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25/05/2023 | FRANCE | N°21/02952

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 25 mai 2023, 21/02952


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/02952 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IEI5



VH



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

15 juin 2021 RG :20/00837



Société LE CLOS DE L'ANGELI



C/



[D]

[W]







































Grosse délivrée

le

à SCP Re

y Galtier

SCP Penard Oosterlynck...











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 25 MAI 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CARPENTRAS en date du 15 Juin 2021, N°20/00837



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02952 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IEI5

VH

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

15 juin 2021 RG :20/00837

Société LE CLOS DE L'ANGELI

C/

[D]

[W]

Grosse délivrée

le

à SCP Rey Galtier

SCP Penard Oosterlynck...

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 25 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CARPENTRAS en date du 15 Juin 2021, N°20/00837

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Virginie HUET, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Mme Laure MALLET, Conseillère

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 27 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

La SCCV Le CLOS DE L'ANGELI, société civile de construction vente au capital de 1000 euros immatriculée au RCS de Salon de Provence sous le numéro 828 801 027, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean Philippe GALTIER de la SCP REY GALTIER, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me DUBOURG de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉS :

Monsieur [A] [W] [S] [D]

né le 17 Octobre 1971 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 13]

Représenté par Me Caroline BEVERAGGI de la SCP PENARD-OOSTERLYNCK, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

Madame [V] [J] [U] [W] épouse [D]

née le 04 Août 1945 à [Localité 13]

[Adresse 7]

[Localité 13]

Représentée par Me Caroline BEVERAGGI de la SCP PENARD-OOSTERLYNCK, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 09 Février 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 25 Mai 2023,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Suivant acte authentique dressé le 25 septembre 2017, les consorts [W]-[D] ont vendu à la société civile de construction vente (SCCV) Le clos de l'Angeli les parcelles cadastrées section AK, [Cadastre 9] et [Cadastre 4], sises sur la commune de [Localité 13] (Vaucluse), dans le cadre de la construction d'un parc résidentiel, moyennant le paiement de la somme de 900 000 euros, converti en l'obligation de construire pour le compte du vendeur sur les parcelles restant la propriété du vendeur, cadastrées section [Cadastre 10] à [Cadastre 6], sept villas et de lui livrer après achèvement au plus tard dans les 18 mois des présentes.

Ledit acte prévoit que « les sept villas seront édifiées par l'acquéreur constructeur, conformément aux plans et aux notices descriptives nominatives jointes aux présentes et approuvés par les parties (') » et que « dans le cas, où, au bout des 18 mois, les maisons ne seraient pas achevées, il s'engage à verser au vendeur, une indemnité de retard à hauteur de 800 euros par mois et par logement (...) ».

La livraison devait intervenir le 25 mars 2019.

Se plaignant de retards d'exécution, que les villas 6 et 7 devant leur revenir présentaient, pour l'une (n°6), des malfaçons et non-conformités ayant fait l'objet de réserves lors de la réception du 6 mai 2019 et que la situation perdurait pour une terrasse ne reposant pas sur un vide sanitaire, pour l'autre (n°7), de multiples désordres ayant fait obstacle à toute réception et que l'immeuble n'avait pas été implanté conformément aux plans et prescriptions du permis de construire, M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D], ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Carpentras, qui, par ordonnance du 31 juillet 2019, a désigné M. [N] en qualité d'expert et condamné la société de construction à verser la somme de 2 400 euros à valoir sur les pénalités de retard.

L'expert a déposé son rapport le 23 juin 2020.

Par acte délivré le 17 juillet 2020, M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] ont fait assigner la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli pour soutenir que, dans son rapport, l'expert judiciaire avait confirmé les retards, malfaçons et défauts de conformité aux stipulations contractuelles des ouvrages et obtenir, dès lors, en se fondant sur les évaluations opérées par M. [N] et/ou des devis, la condamnation de leur adversaire à leur payer, outre une indemnité pour frais irrépétibles, les sommes de :

*36 060 euros pour l'absence de fondation des terrasses,

* 16 000 euros au titre des moins-values affectant la villa 7,

*7 200 euros pour l'absence de pose de volets bois coulissants,

*800 euros pour l'absence de pose de volet électrique dans la cuisine de la villa 6,

*2 186 euros au titre de l'indemnité de retard,

*5000 euros en réparation du préjudice moral subi.

