RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/02518 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IDDS
CG
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'ALES
23 avril 2021 RG :19/00923
[E]
[K]
C/
[O]
S.A.R.L. L'ETANCHEUR GARDOIS
[O]
S.A. AXA FRANCE IARD
Grosse délivrée
le
à SCP Coudurier & Chamski
SCP Fontaine et Flouier ...
SCP BCEP
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 23 MARS 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ALES en date du 23 Avril 2021, N°19/00923
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine GINOUX, Magistrat honoraire juridictionnel, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre
Mme Laure MALLET, Conseillère
Mme Catherine GINOUX, Magistrat honoraire juridictionnel
GREFFIER :
Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 26 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Mars 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
Monsieur [C] [E]
né le 28 Mars 1977 à NIMES (30000)
[Adresse 11]
[Localité 4]
Représenté par Me Stanislas CHAMSKI de la SCP COUDURIER & CHAMSKI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Madame [Z] [K]
née le 22 Août 1984 à
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représentée par Me Stanislas CHAMSKI de la SCP COUDURIER & CHAMSKI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Madame [V] [O]
née le 03 Septembre 1953 à LE CREUSOT (71200)
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Charles FONTAINE de la SCP FONTAINE ET FLOUTIER ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Monsieur [N] [O]
né le 15 Août 1949 à ORLY (94310)
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Charles FONTAINE de la SCP FONTAINE ET FLOUTIER ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMES SUR APPEL PROVOQUE
S.A.R.L. L'ETANCHEUR GARDOIS immatriculée au RCS de Nîmes sous le n° B 509 234 787, pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité au siège social sis
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représentée par Me Bruno CHABADEL de la SCP B.C.E.P., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
S.A. AXA FRANCE IARD immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 722 057 460, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité au siège social sis
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représentée par Me Bruno CHABADEL de la SCP B.C.E.P., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 05 Janvier 2023
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 23 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant acte authentique reçu le 27 octobre 2014, M. [C] [E] et Mme [Z] [K] (les consorts [E]/[K]) ont vendu à M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] (les époux [O]) une maison à usage d'habitation sise à [Adresse 10].
Invoquant l'existence de désordres affectant l'immeuble vendu, les époux [O] ont obtenu en référé, suivant ordonnance rendue le 26 avril 2018, la désignation d'un expert judiciaire .
L'expert, M. [S], a déposé son rapport le 6 juin 2009.
Par actes d'huissier délivrés les 21 et 26 août 2019, les époux [O] ont fait assigner leurs vendeurs (les consorts [E]/[K]), les constructeurs concernés par les désordres et leurs assureurs.
Par jugement rendu le 23 avril 2021, le tribunal judiciaire d'Alès a :
- rejeté la demande tendant à l'annulation de l'expertise judiciaire
- condamné la Sarl l'Etancheur Gardois et son assureur Axa à payer aux époux [O] la somme de 6.817,78 € au titre de la reprise de l'étanchéité de la terrasse accessible et de la reprise des dommages causés par les infiltrations
- condamné Axa à garantir son assurée des condamnations prononcées à son encontre sous réserve de la franchise contractuelle
- condamné la société Aréas Dommages, assureur de l'entreprise de gros oeuvre Doriabat, à payer aux époux [O] la somme de 8.428,40 € au titre de la reprise des fissures et de l'enduit du premier étage, ainsi que du garde-corps de la terrasse accessible, sous réserve des provisions déjà versées
- condamné les consorts [E]/[K] à payer aux époux [O] la somme de 17.402 € au titre de la reprise de l'enduit du rez de chaussée et de la quatrième face de l'étage
- rejeté la demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance
- condamné la sarl l'Etancheur Gardois, la société Axa et les consorts [E]/[K] à verser aux époux [O] la somme de 4.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens
- rejeté les autres demandes formulées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Par déclaration effectuée le 30 juin 2021, les consorts [E]/[K] ont interjeté appel en intimant les époux [O], lesquels ont appelé en la cause la Sarl l'Etancheur Gardois et la société d'assurances Axa.
Suivant conclusions notifiées le 30 septembre 2021, les consorts [E]/[K] demandent à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé des condamnations à leur encontre
- de rejeter l'intégralité des demandes formées par les époux [O] à leur encontre
- de condamner les époux [O] à leur verser la somme de 5.000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Les appelants soutiennent que les enduits de façade ne constituent pas un ouvrage soumis à la garantie décennale dès lors qu'ils ont une simple fonction d'imperméabilisation.
Ils prétendent en outre qu'il n'existe aucun désordre de nature décennale affectant les enduits.
Suivant conclusions notifiées le 30 décembre 2022, les époux [O] demandent à la cour
de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la Sarl l'Etancheur Gardois et la société d'assurances Axa à leur payer la somme de 6.817,78 € au titre de la reprise de l'étanchéité de la terrasse accessible
- l'infirmer pour le surplus
- condamner la Sarl l'Etancheur Gardois et la société d'assurances Axa à leur payer la somme actualisée de 27.078,64 € au titre de la reconstruction intégrale de la toiture terrasse inaccessible
- condamner les consorts [E]/[K] à leur payer la somme de 47.870,97€ outre indexation à compter du 6 juin 2019, au titre de la reprise de l'enduit du rez de chaussée et de la quatrième face
- condamner in solidum la Sarl l'Etancheur Gardois, la société d'Assurances Axa et les consorts [E]/[K] à leur payer :
* la somme de 7.000€ en réparation de leur préjudice de jouissance
* celle de 8.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance y compris le coût de l'expertise.
