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23/03/2023 | FRANCE | N°21/03819

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 23 mars 2023, 21/03819


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 21/03819 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IHAJ



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

30 août 2021

RG:19/01629



[S]

[C]



C/



[E]

[U]







































Grosse délivrée

le

à Me

Hilaire-Lafon

Selarl Delran...















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 23 MARS 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 30 Août 2021, N°19/01629



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Anne DAMPFHOF...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/03819 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IHAJ

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

30 août 2021

RG:19/01629

[S]

[C]

C/

[E]

[U]

Grosse délivrée

le

à Me Hilaire-Lafon

Selarl Delran...

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 23 MARS 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 30 Août 2021, N°19/01629

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,

Mme Laure MALLET, Conseillère,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Mars 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

Madame [D] [C]

tant en son nom personnel qu'es qualité d'héritier de son défunt

mari Monsieur [G] [S].

née le 12 Janvier 1960 à [Localité 8]

[Adresse 1]

[Localité 3] / BELGIQUE

Représentée par Me Philippe HILAIRE-LAFON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Madame [K] [E]

née le 06 Mai 1985 à [Localité 2]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Arthur GUIMET de la SELARL GUIMET & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de LYON

Monsieur [N] [U]

né le 16 Octobre 1973 à [Localité 11]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Arthur GUIMET de la SELARL GUIMET & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de LYON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 05 Janvier 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 23 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

Exposé :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nîmes le 30 août 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

' déclare [N] [U] et [K] [E] responsables in solidum sur le fondement de l'article 1792 du Code civil des désordres relatifs au carrelage, aux infiltrations au niveau du sol et de la toiture,

' les déclare responsables in solidum sur le fondement des articles 1103 et suivants du Code civil des désordres relatifs à la terrasse,

' les condamne in solidum à verser à Monsieur [S] et à Madame [C] la somme de 44'700 € TTC au titre de la réparation des désordres,

' les condamne à verser la somme de 2000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile à Monsieur [S] et à Madame [C] ainsi qu'à supporter les dépens,

' rejette la demande de Monsieur [S] et de Madame [C] en indemnisation au titre du dol et du défaut de loyauté contractuelle,

' rejette les demandes plus amples,

' ordonne l'exécution probatoire.

Appel de cette décision a été interjeté par Monsieur [S] et Madame [C] le 20 octobre 2021.

Aux termes des dernières conclusions prises par Madame [C] le 18 mars 2022 en son nom personnel et en sa qualité d'héritière de son mari décédé, Monsieur [S], il est demandé à la cour de :

' réformer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation formée au titre du dol et du défaut de loyauté contractuelle et statuant à nouveau,

' juger que Madame [E] et Monsieur [U] ont commis un dol en cachant aux acquéreurs les courriers de la commune de [Localité 10] des 9 décembre 2014 et 8 janvier 2015 ainsi que les projets de travaux de voirie, qu'ils ont failli à leur obligation contractuelle de loyauté et les condamner à verser à Madame [C] la somme de 40'000 € au titre du dol et la somme de 20'000 € pour exécution déloyale des conventions,

' à titre subsidiaire sur les conséquences du dol, s'il existait le moindre doute sur le montant du préjudice,

' rejeter l'argumentation des intimés visant à faire juger la demande d'expertise irrecevable pour la première fois en cause d'appel,

' nommer un expert avec pour mission notamment de décrire et chiffrer les travaux nécessaires à l'édification d'un mur de soutènement entre la propriété et la voie communale, les frais devant être avancés par les intimés,

' déclarer recevable mais infondé l'appel incident des intimés et le rejeter,

' confirmer le jugement en ce qu'il a condamné à la réparation des désordres pour la somme de 44'700 €,

' condamner in solidum les intimés au paiement de la somme de 10'000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens, y compris les frais de l'expertise, de constat et de référé.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 4 octobre 2022, Madame [E] et Monsieur [U] demandent à la cour de :

' confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande au titre du dol et du défaut de loyauté,

' rejeter la demande d'expertise devant la cour comme une demande nouvelle et si elle était jugée recevable, la rejeter comme inutile,

' faire droit à leur appel incident et infirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité au titre du carrelage, des infiltrations au niveau du sol et de la toiture, et au niveau de la terrasse en bois,

' statuant à nouveau, rejeter toutes ces demandes,

' à titre subsidiaire, dire que les sommes auxquelles ils pourraient être condamnés ne seront pas supérieures au montant des devis présentés par eux,

' infirmer le jugement au titre de la condamnation par application de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

' confirmer le jugement pour le surplus,

' rejeter les demandes d'article 700 et de dépens,

' condamner Madame [C] aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction.

