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17/04/2023 | FRANCE | N°22/03402

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 17 avril 2023, 22/03402


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/03402 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ITE4



NG/MM



JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE NIMES

19 septembre 2022

RG :22/00445



[I]



C/



S.C.I. CASNAT





Grosse délivrée

le

à











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU

17 AVRIL 2023





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge des contentieux de la protection de NIMES en date du 19 Septembre 2022, N°22/00445



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/03402 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ITE4

NG/MM

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE NIMES

19 septembre 2022

RG :22/00445

[I]

C/

S.C.I. CASNAT

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 17 AVRIL 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge des contentieux de la protection de NIMES en date du 19 Septembre 2022, N°22/00445

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Mars 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 Avril 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [B] [I]

née le [Date naissance 1] 1972 à

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Romain FUGIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/004699 du 27/12/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉE :

S.C.I. CASNAT

inscrite au RCS de NIMES sous le n° 520 276 890

prise en la personne de son représentant légal en exercice, Mme [T] [K] épouse [U], domiciliée ès qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Patricia PERRIEN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 6 mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 17 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 6 septembre 2021 avec effet le 13 juillet 2021, la SCI Casnat a donné à bail à Mme [B] [I], un bien à usage d'habitation sis [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel de 642 €, outre une provision sur charges de 38 €, pour une durée reconductible de trois ans.

Considérant que des loyers demeurés impayés, la SCI Casnat a fait délivrer le 19 novembre 2021 à Mme [B] Casnat un commandement visant la clause résolutoire et lui enjoignant de payer la somme en principal de 2491,77 €, hors frais, au titre des loyers et charges arrêtés au 17 novembre 2021.

Par exploit d'huissier du 15 mars 2022, la SCI Casnat a fait assigner Mme [B] [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes, statuant en référé, aux fins de voir :

-constater les effets de la clause résolutoire et ordonner son expulsion,

-condamner Mme [I] à payer par provision 3851,77 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 19 janvier 2022, outre 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-fixer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer mensuel et des charges en subissant les augmentations légales à venir, les entiers dépens étant mis à sa charge.

Par ordonnance réputée contradictoire de référé du 19 septembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes a :

-dit l'action initiée par la SCI Casnat recevable et bien fondée,

-constaté que le commandement de payer du 19 novembre 2021 est resté infructueux pendant un délai de deux mois,

-constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 19 janvier 2022 à 24h00, et ainsi la résiliation de plein droit du contrat de location conclu le 6 septembre 2021 entre la SCI Casnat, bailleur, et Mme [B] [I], locataire,

-ordonné l'expulsion de Mme [B] [I] et celle de tous occupants de son chef, des lieux loués sis [Adresse 2],

-fixé et condamné Mme [B] [I] à payer à la SCI Casnat une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, à compter du 20 janvier 2022 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux caractérisée par la restitution des clés,

-condamné Mme [B] [I] à payer à la SCI Casnat la somme provisionnelle de 2 720 euros selon décompte arrêté au 19 janvier 2022 au titre des arriérés de loyers, et charges ainsi que de l'indemnité d'occupation, en deniers ou quittance valable, avec intérêts au taux légal à compter de la présente ordonnance,

-condamné Mme [B] [I] à payer les entiers dépens,

-condamné Mme [B] [I] à payer à la SCI Casnat la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- rappelé que l'ordonnance est exécutoire par provision.

Par déclaration du 20 octobre 2022, Mme [B] [I] a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 3 mars 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, Mme [B] [I], appelante, demande à la cour, au visa des articles L.412-3 et L.412-4 du code de procédure civile d'exécution et de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, de :

-dire son appel recevable et bien fondé,

-infirmer l'ordonnance en date du 19 septembre 2022 en toutes ses dispositions,

Jugeant à nouveau,

- à titre principal, débouter la SCI Casnat de la demande d'expulsion la concernant,

-à titre subsidiaire, lui accorder un délai d'un an avant que l'expulsion soit exécutée afin permettre un relogement,

En tout état de cause,

- débouter la SCI Casnat de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Au soutien de son appel, Mme [B] [I] sollicite, à titre principal, la réformation de la décision attaquée en ce qu'elle a ordonné son expulsion arguant avoir entrepris des démarches de relogement. Elle ajoute également rencontrer des problèmes psychiatriques qui nécessitent un suivi régulier et une prise en charge adaptée.

A titre subsidiaire, Mme [B] [I] expose avoir eu des difficultés à surmonter le décès de sa mère survenu au mois de mars 2021, et élever seule sa fille âgée de 17 ans, sans aucune aide extérieure. Elle ne conteste pas les arriérés locatifs et souhaite pouvoir apurer son passif dès qu'elle en aura la possibilité expliquant qu'au regard de sa situation financière extrêmement précaire, il lui sera difficile de se reloger.