Le tribunal judiciaire de Carpentras, par jugement contradictoire du 15 juin 2021, a :

- Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 16 000 euros au titre des moins-values affectant la villa n°7.

- Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 8000 euros au titre de la mise en conformité des volets.

- Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 10 000 euros au titre du défaut de réalisation de fondations sous terrasses.

- Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 2186 euros au titre des pénalités de retard.

- Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli aux dépens de l'instance incluant le coût de l'expertise confiée à M. [N] suivant ordonnance de référé du 31 juillet 2019.

- Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] une indemnité de 2000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Dit que les condamnations précédentes prononcées à l'encontre la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli sont prononcées en deniers ou quittances valables au regard des sommes versées en exécution de l'ordonnance de référé 19/223 en date du 31 juillet 2019, les condamnations se confondant et ne se cumulant pas.

- Rejeté toutes les autres réclamations.

Par acte du 28 juillet 2021, la société Le clos de l'Angeli a régulièrement interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

Par ordonnance du 7 novembre 2022, la clôture de la procédure a été fixée au 9 février 2023, l'affaire a été appelée à l'audience du 27 février 2023 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 25 mai 2023.

EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 janvier 2023, la société Le clos de l'Angeli, appelante, demande à la cour de :

Vu l'article 1231-1 du code civil

Vu l'article 32-1 du code de procédure civile

Vu l'article 700 du code de procédure civile

- Recevoir la SCCV Le clos de l'Angeli en son appel et l'y déclarer bien fondée,

- Infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté les Consorts [D] de leur demande de condamnation à des dommages et intérêts pour préjudice moral,

Statuant à nouveau :

A titre principal :

- Débouter les Consorts [D] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire :

- Revoir à de plus justes proportions les demandes indemnitaires des Consorts [D],

En tout état de cause :

- Condamner in solidum les Consorts [D] au paiement d'une amende civile de 5 000 euros,

- Condamner in solidum les Consorts [D] au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- Au besoin, ordonner la compensation des sommes dues,

- Condamner in solidum les Consorts [D] au paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner in solidum les Consorts [D] aux entiers frais et dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise.

La SCCV Le clos de l'Angeli fait en substance valoir que :

- La notice descriptive simplifiée précise que « les plans du logement joins à cette notice sont susceptibles d'être modifiés pour des raisons techniques ou architecturales ». Cette notice descriptive simplifiée ne mentionne pas que les modifications susceptibles d'intervenir doivent nécessairement faire l'objet d'une information spécifique aux propriétaires. En ce sens, la SCCV a donc respecté les documents contractuels.

- La durée du chantier aurait dû permettre aux consorts [D] de visualiser les modifications apportées au fur et à mesure de l'avancée des travaux, comme l'absence de création de vide sanitaire.

- La terrasse ne figure pas sur la notice d'origine.

- La SSCV LE CLOS DE L'ANGELI n'est pas à l'origine du projet et n'était pas l'auteur du descriptif des travaux. Dès lors, à son arrivée dans le projet, celle-ci a modifié le projet en réalisant un nouveau descriptif des travaux, bien plus complet et sérieux.

- M. [W], souhaitant impérativement avoir des parcelles égales entre les trois bénéficiaires, contrairement au permis de construire initial, a exigé que soit modifiées les surfaces des lots afin que les terrains cadastrés [Cadastre 8] / [Cadastre 5] /[Cadastre 6] fassent exactement 333 m2. ce qui a entrainé de nombreuses modifications et notamment des modifications sur la parcelle voisine des consorts [D].

- Un délai de livraison de dix-huit mois y était stipulé avec indemnité de retard «dont le constructeur pouvait s'exonérer en cas de force majeure». Le constructeur a rencontré des jours d'intempéries qui justifient du retard de la livraison pour certaines constructions et constituent un cas de force majeure.

- Eu égard aux modifications du descriptif des travaux ayant permis l'apport de nombreuses améliorations, les prestations complémentaires s'élevaient ainsi à plus de 85 000 euros que le constructeur a pris en charge conformément à l'acte de vente du 25 septembre 2017. Dès lors, la SCCV Le clos de l'Angeli a exécuté ses obligations avec la plus grande diligence livrant des biens d'une qualité supérieure à ce qui était prévu originellement. Les intimés ne subissent donc aucun préjudice.

