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08/06/2023 | FRANCE | N°22/00029

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 08 juin 2023, 22/00029


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/00029 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IJQN



CG



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

13 décembre 2021 RG :20/03050



Compagnie d'assurance GROUPAMA MEDITERRANEE



C/



[T]







































Grosse délivrée

le

à SCP

Lobier

Selarl Vajou











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 08 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 13 Décembre 2021, N°20/03050



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine G...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/00029 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IJQN

CG

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

13 décembre 2021 RG :20/03050

Compagnie d'assurance GROUPAMA MEDITERRANEE

C/

[T]

Grosse délivrée

le

à SCP Lobier

Selarl Vajou

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 13 Décembre 2021, N°20/03050

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine GINOUX, Magistrat honoraire juridictionnel, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Madame Virginie HUET, Conseillère

Mme Catherine GINOUX, Magistrat honoraire juridictionnel

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Avril 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 Juin 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Compagnie d'assurance GROUPAMA MEDITERRANEE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Service contentieux [Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Raphaël LEZER de la SCP LOBIER & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

Madame [K], [E] [S] [T] épouse [P]

née le 19 Février 1940 à [Localité 5] (30)

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me LAMRINI de la SELARL THIREL SOLUTIONS, Plaidant, avocat au barreau de ROUEN

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 09 Mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 08 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

Exposé du litige

Mme [K] [T] épouse [P] est propriétaire d'une maison sise à [Localité 1] (Gard), assurée auprès de la société Groupama en garantie multirisques habitation incluant le risque 'catastrophes naturelles'.

Après avoir constaté l'apparition de fissures importantes tant à l' extérieur qu'à l'intérieur de son habitation, Mme [P] a procédé à une déclaration de sinistre au titre de la garantie 'catastrophes naturelles'.

Le 23 octobre 2018, après avoir missionné un expert, la société d'assurances Groupama, a refusé sa garantie.

Le 27 novembre 2019, Mme [P] a obtenu en référé la désignation de M. [C] [V] comme expert judiciaire.

Le 11 juin 2020, l'expert a déposé son rapport.

Par acte du 29 juin 2020, Mme [P] a fait assigner la société d'assurances Groupama en vue de la voir condamnée à la garantir des désordres affectant son immeuble.

Par jugement rendu le 13 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Nimes a condamné, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la société d'assurances Groupama Méditerranée à payer à Mme [P] :

- au titre des travaux de reprise la somme de 129.868,52 euros HT outre TVA en vigueur à la date du paiement, et actualisation en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 11 juin 2020 jusqu'à la date du paiement

- au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2.000 euros et aux dépens

Par déclaration effectuée le 29 décembre 2021, la société d'assurances Groupama Méditerranée a interjeté appel.

Suivant conclusions notifiées le 28 mars 2022, la société d'assurances Groupama Méditerranée demande à la cour de :

- réformer le jugement

- débouter Mme [P] de toutes ses demandes

- la condamner à lui payer la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

L'appelante soutient que les désordres de fissurations invoqués par Mme [P] n'ont pas pour cause déterminante les événements de catastrophe naturelle des années 2012,2016 et 2017. Elle estime que ce sont les fondations qui sont inadaptées à la nature du sol.

Elle prétend par ailleurs que Mme [P] n'a pas pris les mesures habituelles destinées à prévenir l'apparition de ces dommages.

Suivant conclusions notifiées le 5 mai 2022, Mme [P] demande à la cour

- d'infirmer le jugement en ce qui concerne le quantum des dommages et intérêts qui lui ont été alloués

- de condamner Groupama Méditerranée à lui payer la sommme de 142.508,72 euros

- de condamner Groupama Méditerranée à lui verser la somme de 3.600 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

L'intimée sollicite, outre le coût des travaux de reprise, le montant de la maitrise d'oeuvre FR SPS et mission géotechnique, comme retenu par l'expert. Elle soutient que les insuffisances constructives alléguées par l'assureur ne sont pas la cause des désordres mais un simple facteur aggravant de ceux-ci. Elle souligne les caractéristiques du sol, argileux et sujet aux variations hydriques (phénomène de retrait gonflement) .

La clôture de la procédure a été fixée au 9 mars 2023

Motifs de la décision

L'expert a constaté que les façades est, ouest et sud sont marquées de désordres constitués de fissures sur murs et microfissures sur enduits extérieurs localisées, indiquant que s'agissant de la façade nord, la situation est minorée.

L'intérieur de la villa présente divers désordres par fissures localisées sur les murs porteurs et cloisons comme doublage.... Les désordres intérieurs sont nombreux et correspondent au résultat imposé par la notion de mouvement des structures consécutives aux réactions des sols dans le cadre de la sécheresse.

Selon l'article L125-1 du code des Assurances, sont considérés comme des effets de catastrophes naturelles, les dommages matériels non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages, n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises .

Le caractère déterminant du rôle causal de l'agent naturel dans la survenance des désordres est une condition de la garantie du risque de catastrophe naturelle qu'il appartient à l'assuré d'établir.

Pour prétendre à la mise en jeu de la garantie, Mme [P] doit donc justifier :

- de l'existence d'un arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle

-d' un dommage en lien direct avec l'intensité anormale d'un agent naturel

- du rôle déterminant de cet agent dans la survenance du dommage

- du fait que les mesures habituelles à prendre pour prévenir le dommage n'ont pu empêcher sa survenance ou n'ont pu être prises.

1)l'existence d'un arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle

L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couvertspar la garantie visée au premier alinéa du présent article. Cet arrêté précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la décision des ministres. Cette décision est ensuite notifiée à chaque commune concernée par le représentant de l'Etat dans ledépartement, assortie d'une motivation. L'arrêté doit être publié au Journal officiel dans un délai de troismois à compter du dépôt des demandes à la préfecture.