La procédure a été clôturée le 5 janvier 2023.

Motifs

Le jugement déféré a été rendu dans le cadre d'un litige opposant M [U] et Mme [E], vendeurs, à Monsieur [S] et Madame [C], acquéreurs, à la suite de la vente d'un immeuble par acte du 17 janvier 2017, ces derniers se plaignant de l'apparition de désordres, ayant fait dresser un constat d'huissier le 18 janvier 2018 et recherchant, en conséquence, la responsabilité de leurs vendeurs .

Une expertise était ordonnée le 4 juillet 2018 avec une extension de mission le 23 janvier 2019.

Le jugement a retenu la responsabilité des vendeurs tantôt sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, tantôt sur le fondement contractuel.

Il n'est pas contesté par les vendeurs que la maison a été édifiée par eux.

Aux termes de l'article 1792 du Code civil, « tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage des dommages même résultant d'un vice du sol qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

En application de l'article 1792-1, est réputée constructeur toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.

Madame [C] est désormais seule propriétaire du bien en cause, tenant ses droits, à l'origine avec son mari à ce jour décédé, de l' acte de vente sus visé, passé le 17 janvier 2017 et portant sur une maison d'habitation de plain-pied avec terrain attenant, cadastrés section A numéro [Cadastre 6] et [Cadastre 7], l'acte authentique faisant suite à un compromis du 4 novembre 2016.

Il était inscrit dans le compromis qu'il résultait d'un courrier du maire du 20 octobre 2016 y annexé que la conformité sera donnée sous réserve que les travaux convenus (démolition du mur de clôture remplacée par un grillage léger réalisation d'un soutènement de l'angle sud de l'habitation soient exécutés et qu'il soit donné aux acquéreurs l'information concernant la tenue des terres du talus en limite de voirie communale. Que la réalisation des présentes est soumise à la condition suspensive que la procédure en cours relative au défaut d'implantation de l'habitation par rapport au plan du permis de construire soit abandonnée. Que comme conséquence de la réalisation de ladite condition, il sera porté à l'acquéreur l'obligation faite au propriétaire du bien de maintenir ses terres en limite de la voirie communale actuellement existante ou suite à un élargissement de ladite voirie.

L'acte authentique stipule cet égard :

« les parties rappellent le courrier de Monsieur le maire de [Localité 10] en date du 20 octobre 2016 demeuré annexé dans le cadre de la conformité sur l'habitation objet des présentes et dans lequel il est mentionné que la conformité sera donnée sous réserve que les travaux convenus... soient exécutés.

D'autre part, Monsieur le maire demande à travers ce courrier qu'il soit donné aux acquéreurs l'information concernant la tenue des terres du talus en limite de voirie communale.

Les acquéreurs déclarent donc expressément avoir pris acte de cette information.

Et comme conséquence l'acquéreur s'oblige en qualité de propriétaire du bien à maintenir ses terres en limite de la voirie communale actuellement existante ou suite à un élargissement de ladite voirie.

Enfin, il ressortait de ce courrier que la commune poursuivait la procédure relative au défaut d'implantation de l'habitation par rapport au plan déposé dans le permis de construire.

Sur ce dernier point et sur la conformité relative à la construction suivant le permis de construire..., le vendeur a produit un courrier de Monsieur le maire de [Localité 10] du 6 décembre 2016 demeurant annexé aux présentes qui a stipulé'....,que « la commune abandonne la procédure relative à l'infraction ainsi que toute poursuite et déclarer(sic) la conformité de l'habitation. »

Les vendeurs écrivent dans leurs conclusions, page 3, que les travaux de soutènement étaient indispensables pour rendre à la maison propre à sa destination d'habitation car il existait un risque d'effondrement de l'angle est du bâtiment implanté au-dessus d'un talus bordant la voirie communale ; que c'est ainsi qu'ils ont missionné un bureau d'études en octobre 2015 et que les travaux ont été ensuite réalisés sur une autorisation du 2 novembre 2016 ; qu'à la suite de ces travaux, le 6 décembre 2016, la mairie a donc attesté de l'achèvement des travaux et de leur conformité au permis de construire.

