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02/05/2023 | FRANCE | N°23/00019

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 02 mai 2023, 23/00019


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 23/00019 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IVJS



CS



JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'AVIGNON

20 décembre 2022

RG :22/00289



[L]

[L]



C/



[J] [G]





Grosse délivrée

le

à







COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 02 MAI 2023r>


Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge des contentieux de la protection d'AVIGNON en date du 20 Décembre 2022, N°22/00289



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de p...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/00019 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IVJS

CS

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D'AVIGNON

20 décembre 2022

RG :22/00289

[L]

[L]

C/

[J] [G]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 02 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge des contentieux de la protection d'AVIGNON en date du 20 Décembre 2022, N°22/00289

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 02 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

Monsieur [R] [P]

né le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 9]

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représenté par Me Jean-philippe BOREL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Madame [F] [P]

née le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 10] (HAÏTI)

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean-philippe BOREL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :

Madame [N] [J] [G]

née le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 8]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe CANO de la SCP CANO/CANO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 13 mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 02 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 1er octobre 2021, Mme [N] [J] [G] a donné à bail à M. [R] [B] [C] et Mme [F] [B] [C] un bien à usage d'habitation sis [Adresse 6], moyennant un loyer de 890 euros, outre 80 euros de provisions sur charge.

Considérant que les loyers n'ont pas été réglés régulièrement, un commandement visant la clause résolutoire a été délivré aux preneurs le 3 juin 2022 portant sur un arriéré locatif de 3.688,17 €.

Par exploit du 30 septembre 2022, Mme [N] [J] [G] a fait assigner ses locataires devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Avignon, statuant en référé, aux fins de résiliation de bail et d'expulsion, qui par ordonnance de référé du 20 décembre 2022, a :

- constaté la résiliation du bail du 1er octobre 2021 par l'effet de la clause résolutoire à la date du 3 août 2022 ;

- condamné solidairement [R] [B] [C] et [F] [B] [C] à payer à [N] [J] [G], 6234.85 euros de provision pour l'arriéré de loyers au 5 décembre 2022, outre une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer courant et charges (calculée comme si le bail n'avait pas été résilié) et ce jusqu'à libération des lieux ;

- ordonné l'expulsion des locataires ci-dessus désignés ainsi que tous occupants de leur chef avec si besoin est le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier ;

- dit que les meubles garnissant les lieux pourront être transportés aux frais du locataire par l'huissier instrumentaire dans un garde meuble désigné par les locataires et, à défaut, par le bailleur en cas d'exécution forcée ;

- rejeté les autres demandes ;

- ordonné communication de la décision à la préfecture de Vaucluse ;

- condamné les défendeurs aux dépens en ce compris le coût du commandement de payer sus visé.

Par déclaration du 30 décembre 2022, M. [R] [B] [C] et Mme [F] [B] [C] ont interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.

Par des conclusions notifiées le 8 février 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, M. [R] [B] [C] et Mme [F] [B] [C], appelants, demandent à la cour, au visa de l'article 1343-5 du code civil et de l'article 24 V de la loi du 6 juillet 1989, de :

- déclarer recevable et bien fondé leur appel à l'encontre de l'ordonnance de référé en date du 20 décembre 2022,

- infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- et statuant à nouveau, les autoriser à se libérer de leur dette de 9 215,94 euros en 36 versements mensuels de 256 euros,

- dire et juger que, pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit seront suspendus, que ces délais et les modalités de paiement accordés ne pourront affecter l'exécution du contrat de location et qu'en particulier, les locataires devront payer le loyer courant et les charges ;

- dire et juger que, si les locataires se libèrent dans le délai et selon les modalités fixées par le juge, la clause de résiliation de plein droit sera réputée ne pas avoir joué et que, dans le cas contraire, elle reprendra son plein effet.

Au soutien de leur appel, les locataires indiquent avoir quatre enfants communs à charge, avoir toujours honoré leur loyer mais que la cessation temporaire du paiement du loyer correspond à des difficultés financières générées par une dette fiscale incombant à M. [B] [C]. Ils allèguent également avoir des difficultés personnelles, notamment le cancer de leur fils âgé de 15 ans.