En l'espèce, la maison assurée est bien située dans la zone ayant donné lieu à deux arrêtés de catastrophe naturelle pour la période du 1er avril 2016 au 30 septembre 2016 , puis du 1er juillet au 30 septembre 2017 . Le sinistre déclaré par Mme [P] est donc contemporain de ces deux épisodes de catastrophe naturelle.

2) un dommage en lien direct avec l'intensité anormale d'un agent naturel

La garantie est due en cas de dommages provoqués de façon prépondérante par le phénomène de catastrophe naturelle, et ne peut parconséquent s'appliquer aux dommages préexistants.

Cela ne signifie pourtant pas nécessairement que des dommages qui se sont produits du fait de l'aggravation de dommages antérieurs ne puissent être pris en garantie au titre des « dommages directs ».

Les fissures considérées dans l'instance sont bien apparues par l'effet de la sécheresse, catastrophe naturelle, objet des arrêtés pris en 2017 et 2018, celle-ci ayant aggravé les fissurations qui préexistaient

Il résulte des attestations de Mmes [F] et [P] que si des fissures sont apparues en 1997, en revanche à la suite des traitements des façades et des peintures réalisés en 2012 et 2014 , il n'existait plus de fissures et ce jusqu'en 2016 à la suite de la période de sécheresse, fissures qui se sont aggravées en 2017.

C'est donc l'effet de la sécheresse qui a provoqué le sinistre déclaré, qui sans cet événement, ne se serait pas produit .

3) le rôle déterminant de cet agent dans la survenance du dommage

Cette notion renvoie à celle de causalité adéquate.

La garantie ne peut avoir lieu qu'à condition que le phénomène naturel

a bien été, au-delà d'un antécédent nécessaire du dommage, sa cause

déterminante.

Il convient de rechercher parmi les causes parfois multiples qui ont concouru au dommage celle qui présente ce caractère déterminant c'est-à-dire prépondérant au point d'évincer toutes les autres.

L' expertise a identifié plusieurs causes :

la construction d'origine de la villa présentait des fondations inadaptées, avec une faible rigidité. Ensuite, les extensions réalisées en 1984 (avec la création d'un étage et d'un grand garage) présentent des défaillances constructives qui ont entrainé des tiraillements et surcharges. Puis les sols seront soumis au phénomène récurrent de sécheresse au cours des années 2012 , 2016 et 2017 .

Ainsi, les désordres apparus résident dans la conjonction de plusieurs facteurs :

désordres antérieurs dus à des défaillances techniques imputables à l'homme (insuffisance constructive) et dommages consécutifs provoqués par les épisodes de sécheresse qualifiés de catastrophe naturelle.

Il y a donc lieu de rechercher la part de l'ampleur de chacun des facteurs incriminés et de déterminer, en particulier, si le phénomène naturel a été, ou non, l'agent déterminant à l'origine des dommages .

L'expert indique en page 20 de son rapport que les fissures intérieures sont caractéristiques des mouvements de sol 'Les désordres intérieurs.... correspondent au résultat imposé par la notion de mouvement des structures consécutives aux réactions des sols dans le cadre de la sécheresse...

Surtout, selon l'expert, le phénomène 'sécheresse' devient majeur en 2017 et 2018 dans l'apparition des fissures et de l'instabilité des sols, l'expert mentionnant 'la secheresse des sols va prendre le dessus au profit des constructions défaillantes ' (page 36),

ce dont il peut être déduit que le phénomène naturel a été l'agent déterminant à l'origine des dommages constatés par l'expert.

4) le fait que les mesures habituelles à prendre pour prévenir le dommage n'ont pu empêcher sa survenance ou n'ont pu être prises

L'ampleur du phénomène de secheresse était tel que l'expert a constaté que toutes les constructions autour de la maison (annexe et mur de clôture) ont subi des désordres liés au mouvement des sols.

Ainsi, la survenance de ce phénomène n'aurait pu être enrayé par des mesures qu'aurait pu prendre Mme [P].

Dès lors qu'il est établi que les sècheresses récurrentes de 2016 et 2017 déclarées catastrophe naturelle sont la cause déterminante du sinistre affectant l'immeuble de Mme [P], l'assureur doit indemniser le sinistre.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'obligation pour la société d'assurances Groupama Méditerranée de garantir Mme [P].

Sur le coût des réparations

Toutes les conséquences directes du préjudice doivent être réparées, peu important qu'il en résulte une amélioration du bien.

A partir du devis de l'entreprise SV2B, professionnel en la matière, s'appuyant elle-même sur l'étude géotechnique de la société Abesol, l'expert a évalué la remise en état consistant en un renforcement par micro-pieux et application d'un enduit sur les façades, reprises des fissures avec dispositifs élaborés pour un total lots gros oeuvre et secondaire de 113.335 euros HT( page 41 ).

Il a également préconisé les interventions d'un maître d'oeuvre, d'un coordonnateur SPS et d'une mission géotechnique compte tenu de la complexité de l'opération . Interventions chiffrées à 16.533,52 euros HT (page 42).

Il importe de relever que le premier juge a entériné ces montants HT , de sorte que sa décision de ce chef sera confirmée.

Sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société d'assurances Groupama Méditerranée qui succombe en son recours, sera condamnée à payer, au titre de la procédure d'appel, la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant :

Condamne la société d'assurances Groupama Méditerranée à payer à Madame [K] [T] épouse [P] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les damandes plus amples,

Condamne la société d'assurances Groupama Méditerranée aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 22/00029
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;22.00029 ?
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