RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/04514 - N°Portalis DBVH-V-B7F-IJDP
SL-AB
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PRIVAS
02 avril 2021
RG:18/00271
[C]
[C]
C/
S.A. PROTEC BTP
Organisme R.S.I PROVENCE ALPES
Compagnie d'assurance GAN EUROCOURTAGE
Grosse délivrée
le 06/04/2023
à Me Jean-michel DIVISIA
à Me Marie MAZARS
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 06 AVRIL 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PRIVAS en date du 02 Avril 2021, N°18/00271
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre,
Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,
Mme Séverine LEGER, Conseillère,
GREFFIER :
Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 07 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Avril 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
Monsieur [X] [C]
assisté de son épouse [O] [C] en qualité de curateur
selon décision du juge des tutelles du TI AVIGNON du 16/12/2014
né le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 11]
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représenté par Me Jean-michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Philippe-youri BERNARDINI de la SELARL CABINET BERNARDINI, Plaidant, avocat au barreau de TOULON
Monsieur [Y] [C]
né le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 12]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représenté par Me Jean-michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Philippe-youri BERNARDINI de la SELARL CABINET BERNARDINI, Plaidant, avocat au barreau de TOULON
INTIMÉES :
S.A. PROTEC BTP
prise en la personne de ses représentants légaux en exercice
domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentée par Me Marie MAZARS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Ahmed-cherif HAMDI de la SELAS FAURE - HAMDI GOMEZ & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
Organisme R.S.I PROVENCE ALPES
[Adresse 13]
[Localité 2]
Assigné à personne le 16 février 2022
sans avocat constitué
Compagnie d'assurance GAN EUROCOURTAGE
prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 6]
[Localité 10]
Assigné à personne le 09 février 2022
sans avocat constitué
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 06 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le 1er mai 2012, M. [X] [C] a été victime d'un accident de la circulation, son vélo ayant été percuté par la motocyclette de M. [S] [A], assuré auprès de la société Protect BTP.
La société Protect BTP a réalisé un premier versement provisionnel de 100 000 euros au profit de M. [C].
Un examen médico-légal a été confié au docteur [K] qui a déposé deux rapports, l'un le 20 février 2013 et l'autre le 29 avril 2014.
M. [C] a été placé sous curatelle simple par jugement du 16 décembre 2014, son épouse Mme [O] [C] ayant été désignée en qualité de curatrice.
Par ordonnances des 5 septembre 2013 et 29 janvier 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Privas a accordé à M. [C] deux provisions supplémentaires d'un montant de 150 000 euros chacune.
Le 18 septembre 2015, le docteur [K] a déposé son rapport définitif.
Par ordonnance du 5 janvier 2017, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 16 novembre 2017, le juge des référés a accordé une nouvelle provision complémentaire de 150 000 euros à M. [C].
Par actes du 19 et 22 janvier 2018, M. [C], Mme [O] [C] son épouse, Mme [F] [C] et M. [Y] [C], ses enfants, (ci-après désignés les consorts [C]), ont assigné la société Protect BTP, le RSI Provence Alpes et la société d'assurance Gan Eurocourtage devant le tribunal de grande instance de Privas afin de voir obtenir l'indemnisation de leurs préjudices, sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985.
Par jugement réputé contradictoire du 2 avril 2021, le tribunal judiciaire de Privas a :
- fixé le montant du préjudice alloué à M. [X] [C] des suites de l'accident survenu le 1er mai 2012 à la somme de 1 822 887,89 euros ;
- condamné la société Protect BTP à verser à M. [X] [C], en sa qualité de victime directe, la somme de 686 974,28 euros en réparation de ses préjudices, déduction faite des provisions d'ores et déjà versées, se décomposant comme suit :
2 391,01 euros au titre des dépenses de santé actuelles,
49 316,71 euros au titre des frais divers,
72 975 euros au titre de l'assistance tierce personne,
1 829,13 euros au titre du préjudice matériel,
48 486,41 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels,
522 euros au titre des dépenses de santé futures,
20 896,68 euros au titre des frais de logement adapté,
9 704,06 euros au titre des frais de véhicule adapté,
708 787,20 euros au titre de l'assistance tierce personne permanente,
68 750 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,
15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle,
15 731,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
35 000 au titre des souffrances endurées,
180 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
5 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
20 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
5 000 euros au titre du préjudice sexuel,
- déclaré le présent jugement commun au RSI Provence Alpes et à Gan Eurocourtage ;
- fixé la créance du RSI Provence Alpes à la somme de 363 202,31 euros;
- condamné Protect BTP à verser à Mme [O] [C], en sa qualité de victime indirecte, la somme de 44 975,77 euros se décomposant comme suit :
15 606,44 euros au titre des frais divers,
4 369,33 euros au titre de la perte de revenus,
20 000 euros au titre du préjudice d'affection,
5 000 euros au titre du préjudice sexuel,
- condamné Protect BTP à verser à Mme [F] [C], en sa qualité de victime indirecte, la somme de 9 418,54 euros se décomposant comme suit :
3 418,54 euros au titre des frais divers,
6 000 euros au titre du préjudice d'affection,
- condamné Protect BTP à verse à M. [Y] [C], en sa qualité de victime indirecte, la somme de 11 423,63 euros se décomposant comme suit :
5 423,63 euros au titre des frais divers,
6 000 euros au titre du préjudice d'affection,
- condamné Protect BTP à verser à Mme [Z] [C], en sa qualité de victime indirecte, la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice d'affection ;
- dit que ces condamnations seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2018 et que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter de cette même date ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné la société Protect BTP à payer à M. [X] [C] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Protect BTP à payer à Mme [O] [C], Mme [F] [C], Mme [Z] [C] et M. [Y] [C], la somme de 1 000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Protect BTP aux dépens ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration du 20 décembre 2021, M. [X] [C] assisté de son épouse et leur fils, M. [Y] [C] ont interjeté appel de cette décision.
