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03/04/2023 | FRANCE | N°22/03081

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 03 avril 2023, 22/03081


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/03081 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ISET



NG



PRESIDENT DU TJ DE PRIVAS

18 août 2022

RG:22/00124



[N]



C/



[L]





Grosse délivrée

le

à















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B





ARRÊT DU

03 AVRIL 2023





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de PRIVAS en date du 18 Août 2022, N°22/00124



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,



GREFFIER :



Madame...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/03081 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ISET

NG

PRESIDENT DU TJ DE PRIVAS

18 août 2022

RG:22/00124

[N]

C/

[L]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 03 AVRIL 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de PRIVAS en date du 18 Août 2022, N°22/00124

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 03 Avril 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [B] [N]

né le 12 Novembre 1971 à [Localité 13]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Frédéric DEMOLY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'ARDECHE

INTIMÉ :

Monsieur [O] [L]

né le 28 Mars 1957 à [Localité 13]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Jean LECAT de la SCP D'AVOCATS BERAUD LECAT BOUCHET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'ARDECHE

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 30 janvier 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 03 Avril 2023,par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [O] [L], qui est propriétaire des parcelles cadastrées section [Cadastre 9], [Cadastre 4] et [Cadastre 6] sur le territoire de la commune [Localité 1], suite à un acte de donation-partage en date du 6 novembre 1997, et qui a acquis la parcelle [Cadastre 11] en octobre 2020, a effectué en février 2022 des travaux d'enrochement de ses terres pour aménager un passage pour accéder à ce dernier terrain.

Monsieur [B] [N], exploitant agricole depuis 1995 et propriétaire des parcelles cadastrées section [Cadastre 12], [Cadastre 5], [Cadastre 10], [Cadastre 7] et [Cadastre 8] sur la même commune, reproche à M. [L] d'avoir par ses travaux interrompu le tracé de la servitude dont il disposait pour accéder à ses terrains, plantés d'oliviers et de cerisiers.

Par exploit d'huissier du 21 avril 2022, M. [B] [N] a ainsi assigné M. [O] [L] devant le président du tribunal judiciaire de Privas, statuant en référé, afin que soit ordonné à Monsieur [L], sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la présente assignation, de remettre les lieux, et particulièrement le chemin, dans son état antérieur aux travaux qu'il a fait réaliser au cours de l'hiver 2021-2022, outre de le voir condamner à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Par ordonnance contradictoire du 18 août 2022, le président du tribunal judiciaire de Privas, statuant en référé, a :

-dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M. [B] [N] tendant à imposer à M. [O] [L] de remettre les lieux, et plus particulièrement le chemin, dans son état antérieur ;

-dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties ;

-laissé les dépens de l'instance à la charge de M. [B] [N].

Par déclaration du 20 septembre 2022, M. [B] [N] a interjeté appel de cette ordonnance en ce qu'elle l'a débouté de sa demande principale.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 6 janvier 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, M. [B] [N], appelant, demande à la cour, au visa des articles 808 et 809 du code de procédure civile, de :

-déclarer recevable et bien fondé son appel,

-réformer l'ordonnance dont appel,

-ordonner à M. [L], sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la présente assignation, de remettre les lieux, et particulièrement le chemin décrit au procès-verbal de constat du 25 mars 2022 et au rapport d'expertise amiable du 14 avril 2022, dans son état antérieur aux travaux qu'il a réalisés ou fait réaliser au cours de l'hiver 2021-2022,

-condamner M. [L] à verser à M. [N] une somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers les dépens d'instance et d'appel.

Au soutien de son appel, M. [B] [N] expose tout d'abord que le trouble causé par M. [L] à sa propriété est manifestement illicite du fait de l'acte sous-seing privé du 30 janvier 1952 qui trace et valide une servitude de passage entre les propriétaires de l'époque, de l'usage constant du chemin obstrué pour desservir les parcelles enclavées depuis 1952, de l'impossibilité matérielle d'accéder à ses parcelles par un autre chemin que le chemin obstrué, de la mauvaise foi de M. [L] qui ne justifie d'aucun intérêt autre que celui de lui nuire, puisqu'il ne peut plus accéder à ses arbres fruitiers avec ses engins agricoles, le chemin rural situé au sud de ses parcelles n'ayant pas un largeur suffisante lui permettant d'accéder à ses végétaux (cerisiers, oliviers et vignes) avec un engin agricole.

Il indique également que l'urgence est justifiée par le péril subi par ses récoltes dont l'essentiel est perdu, faute d'entretien et d'exploitation conforme aux besoins des essences en place.

Enfin, il fait savoir que l'ensemble des pièces produites aux débats permettent de mettre en évidence l'usage très ancien du chemin obstrué par M. [L] pour accéder à ses parcelles depuis plus de trente années ainsi que l'impossibilité matérielle d'y accéder par un autre chemin avec des engins motorisés.

