance pour le prêt de 27 000 € ne suffit pas à remettre en cause le respect du formalisme du contrat, objet du présent litige, dès lors qu'il est rapporté la preuve que l'assureur a rempli son obligation en mettant à la disposition de l'établissement bancaire souscripteur une notice d'information précisant le contenu et les conditions des garanties et les exclusions et que celles-ci ont a été remises lors de l'adhésion au contrat.

Aucune confusion n'a pu être opérée entre les conditions de la notice n°9885 afférente au contrat de prêt de 27 000 € et le notice 7017C clairement identifiée comme étant celle du prêt de 150 000 €.

Par ailleurs, la lettre en date du 14 juin 2016 adressée par la SA CNP à Mme [W] ne peut caractériser une renonciation non équivoque de la part de l'assureur à l'application du contrat puisqu'il ne précise pas qu'il accepte d'assurer le prêt 3050 malgré la clause dont il se prévaut ultérieurement.

En conséquence, infirmant le jugement déféré, les consorts [W] seront déboutés de leur demande de prise en charge au titre de la garantie PTIA.

Cependant, le devoir d'information ne s'achève pas avec la remise de la notice.

Il existe une obligation pré-contractuelle de mise en garde et de conseil qui est à la charge du banquier intermédiaire qui fait souscrire l'adhésion et non à celle de l'assureur qui ne se trouve lié à l'emprunteur qu'à compter de l'adhésion.

En effet, le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu d'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à la situation personnelle de l'emprunteur, la remise d'une notice claire et dépourvue d'ambiguïté ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation.

En l'espèce, en proposant à Mme [W] qui avait 58 ans au moment de la souscription d'un emprunt immobilier de 150 000 € remboursable sur 20 ans une garantie limitée à deux ans, soit jusqu'à 60 ans, la banque a manqué à son obligation d'éclairer sa cliente sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle.

Dûment informée, elle aurait été en mesure d'apprécier ce facteur de limitation dans le temps qui était d'autant plus important en raison de son âge au moment de la souscription.

Les consorts [W] ès qualités ne peuvent cependant pas obtenir de la banque l'exécution d'un contrat d'assurance dont elle n'est pas débitrice mais leur action en responsabilité ne peut aboutir qu'à recevoir l'indemnisation du dommage subi consécutivement au manquement subi, à savoir une « perte de chance », en l'occurrence, celle de bénéficier de meilleures garanties ou de garanties plus appropriées à sa situation personnelle.

Or, la perte de chance de Mme [W] est inexistante compte tenu des relations anciennes et privilégiées qu'elle avait avec son banquier et alors qu'elle reconnaît n'avoir sollicité aucun autre assureur qui aurait pu lui accorder des conditions plus favorables.

Ainsi, il n'est pas rapporté la preuve que même si Mme [W] avait été parfaitement éclairée sur l'adéquation ou non des risques couverts par l'assurance à sa situation, elle aurait, compte tenu notamment des garanties qu' elle aurait pu obtenir, fait le choix d'adhérer à une autre assurance plus complète.

Infirmant le jugement déféré, elle sera également déboutée de sa demande à l'encontre de la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France.

Sur la demande de dommages et intérêts,

Les consorts [W] sollicitent la condamnation in solidum de la SA CNP et de la Caisse d'épargne à leur verser la somme de 10 000 € à titre de dommage et intérêts pour préjudice moral.

Ils reprochent à l'assureur son comportement lors de la demande de prise en charge ayant dans un premier temps accepté par courrier du 14 juin 2016 celle-ci au titre du PTIA pour les deux prêts avant de notifier un refus pour le prêt de 150 000 € par courrier du 5 août 2016.

Aucune faute n'est invoquée ni explicité concernant la banque.

En conséquence, infirmant le jugement déféré, ils seront déboutés de ce chef de demande à son encontre.

En revanche, la SA CNP qui ne conteste pas la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral autrement que par son absence de faute et l'inexistence du préjudice, a bien fait preuve d'une légèreté blâmable dans la gestion du dossier en annonçant à Mme [W] une prise en charge pour les deux prêts alors qu'elle ne pouvait ignorer la clause de limitation qu'elle invoquera ultérieurement, laissant croire à cette dernière à une prise en charge, engendrant un préjudice moral certain pour l'assurée qui se trouvait dans une situation de faiblesse étant atteinte d'un cancer et qui décédera un mois plus tard et ayant pu espérer un apaisement au moins matériel du fait de la garantie.

