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06/04/2023 | FRANCE | N°21/00428

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 06 avril 2023, 21/00428


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/00428 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H5VH



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

07 janvier 2021 RG :19/01539



[C]



C/



Société DARAG DEUTSCHLAND AG







































Grosse délivrée

le

à Me Mansat Jaffrer>
Selarl PG











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 06 AVRIL 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 07 Janvier 2021, N°19/01539



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Anne DAMPFHOFFER, Présid...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00428 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H5VH

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

07 janvier 2021 RG :19/01539

[C]

C/

Société DARAG DEUTSCHLAND AG

Grosse délivrée

le

à Me Mansat Jaffre

Selarl PG

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 06 AVRIL 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 07 Janvier 2021, N°19/01539

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Mme Laure MALLET, Conseillère

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Avril 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [W], [H] [C]

né le 07 Novembre 1977 à [Localité 8] - CAMEROUN

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Frédéric MANSAT JAFFRE de la SELARL MANSAT JAFFRE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Rochfelaire IBARA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Société DARAG DEUTSCHLAND AG L dont le siège social se situe [Adresse 7] (Allemagne), prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits de la SA SADA ASSURANCES, dont le siège social se situe [Adresse 3], suivant convention de TPA en date du 17 juin 2021,

[Adresse 7]

[Localité 2] (ALLEMAGNE)

Représentée par Me Pauline GARCIA de la SELARL PG AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 12 janvier 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 06 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

Exposé :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nîmes le 7 janvier 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

- ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture et fixe la clôture au 26 novembre 2020 avant l'ouverture des débats,

- déboute Monsieur [W] [C] de sa demande tendant à voir condamnée la compagnie d'assurances à lui payer la somme de 69 000 euros correspondant au prix d'acquisition du véhicule Jaguar Land Rover immatriculé [Immatriculation 6],

- déboute Monsieur [W] [C] de sa demande au titre du blouson painting en croco,

- déboute Monsieur [W] [C] de sa demande au titre du préjudice financier,

- condamne Monsieur [C] à payer à la SA Sada assurances la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute Monsieur [W] [C] de sa demande au titre des frais irrépétibles,

- condamne Monsieur [W] [C] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Vu l'appel interjeté le 1er février 2021 par Monsieur [C].

Vu les conclusions de l'appelant en date du 10 février 2022, demandant de :

Vu le code civil notamment en ses articles 1231-1, 1344, 1119,

Vu le code de la consommation notamment en son article L.133-2,

Vu le code des assurances notamment en ses articles L.113-5, L113-1, L.113-11,

Vu le code monétaire et financier notamment en ses articles L.152-1 à L152-6, R 152-6 à R152-10,

Vu le code des douanes notamment en ses articles 464 et 465,

Vu le code de procédure civile en son article 56,

Vu la police d'assurance Netvox (conditions particulières) du 17/02/2017,

vu le bordereau de pièces communiquées,

- recevoir monsieur [C] [W] [H] en son appel, fins et conclusions en les jugeant bien fondés,

- infirmer l'entier dispositif du jugement du tribunal judiciaire de Nîmes en ce qu'il déboute M. [W] [H] [C] de l'ensemble de ses demandes fins, exceptions et conclusions,

Statuant à nouveau sur la cause,

- juger que monsieur [W]-[H] [C] justifie de la survenance d'un risque ou sinistre, en l'occurrence le vol de son véhicule Land Rover immatriculé [Immatriculation 6] survenu le 17 juin 2017 dont le préjudice est effectivement couvert par la police d'assurance n° AG126706 souscrite auprès de Sada assurances par l'intermédiaire de son courtier Netvox,

- juger que monsieur [W]-[H] [C] justifie consécutivement à la survenance du sinistre de vol de son véhicule Land Rover immatriculé [Immatriculation 6] survenu le 17 juin 2017 d'avoir accompli dans les délais contractuels en toute bonne foi toutes les obligations déclaratives conditionnant l'indemnisation de son préjudice expressément prévues aux termes de la police d'assurance n° AG126706,