- L'obligation qui incombait à la SCCV le clos de l'Angeli portait sur des terrains d'une valeur de 900.000 euros, convertis en une obligation de construire sept villas lesquelles ont finalement une valeur actuelle de 1.600.000 euros. Une faute contractuelle n'implique pas nécessairement par elle-même l'existence d'un dommage en relation de cause à effet avec cette faute. Les consorts [D] ne justifient d'aucun préjudice.

- S'agissant de la terrasse construite sur radier et non sur vide-sanitaire, cela a été réalisé conformément aux règles de l'art et n'altère en rien la solidité et la pérennité de l'ouvrage.

Et si celles-ci ne sont pas conformes à la notice descriptive initiale, elles ont été construites sous la forme d'un dallage sur terre-plein conformément aux règles DTU 13.3 ainsi que l'indique le bureau d'étude « PYC INGENIERIE », conformément aux préconisations du géotechnicien et conformément à la notice simplifiée qui permet des modifications en cas de nécessité technique ou architecturale.

- L'expert conclut notamment que les villas n°6 et 7 ne sont affectées d'aucun désordre.

- Concernant le fenestron, ce dernier n'a pas été supprimé, mais simplement déplacé.

En l'état de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 janvier 2023, contenant appel incident, M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D], intimés, demandent à la cour de :

Et tous autres à déduire ou à suppléer s'il y a lieu,

Vu le rapport d'expertise judiciaire,

Vu l'article 1231-1 du code civil,

Vu le rapport d'expertise de Monsieur [N],

Vu l'article 1792-6 al 2 du code civil,

- Débouter la SCCV Le clos de l'Angeli de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Carpentras du 15 juin 2021 en ce qu'il a :

* Condamné la société civile de construction vente Le clos de l'Angeli à payer à Monsieur [A] [D] et Madame [V] [W] épouse [D] la somme de 16 000 euros au titre des moins-values affectant la villa n°7,

* Condamné la SCCV Le clos de l'Angeli à payer à Monsieur [A] [D] et Madame [V] [W] épouse [D] la somme de 8 000 euros au titre de la mise en conformité des volets,

* Condamné la SCCV Le clos de l'Angeli à payer à Monsieur [A] [D] et Madame [V] [W] épouse [D] la somme de 2.186 euros au titre des pénalités de retard,

* Condamné la SCCV Le clos de l'Angeli aux dépens de l'instance incluant le coût de l'expertise confiée à Monsieur [N] suivant ordonnance de référé du 31 juillet 2019,

* Condamné la SCCV Le clos de l'Angeli à payer à Monsieur [A] [D] et Madame [V] [W] épouse [D] une indemnité de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* Dit que les condamnations précédentes prononcées à l'encontre de la SCCV Le clos de l'Angeli sont prononcées en deniers ou quittances valables au regard des sommes versées en exécution de l'ordonnance de référé en date du 31 juillet 2019 les condamnations se confondant et ne se cumulant pas,

* Rejeté toutes les autres réclamations.

Incidemment,

- Réformer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCCV Le clos de l'Angeli à la somme de 10 000 euros au titre du défaut de réalisation de fondations sous terrasses,

Statuant à nouveau,

- Condamner la SCCV Le clos de l'Angeli à payer aux consorts [D] la somme de 36 060 euros au titre du défaut de réalisation des terrasses sur vides sanitaires,

A titre subsidiaire,

- Confirmer le jugement du 15 juin 2021 en ce qu'il a condamné la SCCV Le clos de l'Angeli à payer aux consorts [D] la somme de 10.000 euros (5.000 euros par villa) au titre du défaut de réalisation des terrasses sur vides sanitaires,

Y ajoutant,

- Condamner la SCCV Le clos de l'Angeli à payer à Monsieur [A] [D] et Madame [V] [D] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la SCCV Le clos de l'Angeli aux dépens d'appel en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] font valoir essentiellement que :

- La livraison des villas devait intervenir le 25 mars 2019. Or, la villa n°6 n'a été réceptionnée que le 6 mai 2019 et a fait l'objet d'un procès-verbal de réception avec réserves. La villa n°7, elle n'a pas été réceptionnée au regard des nombreux désordres constatés et des non-conformités.

- Selon l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. En l'espèce, eu égard au rapport d'expertise de M. [N], la responsabilité contractuelle de la SCCV Le clos de l'Angeli ne peut être qu'engagée, celle-ci étant tenue à une obligation de résultat.

- Le dommage est en l'espèce pleinement caractérisé, les consorts [D] ne disposant pas de villas conformes à la notice descriptive.