Elle indique percevoir la somme de 554 € au titre des indemnités Pôle emploi, 113 € au titre du RSA, 122 € au titre de l'allocation de soutien familial et attendre de recevoir le reliquat du prix de vente d'un véhicule ayant appartenu à sa défunte mère, soit une somme de 13.315 €.

La SCI Casnat, intimée, par conclusions notifiées le 6 mars 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 510, 562, et 524 du Code de procédure civile et des articles 7 et 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, de :

In limine litis,

-juger que la Cour d'appel n'est pas compétente pour accorder des délais de grâce à Mme [I],

-ordonner la radiation du rôle de l'affaire au visa de l'article 524 du Code de procédure civile,

A titre principal,

-confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé entreprise.

Y ajoutant,

-débouter Mme [I] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-juger qu'aucun délai de grâce ne peut être accordé à Mme [I],

-la condamner à lui payer, au titre des arriérés de loyers, la somme provisionnelle de 12 240 € à parfaire à la date de la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés,

- juger que Mme [I] devra s'acquitter de ses dettes fiscales,

En tout état de cause,

- la condamner à lui payer la somme de 1 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure en appel et celle de 500 € pour la procédure en 1ère instance,

-condamner Mme [B] [I] aux entiers dépens pour les procédures de 1ère instance et d'appel.

La SCI Casnat invoque, in limine litis, l'irrecevabilité de l'appel interjeté par Mme [I] en se fondant, d'une part, sur une erreur de saisine de la juridiction compétente. Elle indique que l'appelante a accepté sans restriction la décision rendue par le premier juge, ne souhaitant en réalité qu'un délai de grâce, lequel doit être formulé auprès du juge de l'exécution après délivrance d'un commandement conformément à l'article 510 du code de procédure civile. D'autre part, l'intimée sollicite la radiation de l'affaire au visa de l'article 524 du même code, soulevant l'absence d'exécution de Mme [I] puisque cette dernière n'a versé absolument aucune somme depuis le mois d'octobre 2021.

A titre principal, elle fait valoir le bien-fondé de son action en application des articles 7 et 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. Elle explique que tenant l'absence totale de paiement des loyers depuis le mois d'octobre 2021, la SCI s'appauvrit grandement et ses réserves de fond diminuent chaque mois car elle doit faire face aux paiements des charges de copropriété et de la taxe foncière.

Ensuite, elle soutient que Mme [I] est de mauvaise foi, qu'elle n'a jamais eu l'intention de régler sa dette locative et que l'appel interjeté ne vise qu'à la maintenir un peu plus longtemps dans les lieux à son détriment. Elle précise à ce propos que l'appelante a cessé de payer les loyers dès son entrée dans le logement, s'interrogeant sur la sincérité des documents produits tant lors de la signature du bail que durant le cours de la procédure aux fins d'établir sa situation personnelle, qui apparaît des plus confuse.

Elle conclut au rejet de la demande de délais de grâce formée par Mme [I] arguant, au regard de l'ensemble des pièces versées aux débats notamment ses fiches de salaire et ses avis d'imposition, que celle-ci dissimule délibérément ses ressources, sa véritable identité et son adresse postale.

Enfin, elle entend indiquer, au soutien de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, assumer tous les frais de la procédure alors qu'elle doit, dans un même temps, alimenter son compte à partir des comptes personnels des gérants pour assumer le coût de la SCI en l'absence des loyers, que l'appelante bénéficie de l'aide juridictionnelle, laquelle ne conteste pas d'ailleurs l'arriéré locatif.

La clôture de la procédure est intervenue le 2 janvier 2023 et l'affaire a été initialement fixée à l'audience du 9 janvier 2023.

Par ordonnance du 9 janvier 2023, l'ordonnance de clôture du 2 janvier 2023 a été révoquée, la clôture de la procédure a été fixée au 6 mars 2023 et l'affaire renvoyée à l'audience du 13 mars 2023 pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, le 17 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

In limine litis,

Selon l'alinéa 3 de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions des parties énoncées dans le dispositif de leurs conclusions.

En l'espèce, la SCI Casnat ne soulève pas dans le dispositif de ses dernières écritures l'irrecevabilité de l'appel de Mme [I], même si elle y fait allusion en exorde de ses écritures.

En effet, elle fait valoir, d'une part, que la cour n'est pas compétente pour accorder des délais de grâce à une expulsion, ce pouvoir revenant exclusivement au juge de l'exécution. Cette discussion qui relève du fond sera évoquée ci-dessous.