- juger que la société Darag Deutschland AG (DAG) venant aux droits de la compagnie d'assurances Sada assurances ne justifie pas du consentement exprès de monsieur [W]-[H] [C] aux conditions générales d'assurances Sada assurances lors de la souscription de la police d'assurance auprès de son courtier Netvox,

- juger que la clause de déchéance de la garantie stipulée aux termes de la police d'assurance n° AG126706 invoquée par la société Darag Deutschland AG (DAG) venants aux droits de la compagnie d'assurances Sada assurances est entachée de nullité et doit être réputée non écrite ou inexistante en ce qu'elle vise, outre son défaut d'acceptation expresse par l'assuré et sa rédaction pathologique en des termes non apparents, des cas généraux de déchéance de la garantie correspondant aux manquements de l'assuré aux obligations légales et réglementaires relatives à la prévention du blanchissement de capitaux,

- juger, moyennant une interprétation restrictive de la clause de déchéance de la garantie stipulée aux termes des conditions générales de la police d'assurance n° AG126706, qu'elle est inopposable à monsieur [W]-[H] [C] en ce qu'elle vise, outre son défaut d'acceptation expresse par l'assuré et sa rédaction pathologique en des termes non apparents, des cas généraux de déchéance de la garantie correspondant aux manquements de l'assuré aux obligations légales et réglementaires en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux,

- condamner la société Darag Deutschland AG (DAG) venant aux droits de la compagnie d'assurances Sada assurance à payer à [W]-[H] [C] à titre d'indemnité compensatrice de son préjudice matériel subi suivant le vol de son véhicule Jaguar Land Rover Lmited immatriculé [Immatriculation 6] survenu le 17 juin 2017 à concurrence d'un montant correspondant à son prix d'acquisition d'un montant de soixante-neuf mille euros (69.000,00€) qui sera majorée des intérêts de retard à liquider au taux légal à compter de la première mise en demeure valant demande de paiement,

- condamner, la société Darag Deutschland AG (DAG) venant aux droits de la compagnie d'assurances Sada assurance à payer à Monsieur [W]-[H] [C] au titre de l'indemnisation de vol incident de son blouson painting en croco une indemnité d'un montant de vingt-deux mille cinq cents euros 22 500 euros qui sera majorée des intérêts de retard à liquider au taux légal à compter de la première mise en demeure valant demande de paiement,

- condamner, la société Darag Deutschland AG (DAG) venant aux droits de la compagnie d'assurances Sada assurance à payer à Monsieur [W]-[H] [C] au titre de l'indemnisation du préjudice financier causé par le retard d'indemnisation du vol de son véhicule une indemnité d'un montant de seize mille six cent dix-neuf euros quatre-vingt douze centimes (16 619.92 euros) qui sera majorée des intérêts de retard à liquider au taux légal à compter de la première mise en demeure valant demande de paiement,

- condamner la société Darag Deutschland AG (DAG) venant aux droits de Sada assurance aux entiers dépens d'instance et à payer à monsieur [W]-[H] [C] la somme de cinq mille euros 8.000 euros (sic) au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouter la société Darag Deutschland AG (DAG) venant aux droits de la compagnie d'assurances de l'ensemble de ses demandes, fins, exceptions et conclusions.

Vu les conclusions de la société Darag Deutschland AG en date du 23 décembre 2022, demandant de :

Vu les articles L.112-6, L.152-4, et D.112-3 du code monétaire et financier,

Vu les articles 464 et 465 du code des douanes,

Vu l'article 1353 du code civil,

Vu les conditions générales et dispositions particulières du contrat liant les parties en date du 17 février 2017,

- confirmer la décision déférée en son intégralité,

- débouter Monsieur [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Monsieur [C] au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens.

Vu la révocation de l'ordonnance de clôture du 1er septembre 2022.

Vu la clôture du 12 janvier 2023.

Motifs

Monsieur [C] a acheté un véhicule Land Rover au prix de 69 000 € le 7 novembre 2016. Il a souscrit une police d'assurance le 17 février 2017 auprès de la société Sada assurances par l'intermédiaire d'un courtier Netvox.

