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13/06/2023 | FRANCE | N°22/02411

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 13 juin 2023, 22/02411


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/02411 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IQCT



NG



JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'ALES

21 juin 2022

RG :22/00007



[L]



C/



Compagnie d'assurance [19]

Société [20] CHEZ [17]

Société [24] [Localité 13]

S.A. [15]

Société [21]

[L]





















COUR D'APP

EL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 13 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection d'ALES en date du 21 Juin 2022, N°22/00007



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/02411 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IQCT

NG

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'ALES

21 juin 2022

RG :22/00007

[L]

C/

Compagnie d'assurance [19]

Société [20] CHEZ [17]

Société [24] [Localité 13]

S.A. [15]

Société [21]

[L]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 13 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection d'ALES en date du 21 Juin 2022, N°22/00007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 Avril 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Juin 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [B] [L]

[Adresse 4]

[Localité 14]

Non comparante

INTIMÉS :

Compagnie d'assurance [19]

[Adresse 23]

[Adresse 23]

[Localité 8]

Non comparante

Société [20] CF CHEZ [17]

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 7]

Non comparante

Société [24] [Localité 13]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Non comparante

S.A. [15]

Chez [22]

[Adresse 3]

[Localité 11]

Non comparante

SOCIÉTÉ [21]

Chez [16]

[Adresse 9]

[Localité 12]

Non comparante

Monsieur [U] [L]

né le 02 Mars 1981 à [Localité 14] (80)

[Adresse 1]

[Localité 6]

Comparant en personne

Statuant en matière de surendettement après convocation des parties par lettres simples et lettres recommandées avec avis de réception du 8 février 2023.

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 13 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Le 16 décembre 2021, la commission de surendettement des particuliers du département du Gard a déclaré recevable la requête de M. [U] [L], présentée le 2 décembre 2021, tendant à se voir accorder le bénéfice de la procédure de surendettement.

La commission, suivant avis du 27 janvier 2022 et considérant que la situation de l'intéressé était irrémédiablement compromise, a recommandé une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au profit de M. [U] [L] et l'effacement de ses dettes.

Mme [B] [L], créancière et tante de M. [U] [L], a contesté ces mesures recommandées le 15 février 2019.

Par jugement réputé contradictoire du 21 juin 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Alès a, notamment, rejeté le recours de Mme [B] [L] et prononcé le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire de M. [U] [L].

Par courrier adressé au greffe de la cour le 7 juillet 2022, Mme [B] [L] a relevé appel de ce jugement, qui lui a été notifié le 22 juin 2022, contestant la mesure imposée par la commission de surendettement. Elle fait valoir la mauvaise foi de son neveu, M. [U] [L], précisant qu'elle a contracté un prêt bancaire d'un montant de 23 000 €, outre un prêt personnel de 5 000 €, pour l'aider financièrement mais que celui-ci a utilisé l'argent, notamment, pour payer son luxueux mariage, en dépit de ses importantes difficultés financières. Elle ajoute qu'il n'a pas l'intention de la rembourser alors qu'elle ne perçoit qu'une pension de retraite de 1 200 € par mois.

Cette procédure, qui a été enregistrée au répertoire général sous le n°22/02411, a été appelée à l'audience du 11 avril 2023.

A cette date, Mme [B] [L], appelante, n'a pas comparu, ayant été dispensée de comparaître à l'audience, compte tenu de l'éloignement géographique de son domicile et de son état de santé.

Pour sa part, M. [U] [L], qui comparaissait en personne, a contesté les pièces produites par sa tante. Il a reconnu avoir bénéficié d'un prêt de sa tante car il était confronté à une situation familiale terrible puisqu'il était accusé de viol sur sa fille par son ancienne compagne et qu'il s'est retrouvé au chômage à la suite d'une rupture conventionnelle pour s'occuper de sa fille dont la garde lui a été remise en 2017 grâce à l'intervention des forces de l'ordre. Il a précisé qu'il n'avait jamais souhaité cette situation financière, la considérant comme un échec.

