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01/06/2023 | FRANCE | N°21/04599

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 01 juin 2023, 21/04599


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/04599 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IJMI



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

25 novembre 2021 RG :19/00996



[I]



C/



[M]

[M]







































Grosse délivrée

le

Me Rostagni

Selarl Mazarian

Roura Paolini

à









COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 01 JUIN 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 25 Novembre 2021, N°19/00996



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Anne DAMPFHOFFER, Président...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/04599 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IJMI

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

25 novembre 2021 RG :19/00996

[I]

C/

[M]

[M]

Grosse délivrée

le

Me Rostagni

Selarl Mazarian Roura Paolini

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 01 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 25 Novembre 2021, N°19/00996

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Madame Virginie HUET, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Avril 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 01 Juin 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [T], [H] [I] épouse [R]

née le 16 Août 1942 à[Localité 8])

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Carole ROSTAGNI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

INTIMÉS :

Madame [U] [M]

née le 20 Novembre 1976 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Christian MAZARIAN de la SELARL MAZARIAN-ROURA-PAOLINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Monsieur [E] [M]

né le 13 Août 1953 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Christian MAZARIAN de la SELARL MAZARIAN-ROURA-PAOLINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 09 Mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 01 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

Exposé :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon le 25 novembre 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

- dit que Mme [U] [M], en sa qualité de nue propriétaire de la parcelle cadastrée section [Cadastre 5], est recevable à agir aux côtés de M. [E] [M], usufruitier de cette même parcelle, afin de faire cesser un éventuel empiétement du fonds contigu, propriété de Mme [T] [I], veuve [R], sur leur parcelle,

- déboute Mme [T] [I], veuve [R] de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action réelle immobilière en cessation d'un empiétement et de l'action en responsabilité extracontractuelle pour troubles anormaux de voisinage exercées par M. [E] [M] et par Mme [U] [M],

- déboute M. [E] [M] et Mme [U] [M] de leur demande de constatation que le mur de soutènement dont est propriétaire Mme [T] [I] veuve [R] empiète sur leur parcelle cadastrée section [Cadastre 5],

- constate, par contre, que le mur litigieux est instable et risque de s'effondrer, ce qui constitue pour les consorts [M] un trouble anormal de voisinage,

- condamne en conséquence Mme [T] [I], veuve [R] à effectuer tous travaux à partir de son propre fonds pour conforter le mur de soutènement dont elle est propriétaire et faire cesser l'évolution de l'inclinaison de ce mur et le risque d'effondrement qui en résulte, et ce dans un délai de trois mois à compter du prononcé du présent jugement,

- dit que passé ce délai, une astreinte provisoire de 150,00 euros par jour de retard commencera à courir, et ce pendant un délai de trois mois au-delà duquel il sera à nouveau statué,

- condamne Mme [T] [I], veuve [R] à payer à M. [E] [M] et à Mme [U] [M] ensemble la somme de trois mille euros (3 000,00 EUR) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi,

- déboute Mme [T] [I], veuve [R] de ses demandes reconventionnelles en déplacement d'une cabane en bois et en indemnisation de son préjudice moral,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Vu l'appel interjeté le 24 décembre 2021 par Madame [I], veuve [R].

Vu les conclusions de l'appelante en date du 6 mars 2023, demandant de :

Vu les articles 613, 614, 578, 2224, 2227 du code civil,

Vu les articles 9, 31 et 117 du code de procédure civile,

Vu le rapport d'expertise judiciaire du 26/02/2019,

in limine litis,

- dire et juger irrecevables les demandes formées par Madame [U] [M] et ce, en application des articles 613, 614 et 578 du code civil et des articles 31 et 117 du code de procédure civile,

- dire et juger prescrite l'action réelle immobilière de Monsieur [E] [M] et ce, en application de l'article 2227 du code civil et de l'article 9 du code de procédure civile,

- dire et juger prescrite l'action en responsabilité extra contractuelle pour trouble anormal de voisinage des consorts [M],