- L'expert a retenu une dépréciation réelle des villas et un travail véritablement bâclé n'ayant fait l'objet d'aucune reprise ou finition par la SCCV Le clos de l'Angeli.

- concernant la villa n° 7 : alors que les consorts [D] avaient signé les plans de constructions de chacune des villas, la SCCV Le clos de l'Angeli a, sans en avertir les propriétaires et en cours de chantier, modifié l'implantation de la villa n°7. L'expert M. [N] a retenu en effet une non-conformité apparente aux documents contractuels.

- Comme le conclut l'expert, le prétendu caractère inévitable et imprévisible de cette modification du fait « d'une erreur du géomètre », résulte des seuls et « propres dires de la SCCV» qui n'en rapporte à ce jour toujours pas la preuve.

- La SCCV Le clos de l'Angeli ne peut se prévaloir d'un permis modificatif d'octobre 2018 pour justifier de modifications dont elle connaissait l'existence ou qu'elle pouvait raisonnablement anticiper lors de la signature de l'acte authentique.

- M. [D] n'a, à aucun moment été avisé, du moindre permis modificatif concernant son lot.

- Il ressort explicitement du rapport d'expertise et de l'ensemble des documents contractuels que SCCV Le clos de l'Angeli n'a pas respecté les prévisions de la notice descriptive qui prévoyait que les terrasses devaient être construites sur un vide sanitaire. Cette notice descriptive simplifiée en date du 24 octobre 2016 et annexée à l'acte notarié du 25 septembre 2017 prévoyait expressément en sa page 2 « La réalisation d'un vide sanitaire ventilé de 0,60m de haut minimum pour les terrasses » alors que les terrasses des villas n°6 et 7 ont été réalisées en dalles béton sur radier. Cette construction sur vide sanitaire a été expressément mentionnée sur la notice descriptive de sorte qu'elle a été érigée en condition déterminante. Le coût de la réalisation de terrasses sur vide sanitaire est plus onéreux comme le démontre le devis fourni par les Consorts [D]. La SCCV a ainsi réalisé une économie certaine au détriment des stipulations contractuelles.

- Par rapport à la terrasse de la villa n°7, l'expert estime à juste titre que cette diminution de la terrasse est indemnisable à hauteur de 6 000 euros (5m² x 1 200 euros/m²).

- La perte du fenestron ouvrant désormais à l'intérieur du garage occasionne une moins value à hauteur de 6 000 euros.

- La diminution de la largeur du garage de la villa n°7 constituant une moins-value de 4 000 euros selon l'expert.

- L'absence de volets roulants conforme (manuel au lieu d'électrique, en aluminium au lieu de PVC en imitation bois) occasionne une moins value à hauteur de 1 200 euros selon l'expert et par volet et par villa soit la somme totale de 8 000 euros.

Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION :

Sur la responsabilité de la SCCV Le clos de l'Angeli :

Les intimés font valoir un manquement aux stipulations contractuelles de la part de la SCCV.

Selon le constructeur, appelant, la notice descriptive simplifiée précise que « les plans du logement joins à cette notice sont susceptibles d'être modifiés pour des raisons techniques ou architecturales ». Il considère ainsi n'avoir pas manqué à ses obligations.

Réponse de la cour :

Les parties se fondent sur la responsabilité contractuelle du constructeur pour inexécution de ses obligations en raison d'une délivrance non conforme aux stipulations contractuelles.

En vertu de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Il est constant qu'aux termes d'un acte de vente régularisé le 25 septembre 2017 en l'étude de Maître [B], notaire à [Localité 12] (84), les consorts [D] ont vendu à la société civile de construction vente, la SCCV le clos de l'Angeli deux parcelles de terres figurant au cadastre sous les références [Cadastre 9] et [Cadastre 4] lieudit La grande bastide aux fins de construction d'un programme immobilier. La vente ne porte pas sur le bien cadastré section [Cadastre 10] à [Cadastre 6] restant la propriété des consorts [D] avec obligation pour la SCCV Le clos de l'Angeli de construire.

Le prix de vente de 900 000 euros a été converti en une obligation de faire pour la SCCV le clos de l'Angeli, de construire pour le compte des consorts [D], et plus particulièrement pour M. [A] [D], M. [T] [D] son frère et Mme [V] [D], sur les parcelles restant leur propriété, cadastrée [Cadastre 10] à [Cadastre 6] :

« Quatre villas de 75 m2 habitables environ avec garage sur un terrain chacun d'une contenance de 2 ares 50 centiares, numérotées 4, 5, 6, 7 conformément aux plans qui ont été joints et approuvés par les parties. » Les villas 4 et 5 ont été attribuées à M. [T] [D] et les villas 6 et 7 à M. [A] [D].