D'autre part, elle demande que l'affaire soit radiée pour défaut d'exécution de la décision de première instance. Mais, s'agissant d'une ordonnance de référé fixée de plein droit devant la cour selon la procédure à bref délai, il lui appartenait de saisir en temps utiles le premier président de la cour d'appel, en application des dispositions de l'article 524 du code de procédure civile, applicable en l'espèce.

En tout état de cause, ces moyens ne soutiennent pas une irrecevabilité de l'appel.

Sur le périmètre de l'appel,

A la lecture de l'acte d'appel, Mme [B] [I] a formé un recours visant l'ensemble des dispositions de l'ordonnance de référé rendue le 19 septembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes. Cependant, dans ses écritures, elle ne soutient devant la cour aucun moyen ou élément à l'appui de son recours sur le jeu de la clause résolutoire, la résiliation du bail et le paiement des sommes mises à sa charge à titre de provision.

Par ailleurs, la bailleresse demande que la provision allouée au titre de la dette locative soit portée de 2 720 euros au 19 janvier 2022 à la somme 'de 12 240 euros à parfaire à la date de libération effective et définitive des lieux'.

Il s'avère qu'elle ne produit aucun décompte de cette somme dans les pièces annexées à ses conclusions, raison pour laquelle la somme provisionnelle arrêtée par le premier juge sera confirmée, dans la mesure où chaque mois, à compter du 20 janvier 2022 s'ajoute l'indemnité d'occupation fixée, à titre provisoire, à une somme équivalente au montant du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, et ce, jusqu'à libération des lieux.

Les dispositions de l'ordonnance dont appel relatives au jeu de la clause résolutoire, à la résiliation du bail et au paiement des sommes mises à la charge de l'appelante à titre de provision seront donc confirmées.

Sur l'expulsion et la demande de délais :

L'appelante conteste l'expulsion ordonnée.

Il s'avère que, étant devenue occupante sans droit ni titre du fait de la résiliation du bail au 19 janvier 2022, qu'elle ne conteste pas, elle ne peut plus demeurer dans les lieux antérieurement loués par la SCI Casnat.

Il entre dans les pouvoirs du juge des référés d'ordonner l'expulsion des occupants sur le fondement de l'article 834 du code de procédure civile, sans que la situation personnelle de ceux-ci n'ait à être appréciée à ce stade.

A défaut de départ volontaire de M. [I] de l'appartement appartenant à la SCI Casnat, l'expulsion ordonnée par le premier juge sera confirmée.

Mme [I] sollicite des délais de grâce à cette mesure. La SCI Casnat s'y oppose. L'ordonnance de référé du 19 septembre 2022 du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes a ordonné l'expulsion de Mme [B] [I] sans bénéfice de délais à défaut de libération volontaire des lieux, l'exécution provisoire de l'ordonnance étant de droit.

Aux termes de l'article 510 du code de procédure civile, le délai de grâce ne peut être accordé que par la décision dont il est destiné à différer l'exécution. En cas d'urgence, la même faculté appartient au juge des référés. Après signification d'un commandement ou d'un acte de saisie, selon le cas, le juge de l'exécution a compétence pour accorder un délai de grâce. L'octroi du délai doit être motivé.

L'article L.613-1 du code de la construction et de l'habitation dispose que le sursis à l'exécution des décisions d'expulsion est régi par les articles L.412-3, L.412-4, L.412-6 à L.412-8 du code des procédures civiles d'exécution.

Aux termes de l'article L.412-3 du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d'un titre à l'origine de l'occupation. Le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.

La SCI Casnat, qui n'a pas fait délivré de commandement de quitter les lieux, est mal fondée à soutenir que seul le juge de l'exécution serait compétent pour accorder ces délais.

Aux termes de l'article L.412-4 du même code, la durée des délais prévus à l'article L.412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également pris en considération le droit à un logement décent et indépendant, les délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L.441-2-3 et L.441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et le délai prévisible de relogement des intéressés.

Mme [B] [I] sollicite un délai de grâce d'un an avant que l'expulsion soit exécutée afin de permettre un relogement, au visa des articles susvisés. Il ressort tout d'abord de la lecture de l'ordonnance frappée d'appel que les débats devant le juge des référés se sont déroulés à l'audience du 4 juillet 2022 et que l'appelante n'était pas comparante ni représentée, l'assignation ayant fait l'objet d'un procès-verbal de recherches infructueuses, conformément à l'article 659 du code de procédure civile. Il apparaît donc que Mme [B] [I] a été privée de la faculté de justifier de sa situation financière et de solliciter de délais de grâce pour quitter les lieux.