- dire et juger irrecevables les demandes des consorts [M] tenant au défaut d'intérêt légitime et ce, en application de l'article 31 du code de procédure civile,

au fond,

- dire et juger recevable et bien fondée Mme [I], veuve [R] en son appel,

- confirmer le jugement du 25 Novembre 2022 du tribunal judiciaire d'Avignon en ce qu'il a débouté les consorts [M] de leur demande de constatation que le mur de soutènement dont est propriétaire Mme [T] [I], veuve [R] empiète sur leur parcelle cadastrée section [Cadastre 5],

- réformer le jugement du 25 Novembre 2022 du tribunal judiciaire d'Avignon en ses autres dispositions,

- dire et juger que l'inclinaison du mur de soutènement ne constitue pas un trouble anormal de voisinage,

- rejeter les demandes, fins et conclusions des consorts [M],

à titre subsidiaire,

- fixer la durée des travaux de consolidation du mur de soutènement appartenant à Madame Veuve [R] à 08 mois,

- prendre acte que les travaux ont été réalisés avec diligence et célérité par Madame [R] par une entreprise compétente dans le délai requis par Madame veuve [R],

- prendre acte que les consorts [M] ont fait opposition et empêché l'entreprise requise d'accéder au lieu pour réaliser les travaux fixés par le tribunal,

- condamner in solidum les consorts [M] à payer chacun la somme de 5.000 euros à Madame [T] veuve [R] pour le préjudice moral et financier et ce, avec intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,

- condamner les consorts [M] à déplacer la construction qui d'une part prend appui sur le mur de soutènement et d'autre part est construite en partie sur l'assiette située au pied du mur de soutènement et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,

- condamner in solidum les consorts [M] à payer chacun la somme de 50.000 euros à Madame [T] veuve [R] pour le préjudice moral et ce, avec intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,

- rejeter les demandes, fins et conclusions des consorts [M],

- condamner in solidum les consorts [M] à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les conclusions de Monsieur [E] [M] et de Madame [U] [M] en date du 11 avril 2022, demandant de :

Vu l'article 12 du code de procédure civile,

Vu les dispositions des articles 544, 545, 552, 653 et 1240 et 1242 du code civil,

- confirmer dans son principe la décision du 25 novembre 2021,

Vu le chiffrage des travaux par l'expert [G] soit,

17 374, 53 €,

outre,

1 500,00 € (étude)

soit un total de 18 874, 53 €,

- dire et arrêter que Mme [R] devra effectuer les travaux de confortement du mur de soutènement suivant les préconisations [G] sauf à dire que la remise en état aura lieu un mois après la signification de l'arrêt à intervenir et qu'à défaut une astreinte de 200 €/jour courra jusqu'à complète réalisation,

- Mme [R] sera condamnée à réaliser ces travaux sans atteinte à la propriété [M] suivant les préconisations du rapport [G] « soit »:(sic)

Mme [R] sera condamnée à payer 60 000 € en réparation de l'atteinte à leur propriété déjà réalisée (30 000 € à [E] [M], 30 000 € à [U] [M]),

- condamner Mme [R] aux entiers dépens et à payer la somme de 5 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu la clôture du 9 mars 2023.

MOTIFS

Monsieur [M] et Madame [M], sa fille, sont respectivement usufruitier et nue-propriétaire d'une parcelle de terrain à [Localité 6] comportant une maison d'habitation. Ils sont voisins de Madame [I], veuve [R] dont la parcelle surplombe la leur, les terres en étant retenues par un mur de soutènement d'une longueur de 20 m environ .

Monsieur et Madame [M] se sont plaints de l'inclinaison importante et de l'empiétement de ce mur et ont obtenu la désignation d'un expert judiciaire.

L'expert retient essentiellement que le mur de soutènement a une longueur de 20 m et une hauteur de 2,15 m ; qu'il a été édifié en 1976 ; qu'il présente une inclinaison moyenne de 375 mm, que son basculement est évolutif car l'inclinaison s'est accrue depuis l'expertise amiable de 2017; que le mur est dangereux, sa stabilité étant compromise et qu'il doit être renforcé par des travaux de sécurisation ; que par précaution, une zone de 2,50 m sur toute sa longueur prise sur la parcelle des consorts [M] doit être interdite et sécurisée jusqu'à réalisation des travaux de confortement; que la rupture d'une canalisation d'eau des époux [R] en 2013 consécutive à des travaux réalisés par les membres de la famille [M] et une fuite d'eau en 2015 sur la propriété [R] ont déstabilisé le sol d'assise de la semelle du mur de soutènement en accentuant le faux aplomb d'une manière inacceptable.