Il a déclaré, le 17 juin 2017, au commissariat de police d'[Localité 5] le vol de son véhicule Land Rover sur le lieu de son ancien domicile.

Il a par ailleurs déclaré le sinistre par lettre recommandée à son assureur le 17 juin 2017.

Le 26 juin 2017, le courtier procédait à l'enregistrement de sa déclaration en lui demandant de fournir des documents complémentaires.

Les 30 novembre 2018 et 7 janvier 2019, Monsieur [C] demandait à son assureur l'indemnisation de son sinistre par mise en demeure et celui-ci lui répondait au visa notamment des dispositions du chapître E1 des conditions générales en lui opposant un avis de déchéance de garantie pour le motif suivant : « lors de l'instruction de votre dossier sinistre conformément à la législation relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme qui nous impose d'être vigilant, nous avons été a amenés à vous demander l'origine et la provenance des fonds ayant permis l'acquisition de votre véhicule...... vous n'avez pas été en mesure de justifier sereinement de la provenance des fonds vous ayant permis l'acquisition du Land Rover immatriculé H3 125 SZ. En conséquence, nous ne pouvons pas intervenir dans le cadre de la procédure d'indemnisation' l'étude des éléments de votre dossier nous amène à prononcer la déchéance de votre garantie pour ce sinistre' »

C'est dans ces conditions qu'il a donc saisi le tribunal judiciaire de Nîmes en sollicitant son indemnisation, critiquant la déchéance ainsi opposée par son assureur.

Dans le jugement attaqué, le tribunal a retenu que Monsieur [C] avait signé une page des conditions particulières sur laquelle figurait la mention qu'il a déclaré avoir reçu et pris connaissance des conditions générales ; que la clause de déchéance invoquée figure en caractère entièrement gras dans les conditions générales de manière très apparente, qu'elle ne tend pas à frapper l'assuré de déchéance pour violation des lois et règlements, mais seulement pour fausse déclaration sur la nature, les causes, les circonstances et les conséquences du sinistre ainsi que la valeur du véhicule assuré et que cette clause prévoit précisément que l'assuré doit « justifier de manière incontestable avec certitude le prix d'achat réel du véhicule ».

Sur le bien-fondé du refus de garantie, il a été retenu que Monsieur [C] n'avait déposé le modèle Cerfa de déclaration d'achat de son véhicule à l'étranger que postérieurement au sinistre, le 30 octobre 2017, qu'il ne justifiait pas de la provenance du financement dont il indique qu'il s'est fait en liquide et qu'il était dans l'incapacité de rapporter le paiement effectif du prix ; que par suite, l'assureur a pu légitimement refuser de l''indemniser.

Au soutien de son appel, Monsieur [C] formule, en premier lieu,dans le développement de ses conclusions, une demande de nullité du jugement, cependant non reprise dans le dispositif de ses écritures.

Il fait, ensuite, essentiellement valoir un défaut de motivation de la décision déférée en exposant que le tribunal s'est déterminé par voie de suppositions sans vérifier que la clause de déchéance était stipulée dans des termes apparents dans les conditions générales et sans s'assurer de l'effectivité de leur communication au moment de la souscription du contrat; il affirme que le tribunal s'est mépris sur la qualification et l'interprétation de la clause et que la déchéance opposée par l'assureur est fondée sur la présomption du manquement de l'assuré aux dispositions du code monétaire et financier qui sont des manquements à des normes de portée générale ; que par ailleurs, il résulte de la facture d'achat que le prix de 69 000 € a été payé comptant en espèces ; que la police d'assurance ne réserve pas l'octroi de la garantie à la justification du mode de paiement et ne fait pas de la preuve de l'origine des fonds une condition déterminante de l'engagement de l'assureur ; que l'assureur ne pouvait ignorer le mode d'acquisition et de financement du véhicule qui a fait l'objet d'une première déclaration Cerfa le 8 décembre 2016 ; que le tribunal a donné à la clause de déchéance une portée qu'elle n'a pas dans la police et que la question du blanchiment des capitaux ne peut, tout au plus, que faire l'objet d'un signalement aux autorités.