Ils reconnaissent devoir une dette d'un montant de 9.215,94 euros comprenant 1.055,22 euros de frais d'huissier. Ils sollicitent, dès lors, l'octroi de délais de paiement puisqu'ils sont tous les deux salariés, percevant une rémunération mensuelle globale de 4 100 euros mais doivent faire face aux dépenses mensuelles s'élevant à 2 131 euros , soit un restant de 1 969 euros , outre 1 000 euros au titre des frais de nourriture et d'entretien. Ils considèrent donc être en capacité financière d'apurer leur dette locative sans difficulté.

Par des conclusions en date du 8 février 2023 , auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, Mme [N] [J] [G] demande la confirmation de l'ordonnance de référé du 20 décembre 2022 en toutes ses dispositions, sauf à actualiser la dette locative et d'indemnités d'occupation à la somme de 8.160,69 euros au 8 février 2023 et à lui allouer une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens à mettre à la charge des appelants.

L'intimée expose que le loyer courant n'est pas soutenable pour les époux [B] [C], dont la persistance à rester dans les lieux n'est pas de leur propre intérêt compte tenu de leur budget familial. Elle ajoute qu'en comparant leurs revenus cumulés à leurs charges incompressibles, le « reste à vivre » avant paiement des loyers devrait les convaincre de solliciter davantage l'octroi d'un logement social plutôt que de persister à rester dans un logement non conventionné.

Elle soutient que les occupants sont entrés dans les lieux en connaissant parfaitement leur impossibilité à venir d'honorer leur engagement contractuel, démonstration de leur déloyauté dès l'origine de la relation contractuelle ainsi que leur mauvaise foi.

Elle rapporte qu'antérieurement à l'engagement de l'action en première instance, un échéancier a été proposé mais n'a jamais été respecté par les occupants, que la dette fiscale exposée ne justifie pas une carence de plus de deux ans dans leurs engagements contractuels.

La clôture de la procédure est intervenue le 13 mars 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 20 mars 2023, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, le 2 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

L'obligation pour le preneur de payer le loyer et les charges justifiées résulte de l'article 7 de la loi du 06 juillet1989.

Le bail signé entre les parties contient une clause résolutoire prévoyant, conformément à l'article 24 de la loi du 06 juillet 1989, qu'à défaut de paiement des loyers ou charges échus, et deux mois après la délivrance d'un commandement resté infructueux, le bail sera résilié de plein droit.

Le bailleur a fait délivrer aux époux [B] [C], le 3 juin 2022, un commandement de payer la somme de 3.496,50 euros, en principal, pour les loyers et charges locatives impayés au 5 mai 2022, tout en visant la clause résolutoire.

Les époux [B] [C] ne démontrent, ni ne soutiennent au demeurant, que les sommes réclamées dans ce commandement ont été réglées dans le délai de deux mois.

En conséquence, c'est par de justes motifs que le premier juge a constaté que les locataires n'ont pas satisfait aux termes du commandement de payer dans le délai imparti et que la clause résolutoire était donc acquise.

Les appelants ont été condamnés au paiement d'une provision au titre de l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation de 6.234,85 euros arrêtée au 5 décembre 2022 dont ils ne contestent pas le montant.

En appel, alors que Mme [J] [G] réclame l'actualisation de la provision à la somme de 8.160,69 euros au 8 février 2023, les époux [B] [C] demandent de les autoriser à se libérer de leur dette, qu'ils arrêtent à la somme de 9.215,94 euros en y intégrant des frais d'huissier.

Les appelants n'étant pas opposés à la réactualisation de la dette, qu'ils sollicitent par ailleurs, seront en conséquence condamnés solidairement au paiement de la provision de 8.160,69 euros arrêtée au 8 février 2023, les frais d'huissier n'ayant pas à intégrer la dette locative. L'ordonnance de référé contestée sera infirmée de ce chef.

L'article 1343-5 du code civil permet d'accorder aux débiteurs impécunieux des délais de paiement qui emprunteront leur mesure aux circonstances, sans pouvoir dépasser trois ans.

L'article 24 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989, tel que modifié par la loi n°2014-366 du 24 mars 2014, permet au juge même d'office d'accorder des délais de paiement, dans la limite de trois années et dans les conditions prévues à l'article 1345-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus pendant ce délai. Si le locataire se libère dans les conditions définies par le juge, la clause de résiliation est réputée ne pas avoir joué.

Les époux [B] [C] sollicitent des délais de paiement sur une période de 36 mois.

En l'état, l'examen du dernier décompte versé au dossier par l'intimée permet de constater que, depuis leur entrée dans les lieux, en janvier 2021, les locataires ont réglé leur loyer de manière irrégulière de sorte que le solde du compte locataire a toujours été négatif.