Le tribunal a considéré que les consorts [M], qui avaient la charge de la preuve de démontrer l'existence de l'empiétement du mur, ne la rapportaient pas, ne produisant à aucun élément sur la délimitation de leur parcelle qui était contestée par Mme [R] ; que par ailleurs, le mur, par le risque d'éboulement qu'il présentait, constituait un trouble anormal de voisinage et qu'il convenait de faire cesser ce trouble en condamnant Madame [R] à effectuer les travaux de confortement.

Le tribunal a fixé le préjudice de jouissance de Monsieur [M] et de Madame [M] à 3000 € ; il a rejeté la demande de déplacement d'une cabane formée par Madame [R], retenant que la limite divisoire entre les 2 fonds n'était pas établie.

Au soutien de son recours, Madame [R] fait valoir en substance que seul l'usufruitier peut exercer une action pour faire cesser un trouble de jouissance et peut engager une action immobilière et non le nu-propriétaire.

Elle oppose également le caractère prescrit de l'action réelle immobilière de Monsieur [M], usufruitier et fait valoir que depuis 1976, le délai de 30 ans est écoulé, soulignant que l'expert a retenu que la solidité du mur n'est pas affectée depuis plus de 40 ans et que nul ne sait depuis quand cette inclinaison existe ; que le point de départ de l'inclinaison du mur est inconnu et que Monsieur [M] ne peut donc prétendre que son action n'est pas prescrite ; que l'action fondée sur le trouble anormal de voisinage est soumise à la prescription de 5 ans et qu'à la date du 22 mars 2019, cette action était prescrite, Monsieur [M] ayant déjà fait état de l'inclinaison du mur dans le cadre des débats devant le juge des référés en 2013; qu'en ce qui concerne les travaux sur le mur de soutènement, l'expert a retenu que la stabilité du mur avait été assurée depuis sa construction en 1976, soit 40 ans sans problème, confirmant en cela les observations de l'expertise amiable ; que dès lors, on ne peut retenir une atteinte ou une instabilité du mur, ni un risque d'éboulement, ni un trouble anormal de voisinage, ni ordonner qu'il soit effectué les travaux ; que le tribunal a prévu des délais impossibles et que le délai pour la réalisation des travaux sera de 8 mois ; que les consorts [M] ne démontrent pas qu'ils sont propriétaires au pied du mur de soutènement car les 30 cm sur lesquels le mur empiète ne leur appartiennent pas, mais appartiennent à Madame [R]. Elle maintient sa demande sur le cabanon et souligne qu'elle a désormais effectué les travaux de comportement de son mur, ses voisins ne lui ayant, depuis, opposé aucune réclamation.

Monsieur et Madame [M] s'opposent aux irrecevabilités soulevées et au fond, exposent essentiellement que le mur est un mur de soutènement, qu'il est présumé appartenir à celui dont il soutient les terres et qui en profite; que c'est donc Madame [R] qui doit en assurer l'entretien ; que les développements relatifs aux canalisations qui auraient été détériorées concernent Madame [P] [M] qui n'est pas partie à la présente procédure ; que l'expert a fixé l'empiétement du mur à 0,375 m sur une longueur de 20 m et qu'en basculant sur la propriété dans sa partie haute, il y a nécessairement empiétement ; que le trouble anormal de voisinage existe.

Sur la recevabilité :

Les moyens d'irrecevabilité ont été examinés par le tribunal dans son jugement du 25 novembre 2021 sur une action introduite le 22 mars 2019.

Le jugement, qui a ainsi statué, est déféré à la cour sur un appel critiquant notamment cette question de recevabilité.

Il en résulte la compétence de la cour pour statuer de ces chefs.

L'action est introduite par [E] [M] en sa qualité d'usufruitier et par [U] [M] en sa qualité de nue-propriétaire.