Il a expliqué avoir ouvert son entreprise mais avoir rencontré d'importantes difficultés financières, en raison de la crise des 'gilets jaunes' bloquant l'accès à son dépôt de vente pendant plusieurs semaines et du non-paiement de ses clients. Il a ajouté avoir dû licencier sa compagne pour obtenir un seuil de rentabilité minime. Actuellement, il a déclaré travailler en qualité de gérant-salarié de sa société mais sans pouvoir se verser de salaire et continuer, par la force de son travail, à payer les dettes de sa société. Il a assuré être de bonne foi car tous les mois, il rembourse mensuellement ses fournisseurs et essaie, par son implication totale, de sortir de ce 'gouffre'. Il a indiqué être marié, avoir deux enfants à charge dont un issu de son union avec son épouse, qui perçoit pour sa part la somme de 472 € par mois.

Enfin, il a souligné que cette procédure d'appel était sans fondement et totalement abusive, les propos de sa tante étant totalement faux et relevant de la manipulation. Il a assuré que cette procédure avait été initiée pour le nuire et le blesser personnellement.

En fin de compte, M. [U] [L] a sollicité en conséquence la confirmation de la décision entreprise ainsi que la condamnation de Mme [B] [L] à lui verser la somme de 2 000 € au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et dilatoire sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

[18], par courrier reçu le 27 février 2023, a rappelé que sa créance s'élevait à la somme de 432,38 euros.

Aucun des autres créanciers n'étaient présents, ni représentés.

SUR CE :

Sur la recevabilité de l'appel :

L'article 932 du code de procédure civile dispose que l'appel est adressé au greffe de la cour d'appel, dans un délai de 15 jours. Le recours interjeté par Mme [B] [L], qui respecte les conditions légales, sera donc déclaré recevable.

Sur le fond :

La situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir. L'impossibilité manifeste pour une personne physique de bonne foi de faire face à l'engagement qu'elle a donné de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale ne peut être tenu comme empêchant que la situation de surendettement soit caractérisée. Lorsque les ressources ou l'actif réalisable du débiteur le permettent, des mesures de traitement peuvent être prescrites devant la commission de surendettement des particuliers dans les conditions prévues aux articles L.732-1 à L.733-1 à 3, L.733-7 et 8.

Le premier juge a relevé, d'une part, qu'aucun élément concret, sérieux et fiable ne venait contrarier la présomption de bonne foi concernant M. [U] [L] et, d'autre part, que les mesures arrêtées par la commission étaient adaptées pour permettre de traiter de manière définitive sa situation de surendettement.

Mme [B] [L] conteste cette décision s'agissant, en premier lieu, de la bonne foi du débiteur soutenant qu'elle ne peut être retenue, au regard du comportement de son neveu, auquel elle a prêté la somme de 23 000 € pour lui en venir en aide lorsqu'il était en grande difficulté conjugale et financière. Au soutien de ce moyen, elle indique que M. [U] [L] n'a nullement l'intention de rembourser cette somme, préférant vivre des prestations sociales, alors qu'il mène un train de vie dispendieux illustré notamment par son mariage célébré en octobre 2016 dont elle produit six photographies.

La bonne foi est présumée, et il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur.

Le débiteur doit être de bonne foi pendant la phase d'endettement, mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité.

La notion de mauvaise foi en matière de surendettement implique que soit recherché chez le surendetté, pendant le processus de formation de la situation de surendettement, l'élément intentionnel de la connaissance qu'il ne pouvait manquer d'avoir de ce processus et de la volonté, non de l'arrêter mais de l'aggraver, sachant pertinemment qu'il ne pourrait faire face à ses engagements.

En l'espèce, M. [U] [L] a déclaré un endettement constitué de dettes sur charges courantes, de dettes d'éducation, de deux crédits à la consommation, d'autres dettes bancaires, d'une dette fixée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'une dette familiale, pour un montant total de 71 622,66 €. Il expose que ces dettes résultent d'une situation conjugale très conflictuelle et d'une situation professionnelle fragilisée par le contexte social et économique, et assure fournir d'importants efforts pour sortir de cette situation délicate par son implication totale et la force du travail.

Il y a lieu, également, de souligner que M. [U] [L] ne peut être considéré comme un débiteur averti, celui-ci se retrouvant manifestement pour la première fois devant cette situation, n'ayant pas bénéficié auparavant de mesures de traitement du surendettement et pouvant s'être rapidement retrouvé dans une « spirale » d'endettement en raison de grandes difficultés survenues successivement au cours de sa vie.