L'objet et la portée de l'appel ont été précisés par une annexe jointe à la déclaration d'appel et visée par cette dernière.
Par ordonnance du 30 septembre 2022, la procédure a été clôturée le 24 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 7 février 2023 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 6 avril 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 juin 2022, les appelants demandent à la cour d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- insuffisamment indemnisé les postes de perte de gains professionnels actuels, perte de gains professionnels futurs, incidence professionnelle, assistance en tierce personne temporaire, assistance en tierce personne permanente, déficit fonctionnel permanent,
- débouté M. [X] [C] de ses demandes portant sur les préjudices économiques et financiers périphériques, et M. [Y] [C] de sa demande d'indemnisation de son préjudice économique,
- confirmer le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau,
- condamner la société Protect BTP à payer à M. [X] [C] les sommes suivantes :
Au titre de la perte de gains professionnels actuels :
au principal : 120 358,41 euros
subsidiairement : 63 215,55 euros
Au titre de la perte de gains professionnels futurs échus :
au principal : 289 735,50 euros
subsidiairement : 156 155,45 euros
Au titre des préjudices économiques et financiers périphériques :
remboursement du compte courant dans les livres de la société Pro Home au 31 décembre 2011 : 37 335 euros
remboursement du compte courant dans les livres de la société SCCV PH
Morières au 31 décembre 2011 : 83 000 euros
perte de la valeur vénale de la société Pro Home : 673 072,00 euros
remboursement du prêt personnel contracté auprès de M. [N] : 188 123,60 euros
Au titre de l'incidence professionnelle :
au principal : 300 000 euros
subsidiairement : 200 000 euros
Au titre de l'aide humaine avant consolidation : 119 573,55 euros
Au titre de l'aide humaine permanente : 897 612,35 euros
Déficit fonctionnel permanent : 192 600 euros
Frais divers (facture [G]) : 1 152 euros
Subsidiairement, si la cour ne s'estimait pas suffisamment avisée pour statuer sur les demandes portant sur les préjudices économiques et financiers, et/ou sur la perte de droits à la retraite,
- ordonner une expertise comptable avec pour mission de :
se faire communiquer toutes pièces comptables, ainsi que celles relatives aux droits à la retraite, nécessaires à la réalisation de sa mission ;
déterminer le montant du compte courant de M. [C] dans les livres de la société Pro Home et de la société SCCV PH Momières au 31 décembre 2011 ;
procéder à une estimation de la valeur vénale de la société Pro Home calculée sur la base d'une prise de retraite de M. [X] [C] à 67 ans ;
procéder à une estimation de la perte de droits à la retraite de M.[X] [C] à compter de ses 67 ans sur la base au principal d'un revenu moyen de 5 000 euros et sur la base d'un revenu moyen de 3 428,57 euros ;
dire que l'expert devra communiquer un pré rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits auxquels il devra répondre dans son rapport définitif.
- condamner Protect BTP à payer à M. [Y] [C], au titre de son préjudice économique pour la période du 16 septembre 2014 au 9 décembre 2016, la somme de 41 390,32 euros,
En tout état de cause,
- juger que les sommes allouées en principal seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la demande en justice soit du 22 janvier 2018 et que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter de cette même date, en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
- condamner Protect BTP à payer à M. [X] [C] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et la somme de 1 000 euros en application du même article à M. [Y] [C].
Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 mai 2022, la SA Protect BTP, intimée à titre principal et appelante à titre incident, demande à la cour de :
Sur la perte de gains professionnels actuels :
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a estimé que ce poste de préjudice serait réparé par la somme de 88 128 euros,
A titre incident,
- juger qu'il conviendra de déduire du poste de préjudice de la perte de gains professionnels actuels la somme de 88 128 euros, outre la somme de 39 641,59 euros correspondant à la créance du RSI ainsi que la somme de 39 166 euros correspondant aux prestations versées par Gan,
A titre subsidiaire,
- rectifier l'erreur ou l'omission matérielle affectant le jugement dont appel en ce que les premiers juges ont omis de déduire du montant de la perte de gains professionnels actuels les prestations du Gan,
- juger en conséquence que M. [X] [C] se verra verser la somme de 9 320,41 euros au titre de ce poste, déduction faite des prestations versées par le RSI et le Gan,
Sur la perte de gains professionnels futurs échus :
- confirmer le jugement en ce qu'il a indiqué que ce poste de préjudice serait réparé par la somme de 68 750 euros,
A titre incident,
- juger qu'il conviendra de déduire la somme de 68 6750 €, outre les prestations versées par le RSI, les sommes de 18 243 € et de 20 923 € correspondant aux prestations du GAN,
Subsidiairement, au fondement de l'article 462 du Code de procédure civile,
- rectifier l'erreur ou omission matérielle affectant le jugement de première instance dont appel déféré à la cour de céans en ce que les premiers juges ont omis de déduire du montant de la perte de gains professionnels futurs les prestations du GAN,
- juger, en conséquence, que ce poste sera valablement indemnisé par l'allocation de la somme totale de 7 168,44 euros, déduction faite des prestations versées par le RSI et le GAN,
Sur les préjudices économiques et financiers périphériques :
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté M. [X] [C] de l'ensemble de ses demandes,
A titre incident,
- infirmer le jugement en ce qu'il a estimé que le protocole transactionnel signé ne pouvait avoir de portée en l'espèce et de juger, en premier lieu, la demande irrecevable au regard de la portée et de l'autorité attachée au protocole transactionnel et, subsidiairement, au fondement de la motivation du premier juge,
Sur l'incidence professionnelle :
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a alloué à M. [X] [C] la somme de 15000 euros au titre de l'incidence professionnelle,
Sur l'aide humaine avant consolidation :
- confirmer la décision en ce qu'elle alloué à M. [X] [C] la somme de 72 975 euros et, subsidiairement, s'il devait être retenu un taux de 20 euros, juger que M. [X] [C] ne pourra se voir allouer une somme supérieure à 97 300 euros (4 865 x 20 euros),
Sur l'aide humaine permanente :
- confirmer le jugement dont appel au titre de l'assistance tierce personne permanente avec valorisation à hauteur de 20 euros de l'heure,
A titre incident,
- réformer le jugement dont appel en ce qu'elle a ordonné une liquidation en capital et non sous forme de rente et juger que l'assistance tierce personne sera liquidée sous forme de rente et non de capital,
Sur le déficit fonctionnel permanent :
- confirmer la décision dont appel sur ce point en ce qu'elle a alloué à M.[X] [C] la somme de 180 000 euros,
Sur les frais divers :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [X] [C] de sa demande de remboursement de la facture [G] pour la somme de 1 152 euros,
Sur les demandes formulées par M. [Y] [C] :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [Y] [C] de sa demande d'allocation de la somme de 41 390,69 euros au titre de la perte de revenus alléguée,
- à titre subsidiaire, juger qu'il sera alloué à M. [Y] [C] la somme de 4 253,46 euros,
En tout état de cause,
- débouter M. [X] [C] de sa demande d'expertise judiciaire,
- débouter les consorts [C] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires.
La SA Protect BP a notifié de nouvelles écritures postérieurement à la clôture le 3 février 2022 en sollicitant le rabat de l'ordonnance de clôture.
Intimées par signification de la déclaration d'appel par acte d'huissier respectivement remis à personne habilitée pour le compte de la personne morale le 9 février 2022 pour la compagnie d'assurances Gan eurocourtage et le 16 février 2022 pour le RSI Provence Alpes, ces organismes n'ont pas constitué avocat.
Les dernières conclusions de l'appelant ont été signifiées à la SA Gan Eurocourtage et à l'Urssaf PACA, intimés défaillants le 3 juin 2022 et le 8 juin 2022.
La décision sera réputée contradictoire en application des dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la révocation de l'ordonnance de clôture :
Aux termes de l'article 802 du code de procédure civile, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
Selon l'article 803 de ce même code, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.
A défaut de justifier d'une cause grave à l'appui de sa demande de révocation de clôture présentée par la SA Protect Btp qui a déposé des écritures le 3 février 2023, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture en date du 30 septembre 2022 à effet différé au 24 janvier 2023, la demande de l'intimé ne peut prospérer compte tenu des échanges d'écritures entre les parties ayant respectivement conclu le 10 mai 2022 pour l'intimée et le 30 juin 2022 pour les appelants, aucun élément ne justifiant le dépôt tardif de ces dernières conclusions qui seront déclarées irrecevables.
Sur la liquidation du préjudice corporel de la victime directe :
L'appel principal ne porte que sur certains postes de préjudices qui seront seuls réexaminés.
L'appel incident formé par l'intimée porte sur les mêmes postes de préjudice lesquels seront ainsi successivement examinés.
Les données de fait nécessaires à l'examen du litige sont les suivantes :
L'accident est survenu le 1er mai 2012, occasionnant un traumatisme cranio cérébral grave avec coma, polytraumatisé associant plusieurs fractures, outre un traumatisme thoracique et une atteinte neurologique alors que la victime, née le [Date naissance 4] 1955, était âgée de 57 ans.
La victime a été consolidée le 31 décembre 2014, soit à 59 ans mais en réalité à presque 60 ans. Elle a été placée en arrêt de travail de la date de l'accident, du 1er mai 2012 au 31 décembre 2014 et une pension d'invalidité lui a été versée par le RSI à compter du 1er janvier 2015 jusqu'au 31 janvier 2017 compte tenu de l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle. Elle a fait l'objet d'un placement d'office en retraite à compter du 1er février 2017, à l'âge de 62 ans en raison de l'inaptitude au travail.
Le taux de déficit fonctionnel permanent a été fixé à 60 % par l'expert.
A la date de l'accident, M. [C] était le gérant de la société Pro Home, créée le 1er août 2005 (EURL) et d'une société de promotion immobilière jouant le rôle de société animatrice holding coiffant des sociétés civiles de construction dont son fils avait été nommé co-gérant le 29 mars 2012 aux fins de gestion technique des chantiers.
Cinq programmes immobiliers étaient en cours de réalisation à la date de l'accident.
Les sociétés ont été placées en redressement judiciaire le 17 septembre 2014 puis en liquidation judiciaire le 18 mars 2015 avec extension de la mesure aux SCI et SCCV du groupe le 10 février 2016.
