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11/05/2023 | FRANCE | N°21/03161

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 11 mai 2023, 21/03161


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/03161 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IE4Y



AD



JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'UZES

13 juillet 2021 RG :1120000427



[S]



C/



[S]







































Grosse délivrée

le

à SCP Fortunet

SCP Penard Oosterlynckr>










COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 11 MAI 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection d'UZES en date du 13 Juillet 2021, N°1120000427



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/03161 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IE4Y

AD

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'UZES

13 juillet 2021 RG :1120000427

[S]

C/

[S]

Grosse délivrée

le

à SCP Fortunet

SCP Penard Oosterlynck

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 11 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection d'UZES en date du 13 Juillet 2021, N°1120000427

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Madame Virginie HUET, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

En présence de Madame Carla D'Agostino, Greffière stagiaire.

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [L] [S]

née le 18 Juin 1952 à [Localité 11]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Lettelier-Tardy de la SCP FORTUNET ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

INTIMÉ :

Monsieur [I] [S] décédé le 24/11/2021

né le 05 Octobre 1923 à [Localité 9]

[Adresse 8]

[Localité 1]

INTERVENANT

Monsieur [N], [O] [S]

intervenant volontaire en sa double qualité d'héritier légitime de [I] [S] et de propriétaire de l'appartement occupé par Mme [L] [S]

né le 05 Juin 1961 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Nicolas OOSTERLYNCK de la SCP PENARD-OOSTERLYNCK, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 20 Mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 11 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

Exposé :

Vu le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Uzès le 13 juillet 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

- déboute Madame [L] [S] de sa demande en requalification du contrat la liant à Monsieur [W] [S] au sujet de l'occupation du logement sis [Adresse 5], en bail d'habitation ;

- constate que le prêt à usage du logement sis [Adresse 5] a été valablement résilié par Monsieur [W] [S] ;

- constate que Madame [L] [S] est occupante sans droit ni titre du logement sis [Adresse 5] depuis le 19 mars 2020 ;

- rejette la demande de délai pour quitter les lieux présentée par Madame [L] [S] ;

- ordonne en conséquence à Madame [L] [S] de libérer les lieux et de restituer les clés à compter de la signification de la présente décision ;

- dit qu'à défaut pour Madame [L] [S] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, Monsieur [W] [S] pourra un mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

- condamne Madame [L] [S] à payer à Monsieur [W] [S] une indemnité mensuelle d'occupation, et ce depuis le 19 mars 2020 jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux et jusqu'à la libération effective des lieux, se matérialisant par la remise des clefs ou l'expulsion de l'occupante ;

- fixe le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation à la somme de 1 000 € ;

- ordonne la séquestration des meubles et objets mobiliers les garnissant selon les modalités fixées par les procédures civiles d'exécution en la matière ;

- condamne Madame [L] [S] à verser à Monsieur [W] [S] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne Madame [L] [S] aux entiers dépens de la présente procédure ;

- rejette la demande de Madame [L] [S] d'écarter l'exécution provisoire de plein droit de la présente décision ;

- rappelle donc que la présente décision est exécutoire à titre provisoire, frais et dépens compris.

Vu l'appel interjeté le 17 août 2021 par Madame [L] [S].

Vu le décès de Monsieur [W] [S] le 24 novembre 2021.

Vu l'intervention volontaire en date du 15 février 2022 de Monsieur [N] [S] en sa qualité d'ayant droit de [I] [S].

Vu les conclusions de l'appelante en date du 27 février 2023, demandant de :

Vu l'article 1134 du code civil,

Vu les articles 1785 et 1900 du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil,

- révoquer l'ordonnance de clôture à effet du 26 janvier 2023,

- déclarer recevables les présentes écritures,

- prononcer l'interruption de l'instance en application de l'article 370 du code de procédure civile,

- à l'éventuelle reprise de l'instance, réformer le jugement déféré en ce qu'il a :

* débouté Madame [L] [S] de sa demande en requalification du contrat la liant à Monsieur [W] [S] au sujet de l'occupation du logement sis [Adresse 5], en bail d'habitation,