La notice descriptive simplifiée du 24 octobre 2016 annexée à l'acte notarié du 25 septembre 2017 ne précise pas expressément qui est le rédacteur de la notice. Cependant si sur la première page est mentionné, aussi, 'Provence Concept Projets' tous les bas de page, comme la page de garde mentionnent à chaque fois : « SCCV Le clos de l'Angeli [Adresse 3] » (sic).

L'appelante ne peut donc venir prétendre qu'elle n'a pas établi cette notice ou qu'elle ne lui est pas opposable, n'en n'étant pas à l'origine.

La SCCV est donc tenu par les dispositions contractuelles sur lesquelles elle s'est engagée.

Il n'est pas contesté par l'appelante que plusieurs modifications ont été apportées par rapport à la notice.

Dans le cadre des généralités de cette notice, il est mentionné en page 1 de la dite notice : 'les plans du logement joints à cette notice sont susceptibles d'être modifiés pour des raisons techniques ou architecturales'.

Cependant, comme le relève le premier juge pertinemment, la mesure d'instruction n'a pas permis d'identifier les motifs du changement, malgré les invitations pressantes et renouvelées de l'expert. Au demeurant il résulte de l'expertise que les consorts [D] n'ont pas été avertis des modifications effectuées.

Le moyen tiré de l'autorisation de modification des plans est donc inopérant.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la SCCV le Clos de l'Angeli a donc manqué à ses obligations contractuelles.

Sur l'indemnisation des préjudices :

L'appelante estime que les intimées n'ont subi aucun préjudice, les maisons ayant été construites avec de meilleurs matériaux, de meilleure qualité et que par ailleurs l'expert n'a constaté aucun désordre.

Réponse de la cour :

Il est rappelé que l'action n'est pas fondée sur une responsabilité de type décennale qui pré-supposerait un désordre. L'action étant fondée sur un défaut de délivrance conforme, le préjudice résulte du fait que la villa livrée est non conforme à ce qui était défini contractuellement. Par ailleurs, l'expert a chiffré des moins values résultant des manquements contractuels.

- sur les terrasses :

Les Consorts [D] versent aux débats, un devis réalisé par l'EURL Pascuito pour la mise en conformité de la terrasse sur vide sanitaire à hauteur de 36 060 euros TTC.

Le jugement de première instance a indemnisé ce préjudice par l'allocation d'une somme qu'il a évaluée à hauteur de 5 000 euros par villa.

L'expert ne conclut pas à l'indemnisation de ce préjudice considérant en page 9 de son rapport que le descriptif ne donne aucune précision quant aux fondations des terrasses qui devaient être selon lui traditionnelles sous réserves d'une étude de sol. Il souligne que les terrasses ne sont affectées d'aucun désordre.

Cependant, la notice des travaux indique :

« Soubassement : Réalisation d'un vide sanitaire ventilée de 0,60 m de haut minimum pour les villas. Vide sanitaire en partie enterré afin de respecter les règles d'accessibilité. Réalisation d'un vide sanitaire ventilé de 0,60 m de haut minimum pour les terrasses ». (sic)

La pièce versée aux débats par l'appelante selon laquelle la société PYC Ingénerie écrit : 'conformément aux préconisations du géotechicien, chaque terrasse des villas 4 a 7 est réalisée sous forme d'un dallage sur terre-plein (...)' (sic) ne justifie pas les raisons du changement contractuel sur l'absence de réalisation de terrasse sous vide sanitaire.

De surcroît comme l'indique l'expert, aucun élément ne permet de dire que les consorts [D] ont été informés de ces changements et il ne leur appartenait pas de surveiller le chantier pour s'apercevoir d'éventuelles modifications des plans ou accords contractuels.

Enfin le seul fait que les terrasses soient couvertes par une assurance dommages ouvrage, ne les rend pas davantage conformes aux stipulations contractuelles. Si l'assureur dommages ouvrage venait à intervenir, il prendrait en charge le coût d'une reconstruction à l'identique, mais non sur vide-sanitaire.

Le préjudice doit être réparé dans son intégralité.