Un protocole transactionnel a été signé par les sociétés et M. et Mme [C] le 12 novembre 2017 à titre personnel et en qualité de gérant et associé des sociétés, homologué par jugement du tribunal de commerce.
L'offre d'indemnisation a été notifiée le 2 mars 2016 à la victime par l'assureur, la société Protect BTP.
- sur la perte de gains professionnels actuels
Le tribunal a alloué la somme de 88 128 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels sur une période de 32 mois, de la date de l'accident survenu le 1er mai 2012 à la date de consolidation de la victime le 31 décembre 2014, calculée sur la base d'un revenu mensuel au moment de l'accident de 2 754 euros par mois au regard des sommes réglées au titre des indemnités journalières par le RSI et Gan Eurocourtage.
L'appelant fait grief au premier juge de ne pas avoir pris en compte la réalité de sa situation financière au moment de l'accident et sollicite la prise en compte d'un revenu mensuel de 5 000 euros par mois comme salaire pour l'indemnisation de son préjudice professionnel conformément au procès-verbal de l'associé unique de la société Pro Home du 5 janvier 2012 ayant augmenté sa rémunération à partir du mois de janvier 2012.
Il demande ainsi à la cour de fixer principalement la perte de salaire à la somme de 160 000 euros et subsidiairement, à la somme de 102 857,14 euros en prenant en considération une perte de revenus mensuels de 3 428,57 euros correspondant à la moyenne des revenus perçus de janvier 2010 à avril 2012 établie par la production des avis d'imposition 2011 et 2012.
L'intimée sollicite la confirmation de la décision déférée en raison de l'insuffisance des pièces produites par la victime qui ne fournit pas les avis d'imposition des trois dernières années avant l'accident.
L'appelant verse aux débats le procès-verbal des décisions de l'associé unique de la société Pro-Home du 5 janvier 2012 selon lequel la rémunération des fonctions de gérant au titre de l'année 2012 a été fixée à un montant de 60 000 euros soit 5 000 euros par mois, document corroboré par l'attestation de son expert comptable ayant établi que le montant de sa rémunération nette était de 5 000 euros par mois de janvier à avril 2012.
L'avis d'imposition 2013 sur les revenus de l'année 2012 mentionne la somme de 20 000 euros alors qu'il est établi que la victime a perçu des indemnités journalières versées par le RSI et par le Gan, raison pour laquelle le premier juge a refusé de tenir compte d'une rémunération mensuelle de 5 000 euros dont le montant n'était pas corroboré par les pièces versées aux débats.
A la différence des revenus salariés classiques, la rémunération d'un gérant de société présente un caractère variable compte tenu du contexte économique dans lequel s'inscrit l'activité de la société et il convient dès lors de calculer un revenu moyen de référence sur les années précédant la réalisation du dommage.
L'appelant verse aux débats des pièces nouvelles par rapport à celles produites devant le premier juge constituées par les avis d'imposition 2012 et 2011 établissant une perception de revenus de 38 000 euros par an pour l'année 2010 et l'année 2011, ces pièces permettant d'établir un revenu moyen de référence sur la période de janvier 2010 à avril 2012, soit sur une période de 28 mois, laquelle est tout-à-fait satisfaisante, l'intimée étant mal fondée à exiger la communication d'éléments sur une période de 36 mois.
Le revenu mensuel moyen de référence s'établit ainsi à la somme de 3 428,57 euros qui sera prise en compte pour le calcul de la perte de gains professionnels actuels s'élevant ainsi à la somme de 102 857,14 euros telle que réclamée à titre subsidiaire par l'appelant.
S'agissant de la déduction des sommes versées par les organismes sociaux, les parties s'accordent sur l'imputation de la somme de 39 641,59 euros au titre des indemnités journalières versées par le RSI sur la période considérée mais sont en désaccord sur l'imputation de la somme de 39 166 euros versée par le Gan que le premier juge n'a pas imputé sur la somme allouée à la victime et que l'intimée demande de déduire.
L'appelant produit une attestation de Groupama Gan vie du 2 janvier 2018 indiquant que M. [C] avait souscrit un contrat de prévoyance non obligatoire et soutient que les sommes réglées dans ce cadre ne sont pas visées par l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985.
Les règles concernant les modalités d'imputation du recours des tiers payeurs sont d'ordre public et doivent être appliquées même en l'absence de prétention du tiers payeur relative à l'assiette du recours et c'est donc vainement que l'appelant s'oppose à la déduction des sommes réglées par le Gan au moyen que cet organisme n'a sollicité aucune prétention de ce chef.
Le moyen selon lequel les sommes ont été réglées par le Gan dans le cadre d'un régime non obligatoire est également inopérant dans la mesure où les sommes versées l'ont été à titre d'indemnités journalières et que la déduction de ces sommes est expressément prévue par l'article 29.5 de la loi du 5 juillet 1985.
La somme revenant à la victime au titre de la perte de gains professionnels actuels s'établit ainsi comme suit :
102 857,14 euros - (39 641,59 euros + 39 166 euros ) = 24 049,55 euros.
La décision déférée sera donc infirmée sur ce poste de préjudice.
- sur la perte de gains professionnels futurs
Le tribunal a indemnisé la perte de gains professionnels futurs sur la base d'une perte de revenus jusqu'à la mise en retraite de la victime en date du 31 janvier 2017, soit à l'âge de 62 ans, en excluant toute autre indemnisation et en ayant ainsi retenu une période de 25 mois pour le calcul de la perte alléguée sur la base du revenu mensuel moyen perçu avant l'accident.