Il réitère qu'il n'a jamais consenti aux conditions générales de la garantie qui ne lui ont jamais été communiquées ; qu'il a souscrit sa déclaration de sinistre dans le délai et a fourni tous les documents justificatifs demandés.

Il ajoute que le stipulant dans les contrats d'adhésion ne peut bénéficier d'une clause qu'à la condition qu'il justifie de son acceptation, ce qui est rappelé par l'article 1119 Code civil ; que cette obligation est d'autant plus renforcée que le contrat a été passé par l'intermédiaire d'un courtier à qui il incombe de justifier de ses obligations d'information.

Il rappelle que sont nulles les clauses générales frappant de déchéance l'assuré en cas de violation des lois et règlements à moins que cette violation ne constitue un crime ou un délit intentionnel et que l'assureur n'établit pas à son encontre un crime ou un délit intentionnel ; que la méconnaissance de l'obligation déclarative prévue par l'article L 152 ' 1 du code monétaire et financier ne constitue ni un crime, ni un délit intentionnel ; que la clause de déchéance évoquée ne subordonne pas la réalisation du droit de garantie de l'assuré à la licéité des conditions de financement du bien et que la déchéance opposée est sans fondement contractuel et en tant que telle inopposable ; que les modalités de paiement du véhicule ne peuvent être invoquées pour tenir en échec son droit à l'indemnisation et qu'en l'absence de la preuve de sa mauvaise foi, la déchéance de garantie ne peut lui être opposée.

Il souligne que par ailleurs que l'assurance ne conteste pas la réalité de la transaction, ni la valeur marchande du véhicule.

L'assureur fait, en substance, valoir au sujet de la portée de cette clause, qu'il est soumis aux dispositions du code monétaire et financier au titre notamment de la lutte contre le blanchiment et qu'il est apparu que le véhicule avait été acquis en fraude de la législation française vu son règlement en espèces pour la somme de 69 000 €, ce qui lui interdisait d'avoir une relation d'affaires avec l'assuré et ce qui aurait dû conduire à la saisie ou consignation du bien ; que l'assureur était bien fondé à opposer le refus de garantie dans la mesure Monsieur [C] ne justifiait pas avec certitude le prix d'achat réel du véhicule alors que les conditions générales prévoyaient dans une clause stipulant la déchéance de l'assuré mentionnée en caractères gras au chapitre E que l'assuré devait déclarer justifier de manière incontestable avec certes prix d'achat réel du véhicule ainsi que le kilométrage parcouru au jour du sinistre de sorte qu'il était parfaitement en mesure de demander des explications sur l'origine des fonds ; que la déclaration de valeur et de prix d'achat doit être sincère et appuyée de justificatifs que l'assureur est en droit de solliciter pour mettre en 'uvre sa garantie et qu'en l'espèce, il apparaissait que le véhicule était acquis en fraude de la législation française avec un paiement de son prix en espèces qui ne pouvait être justifié.

À titre subsidiaire, l'assureur fait valoir que le véhicule a subi une décote entre son jour d'achat, le 7 novembre 2016, et le jour du vol, le 17 juin 2017, ne serait-ce que par le kilométrage parcouru, la police précisant que la valeur du véhicule est celle fixée à dire d'expert, au jour du sinistre ; que la provenance des fonds ayant permis l'acquisition du blouson déclaré pour 25 000 € n'est pas non plus justifiée alors que Monsieur [C] gagnait 3629 € par mois ; que son préjudice de location n'est pas sérieusement justifié consistant dans des factures de location de véhicules bien postérieurs à la survenance du sinistre ; qu'enfin, le préjudice corporel ne peut être couvert par la police qui ne prévoit son indemnisation que lorsque le véhicule est utilisé comme un moyen de transport, ce qui n'est pas le cas en l'espèce dans la mesure où les blessures ne résultent que de la volonté de Monsieur [C] de s'accrocher au véhicule lorsqu'il lui a été dérobé.