En l'état de l'appel principal et de l'appel incident tels que portés devant la cour, l'ensemble des débats tels qu'envisagés devant le premier juge sera repris, tant sur la question de la responsabilité des vendeurs que ceux-ci contestent à nouveau, que sur celle du dol et du défaut de loyauté, écartés par le premier juge, lequel est donc critiqué de ce chef par les appelants.

Sur les demandes formées par l'appelante à titre principal et fondées sur le dol et le défaut de loyauté, Madame [C] fait essentiellement valoir la réticence de leur vendeur prétendant que l'illicéité du silence est née de l'inégalité de l'information des parties quant à une qualité du bien vendu.

Elle reproche à leur vendeur de ne pas avoir informé les acquéreurs des courriers de la commune en date du 9 décembre 2014 et du 8 janvier 2015 qui selon elle, font apparaître, sans l'ombre d'un doute, que l'aménagement et l'agrandissement du chemin sont une certitude connue depuis plusieurs mois avant la signature du compromis et non une simple éventualité, soulignant que la mairie a, elle-même, acheté de leurs propres vendeurs une parcelle en vue d'agrandir la voirie communale en décaissement et que par suite de ces travaux, leur maison se trouve aujourd'hui à la pointe de la route, cette situation rendant nécessaire la construction d'un mur de soutènement qui va entraîner des frais importants ; que les vendeurs ont caché cette situation dont ils avaient parfaitement connaissance à leurs acheteurs ; qu'il ne s'agit pas d'une responsabilité délictuelle, mais d'une responsabilité contractuelle et qu'il ne faut pas confondre les informations données dans le compromis et dans l'acte notarié qui se limitaient à rappeler leur obligation de maintenir la terre ainsi que le fait que le défaut d'implantation de l'immeuble n'empêchait plus la conformité de la construction qui avait été délivrée par la commune avec celles contenues aux correspondances du 9 décembre 2014 et du 8 janvier 2015 qui permettaient d'appréhender le projet de modification de la voirie et les conséquences sur l'immeuble vendu, ces documents ne leur ayant donc jamais été transmis avant la vente, soulignant à cet égard que son reproche n'est pas celui de ne pas avoir été informée de l'imminence du projet, mais celui de n'avoir pas été avisée de la teneur de celui-ci.

Étant préalablement rappelé que la responsabilité de ce chef encourue est une responsabilité délictuelle, il sera par ailleurs considéré que l'étude de l'ensemble des courriers établis jusqu'au jour de la vente relativement aux travaux à entreprendre permet de retenir que si le courrier du 9 décembre 2014 mentionne le défaut de conformité en lien avec le positionnement de l'habitation à 7 m de l'axe futur de la voirie qui n'est pas respecté de sorte qu'en l'état actuel, la mise au gabarit du [Adresse 9] n'est techniquement pas possible, ce qui expose la construction à un risque de démolition partielle et si dans le courrier du 8 janvier 2015, il est à nouveau stipulé que la mairie a pour objectif d'élargir le chemin et qu'elle prévoit de décaisser totalement la parcelle [Cadastre 5] de sorte que la limite de propriété du bien vendu sera en pied de talus à l'altimétrie du chemin, il demeure :

- que le compromis de vente du 4 novembre 2016 est suffisamment explicite du risque d'élargissement de la voirie en ce qu'il prévoit que la réalisation des présente est soumise à la condition suspensive de l'obtention d'un certificat de conformité ou d'une attestation de la mairie certifiant que la conformité des travaux avec le permis n'a pas été contestée et qu'il est précisé à ce propos qu'il résulte d'un courrier de la mairie du 20 octobre 2016 annexé que la conformité sera donnée sous réserve que les travaux convenus (démolition du mur de clôture remplacée par un grillage léger et réalisation d'un soutènement de l'angle Sud de l'habitation) soient exécutés et qu'il soit donné aux acquéreurs l'information concernant la tenue des terres du talus en limite de la voirie communale, qu'il est enfin expressément donné connaissance à l'acquéreur de l'obligation faite au propriétaire du bien de maintenir ses terres en limite de la voirie communale actuellement existante ou suite à un élargissement de ladite voirie ,