Il est avéré que M. [C] n'a pu reprendre d'activité professionnelle après l'accident et qu'il a bénéficié d'une pension d'invalidité totale et définitive versée par le RSI du 1er janvier 2015 au 31 janvier 2017, date à laquelle il a fait l'objet d'une mise à la retraite d'office au titre de l'inaptitude au travail en ce qu'il avait atteint l'âge légal de 62 ans et a bénéficié d'une pension de retraite à compter de cette date.
L'appelant sollicite l'indemnisation de son préjudice jusqu'à l'âge de 67 ans, soit durant 85 mois en soutenant qu'il n'envisageait pas de prendre sa retraite à l'âge de 62 ans comme l'accident le lui a contraint.
Il produit sur ce point trois attestations émanant de son entourage amical décrivant son dynamisme et son attrait pour l'exercice de son activité professionnelle à laquelle il n'envisageait pas de mettre un terme avant l'âge maximal de 67 ans.
Il résulte des pièces produites et notamment de son relevé de carrière que M. [C] a travaillé de manière ininterrompue de 1982 à 2005 dans le cadre du régime général avant de créer son entreprise en 2006, date à partir de laquelle il a exercé une activité en qualité de chef d'entreprise et il est établi que cette activité était effectivement en phase de croissance.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le préjudice afférent à la perte de gains professionnels futurs sera calculé jusqu'à l'âge de 65 ans, soit sur une période de 61 mois sur la base du salaire mensuel de référence tel que retenu pour la perte de gains professionnels actuels de 3248,47 euros.
Le préjudice s'établit ainsi comme suit :
3248,57 euros X 61 mois = 198 162,77 euros.
Sur cette somme, il convient de déduire les sommes servies à M. [C] au titre de la pension d'invalidité du 1er janvier 2015 au 31 janvier 2017 s'élevant à 24 250,15 euros ainsi que les pensions de retraite versées à partir du 1er janvier 2017 que l'appelant a chiffré à la somme de 111049 euros arrêtée au mois de janvier 2022.
La méthodologie de calcul proposée par l'appelant sur la base d'une retraite à l'âge de 67 ans doit être adaptée à la position retenue par la présente cour à partir d'une retraite à l'âge de 65 ans soit le 1er février 2020 de sorte que les sommes à déduire au titre des pensions de retraite servies sur la période considérée doivent s'arrêter au mois de janvier 2020 et non 2022.
A partir des éléments versés aux débats, c'est la somme globale de 64 835 euros qui a été servie pour les années 2017 à 2019 à laquelle sera ajoutée la somme de 1847 euros pour le mois de janvier 2020, soit une somme à déduire de 66 682 euros.
Aucune somme complémentaire ne saurait être déduite au titre des versements effectués par le Gan, lesquels ont déjà été pris en compte au titre des sommes versées en 2013 et 2014 dans le cadre des indemnités journalières, aucun élément versé aux débats n'établissement le versement de sommes à M. [C] par cet organisme postérieurement au 1er janvier 2015, soit postérieurement à la consolidation de la victime.
La somme revenant à M. [C] s'élève ainsi à la somme de :
198 162,77 euros - (24 250,15 euros + 66 682 euros) = 107 230,77 euros.
Le jugement déféré sera donc également infirmé sur ce poste de préjudice.
- sur l'incidence professionnelle
L'appelant fait grief au premier juge d'avoir insuffisamment évalué à hauteur de 15 000 euros le préjudice afférent à l'incidence professionnelle en ayant considéré à tort que la victime était proche de l'âge de la retraite.
Il avait alors réclamé la somme de 150 000 euros sans prise en compte de l'incidence au titre des droits à la retraite mais forme désormais une réclamation principale de 300 000 euros fondée sur une rémunération mensuelle de 5 000 euros et une prétention subsidiaire de 200 000 euros fondée sur une rémunération mensuelle de 3 428,57 euros incluant tout à la fois la perte des droits à la retraite ainsi que la privation de la possibilité de continuer un épanouissement professionnel.
Il produit à cet égard un rapport de son expert comptable présentant les calculs selon les deux hypothèses de revenus mensuels.
Les éléments versés aux débats et notamment le relevé de carrière du 27 juin 2017 établissent que la pension de retraite servie au titre de la sécurité sociale des indépendants a été calculée sur la base de 47 trimestres cotisés alors que M. [C] aurait pu cotiser jusqu'à l'âge de 65 ans, soit un nombre supplémentaire de 12 trimestres, avec l'application d'une surcote de 5 % par an.
La méthodologie de calcul proposée par l'expert comptable peut ainsi être utilisée avec l'application des données telles que retenues par la cour, soit sur la base de 59 trimestres cotisés au lieu des 47 retenus donnant lieu à l'application d'une surcote de 15 %.
Son revenu annuel moyen sur les dix meilleurs années aurait été de 41 142,84 euros sur huit ans de 2012 à 2020, avec la prise en compte du revenu de 2011 de 36 514 euros et de 36 884 euros en 2010 conformément aux éléments figurant dans le relevé de carrière, soit un revenu annuel moyen de 40 254 euros.
La pension de retraite annuelle aurait ainsi été de :
40 254 euros X 50 % X 59 trimestres cotisés sur 166 trimestres de référence = 7 153,57 euros,
majorée de 15 %, soit 8 226,60 euros.