Leurs prétentions telles qu'exprimées devant la cour sollicitent la confirmation du jugement ; elles tendent donc, vu le dispositif ci-dessus rappelé de la décision déférée à voir dire que Madame [R] doit être condamnée à effectuer les travaux de confortement du mur litigieux et à indemniser le préjudice de jouissance subi ainsi qu'au rejet de la demande de Madame [R] en démolition de la cabane en bois ; elles tendent également à la réparation de l'atteinte à la propriété « déjà réalisée » motif pris de l'empiétement .

La demande de condamnation à effectuer les travaux de confortement en ce qu'elle procède de la volonté de préserver la jouissance de l'usufruitier et la propriété du nu-propriétaire est recevable.

La demande en réparation du préjudice subi du fait de l'empiétement est recevable tant de la part de l'usufruitier que du nu-propriétaire en ce qu'elle tend également à préserver les intérêts des deux 

En revanche, la demande en réparation du préjudice de jouissance est recevable de la seule part de Monsieur [E] [M].

En ce qui concerne le moyen tiré de la prescription, la preuve en incombe à celui qui s'en prévaut, en l'espèce, à Madame [R] .

Or, celle-ci ne verse aux débats aucun élément de nature à démontrer qu'en assignant à la date du 22 mars 2019, les consorts [M] sont hors du délai de prescription trentenaire s'agissant de l'empiétement invoqué, aucun élément ne permettant, en effet, dans les dossiers des parties de déterminer un point de départ antérieur à l'écoulement d'un délai de 30 ans à partir de cette date et les experts intervenus retenant que la stabilité du mur a été assurée pendant 40 ans après sa construction en 1976.

Le moyen tiré de la prescription est donc rejeté, étant relevé que Madame [R], qui a donc la charge de la preuve, écrit, elle-même, qu'aucun élément probant n'est versé aux débats sur le point de départ de la prescription de l'action en ce qui concerne l'action réelle immobilière

Madame [R] ne verse pas plus d'éléments susceptibles de caractériser un point de départ antérieur au délai de 5 ans par rapport à la date de l'assignation introductive de la présente instance, du 22 mars 2019, s'agissant du délai de prescription quinquennale applicable à l'action personnelle tendant au confortement du mur et à l'indemnisation du préjudice de jouissance ; elle fixe, en effet, ce point de départ à la décision du 6 novembre 2013 rendue par le juge des référés, mais la lecture de cette décision ne permet pas de retenir que les consorts [M] y faisaient alors état de l'inclinaison du mur, même si la question du décaissement du terrain d'[P] [M] y est abordée.

Elle écrit également, en page 5 de ses conclusions, que « ce n'est qu'en 2017, soit après les travaux de décaissement par les consorts [M] et déterrement complet des canalisations des époux [R] que les consorts [M] vont se plaindre de l'inclinaison du mur de soutènement des époux [R]. Cette date est indiquée dans le rapport d'expertise amiable du 7 juillet 2017 de la protection juridique protection Prunay . »

Or, cette date prise comme point de départ ne peut caractériser, compte tenu de la date de délivrance de l'assignation, l'acquisition du délai de prescription quinquennale.

Sur le fond :

Étant à titre liminaire rappelé que la demande réparation du préjudice de jouissance n'est donc recevable que de la part de Monsieur [M], usufruitier, il sera procédé à l'examen du bien-fondé des demandes.

Aucun élément ne vient démontrer la réalité de l'empiétement invoqué sur la propriété des consorts [M], l'expert ayant même préconisé que ceux-ci protègent leur propriété au pied du mur sur 50 cm alors que l'empiétement reproché qui est compris dans ces 50 cm serait, lui-même, de 30 cm ; que par ailleurs , aucune autre pièce n'établit davantage cet empiétement.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté toute demande de ce chef.

En ce qui concerne le préjudice de jouissance et la demande de travaux de confortement, il n'est pas contesté que le mur litigieux est un mur de soutènement des terres de Madame [R]. Il en résulte la nécessité pour elle de l'entretenir.

À cet égard, le risque d'effondrement et l'incertitude en résultant pour la sécurité du fonds [M] sont suffisamment démontrés par les observation et études expertales réalisées en 2019, concluant à un aplomb dangereux du mur et faisant état du caractère évolutif du phénomène sans être utilement contredites, celles de l'expertise amiable de 2017 concluant qu'il n'existe pas de risques d'effondrement imminent ne pouvant être utilement invoquées dès lors qu'elles décrivent une situation antérieure à 2 années.