- que ces mêmes informations sont exactement reprises à l'acte authentique,

de sorte que le projet d'élargissement a été suffisamment ainsi porté à leur connaissance ainsi que la nécessité pour le propriétaire de maintenir ses terres en limite de la voirie communale dans son état existant ou suite à un élargissement et que l'ensemble de ces éléments qui vise donc très clairement à la fois la nécessité de réalisation des travaux par rapport au problème de conformité de l'habitation en regard du permis de construire et tout aussi clairement et explicitement la situation particulière de la voirie communale, non seulement dans son état existant, mais également par rapport au projet de son élargissement, les a ainsi suffisamment informés sur l'élément essentiel et déterminant de leur consentement que constituaient la possibilité d'un élargissement de la voirie communale et les conséquences sur la propriété achetée quant à sa proximité et sa situation avec la voirie et quant à l'obligation qui en résultait pour les futurs propriétaires de contenir leur terre, ces données laissant donc augurer de la nature des travaux à leur charge, peu important qu'ils n'y soient pas autrement définis quant à leur teneur, ce qui, en revanche, ne relevait pas d'un élément essentiel de leur consentement.

Aucune réticence dissimulation, ni réticence dolosive, ni par suite aucun manquement à leur obligation de loyauté ne peuvent être retenus et le jugement sera de ce chef confirmé .

Sur le second débat qui concerne la responsabilité des vendeurs au regard des malfaçons invoquées et qui a été jugée par le tribunal, tant au regard des articles 1792 et suivants du Code civil qu'au regard de la responsabilité contractuelle de droit commun, le premier moyen des intimés est tiré de ce que les textes des articles 1792 et suivants du Code civil ne s'appliquent que lorsque l'immeuble est achevé de sorte qu'ils ne seraient pas susceptibles d'être utilement invoqués en l'espèce, prétendant à cet égard que la vente est intervenue avant l'achèvement ; que la vente était parfaite à la date de signature du compromis, mais que le bien vendu n'était pas alors achevé puisque des travaux d'ampleur particulière devaient être encore réalisés, notamment des travaux destinés à sécuriser l'occupation de la maison et à la rendre propre à sa destination d'habitation ; que la notion d'achèvement est une notion matérielle et juridique indépendante de la volonté des parties, de sorte que le vendeur ne peut se prévaloir de ce qu'il considérait le bien comme inachevé à cette date ; que seule, l'attestation d'achèvement des travaux du maire démontre la date d'achèvement.

Or, d'une part, la notion d'achèvement n'est pas exigée pour la mise en 'uvre des dispositions de l'article 1792, seule l'étant la réception, laquelle peut être tacite et procède dans le cas d'espèce où il n'est donc pas contesté que le bien en cause a été construit par son vendeur, de son achèvement, aucune distinction n'existant alors entre le maître de l'ouvrage et le locateur d'ouvrage .

Par ailleurs, si la notion d'achèvement est bien visée à l'article 1792 -1 en ce qu'il mentionne qu'est réputée constructeur toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire, la lecture de l'acte permet à cet égard de retenir que lors du compromis et a fortiori lors de la signature de l'acte authentique, au moment duquel les travaux mentionnés à l'avant-contrat avaient été réalisés, le bien vendu est un bien achevé, la cour relevant sur ce point :

- que la clause ci-dessus citée du compromis a précisément été stipulée au titre d'une condition suspensive quant à l'obtention du certificat de conformité,

- qu'il y était de ce chef exigé la réalisation des travaux (démolition du mur de clôture remplacée par un grillage léger et réalisation d'un soutènement de l'angle sud de l'habitation) et l'abandon de la procédure sur le défaut d'implantation de la maison par rapport au plan du permis de construire,

- que le défaut d'achèvement invoqué par les vendeurs ne procéde pas d'un quelconque autre grief que celui tenant à la finalisation de ces travaux avant la réitération du compromis,

de sorte que la stipulation de cette exigence au titre d'une condition vient derechef établir que la vente s'est réalisée sur un bien achevé.

Le premier grief concerne le carrelage.