Par ailleurs, depuis leur passage devant le premier juge, les époux [B] [C] n'ont pas repris le règlement du loyer et charges en l'absence de tout versement intervenu en janvier et février 2023, la dette s'élevant ainsi au 8 février 2023 à la somme de 8.160,69 euros.

Ceci étant, ils justifient de difficultés financières liées à l'existence d'une dette fiscale dont M. [B] [C] était redevable pour une somme de 37.806 euros qu'il a réglé pour l'essentiel au cours des années 2021 et 2022 entraînant de ce fait la baisse conséquente de leur capacité financière.

A ce jour, cette dette fiscale est soldée comme le confirme la pièce 4 produite aux débats par les appelants.

Il est justifié par ailleurs que le couple [B] [C] dispose d'un revenu pour l'année 2021 d'un montant de 52.490 euros, soit 4.307 euros par mois, et qu'ils ont 4 enfants à charge âgés respectivement de 17, 15, 13 et 12 ans. Déduction faite du loyer actuel d'un montant de 1.005,92, il leur reste un disponible de 3.302 euros qui paraît suffisant pour assurer le règlement de leurs charges mensuelles restantes d'un montant de 1151 euros.

En conséquence, les époux [B] [C] présentent une capacité financière devant leur permettre de régler la somme réclamée en sus du loyer courant.

Tenant ces éléments et leur capacité financière, la demande de délai sera accueillie favorablement selon les modalités prévues au dispositif. Dès lors, les effets de la clause résolutoire seront suspendus pour permettre aux locataires de se libérer de leur dette locative tout en payant les échéances à venir des loyers et des charges.

L'ordonnance entreprise sera infirmée de ce chef.

Les dépens et les frais irrépétibles ont été exactement réglés par le premier juge dont la décision sera confirmée sur ces points.

Les dépens d'appel sont mis à la charge des appelants. L'équité commande par ailleurs de ne pas faire droit à la demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance de référé rendue le 20 décembre 2022 par le juge des contentieux et de la protection d'Avignon en ce qu'elle a :

-constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 1er octobre 2021 sont réunies au 3 août 2022 ;

-condamné [R] [B] [C] et [F] [B] [C] aux entiers dépens de la présente procédure, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.

La réforme pour le surplus,

Et statuant à nouveau des chefs réformés,

Condame solidairement [R] [B] [C] et [F] [B] [C] à payer à [N] [J] [G] à la somme de 8.160,69 euros à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 8 février 2023,

Suspend les effets de la clause résolutoire,

Autorise [R] [B] [C] et [F] [B] [C] à se libérer de l'arriéré locatif par 36 mensualités de 226 € chacune, jusqu'à apurement de la dette, la dernière mensualité étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

Dit que si les locataires s'exécutent dans les délais et selon les modalités fixées, la clause résolutoire insérée au bail dont les effets sont suspendus, sera réputée n'avoir jamais joué,

Dit qu'à défaut de paiement de toute mensualité, qu'elle soit due au titre de l'arriéré fixé, du loyer courant ou des charges afférentes, le solde de la dette deviendra immédiatement exigible en intégralité et la clause reprendra ses effets sans autre procédure,

Dit, en revanche, qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité pendant le délai accordé ou du loyer courant ou des charges afférentes à son terme exact, suivie d'une mise en demeure en lettre recommandée avec accusé de réception restée infructueuse durant quinze jours :

1 - la clause résolutoire retrouvera ses entiers effets.

2 - [R] [B] [C] et [F] [B] [C] devront quitter les lieux.

3 - le solde de la dette deviendra immédiatement exigible.

4 - qu'à défaut par [R] [B] [C] et [F] [B] [C] d'avoir libéré les lieux situés [Adresse 6], au plus tard DEUX MOIS après la notification au préfet du commandement d'avoir à quitter les lieux, il sera procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de leur chef, avec l'assistance de la force publique, si besoin est, et au transport des meubles laissés dans les lieux à ses frais dans tel garde-meuble désigné par les expulsés ou à défaut par le bailleur ;

5 - [R] [B] [C] et [F] [B] [C] seront tenus au paiement de l'indemnité d'occupation fixée au montant du dernier loyer et charge, soit la somme de 1.005,92 euros et ce jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [R] [B] [C] et [F] [B] [C] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 23/00019
Date de la décision : 02/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-02;23.00019 ?
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