*********

La cour rappellera à titre liminaire qu'elle n'est saisie que des demandes formulées au dispositif des conclusions des parties qui en application de l'article 954 du code de procédure civile, lie la cour que Monsieur [C] n'y formule pas de demande de nullité du jugement ; que la cour n'est donc pas saisie de cette demande de M [C] et que les moyens de ce chef développés par la société d'assurances sont donc sans objet.

Il résulte par ailleurs de l'examen des pièces versées aux débats que Monsieur [C] a signé les conditions particulières et qu'au terme de la page 4 il est indiqué :

« Je reconnais avoir reçu et pris connaissance des documents ci-dessous en vigueur à la date de souscription du contrat dont j'accepte le contenu sans restriction, ni réserve :

' la fiche d'information et de conseil

' les dispositions générales référencées SADA auto AOG N°2 du 1er janvier 2013,

' la convention d'assistance référencée KF2

' les conventions de protection juridique incluse dans les conditions générales.

En apposant la signature au bas du présent, je reconnais que les dispositions générales en vigueur à la date de souscription du contrat et les présentes dispositions particulières constituent mon contrat d'assurance. »

Ce document est signé du 17 février 2017 et la signature est précédée de la mention 'lu et approuvé'.

Il en résulte, ainsi que le tribunal l'a jugé, que Monsieur [C] a bien eu connaissance des conditions générales du contrat d'assurance dont il affirme ainsi qu'il en a reçu un exemplaire et que les dispositions qu'il invoque de l'article 1119 du code civil ont bien été respectées de sorte qu'elles lui sont parfaitement opposables.

Sur le moyen tiré de ce que la clause en litige ne serait pas suffisamment lisible, il résulte de l'examen des conditions générales, qu'elle figure ainsi rédigée en caractères gras au chapitre E au titre des obligations du preneur par ailleurs présentées en caractères ordinaires: « si le preneur d'assurance ou l'assuré ou l'ayant droit de l'un ou de l'autre fait de fausses déclarations sur la nature, les causes, les circonstances et les conséquences du sinistre ainsi que sur la valeur du véhicule assuré (à ce titre, l'assuré doit déclarer et justifier de manière incontestable avec certitude le prix d'achat réel du véhicule ainsi que le kilométrage parcouru au jour du sinistre), il est entièrement déchu de tout droit à la garantie pour ce sinistre ».

Cette clause stipule donc clairement la déchéance de tout droit à garantie en cas de fausse déclaration de l'assuré, non seulement sur le sinistre, mais également sur la valeur du véhicule assuré et en prenant la précaution d'exiger à ce titre et expressément la déclaration et la justification de la certitude de son prix réel d'achat.

Par ailleurs elle se présente bien en caractère gras et très apparent sur la page sur laquelle elle figure.

Monsieur [C] invoque encore le moyen au terme duquel en application de l'article L 113-11 du code des assurances, sont nulles les clauses générales frappant de déchéance l'assuré en cas de violation des lois ou règlements, à moins que cette violation ne constitue un crime ou un délit intentionnel.

Toutefois, la clause litigieuse, dont la rédaction a été ci-dessus rappelée ne saurait être considérée comme une clause générale sanctionnant l'assuré en cas de violation des lois et règlements, s'agissant, au contraire, d'une clause envisageant la déchéance dans la circonstance y précisément définie de fausse déclaration sur la nature, les causes, les circonstances et les conséquences du sinistre ainsi que sur la valeur du véhicule assuré.

La déchéance a, par ailleurs, été notifiée par l'assureur au dernier domicile connu par lui de Monsieur [C] figurant sur son contrat et le courrier qui lui a été envoyé n'est pas revenu comme 'n'habitant pas à l'adresse indiquée'.

Les dispositions du code monétaire et financier sur le blanchiment d'argent également invoquées par l'assureur résultent de l'ordonnance du 1er décembre 2016 qui a transposé la quatrième directive européenne du 20 mai 2015 visant à renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

En l'espèce, la police d'assurance en cause a été souscrite le 17 février 2017 et le sinistre a été déclaré le 17 juin 2017.