L'expert retient que la question du carrelage se pose dans le couloir de distribution des chambres et le séjour ; qu'il s'agit d'un carrelage gris 40/ 40 ; que depuis le constat d'huissier du mois de mars 2018, le désordre s'est généralisé en ce que les joints de carrelage éclatent et qu'1/3 des carreaux sonnent creux ; qu'en revanche, les plinthes n'ont pas bougé et n'appellent pas d'observations.

Il relève la présence d'un carreau désolidarisé du sol devant le seuil de porte de l'une des chambres, et en le retournant, il constate l'absence de traces de colle sur sa semelle ainsi que sur la chape sur laquelle il est posé ; il note que les joints ont une largeur de 5 à 9 mm et sont irréguliers, qu'ils se désolidarisent du revêtement et font 3 à 5 mm de profondeur là où ils devraient en faire l'épaisseur du carrelage, soit 15 mm environ.

Ses observations font état d'un manquement aux règles de l'art, concluant que les carrelages ne sont pas posés suivant les prescriptions des matériaux (manque de colle), sans toutefois retenir, ni caractériser d'impropriété de l'ouvrage à sa destination , ni donner d'éléments permettant de caractériser la survenance d'un risque de ce chef certain dans le délai décennal .

Il sera par ailleurs retenu que le carrelage ne saurait être soumis aux dispositions de l'article 1792-2 en ce que simplement posé par un procédé de collage, il ne constitue pas un élément d'équipement indissociable .

Reste, dès lors, à envisager le fondement invoqué par Mme [C] à titre subsidiaire, tiré de la responsabilité contractuelle de droit commun.

À cet égard, la cour observera préalablement

- que rien aux dossiers versés par les parties devant la cour ne démontre le caractère apparent du vice au moment de la vente et ce quand bien même le compromis mentionne que le vendeur s'engage à réparer les carreaux cassés depuis la visite effectuée dès lors que l'acte a été réitéré sans réserve aucune de ce chef et qu'au demeurant, rien nétablit non plus que les acquéreurs connaissaient le vice réel entachant le carrelage tel que procédant, compte tenu des observations expertales, non pas de carreaux qui auraient pu être accidentellement brisés, mais d'un défaut affectant leur pose;

- que les constatations ci-dessus rappelées de l'expert caractérisent suffisamment le manquement du vendeur qui en construisant n'a pas respecté les règles de l'art,

- que ces mêmes constatations établissent que les manquements du vendeur constructeur sont à l'origine du préjudice de l'acquéreur constitué par la nécessité d'effectuer les travaux de reprise qui ont été chiffrés à un coût de 6000 € et qui comprennent la dépose des carreaux et des plinthes, la reprise des murs, la préparation du support, le ragréage, et la fourniture et pose de nouveaux carreaux et de plinthes, ceux-ci étant donc justifiés par les observations de l'expert sur la nature des désordres et la façon d'y remédier, étant au demeurant considéré que les intimés ne combattent pas utilement, se contentant, en effet, de produire un devis inférieur sans pour autant démontrer par quelque explication technique motivée que les travaux prévus à leurs documents de façon très restrictive sont de nature à mettre fin aux désordres et faisant vainement valoir que l'expert ne s'est pas appuyé sur des devis et n'a pas répondu à leurs dires sur cette question, celui-ci ayant au contraire spécifié à la fin de son rapport, et en réponse aux dires du 20 février 2019, que les évaluations qu'il y a données ont été réalisées à partir des tarifs en vigueur et également de devis récents.

Le jugement sera donc confirmé sur le principe de la condamnation à verser de ce chef à Madame [C] la somme de 6000 € TTC.

Le 2e grief concerne les infiltrations.

L'expert constate, en ce qui concerne les infiltrations au sol, que les plinthes dans la chambre se sont décollées et que le parquet flottant s'est déformé sous l'effet de l'humidité. Il situe la cause de l'infiltration dans la dalle de fondation qui se prolonge en dalle de sol intérieur de la maison sur laquelle sont posés les murs de façade.

En ce qui concerne les infiltrations en toiture, il relève, dans la chambre des parents, des traces d'humidité sur 3 m linéaires le long du mur de façade à la cassure du faux plafond.