Madame [R] démontre avoir, à ce jour, effectué des travaux de confortement et sécurisation dudit mur sur la base d'une étude géotechnique et d'un plan d'exécution d'ingénierie consistant notamment dans la création d'un contre rideau arrière de micro pieux, travaux dont elle a fait la réception le 2 juin 2022, à propos desquels aucune critique sérieuse technique n'est opposée par Monsieur et Madame [M] et en suite desquels Monsieur et Madame [M] n'ont d'ailleurs plus émis aucune protestation.

La condamnation prononcée par le tribunal de Madame [R] à effectuer tous travaux de confortement du mur pour éviter tout risque de basculement, justifiée et bien fondée, sera donc confirmée en son principe, sauf à constater que les travaux ont été désormais exécutés, la décision étant par ailleurs réformée en ce que le tribunal l'a assortie d'une astreinte passé un délai de 3 mois à compter du prononcé du jugement, délai qui, compte tenu des conditions de réalisation du chantier, sera fixé à 8 mois conformément à la demande de Mme [R].

Il est par ailleurs certain que la propriété [M] a subi un risque réel, au moins depuis 2016 selon l'expert, c'est-à-dire 40 ans après sa construction, risque auquel l'expert a estimé qu'il fallait mettre fin en installant en place une protection jusqu'à la réalisation de ces travaux.

Dans ces conditions le jugement sera confirmé en ce qu'il a accordé à M et Mme [M] une indemnisation au titre du préjudice subi de ce chef et tenant à l'impossibilité de jouir en toute sécurité de cette partie du terrain, mais il sera réformé sur son montant, la cour le fixant à la somme de 5000€ compte tenu du délai écoulé jusqu'aux travaux.

Il sera, en dernier lieu, relevé qu'en l'état des investigations expertales qui n'ont pas approfondi la question des fuites d'eau à l'origine de l'instabilité de la semelle du mur, notamment celle invoquée comme survenue en 2013, aucune part de responsabilité ne peut être mise à la charge de Monsieur et Madame [M].

En ce qui concerne, enfin, la dernière demande qui est présentée par Madame [R], tendant à voir déplacer une construction qui prend appui sur le mur, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande, faute de preuve du grief tenant à ce que cette construction serait sur la propriété [R].

Madame [R], qui succombe sur le grief tenant au mur de soutènement de sa propriété, est mal fondée à solliciter la condamnation des intimés à réparer à son bénéfice un préjudice moral .

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile et la succombance de Madame [R] devant la cour sur un appel dont elle a pris l'initiative relativement à sa responsabilité quant au mur de soutènement, elle supportera les entiers dépens de la procédure d'appel et versera, en équité, au consort [M] la somme de 1800 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, les dispositions de ce chef du jugement pour la procédure de première instance vu la succombance respectives des parties étant, en revanche, confirmées.

Par ces motifs

La cour, statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, en matière civile et en dernier ressort,

Confirme jugement en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de la prescription, en ce qu'il a déclaré Madame [U] [M] recevable à agir en sa qualité de nue-propriétaire afin de faire cesser un éventuel empiétement, mais dit que l'action en réparation du préjudice de jouissance n'est recevable que de la part de Monsieur [E] [M],

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté au fond les demandes relatives à l'empiétement du mur,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle en déplacement d'une cabane en bois de Madame [R] ainsi que sa demande au titre du préjudice moral,

Confirme le jugement en ce qu'il a ordonné la réalisation des travaux sur le mur par Madame [R] sauf à préciser que ceux-ci sont désormais réalisés de façon satisfactoire et à fixer l'astreinte passé un délai de 8 mois à compter du prononcé du jugement,

Confirme le jugement sur le principe de l'indemnisation du préjudice de jouissance de Monsieur [E] [M] mais le réformant sur le montant de l'indemnisation et statuant à nouveau,

Condamne Madame [R] à verser à Monsieur [E] [M] de ce chef la somme de 5000 €,

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,

Y ajoutant :

Condamne Madame [R] à verser à Monsieur et Madame [M] la somme de 1800 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples,

Condamne Madame [R] à supporter les dépens d'appel

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/04599
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;21.04599 ?
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