La pension liquidée en 2017 étant de 3 604,08 euros, le manque à gagner s'établit à la somme de 4622,52 euros.
La capitalisation de la perte des droits à la retraite doit s'effectuer non à compter de l'age de 67 ans tel que réclamé par l'appelant mais à compter de l'âge de 65 ans tel que retenu par la cour soit un prix de l'euro de rente viagère de 18,759 :
4 622,52 euros X 18,759 = 86 713,85 euros pour le régime de retraite de base.
S'agissant du régime de retraite complémentaire, le document établi par l'expert comptable est inexploitable et non probant en ce qu'il affirme que M. [C] se serait vu attribuer 1710 points de retraite supplémentaires calculés sur une base de 29064 euros de cotisations alors que son relevé de carrière atteste qu'il n'a bénéficié que de 226 points pour les années de cotisations comprises entre 2006 et 2011 avec 62,58 points attribués en 2010 pour un revenu de référence de 36 884 euros mais aucun point en 2011 en l'absence de cotisations suffisantes l'année précédant l'accident.
Le rapport de l'expert comptable mentionne 844 points de retraite valorisés en 2017 à 1,0384 euros mais aucune pièce n'est versée aux débats pour corroborer cet élément et il n'appartient pas à la cour de pallier la carence probatoire des parties.
La preuve de la perte de droits au titre de la retraite complémentaire n'est donc pas établie dans la mesure où il se déduit des éléments présentés par l'expert que M. [C] s'est vu attribuer des points au titre du régime complémentaire des commerçants et industriels postérieurement à son accident soit de 2012 à 2017.
A la date de l'accident, M. [C] était âgé de 57 ans et a été privé de l'exercice de son activité professionnelle à compter de cette date, activité qu'il aurait pu poursuivre jusqu'à l'âge de 65 ans.
Il a ainsi été privé de l'épanouissement professionnel dont il bénéficiait antérieurement devant être pris en compte au titre de l'incidence professionnelle.
Il lui sera ainsi alloué la somme de 120 000 euros en réparation de ce poste de préjudice incluant la perte des droits à la retraite et la part subjective de l'incidence professionnelle par voie d'infirmation du jugement déféré.
- sur l'assistance tierce personne temporaire
Le premier juge a indiqué qu'il était adapté d'appliquer un coût horaire de 20 euros et que M. [C] pouvait ainsi prétendre à une indemnisation totale de 103 977 euros au titre de l'assistance tierce personne temporaire compte tenu des volumes horaires spécifiés par l'expert mais a alloué la somme de 72 975 euros telle que proposée par l'assureur au regard de la seule réclamation de 71 401,20 euros par la victime.
L'appelant réclame l'application d'un taux horaire de 23 euros compte tenu de la moyenne des tarifs prestataire et sollicite ainsi une indemnisation d'un montant de 119 573,55 euros.
L'assureur conclut de son côté principalement à la confirmation du jugement qui ne saurait rectifier les erreurs de calcul des parties et subsidiairement à la seule allocation de la somme de 97 300 euros correspondant à l'application du taux horaire de 20 euros pour 4 865 heures.
L'expert a mis en évidence un besoin en assistance tierce personne défini selon les modalités suivantes :
- besoin en terme de substitution de 4 heures par jour dont 1 heure d'accompagnement
- besoin complémentaire de 5 heures par jour du 24 octobre 2012 au 31 janvier 2013
- besoin complémentaire 3 heures par jour pendant 5 jours par semaine à partir de février 2013 au titre d'un besoin de présence avec stimulation et participation à la vie sociale.
Deux périodes doivent ainsi être distinguées :
- Du 24 octobre 2012 au 31 janvier 2013 : 9 heures par jour pendant 100 jours
- Du 1er février 2013 au 31 décembre 2014 : 6 heures 15 par jour pendant 699 jours
Au soutien de sa demande, l'appelant produit une attestation de l'entreprise O2 du 25 septembre 2017 indiquant que M. [C] bénéficie d'une assistance visant à pallier ses difficultés et son handicap moyennant un montant de 23,10 euros TTC de l'heure.
Ce tarif correspond cependant à l'année 2017 alors que le préjudice d'assistance tierce personne temporaire concerne la période comprise entre octobre 2012 et le 31 décembre 2014.
Dans ces conditions, il sera fait application du tarif horaire de 20 euros parfaitement adapté aux éléments de l'espèce, le taux horaire devant être modulé en fonction de la gravité du handicap et de la spécialisation de la tierce personne alors que le besoin de M. [C] correspond à une tierce personne non spécialisée, s'agissant d'un accompagnement dans la vie sociale.
Le préjudice sera ainsi intégralement réparé par l'allocation de la somme calculée comme suit:
- 9 h X 100 jours X 20 euros = 18 000 euros
- 6 h15 X 699 jours X 20 euros = 85 977 euros
Soit un montant total de 103 977 euros.
- sur l'assistance tierce personne permanente
Le tribunal a indemnisé le préjudice de tierce personne permanente sur la base d'un tarif horaire de 20 euros et de l'année civile de 365 jours à partir du besoin de 4 heures par jour défini par le rapport d'expertise.
L'appelant sollicite l'application d'un taux horaire de 23 euros et la prise en compte d'une base de 412 jours.