* constaté que le prêt à usage du logement sis [Adresse 5] a été valablement résilié par Monsieur [W] [S],

* constaté que Madame [L] [S] est occupante sans droit ni titre du logement sis [Adresse 5] depuis le 19 Mars 2020,

* rejeté la demande de délai pour quitter les lieux présentée par Madame [L] [S],

* ordonné en conséquence à Madame [L] [S] de libérer les lieux et de restituer les clés à compter de la signification de la présente décision,

* dit qu'à défaut pour Madame [L] [S] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, Monsieur [W] [S] pourra un mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

* condamné Madame [L] [S] à payer à Monsieur [W] [S] une indemnité mensuelle d'occupation, et ce depuis le 19 mars 2020 jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux, se matérialisant par la remise des clefs ou l'expulsion de l'occupante,

* fixé le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation à la somme de 1.000 €,

* ordonné la séquestration des meubles et objets mobiliers les garnissant selon les modalités fixées par les procédures civiles d'exécution en la matière,

* condamné Madame [L] [S] à verser à Monsieur [W] [S] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné Madame [L] [S] aux entiers dépens de la présente procédure,

* rejeté la demande de Madame [L] [S] d'écarter l'exécution provisoire de plein droit de la présente décision,

* rappelé donc que la présente décision est exécutoire à titre provisoire, frais et dépens compris,

et statuant à nouveau,

à titre principal,

- juger irrecevables les demandes de résiliation du prêt à usage et d'indemnité d'occupation en ce qu'elles ne respectent pas les dispositions impératives régissant les opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de feu [I] [S],

- déclarer irrecevable la prétention de Monsieur [N] [S] au titre de l'indemnité d'occupation en ce qu'il n'a pas qualité à agir,

subsidiairement,

- débouter Monsieur [N] [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en ce que notamment l'instance initiée par l'auteur commun feu Monsieur [I] [S] n'a pas été valablement reprise par ses héritiers,

- juger que la lettre de résiliation en date du 17 octobre 2019 ne respecte pas les prescriptions de l'article 1875 du code civil,

- juger que le courrier de résiliation de feu [I] [S] est nul et non avenu en raison du vice du consentement et en vertu du principe de loyauté des preuves,

- juger que la résiliation est irrégulière et que le contrat continue à produire ses effets,

- débouter, en conséquence, Monsieur [N] [S] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

plus subsidiairement,

- retenir que feu [I] [S] ne justifiait d'aucun préjudice afférent à l'occupation du bien litigieux par Madame [S],

- rejeter comme infondée et injustifiée la demande d'indemnité d'occupation,

en tout état de cause,

- condamner Monsieur [N] [S] à verser à Madame [S] la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens, tant d'appel que de première instance.

Vu les conclusions de Monsieur [N] [S], intervenant volontaire, en date du 6 février 2023, demandant de :

Et tous autres à déduire ou à suppléer s'il y a lieu,

Vu l'article 724 du code civil,

Vu les articles 1875 et suivants du code civil,

Vu la lettre de résiliation du prêt à usage du 17 octobre 2019,

In limine litis

- révoquer l'ordonnance de clôture à effet du 26 janvier 2023,

- déclarer recevables les présentes écritures,

- déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire de Monsieur [N] [S] en sa double qualité d'héritier légitime de feu [I] [S] saisi de plein droit de l'action du défunt, et de propriétaire de l'appartement occupé par Madame [L] [S],

- confirmer le jugement en date du 13 juillet 2021 en toutes ses dispositions,

en conséquence,

- débouter Madame [L] [S] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- juger que Madame [L] [S] est occupante sans droit ni titre du bien sis à [Localité 10], [Adresse 5], depuis le 18 mars 2020,

- ordonner l'expulsion de Madame [L] [S] des lieux qu'elle occupe sis à [Localité 10], [Adresse 5] constituant le lot n°2 d'un immeuble en copropriété cadastré section AL n°[Cadastre 4], ainsi que de tous occupants de son chef, en la forme ordinaire et avec l'assistance de la force publique si besoin est,

- ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux ou à tel garde-meuble qu'il plaira à la cour de désigner aux frais, risques et périls de Madame [L] [S],

- condamner Madame [L] [S] à payer à l'indivision successorale, une indemnité d'occupation de 1 000 € par mois à compter du 19 mars 2020, date d'expiration du prêt à usage qui lui a été consenti jusqu'au 24 novembre 2021, date du décès de feu [I] [S],

- ordonner que l'indemnité d'occupation due par Madame [L] [S] du 19 mars 2020 jusqu'au 24 novembre 2021 sera séquestrée au compte séquestre de la CARPA d'Avignon, dans l'attente des opérations de liquidation et partage de la succession de feu [I] [S], et de l'indivision successorale,

- condamner Madame [L] [S] à payer à Monsieur [N] [S], une indemnité d'occupation de 1 000 € par mois à compter du 25 novembre 2021 jusqu'à la libération effective des lieux,

- condamner Madame [L] [S] à payer à Monsieur [N] [S] une somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'avis adressé aux représentants des parties le 7 décembre 2022 déplaçant le dossier initialement retenu à l'audience du 13 février 2023 à l'audience du 20 mars 2023, clôture tenante.

Vu la clôture du 26 janvier 2023, révoquée à l'audience avant l'ouverture des débats et le prononcé d'une nouvelle clôture à cette date.

Motifs

À titre liminaire, la cour observe que l'ordonnance de clôture ayant été révoquée à l'audience avant l'ouverture des débats, il n'y a pas lieu à sa révocation.

Sur l'interruption de l'instance :

[N] [S], seul, est intervenu volontairement à l'instance en sa qualité d'ayant droit, faisant valoir qu'à la suite du décès de son père alors qu'il était nu-propriétaire de l'immeuble en cause, il en est devenu pleinement propriétaire.

S'agissant de la demande d'interruption d'instance sollicitée par [L] [S] compte tenu du décès survenu depuis l'engagement de la procédure en première instance par Monsieur [I] [S], il convient cependant de distinguer entre :

' l'action exercée qui tend à voir déclarée [L] [S] occupante sans droit ni titre, à voir ordonner son expulsion, outre la séquestration des biens mobiliers garnissant les lieux, et le paiement d'une indemnité d'occupation à compter du 25 novembre 2021 ainsi que les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens qui peuvent être formées par [N] [S] en sa qualité désormais de propriétaire de l'immeuble , à la suite du décès de son père

' et l'action exercée qui tend à voir condamnée Madame [L] [S] à payer une indemnité d'occupation à l'indivision successorale à compter du 19 mars 2020 jusqu'au 24 novembre 2021 et à voir ordonner que cette indemnité sera séquestrée en compte Carpa dans l'attente des opérations de liquidation partage de la succession, lesquelles ne peuvent être soutenues qu'en qualité d'héritier du défunt, de sorte que l'action concernant ces prétentions se trouve effectivement interrompue par le décès et qu'elle exige, pour sa régularisation devant la cour, sa reprise régulière par l'ensemble des héritiers dont il n'est pas contesté qu'ils sont au nombre de 3,( ou à défaut leur assignation), le moyen tiré de la saisine de plein droit de l'héritier ainsi que celui de la possibilité pour un indivisaire seul d'exercer une action conservatoire étant, à cet égard, sans emport.

Il en résulte l'interruption de l'instance mais sur ces seuls chefs de prétentions.

Sur les demandes soutenues par Monsieur [N] [S] en sa qualité de propriétaire de l'immeuble depuis le décès de son père :

Madame [L] [S] occupe depuis le mois de février 2017 un logement à [Localité 10] ayant appartenu à son père qui en avait donné la nue-propriété à son fils, [N] [S].

Se prévalant de l'existence d'un bail d'habitation, elle conteste devoir quitter les lieux à la suite du courrier qu'elle a reçu au mois d'octobre 2019.

C'est ainsi que le litige a été soumis au juge de première instance, lequel dans la décision déférée a, en substance, considéré que la preuve d'un bail d'habitation n'était pas rapportée, a retenu la qualification de prêt et apprécié, en conséquence, le délai raisonnable pour mettre fin au dit prêt à usage, après avoir considéré la validité de la lettre de résiliation envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception le 17 octobre 2019.