En tout état de cause, si l'endettement de M. [U] [L] apparaît effectivement important, il convient de relever que les éléments du dossier ne permettent pas de dire que son comportement relève d'une volonté d'organiser son insolvabilité en réalisant des dépenses somptuaires ou de mener un train de vie élevé pour ne pas rembourser les sommes prêtées par sa tante. En effet, les photographies versées aux débats ne permettent pas d'affirmer avec certitude que le coût de son mariage ait dépassé son niveau de vie et contribué à sa situation d'endettement.

Ainsi, il s'ensuit qu'il n'est aucunement démontré par l'appelante que M. [U] [L] fait preuve de mauvaise foi, ni qu'il n'ait agi intentionnellement pour ne pas améliorer sa situation financière. De même, rien ne permet de caractériser d'élément intentionnel de la part de M. [U] [L] d'aggraver sa situation, ni même de volonté délibérée de se soustraire à ses créanciers.

Mme [B] [L] s'oppose également aux mesures imposées par la commission et confirmées par le premier juge.

Aux termes de l'article L.733-10 du code de la consommation une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection les mesures imposées par la commission en application de l'article L.733-1, L.733-4 ou L.733-7.

L'article L.733-13 du même code dispose que le juge saisi de la contestation prévue à l'article L.733-10 prend tout ou partie des mesures définies aux articles L.733-1, L.733-4 et L.733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l'article L.731-2. Elle est mentionnée dans la décision.

Lorsqu'il statue en application de l'article L.733-10, le juge peut, en outre, prononcer un redressement personnel sans liquidation judiciaire.

Aux termes de l'article L.724-1 du code de la consommation, lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en 'uvre les mesures de traitement mentionnées au premier alinéa de l'article susvisé, la commission peut, dans les conditions du présent livre :

1° Soit imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire si elle constate que le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle, ou que l'actif n'est constitué que de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale ;

2° Soit saisir, si elle constate que le débiteur n'est pas dans la situation mentionnée au 1°, avec l'accord du débiteur, le juge des contentieux de la protection aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.

Au regard de ces dispositions, des ressources de M. [U] [L] évaluées par la commission à la somme de 1 434 €, de ses charges évaluées à la somme de 2 191 €, le choix de la commission, confirmé par le premier juge, de préconiser un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire apparaît pertinent, dès lors que la situation du débiteur est irrémédiablement compromise au sens de l'article L.724-1 du code de la consommation.

De la même manière, Mme [B] [L] ne précise pas pour quelles raisons elle soutient que M. [U] [L] 'est protégé par la commission de surendettement'.L'appelante n'apporte aucun argument concret et justifié à l'appui de cette affirmation.

Fort de ces éléments et dès lors que les mesures décidées par la commission de surendettement puis confirmées par le premier juge apparaissent être les plus adaptées pour traiter de manière définitive la situation de surendettement de M. [U] [L], il convient de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Sur la demande de dommages-intérêts pour appel abusif

M. [U] [L] sollicite la condamnation de Mme [B] [L] au paiement de la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour appel abusif.

Toutefois, le seul fait pour l'appelante d'être déboutée de ses demandes ne suffit pas à qualifier la procédure engagée d'abusive.

Dès lors, en l'absence d'autres éléments venant caractériser l'abus de droit invoqué, et dès lors que le défendeur ne justifie pas d'un préjudice particulier, autre que la nécessité de se défendre devant la cour d'appel, cette demande de dommages-intérêts ne peut donc aboutir.

Sur les dépens

Les dépens de cette procédure seront à la charge de Mme [B] [L], qui succombe dans le soutien de ses prétentions.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Déclare recevable l'appel formé par Mme [B] [L] à l'encontre du jugement du 21 juin 2022 prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Alès,

Déboute Mme [B] [L] de ses contestations,

Confirme cette décision du 21 juin 2022 prononcée par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Alès,

Y ajoutant,

Déboute M. [U] [L] de sa demande de dommages-intérêt pour procédure abusive,

Condamne Mme [B] [L] aux dépens de cette procédure.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/02411
Date de la décision : 13/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-13;22.02411 ?
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