Ces dispositions sont donc applicables au litige en cause.

Il en résulte que l'assureur est soumis à ces dispositions du code monétaire et financier, notamment les articles L561-2 à L561-8 qui lui imposent de vérifier l'origine des fonds et qui lui interdisent de maintenir aucune relation d'affaires avec un client qui n'est pas en mesure de justifier de la provenance des capitaux utilisés dans sa relation d'affaires, cette obligation de vigilance constante et d'examen attentif des opérations effectuées valant pendant toute la durée de la relation d'affaires (article L 561 ' 6 du code monétaire et financier).

Or, en l'espèce, il résulte de la facture d'achat, produite par Monsieur [C], que celui-ci a payé le véhicule en cause en Allemagne un prix de 69 000 €, l'appelant citant, lui-même, ce document dans son bordereau comme une attestation de règlement en espèces, sans donc pouvoir justifier de l'origine des fonds, ni de la réalité du paiement, et ayant par ailleurs répondu, dans un mail du 18 octobre 2017, à son assureur qui l'interrogeait sur la provenance des fonds engagés pour l'acquisition : « Bonjour, les paiements ont été faits en plusieurs fois et en espèces ; à part mes relevés de compte de cette période, je n'ai pas conservé d'autres justificatifs d'autant plus que mes sources et entrées d'argent sont diverses » ; également, sa déclaration Cerfa, est certes signée par lui le 8 décembre 2016, mais qu'il ne conteste pas son dépôt au 30 octobre 2017, postérieurement au litige ; que par suite l'assureur, qui, en outre, avait expressément rappelé au contrat qu'il est légalement tenu d'effectuer au titre de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme des contrôles qu'il peut conduire à tout moment en demandant des explications et justificatifs, y compris sur l'acquisition des biens assurés, a pu, à bon droit, conformément à la fois aux obligations édictées par les textes ci-dessus rappelés du code monétaire et financier, et aussi à celles de son contrat, refuser d'exécuter aucune opération d'indemnisation de son assuré à la suite du sinistre subi .

Il sera, en dernier lieu, observé que le moyen tiré de ce que la déclaration de sinistre a été régulièrement faite est dans ces conditions inopérant; que compte tenu de la position de l'assureur dès le départ et de ses demandes de justification du prix réel payé il ne peut être allégué qu'il ne conteste pas la valeur du véhicule; qu'il n'est pas nécessaire, pour l'application des textes du code monétaire et financier et de leurs sanctions, de prouver l'infraction de blanchiment de capitaux ; qu'il suffit, en effet, qu'il existe un caractère douteux sur l'origine du financement de l'acquisition, ce qui est le cas en l'espèce pour l'assureur auprès duquel aucun justificatif n'a été produit quant à l'origine des fonds ayant servi au financement, de sorte que Monsieur [C] est également mal fondé à prétendre l'assureur irrecevable pour ne pas établir le caractère douteux de l'origine des fonds ; que la fausse déclaration suffit à justifier la mise en 'uvre d'une clause de déchéance et que le moyen de ce chef n'est pas pertinent au regard de la clause qui en l'espèce, lie les parties et prévoit précisément «la fausse déclaration sur la valeur du véhicule assuré (à ce dernier titre, l'assuré doit déclarer est justifié de manière incontestable avec certitude le prix d'achat réel du véhicule ... »); enfin, que le grief de M [C] à l'égard du courtier pour défaut de conseil ou d'information est vain, celui-ci n'ayant pas été appelé en la cause.

Le jugement sera donc confirmé et Monsieur [C] sera débouté des fins de son recours.

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

Par ces motifs

La cour, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Rejette toutes les demandes de Monsieur [C] et confirme le jugement en toutes ses dispositions,

y ajoutant :

Condamne Monsieur [C] à verser à la société Darag Deutschland AG venant aux droits de la société SADA assurances la somme de 1500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [C] aux dépens .

Arrêt signé par la présidente et la greffière,

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/00428
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;21.00428 ?
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