Le recours à l'année majorée de 412 jours n'est pas adapté en l'espèce, cette méthodologie convenant pour les handicaps lourds nécessitant une assistance à temps complet, ce qui n'est pas le cas en l'espèce au regard du besoin fixé à 4 heures par jour incluant les activités familiales et celles extérieures à la cellule familiale en substitution et en accompagnement.
Afin de tenir compte de l'inflation, il sera opéré une distinction entre les arrérages échus, de la date de consolidation à la date de la décision, pour lesquels il sera fait application d'un taux horaire de 20 euros, tandis que les arrérages à échoir seront capitalisés sur la base d'un coût de 23 euros de l'heure.
Le préjudice s'établit comme suit :
Pour les arrérages échus :
- du 1er janvier 2015 au 31 mars 2023 = 4 h X 20 euros X 3011 jours = 240 880 euros
Pour les arrérages à échoir :
- 4 heures X 365 jours X 23 euros = 33 580 euros qu'il convient de capitaliser avec application du prix de l'euro de rente viagère pour un homme de 68 ans soit de 16,538 euros,
soit 33 580 euros X 16,538 = 555 346,04 euros.
Le préjudice de tierce personne permanente sera donc intégralement réparé par l'allocation de la somme de 796 226,04 euros par voie d'infirmation de la décision déférée.
Cette somme sera allouée à M. [C] sous forme d'un capital conformément à sa demande, la prétention de l'assureur tendant au versement d'une rente viagère n'étant pas adaptée aux circonstances de l'espèce.
- sur le déficit fonctionnel permanent
L'appelant est parfaitement fondé à solliciter l'application d'une valeur de point de 3210 euros compte tenu de l'âge de la victime de 59 ans à la date de consolidation le 31 décembre 2014 et du taux de déficit fonctionnel permanent fixé par l'expert à 60 %.
Ces éléments ne peuvent être remis en cause du fait que la victime, née le [Date naissance 4] 1955, était très proche de l'âge de 60 ans, puisque la valeur de point est identique entre 51 et 60 ans.
Il sera ainsi alloué à M. [C] la somme de 192 600 euros en réparation de ce poste de préjudice par voie d'infirmation du jugement déféré qui avait alloué la somme de 180 000 euros.
Sur les préjudices financiers périphériques :
Le tribunal a considéré que les demandes d'indemnisation présentées par M. [C] au titre de la perte du remboursement des comptes courant d'associé, de la perte des sommes empruntées à titre personnel et de la perte d'opportunité en termes de revenus fonciers futurs étaient recevables mais les a rejetées au fond en l'absence d'éléments probants.
Le tribunal a retenu que seuls le préjudices des sociétés avaient été indemnisés dans le cadre du protocole d'accord transactionnel signé par les 31 juillet et 16 novembre 2017.
L'appelant sollicite la confirmation de la décision déférée sur ce point et réclame l'indemnisation de ses préjudices personnels constitués par le remboursement des comptes courant d'associé dans les livres de la société Pro home et de la SCCV PH, par la perte de valeur vénale de la société éPro home et par le remboursement d'un prêt personnel contracté par ses soins.
L'intimée forme appel incident sur ce point et soulève l'irrecevabilité de l'ensemble des prétentions présentées par M. [C] au titre des préjudices financiers périphériques dans la mesure où le protocole n'a pas seulement été signé en qualité de représentant des sociétés mais aussi à titre personnel.
Le protocole d'accord transactionnel a été signé entre les trois sociétés représentées par le liquidateur judiciaire (SARL Pro Home, SCCV PH Le Thor I, SCCV PH Camaret II), M. [C] assisté par son épouse en qualité de curatrice et la société Protect BTP.
Il a conduit au versement de la somme de 184 329 euros au titre du préjudice subi par les sociétés. Un jugement d'homologation a été rendu par le tribunal de commerce d'Avignon le 27 juin 2018.
L'article 3 du protocole est libellé comme suit :
'Par l'effet du présent protocole, les parties renoncent à toutes procédures, de quelque nature que ce soit envers l'autre et acceptent de conserver à leurs charges respectives les frais irrépétibles exposés.
M. [C], assisté par sa curatrice Mme [C], tous deux parties au présent et agissant, pour M. [C] tant à titre personnel qu'en sa qualité d'ancien représentant légal et en sa qualité d'associé et s'agissant de Mme [C], tant à titre personnel qu'en sa qualité de curatrice, reconnaissent accepter l'indemnisation proposée dans le cadre du présent protocole au titre de l'indemnisation des sociétés du groupe partie au présent accord, sans qu'ils puissent valablement solliciter quelque indemnisation complémentaire à ce titre par ailleurs et/ou ultérieurement, nonobstant la liquidation judiciaire et au titre d'éventuels droits personnels ou propres'.
L'article 4 du protocole précise que :
'En contrepartie de l'exécution du présent protocole, les parties reconnaissent ne plus rien avoir à se réclamer l'une à l'autre, ni pour le passé, ni pour l'avenir'.
Si l'objet du protocole porte effectivement sur l'indemnisation des préjudices subis par la société, les termes du protocole sont parfaitement clairs en ce qu'ils ont expressément exclu toute demande ultérieure formée par M. [C] au titre de droits personnels ou propres, étant précisé qu'il est intervenu au protocole non seulement en sa qualité d'ancien gérant des sociétés mais aussi à titre personnel.
Les demandes au titre des préjudices financiers périphériques en lien avec les sociétés dont il était le gérant seront par conséquent déclarées irrecevables par voie d'infirmation du jugement déféré.