Les époux [O] soutiennent que les désordres affectant les complexes d'étanchéité de la toiture inaccessible et les façades constituent des désordres de nature décennale.
Suivant conclusions notifiées le 15 février 2022, la sarl l'Etancheur Gardois et la société Axa France Iard demandent à la cour de :
- confirmer le jugement sauf en ce qu'il les a condamnées à verser aux époux [O] la somme de 4.000€ au titre des frais irrépétibles
- débouter les époux [O] de l'ensemble des causes de leur appel provoqué
- les condamner à leur payer la somme de 3.000€ au titre des frais irrépétibles et aux dépens d'appel.
Ils soutiennent que la société l'Etancheur Gardois ne peut être déclarée responsable que des désordres d'infiltration affectant les balcons et la terrasse accessible, seuls désordres portant atteinte à l'étanchéité du bâtiment.
La clôture de la procédure a été fixée au 5 janvier 2023.
Motifs de la décision
Sur la demande à l'encontre des consorts [E]-[K]
L'expert a constaté un défaut d'adhérence de l'enduit entraînant un phénomène de faiençage, des microfissurations et décollements des enduits .
Les époux [O] recherchent la responsabilité des consorts [E]- [K] pour les désordres affectant l'enduit, sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil.
Selon l'article 1792 du code civil , tout constructeur est responsable de plein droit envers le maitre de l'ouvrage ou l'acquéreur de l'ouvrage des dommages même résultant du sol qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement le rendent impropre à sa destination.
L'article 1792-1 du code civil alinéa 2 dispose qu'est réputé constructeur de l'ouvrage toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.
Il n'est pas contesté que les consorts [E]-[K] ne disposent pas de factures concernant l'enduit réalisé sur les façades de l'immeuble vendu aux époux [O], de sorte que leur responsabilité peut être recherchée comme réputé constructeur si les conditions cumulatives de mise en oeuvre de la garantie légale sont réunies.
En premier lieu, il y a lieu de déterminer si l'enduit de façade constitue un ouvrage .
La notion d'ouvrage suppose une construction immobilière, laquelle implique un ancrage au sol et une fixité.
Les travaux de pose d'enduits, qui ne comportent pas de modification de l'infrastructure, de la structure ni du clos et du couvert des bâtiments, ne participent pas à la réalisation d'un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil.
Par ailleurs, les enduits de façade ne constituent pas un élément d'équipement dissociable au sens de l'article1792-3 du code civil dès lors qu'il n'est pas destiné à fonctionner, et ce, même s'il a une fonction d'imperméabilisation.
Il en irait autrement si l'enduit litigieux avait une fonction d'étanchéité.
Or, en l'espèce, aucun élément technique de l'expertise ne permet de retenir que l' enduit de l'immeuble vendu par les consorts [E]-[K] avait une fonction d'étanchéité.
Ainsi, la condition de mise en oeuvre de la garantie légale, supposant l'existence d'un ouvrage, n'est pas remplie en l'espèce , de sorte que la responsabilité des consorts [E]-[K] ne peut être engagée.
Par voie de conséquence, il y a lieu :
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que l'enduit relevait de la garantie décennale et a condamné les consorts [E]-[K] à payer aux époux [O] la somme de 17.402 € au titre de la reprise de l'enduit .
- de débouter les époux [O] de leur demande de condamnation des consorts [E]-[K] au titre de la reprise de l'enduit.
Sur la demande des époux [O] au titre des terrasses inaccessibles
L'expert a constaté une rétractation des panneaux de polyurethane entraînant l'apparition de plis en surface.
Selon l'expert, malgré les déformations importantes du revêtement d'étanchéité sur ces espaces, la terrasse litigieuse ne fuit pas, la mise en eau de la toiture terrasse lors des essais du 16 novembre 2018, n'ayant donné lieu à aucune infiltration.
Il n'y a donc pas d'impropriété par rapport à la destination et de désordres de nature décennale .
Il s'ensuit que la responsabilité décennale du constructeur - l'Etancheur Gardois- ne peut être mise en oeuvre .
Il y a lieu par voie de conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que ces désordres ne sont pas de nature décennale et a débouté les époux [O] de leur demande à ce titre formée à l'encontre de l'Etancheur Gardois et de son assureur - la société Axa-.
Sur le préjudice de jouissance
L'expert ayant relevé que les désordres concernant pour l'essentiel des parties externes, n'ont pas ou peu affecté le bon usage de l'habitation, il convient de débouter les époux [O] de ce chef de demande.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté cette demande.
Sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
En application de ce texte, les époux [O] seront condamnés à verser aux consorts [E]-[K] la somme de 2.000€ et aux dépens de l'instance .
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de cet article au profit des sociétés Etancheur Gardois et Axa Assurances .
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement , contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné M. [C] [E] et Mme [Z] [K] à payer à M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] la somme de 17.402 € au titre de la reprise de l'enduit, à verser la somme de 4.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Statuant des chefs infirmés :
Déboute M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] de leur demande formée à l'encontre de M. [C] [E] et Mme [Z] [K] au titre de la reprise de l'enduit.
Déboute M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] de leurs demandes de condamnation de M. [E] et de Mme [K] à leur verser une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens
Condamne M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] aux dépens de la procédure de première instance
Y ajoutant :
Condamne M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] à payer à M. [C] [E] et Mme [Z] [K], pris ensemble, la somme de 2.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne M. [N] [O] et Mme [V] [R] épouse [O] aux dépens d'appel.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,