Le jugement déféré sera ainsi réformé de ce chef et la SCCV LE CLOS DE L'ANGELI condamnée à payer aux Consorts [D] la somme de 36 060 euros conformément au devis précité, lequel n'a pas été contesté.

- sur l'absence de volets roulants électriques dans la cuisine de la villa n°6 et l'absence de volets PVC coulissants couleur bois :

L'appelante considère que les consorts [D] ne subissent pas de préjudice.

Il résulte cependant de l'expertise que les volets ne sont pas conformes à ce qui était demandé (volets PVC à la place de volets aluminium couleur bois et volets mécanique à la place de volets roulants électriques).

L'expert conclut à une indemnisation à hauteur de 8 000 euros pour l'intégralité des volets des deux villas.

Il y a lieu de confirmer le jugement de première instance qui a condamné la SCCV LE CLOS DE L'ANGELI à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 8 000 euros au titre de la mise en conformité des volets.

- Sur les moins-values :

Le jugement entrepris a donc condamné la SCCV Le clos de l'Angeli au paiement de la somme de 16 000 euros au titre des moins-values affectant la villa 7.

Les consorts [D] sollicitent le paiement, conformément au calcul de l'expert, et du jugement de première instance, aux sommes suivantes :

* Diminution de la superficie de la terrasse : 6 000 euros

* Perte du fenestron ouvrant désormais à l'intérieur du garage : 6 000 euros

* Diminution de la largeur du garage : 4 000 euros

La SCCV affirme que le fenestron n'a pas été supprimé mais simplement déplacé et que la diminution du garage est compensée par l'allongement du garage qui conserve sa superficie d'origine.

Il résulte cependant de l'expertise, des moins values du fait de ces modifications.

Aucun élément technique ou moyen ne permet de venir modérer l'indemnisation allouée par le premier juge, établie en fonction du rapport d'expertise.

Il y a donc lieu de confirmer la condamnation de la SCCV Clos de l'ANGELI à payer à M. [A] [D] et Mme [D] la somme de 16 000 euros au titre des moins-values affectant la villa n°7.

Sur les indemnités de retard :

L'acte de vente du 25 septembre 2017 prévoyait expressément, un délai d'exécution de 18 mois qui devait s'achever le 25 mars 2019 avec une indemnité de 800 euros par mois de retard.

Les travaux n'ont été réceptionnés que le 6 mai 2019 pour une des villas et non réceptionnés pour la seconde.

L'appelante entend s'exonérer de son retard, qu'elle reconnaît, en raison des intempéries et des difficultés qu'elle a rencontrées.

Les conditions météorologiques, dont il n'est pas rapporté qu'elles aient eu un caractère exceptionnel et imprévisible, ne sont pas de nature à revêtir le caractère de la force majeure, seule exonératoire de la responsabilité du débiteur de l'obligation.

Concernant les autres causes évoquées (comme les difficultés rencontrées avec les bâtiments de France), elles ne sont ni explicitées, ni justifiées.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande au titre des indemnités de retard à hauteur de 2 186 euros tel que calculées par l'expert en page 14 et 18 de son rapport.

Sur les demandes reconventionnelles de la SCCV de l'Anegli :

L'appelante affirme qu'elle a fourni des prestations nettement supérieures à ce qui était contractuellement prévu, que les consorts [D] ont donc bénéficié de villas de meilleure qualité. A ce titre, la SCCV le clos de l'Angeli sollicite la condamnation des consorts [D] au paiement d'une amende civile de 5 000 euros pour procédure abusive, ainsi que la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Aucun élément ne permet de montrer que les prestations des villas sont de meilleure qualité.

La SCCV ne démontre aucun préjudice.

Le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qu'il a débouté la SCCV Le clos de l'Angeli de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles.

Sur les frais du procès :

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,

- Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :

' CONDAMNE la Société Civile de Construction Vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 10.000 euros au titre du défaut de réalisation de fondations sous terrasses.'

Statuant à nouveau de ces chefs :

- CONDAMNE la Société Civile de Construction Vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 36 060 euros au titre du défaut de réalisation de fondations sous terrasses,

Y ajoutant,

- Condamne la Société Civile de Construction Vente Le clos de l'Angeli à payer à M. [A] [D] et Mme [V] [W] épouse [D] la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la Société Civile de Construction Vente Le clos de l'Angeli aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et la greffière,

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/02952
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;21.02952 ?
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