Il situe la cause dans un défaut de pente de la toiture, notant une cassure en partie basse qui forme un creux et un défaut de calage des tuiles qui crée des possibilités d'infiltrations suivant les vents.

L'expert conclut, à propos des infiltrations par le sol, que la construction n'est pas réalisée dans les règles de l'art, retenant que les murs de façade sont posés à l'intérieur alors qu'ils devraient être à l'aplomb légèrement à l'extérieur de la dalle, que l'enduit s'arrête sur la dalle et que l'eau peut stagner et s'infiltrer par des microfissures inévitables entre le mur et la dalle de sorte qu'il n'y a pas d'étanchéité, l'enduit devant théoriquement descendre 25 cm au-dessous du niveau du plancher.

L'expert préconise des travaux conduisant à intervenir au niveau de l'étanchéité entre la dalle et le mur avec la réalisation d'un solin sur les 13 m linéaires de la façade sud, la nécessité de découper l'enduit de façade avant la pose du solin pour un coût de 7000 €, outre les travaux intérieurs pour un coût de 1700 €TTC.

Ce désordre , compte tenu de sa nature, de sa cause et de ses conséquences en termes d'absence d'étanchéité rend le bien, ainsi exposé à des infiltrations et à de l'humidité déformant les parquets et décollant les plinthes, impropre à sa destination et engage, par suite, la responsabilité décennale des vendeurs réputés constructeurs qui ne peuvent se prévaloir de ce que les acquéreurs ne démontrent pas que désordre était caché, le caractère apparent ou caché des désordres s'appréciant en la personne du maître de l'ouvrage dans le cas de la vente d'une maison construite par le vendeur lui-même de sorte que ce moyen est inopérant.

Le jugement sera de ce chef confirmé .

En ce qui concerne les infiltrations en toiture, l'expert expose que la toiture est à refaire complètement et qu'il convient de corriger sa planéité. Il évalue les travaux à 25'000 €,rappelant que la pose d'un écran de sous-toiture pour un toit à faible pente est imposée par les règles du DTU.

Il s'agit également, vu les conséquences en termes d'infiltrations et d'étanchéité du clos de l'immeuble, d'un désordre de nature décennale le rendant impropre à sa destination et engageant la responsabilité des vendeurs sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil.

Le jugement sera également de ce chef confirmé les observations ci-dessus développées étant reprises relativement à ce désordre.

L'évaluation faite des travaux au titre de ces infiltrations est également vainement critiquée par les intimés qui n'ont accompagné la production de leur document à ce propos d'aucune explication technique de nature à justifier l'évaluation y retenue de 520 € pour la reprise des infiltrations en façade, la motivation ci-dessus développée à propos de la critique de l'évaluation des travaux de reprise de carrelage étant réitérée .

La cour retient également qu'en ce qui concerne la reprise du parquet, la demande tendant à voir minorer la réparation de ce chef se heurte à nouveau aux observations de l'expert qui relève que les travaux ne seront pas aisés, explique qu'il convient de reprendre le pied de cloison au niveau des plinthes décollées et qui souligne que c'est le parquet flottant de toute la chambre qui s'est déformé, le changement du parquet étant d'ailleurs bien limité à cette chambre.

Les observations de la cour seront, enfin, les mêmes pour la somme de 5000 € au lieu des 25'000 € chiffrés par l'expert relativement à la réparation des infiltrations en toiture.

Le 3e désordre concerne la terrasse en bois qui se situe devant la maison et sur le pourtour de la piscine.

L'expert constate que le bois s'est, par endroits, déformé, créant des affleurements inégaux avec des lames cassées, qu'il y a des éclats de bois dangereux avec un risque de blessures par échardes, que les lignes de sillage perpendiculaire aux arêtes longitudinales présentent de nombreuses épaufrures, que les lames sont vissées sur des lambourdes en bois posées sur des plots non réglables en béton , ni fondés, ni enterrés posées directement sur un film polyane recouvrant un apport de tout-venant compacté sur le sol d'origine, enfin, que le bois n'a pas fait l'objet traitement de classe 4 qui est obligatoire lorsqu'il est posé en extérieur, que les vis de fixation sont tantôt en fer et rouillent, tantôt en inox et qu'elles ont été vissées sans pré trou, certaines enfoncées de travers ou en biais ou à la limite de la coupe des lames. Il en conclut que la pose de la terrasse n'est pas conforme aux réglementations en vigueur des DTU et il prévoit des travaux avec reprise complète de la mise en 'uvre pour 5000 € TTC.