Infirmant le jugement déféré mais seulement dans son quantum, il sera alloué aux consorts [W] la somme de 4 000 € de dommages et intérêts.

Sur les demandes de restitution de la somme de 12 319,33 € indûment prélevée sur le capital décès et sur la demande de prise en charge par la SA CNP de la somme de 87 659,82 € au titre de la garantie décès souscrite à compter du 27 mars 2017,

Il ressort de l'analyse du jugement déféré que le premier juge ayant accordé le bénéfice de la garantie PTIA n'a effectivement pas statué sur le subsidiaire de la garantie décès, mais a néanmoins statué sur la demande de restitution puisque le dispositif condamne « la CNP à prendre en charge la totalité de la quote-part de 70% applicable à Mme [W] au titre du remboursement de prêt (capital et intérêts) n°8773050 souscrit auprès de la Caisse d'épargne et ce à compter du 12/08/15, date de la reconnaissance de la PTIA de Mme [W] soit la somme de 94 086,95 € en deniers ou quittances » soit 70 % de la somme restant due de 125 124, 22 € au titre du prêt.

Par ailleurs, aux termes du dispositif de ses écritures devant le premier juge rappelé in extenso dans l'exposé du litige du jugement, les demandes à ce titre étaient expressément formulées par les consorts [W] à l'encontre de la SA CNP.

Il ne s'agit pas de demandes nouvelles à l'encontre de l'assureur.

Elle seront en conséquence déclarées recevables à son égard.

En revanche, aucune demande de ces chefs n'était dirigée à l'encontre de la Caisse d'épargne.

Il s'agit, en conséquence, à son égard d'une demande nouvelle en application de l'article 564 du code de procédure civile, qui sera donc déclarée irrecevable.

Les consorts [W] soutiennent que ce n'est pas la somme de 75 340,90 € qu'ils auraient dû recevoir au titre du remboursement anticipé de l'assurance décès, mais celle de 87 659,82 € sollicitant dès lors la restitution du différentiel.

Suite au décès de [D] [W] le 27 mars 2017, il n'est pas contesté que la SA CNP a pris en charge au titre de l'assurance décès la somme de 75 340,90 €, somme de laquelle a été déduit par l'assureur le montant des échéances d'assurances impayées.

Les consorts [W] soutiennent que les échéances ont été payées.

Il convient cependant de rappeler que selon l'article 1315 devenu 1353 du code civil « celui qui se prétend libéré doit justifier du paiement ou le fait qui a produit l'extinction de l'obligation.»

Or, les consorts [W] ne rapportent pas la preuve par la production de relevés bancaires que les primes invoquées par l'assureur comme impayées ont été prélevées ou réglées par tout autre moyen de paiement.

En effet, l'unique production d'un relevé de décembre 2014 et du plan d'amortissement ne rapporte pas la preuve de l'effectivité du règlement.

En conséquence, les consorts [W] seront déboutés de leurs demandes de restitution de la somme de 12 319,33 € et de leur demande de prise en charge au titre de la garantie décès à hauteur de 87 659,82 €.

Sur les demandes accessoires,

Les dispositions du jugement déféré au titre des frais irrépétibles et des dépens de première instance seront infirmées.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, les consorts [W], succombant principalement, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel distraits au profit de maître Vincent Puech conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser supporter à la SA CNP et à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel. Elles seront déboutées de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire, le pourvoi en cassation en matière civile n'ayant pas d'effet suspensif.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Déclare recevables les demandes de restitution par la SA CNP de la somme de 12 319,33 € indûment prélevée sur le capital décès et de prise en charge par la SA CNP au titre de la garantie décès souscrite à compter du 27 mars 2017 à hauteur de 87 659,82 €,

Déclare irrecevable la demande de restitution par la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France de la somme de 12 319,33 € indûment prélevée sur le capital décès, comme étant une demande nouvelle,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de [P] [W] et [O] [Z], ayants droit de feue Mme [W],

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] de leur demande à l'encontre de la SA CNP au titre de la garantie PTIA,

Condamne la SA CNP à payer à M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] la somme de 4 000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,

Déboute M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral à l'encontre de la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France,

Déboute M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] de leur demande de restitution de la somme de 12 319,33 € et de leur demande de prise en charge au titre de la garantie décès à hauteur de 87 659,82 €,

Condamne M. [P] [W] et Mme [O] [Z] ès qualités d'ayants droit de [D] [W] née [X] aux dépens de première instance et d'appel distraits au profit de maître Vincent Puech conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Déboute la SA CNP et la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/01940
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;21.01940 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award