La demande de résiliation du prêt à usage désormais soutenue par [N] [S] est recevable dès lors qu'il n'est pas contesté qu'il vient bien aux droits de son père à la suite de son décès et de la donation qu'il avait préalablement reçue en nue-propriété de l'immeuble en cause.

Il en est de même des demandes tendant à à l'expulsion, et aux demandes consécutives, ainsi qu'à voir condamner Madame [L] [S] à lui payer une indemnité d'occupation à compter du jour suivant le décès de son père.

Sur le fond, le bail est un contrat par lequel une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige à lui payer.

C'est la jouissance à titre onéreux qui caractérise le bail et qui permet de le différencier, notamment du contrat de prêt à usage.

Aucune des parties ne conteste la jouissance dont a bénéficié Madame [L] [S] depuis le 6 février 2017, la circonstance qu'elle soit redevable d'une taxe d'habitation qui est liée à l'occupation du logement ne suffisant pas à démontrer le caractère onéreux du lien contractuel et de cette jouissance. Il en est de même du paiement de la contribution audiovisuelle et des menues dépenses afférentes à l'occupation, tels les frais d'assurance.

D'ailleurs Mme [S] conclut en écrivant qu'elle prend acte de la qualification de prêt à commodat retenue par le premier juge, mais demande « la nullité de la résiliation qui lui a été adressée le 17 octobre 2019 ».

Le jugement sera donc de ce chef confirmé.

Sur la portée du courrier de résiliation envoyé en la forme dactylographiée au nom de [W] [S], et non signé, il sera retenu d'une part, que son contenu exprime clairement l'intention de procéder à la résiliation du prêt à usage, d'autre part, que cette volonté est également confirmée par le courrier du 7 janvier 2021 cosigné par [I] [S] et sa curatrice, Mme [C], ainsi désignée en sa qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrites sur la liste prévue à l'article L471-2 du code de l'action sociale et des familles, mentionnant que le défunt s'était exprimé sur ses souhaits lors d'une réunion de médiation avec ses 3 enfants en la présence du curateur, qu'il souhaitait poursuivre l'expulsion de sa fille du bien en cause et qu'il était en capacité de donner son avis, la curatrice ayant encore réitéré cette position dans un courrier du 19 janvier 2021.

Il sera par ailleurs considéré que le lieu de résidence de M [S], même en Ephad, est sans incidence et et n'est pas susceptible, en lui-même, de démontrer l'incapacité de celui-ci à exprimer sa volonté ; que quand bien même sa rédaction qui n'est pas manuscrite serait différente de la rédaction habituelle du défunt, aucun élément ne vient cependant démontrer qu'il n'était pas en capacité d'exprimer sa volonté à ce propos, de la mesure de protection mise en 'uvre à partir du début de l'année 2020, étant une sauvegarde de justice en date du 26 février 2020, puis une curatelle renforcée en date du 7 octobre 2020, plus d'une année après ; enfin, que Madame [L] [S] n'a jamais remis en cause, avant la présente procédure, l'authenticité de l'intention de son père telle qu'exprimée dans le courrier du 17 octobre 2019, ayant même écrit à son frère le 3 février 2020 que « papa me demande de quitter l'appartement du [Adresse 5] à [Localité 10] dont il est l'usufruitier et toi le nu-propriétaire » sans donc remettre alors en cause la réalité l'authenticité de cette volonté, n'évoquant ensuite que ses soucis financiers.

Dans ces conditions, le courrier manuscrit du mois de décembre 2019 de [I] [S] invoqué par [L] [E] pour contester celui du 17 octobre ne peut venir utilement le remettre en cause et aucun moyen utile ne peut davantage être allégué relativement à un contentieux opposant le frère et la s'ur sur des prêts consentis par La seconde au premier.

Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a retenu le courrier du 17 octobre 2019 comme exprimant la volonté de résiliation de [I] [S].