Sur les frais divers exposés en cause d'appel :
L'appelant sollicite la somme de 1 152 euros en remboursement de la facture de son expert-comptable pour l'étude réalisée par les soins de ce dernier aux fins de calcul de la perte des droits à la retraite. Cette prestation sera prise en compte au titre des frais irrépétibles exposés par l'appelant.
Sur le préjudice économique du fils de la victime :
Il est sollicité la réparation d'une perte de revenus consécutive à l'accident par M. [Y] [C], co-gérant de la SARL Pro Home depuis le 20 mars 2012, percevant un salaire net mensuel de 3111,56 euros et licencié le 16 septembre 2014.
Indemnisé par Pôle emploi de décembre 2014 à décembre 2016 pour un montant global de 43245,20 euros, il réclame l'allocation de la somme de 41 390,32 euros au titre de la perte de revenus sur la période considérée.
L'intimée soutient de son côté que le licenciement ne peut être imputé de façon certaine et exclusive à l'accident et soutient qu'il s'agit d'une conséquence de la faillite du groupe à l'origine de laquelle se trouve M.[M], ancien associé de la victime.
A titre subsidiaire, elle se prévaut d'une seule perte de chance de voir perdurer le contrat de travail à hauteur de 10 % selon l'évaluation de l'expert judiciaire M. [E] et soutient que le préjudice ne pourrait excéder la somme de 4 253,46 euros.
Le premier juge a rejeté cette prétention en considération de l'insuffisance d'éléments probants en ce qu'il n'était pas justifié que l'intéressé était resté au chômage sur toute la période considérée.
La preuve de cet élément est désormais rapportée par la production d'une attestation de paiement de Pôle emploi du 3 février 2016 établissant que M. [Y] [C] a obtenu le versement de la somme de 21 622,60 euros au titre d'une allocation de retour à l'emploi entre le 4 mars 2015 et le 1er février 2016 et d'une attestation de périodes indemnisées émise le 14 décembre 2021 certifiant l'existence d'une indemnisation du 11 décembre 2014 au 9 décembre 2016 soit sur une période de 730 jours pour un montant brut journalier de 66,93 euros.
Le préjudice allégué s'analyse en une perte de chance de poursuite de l'activité professionnelle dont les éléments d'espèce et notamment la durée d'exercice de cette activité de seulement trois mois à la date de l'accident ne saurait être évaluée à plus de 10 %.
Le préjudice de M. [Y] [C] sera donc intégralement réparé par la somme de 4 139,69 euros.
Sur les autres demandes :
Le chef de décision ayant fixé le point de départ des intérêts à compter du 22 janvier 2018, date de l'assignation, avec capitalisation des intérêts par année entière sera confirmé en l'absence d'un appel incident régulièrement formé par l'intimée dans le dispositif de ses conclusions sur ce point et cette disposition doit s'appliquer à l'ensemble des sommes allouées à la victime directe.
La société Protect BTP succombant dans la plus grande partie de ses prétentions, elle sera condamnée aux entiers dépens de l'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
L'équité commande par ailleurs de la condamner à payer à M. [X] [C] la somme de 3200 euros en cause d'appel et la somme de 1 000 euros à M. [Y] [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes allouées par le premier juge étant confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture ;
Déclare irrecevables les conclusions notifiées par la SA Protect BTP le 3 février 2023 ;
Infirme le jugement déféré sur le quantum des sommes allouées au titre des postes de préjudice constitués par la perte de gains professionnels actuels, la perte de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle, l'assistance par tierce personne temporaire, l'assistance par tierce personne permanente et le déficit fonctionnel permanent ;
Statuant à nouveau sur ces chefs,
Fixe les chefs de préjudice réformés comme suit :
- perte de gains professionnels actuels : 102 857,14 euros de laquelle doivent être déduites les sommes versées par le RSI d'un montant de 39 641,59 euros et les sommes versées par le GAN d'un montant de 39 166 euros, soit la somme de 24 049,55 euros revenant à M. [X] [C];
- perte de gains professionnels futurs : 198 162,77 euros sur laquelle la somme de 107 230,77 euros revient à M. [X] [C] après déduction des sommes allouées au titre de la pension d'invalidité et des pensions de retraite ;
- incidence professionnelle : 120 000 euros ;
- tierce personne temporaire : 103 977 euros ;
- tierce personne permanente : 796 226,04 euros ;
- déficit fonctionnel permanent : 192 600 euros ;
Condamne la SA Protect BTP à payer à M. [X] [C] les sommes susvisées qui porteront intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2018, avec capitalisation par année entière ;
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevables les demandes d'indemnisation présentées par M. [X] [C] au titre des préjudices économiques et financiers périphériques et en ce qu'il a débouté M. [Y] [C] de sa prétention au titre de son préjudice économique;
Statuant à nouveau sur ces chefs,
Déclare irrecevables les prétentions de M. [X] [C] au titre des préjudices économiques et financiers périphériques ;
Condamne la SA Protect BTP à payer à M. [Y] [C] à la somme de 4 139,69 euros en réparation du préjudice économique ;
Déclare le présent arrêt commun et opposable au RSI Provence Alpes et à la compagnie d'assurances GAN Eurocourtage ;
Y ajoutant,
Condamne la SA Protect BTP à régler les entiers dépens de l'appel ;
Condamne la SA Protect BTP à payer la somme de 3 200 euros à M. [X] [C] et la somme de 1 000 euros à M. [Y] [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,