En cause d'appel, elle indique et justifie percevoir la somme de 554,90 € au titre de l'Allocation de Solidarité Spécifique (ASS) versée par Pôle Emploi, la somme de 113,68 € au titre du RSA et la somme de 122,93 € au titre de l'Allocation de soutien familial, soit un montant global de 791,51 € par mois. Elle verse également son avis d'imposition 2022 sur les revenus de 2021, lequel met en évidence un revenu fiscal imposable de 6 170 €, soit 514,16 € par mois. Ainsi, la précarité de sa situation financière est démontrée. Elle ajoute également avoir à sa charge sa fille mineure âgée de 17 ans.

En l'espèce la cour observe qu'à la date à laquelle elle est appelée à statuer, l'appelante qui est suivie par un travailleur social dans le cadre de sa problématique liée au logement, occupe les lieux sans droit ni titre depuis le 19 janvier 2022, qu'elle n'a jamais fait de proposition de paiement de sa dette, mais justifie de l'accomplissement d'une démarche en vue de se reloger, auprès du Conseil départemental du Gard, lequel lui a fixé deux rendez-vous les 9 et 29 mars 2023.

Sur ce point, dès lors que Mme [I] est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de la présente procédure comme n'ayant déclaré que la somme de 5 553 € en 2022, il ne peut lui être fait grief de ne pas justifier de démarches effectuées auprès de bailleurs privés pour se reloger.

La SCI Casnat soulève la mauvaise foi de la locataire considérant que celle-ci n'a nullement l'intention de régler sa dette locative et que l'appel interjeté ne vise qu'à se maintenir un peu plus longtemps dans les lieux, à son détriment, émettant un doute sur sa sincérité au vu des identités, dates de naissance et adresses variables mentionnées dans les pièces justificatives qu'elle produit.

Effectivement, au soutien de ce moyen, l'intimée expose assumer tous les frais de procédure et devoir alimenter son compte à partir des comptes personnels de ses gérants pour assumer son coût en l'absence des loyers. Enfin, elle entend disposer, dans les plus brefs délais, du logement afin de pouvoir à nouveau le proposer à la location compte tenu des difficultés financières qu'elle rencontre.

La cour constate également que l'appelante doit percevoir la somme de 13 313 € émanant de la vente de la voiture de sa mère décédée tel qu'il ressort du courriel du contrôleur des finances publiques du 4 octobre 2022 ainsi que du courrier de confirmation du 11 janvier 2023. Pour autant, Mme [I] indique avec incertitude, dans ses dernières écritures, 'utiliser cette sommes pour essayer d'apurer ses arriérés locatifs' tout en reconnaissant faire face à d'autres dépenses, sans davantage de précisions.

Si effectivement cette dernière justifie de démarches afin de trouver un logement, ses revenus actuels n'apparaissent pas suffisants pour honorer le montant de l'indemnité d'occupation, d'autant plus que la dette locative ne cesse de s'accroître, puisqu'elle n'effectue aucun paiement.

De plus, cette procédure d'appel lui a permis de facto de bénéficier de sept mois de délai de grâce depuis le prononcé de l'ordonnance critiquée.

Dans ces conditions, il convient de débouter Mme [I] de cette demande de délais afférente à la décision d'expulsion.

Sur la demande relative aux dettes fiscales :

La SCI Casnat sollicite qu'il soit jugé que Mme [I] devra s'acquitter de ses dettes fiscales.

Il s'agit effectivement d'une obligation qu'elle doit respecter à l'égard des services fiscaux, mais qui ne justifie d'aucune condamnation particulière à prononcer dans le cadre de ce litige.

La demande formulée ainsi par l'intimée, qui ne présente aucun caractère juridictionnel, ne sera pas prononcée par la cour.

Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement réglé par le premier juge.

En cause d'appel, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Ainsi, la SCI Casnat sera, en conséquence, déboutée de sa prétention de ce chef en cause d'appel.

Mme [B] [I], qui succombe, devra supporter les dépens d'appel recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Dit qu'il n'entre pas dans les pouvoirs de la cour d'ordonner la radiation de cette procédure pour défaut d'exécution,

Déclare recevable l'appel formé par Mme [B] [I] à l'encontre de la décision prononcée le 19 septembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Se déclare compétent pour statuer sur la demande de délais présentée par Mme [I],

Déboute Mme [B] [I] de sa demande de délais de grâce concernant la procédure d'expulsion,

Dit n'y avoir lieu de statuer afin de 'juger que Mme [I] doit payer ses dettes fiscales',

Déboute la SCI Casnat de sa prétention au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Condamne Mme [B] [I] au paiement des dépens d'appel recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/03402
Date de la décision : 17/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-17;22.03402 ?
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