La contestation de ce chef de l'appelante sera, en conséquence, rejetée y compris, pour la motivation ci-dessus en ce qui concerne les fondements tirés d'un vice du consentement et du non-respect du principe de loyauté des preuves.

Par ailleurs, en l'absence de terme convenu sans qu'aucun élément ne permette de déterminer la durée du prêt et alors que dans le prêt à usage, l'obligation de rendre la chose est de l'essence même du contrat, les conditions de la résiliation sont appréciées par le juge sous l'angle du délai raisonnable laissé au co-contractant pour restituer en respectant un délai de prévenance raisonnable.

En l'espèce, il sera à cet égard retenu qu'aucun élément ne vient démontrer la limitation de l'usage du bien à deux années, et que par ailleurs, aucun terme n'a donc été défini.

Il en résulte que la validité du courrier de résiliation du 17 octobre 2019 a été justement appréciée à l'aune de l'existence ou non d'un délai de prévenance raisonnable et qu'il a été considéré que le délai de l'espèce était un délai raisonnable, à la fois compte tenu de la durée de l'occupation de Madame [L] [S] dans les lieux depuis plus de 2 ans et des conditions fixées à son départ à la suite de cette lettre qui avait prévu un préavis de 6 mois commençant à courir à compter de sa présentation.

En ce qui concerne la critique de la demande d'indemnité d'occupation au motif que Mme [L] [S] devait bénéficier d'une jouissance gratuite, il sera observé que dans le cadre juridique retenu du prêt à usage la jouissance n'est gratuite que jusqu'au terme du contrat de prêt; que dès lors, la demande de versement d'une indemnité d'occupation, qui est due par tout occupant se maintenant après l'expiration de son titre d'occupation et qui a un caractère indemnitaire, le préjudice résultant de l'indisponibilité du bien pour son propriétaire, est fondée à partir du jour de sa résiliation.

Celle-ci ne peut par ailleurs être effectivement réclamée par [N] [S] qu'à compter du 25 novembre 2021 à la suite du décès du père, [I] [S] survenu le 24 novembre.

Compte tenu de l'évaluation du bien en litige en pleine propriété à l'acte de donation du 16 décembre 2016, des éléments figurant à son sujet sur l'avis d'imposition de la taxe d'habitation et de sa consistance, la somme de 1000 € allouée sera ramenée, à raison du caractère précaire de l'occupation inhérent à un prêt convenu son terme, à celle de 800 € .

Le jugement sera donc confirmé sauf sur le montant et le point de départ de l'indemnité d'occupation.

En raison de la succombance respective des parties, les dépens seront supportés par moitié par chacune d'entre elles.

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement étant de ces chefs également réformé.

Par ces motifs

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique, contradictoirement, par mise à disposition au greffe, en matière civile et en dernier ressort,

Reçoit l'intervention volontaire de [N] [S] en sa qualité d'ayant droit de [I] [S],

Confirme jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a reçu l'action de [I] [S] en faisant droit à ses demandes en paiement jusqu'au 24 novembre 2021, sauf sur le montant et le point de départ de l'indemnité d'occupation due postérieurement, ainsi qu'en ses dispositions sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens et statuant à nouveau de ces chefs :

Vu l'évolution du litige et le décès de [I] [S],

Constate l'interruption de l'instance en ce qui concerne les demandes tendant à voir condamnée Madame [L] [S] à payer une indemnité d'occupation à l'indivision successorale à compter du 19 mars 2020 jusqu'au 24 novembre 2021 et à voir ordonner que cette indemnité sera séquestrée en compte Carpa dans l'attente des opérations de liquidation partage de la succession.

Rejette les demandes plus amples d'irrecevabilité,

Condamne Madame [L] [S] à verser à Monsieur [N] [S] la somme de 800 € par mois à compter du 25 novembre 2021 à titre d'indemnité d'occupation,

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [L] [U] d'une part et [N] [S] et d'autre part à supporter par moitié chacun les dépens de la procédure de première instance,

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,

y ajoutant :

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour,

Rejette les demandes plus amples,

Condamne [L] [S], d'une part, et [N] [S], d'autre part, à supporter, par moitié chacun, les dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/03161
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;21.03161 ?
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