Le compromis prévoyait au titre d'une condition suspensive que la réalisation de la vente était soumise à la mise en eau de la piscine ne révélant pas de fuites ou de problèmes concernant la machinerie et à ce que la terrasse en bois jouxtant la piscine soit réparée.

L'acte de vente mentionne que la terrasse en bois a été réparée, ce dont les parties déduisent, chacune, la conséquence favorable au soutien de leur thèse respective, à savoir, que selon l'une, le vice était apparent et selon l'autre, le vice ne l'était pas.

Peu importe cependant sur ce grief ce débat des parties sur le caractère apparent ou non du vice, dès lors que la terrasse ne constitue pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil et qu'elle ne peut donc être prise en compte au titre de l'article 1792-2 du même code, de sorte que la responsabilité des vendeurs sur ce fondement ne peut être retenue.

En revanche, sur le fondement contractuel, les vendeurs ne contestant pas avoir réalisé les travaux et ceux-ci n'étant pas conformes aux exigences des DTU, ils ont engagé leur responsabilité contractuelle tant au titre d'une structure non conforme aux règles de l'art que de l'utilisation de vis non adaptées, désordres dont la cour retiendra qu'à raison de leur nature même ils n'étaient pas apparents et dont il ne peut être retenu, au vu des mentions des actes qui ont,certes, relevé l'existence de défauts pour cette terrasse, mais n'ont précisément pas relevé ceux ici retenus, qu'ils les connaissaient.

En ce qui concerne le grief tiré du défaut de traitement du bois, il sera retenu que malgré allégations contraires des vendeurs prétendant qu'ils auraient informé l'acquéreur qu'ils auraient à traiter les lames en bois, cette assertion n'est pas prouvée ; que d'ailleurs la seule mention au sujet de la terrasse au compromis est que la terrasse 'soit réparée' et à l'acte du 17 janvier 2017 qu'elle 'a été réparée' et que la seule circonstance que l'avocat des vendeurs ait rappelé cette allégation dans un dire à l'expert auquel il n'a pas été répondu est inopérante au soutien de cette critique.

Par ailleurs, le caractère apparent n'étant, vu la nature du vice et vu ses conséquences qui ne se manifestent pas dans l'immédiateté, pas plus démontré, le jugement sera confirmé en ce qu'il a mis à la charge du vendeur la réparation telle qu'évaluée par l'expertise, que là encore l'intimé conteste vainement au vu de la pièce numéro 9 et au vu des précédentes motivations sur la contestation des évaluations qui sont ici reprises .

Le 4e désordre concerne la piscine.

Le jugement ne l'a pas retenu ; il n'y a pas de critique de ce chef développée devant la cour . Tout débat à son sujet est donc sans objet.

Le jugement sera donc confirmé ; Mme [C] sera déboutée des fins de son recours et les intimés sont déboutés de leur appel incident.

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

Vu la succombance respective des parties devant la cour justifiant que celles-ci supportent les dépens de la procédure d'appel par moitié chacune, à savoir, d'une part, Madame [C] et d'autre part, ensemble Monsieur [U] et Madame [E] , dépens dont il est précisé qu'ils ne comprennent pas les frais de l'expertise et du référé compris dans les dépens de la procédure de première instance telle qu'arbitrés au jugement qui se trouve confirmé et qu'il n'y a par ailleurs pas lieu d'y inclure les frais du constat d'huissier revendiqués par Madame [C].

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats en audience publique, par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Rejette les demandes de Madame [C] au titre du dol et du défaut de loyauté ,

Rejette les demandes de Monsieur [U] et Madame [E] au titre de leur appel incident,

Confirme en conséquence le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour,

Rejette les demandes plus amples,

Condamne par moitié, d'une part, Madame [C] et par moitié d'autre part ensemble, Monsieur [U] et Madame [E] aux dépens de la procédure d'appel avec distraction au profit de l'avocat qui en a fait la demande, étant précisé que les frais de l'expertise, de constat et de référé sont inclus dans les dépens de première instance sur lesquels le tribunal a déjà statué .

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/03819
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;21.03819 ?
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