M. [O] [L], en sa qualité d'intimé, par ses dernières conclusions en date du 27 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, de :

-confirmer l'ordonnance de référé rendue le 18/08/2022,

-débouter M. [N] de l'intégralité des demandes, fins et prétentions présentées à son encontre,

-condamner M. [N] à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

L'intimé soutient, tout d'abord, que la demande présentée par M. [N] se heurte à une contestation sérieuse et est injustifiée, en l'absence de dommage imminent et de trouble manifestement illicite au sens des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile. Il considère que l'acte sur lequel se fonde l'appelant est trop imprécis (aucun numéro de parcelles) et n'a pas fait l'objet d'un acte authentique ou d'une publication aux hypothèques. Il conteste l'existence d'une preuve relative à l'usage trentenaire et nie l'état d'enclave des parcelles de l'appelant. Il expose qu'un chemin rural permet l'accès aux parcelle de M. [N] sans passer par les parcelles lui appartenant au regard de l'existence du chemin rural.

Il réfute l'existence d'un dommage imminent ou d'une trouble manifestement illicite, dès lors que l'appelant n'exploite pas ses parcelles au regard de l'état d'abandon de ces dernières et des plantations non entretenues tel qu'il ressort du procès-verbal de constat établi par Maître [Y] le 03 mars 2022.

Tenant ces éléments, il entend souligner que l'appelant ne se prévaut de la violation d'aucune règle de droit qu'il lui appartient de viser et surtout, ne démontre l'existence d'aucune servitude de passage, ni de trouble manifestement illicite.

La clôture de la procédure est intervenue le 30 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 6 février 2023, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, le 3 avril 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

L'article 835 du code de procédure civile, applicable en l'espèce, dispose :

« Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite (...). »

Le trouble manifestement illicite s'entend de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

En l'espèce, l'appelant sollicite le rétablissement d'un passage sur la parcelle [Cadastre 11] par un chemin officialisé au vu un document manuscrit signé le 30 janvier 1952 par tous les propriétaires de l'époque leur permettant d'accéder à un ensemble de terrains. Cet écrit est signé par différente personnes, sans qu'un rapprochement en relation avec leur propriété, le numéro des parcelles en cause et le tracé du chemin ne soit possible. En revanche, l'appelant produit un rapport d'expertise de protection juridique qui retrace ce chemin, un constat du 25 mars 2022 qui permet de suivre matériellement la voie de circulation existante, coupée par celle aménagée par M. [L], et des attestations de M. [D], M. [W], Mme [K] et M. [M], qui confirment l'usage de ce chemin depuis plusieurs années par les agriculteurs, et notamment, la famille [N], pour accéder à ses parcelles.

Certes, le document manuscrit n'est pas en l'état exploitable, en raison de son imprécision. Il ne peut servir de titre conventionnel, d'autant qu'il n'est pas rapporté la preuve que les auteurs de M. [L] l'auraient signé.

Toutefois, M. [N] soutient qu'il ne dispose pas d'un autre accès pour pouvoir entrer dans ses parcelles avec un engin agricole, étant précisé qu'il est exploitant agricole.

Il verse aux débats, pour étayer ses affirmations, le procès verbal de constat du 25 mars 2022 aux termes duquel il est avéré que le chemin communal longeant au sud les parcelles de M. [N] n'est pas praticable avec un véhicule, tant en direction de l'est que de l'ouest, en considération de son étroitesse et des murs en pierres sèches qui le bordent. De plus, un certificat du maire de la commune de [Localité 1] en date du 28 juillet 2022 confirme que le chemin rural sis [Adresse 14], menant aux parcelles [Cadastre 10], [Cadastre 12], [Cadastre 7] et [Cadastre 8] n'est pas praticable en tracteur et que la commune n'a pas la possibilité, ni l'intention de l'élargir.

Dans ces conditions, il n'est pas à exclure que M. [N] puisse se prévaloir d'un titre légal résultant de l'enclave partielle de ses terrains et de la prescription de l'assiette du passage qu'il revendique, mais cette appréciation relève exclusivement du juge du fond et n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, raison pour laquelle il ne sera pas fait droit à la demande de M. [N] devant cette juridiction, le trouble qu'il revendique ne pouvant être, en l'état, qualifié de manifestement illicite.

La décision de première instance, dans ses seules dispositions déférées à la connaissance de la cour, sera confirmée.

M. [N], qui succombe, sera condamné au paiement des dépens d'appel, le sort des dépens de première instance ne faisant pas l'objet du recours. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il sera mis à la charge de M. [N] la somme de 800 euros en contrepartie des frais irrépétibles que M. [L] a dû engager dans l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, par décision contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Dans les limites de l'appel,

Confirme les dispositions déférées de l'ordonnance rendue le 18 août 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Privas,

Y ajoutant, invite M. [N] à mieux se pourvoir,

Condamne M. [N] à payer à M. [L] la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [N] aux dépens de l'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/03081
Date de la décision : 03/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-03;22.03081 ?
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