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09/03/2023 | FRANCE | N°21/02338

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 09 mars 2023, 21/02338


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/02338 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICUK



LM



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

03 mai 2021 RG :17/03754



[G]



C/



[G]

[G]

G.F.A. DOMAINE DE MARIE TERRAL





































Grosse délivrée

le

à SCP DELR

AN ...

SCP REY GALTIER











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 09 MARS 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 03 Mai 2021, N°17/03754



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Anne DAMPFHOFFER, P...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02338 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICUK

LM

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

03 mai 2021 RG :17/03754

[G]

C/

[G]

[G]

G.F.A. DOMAINE DE MARIE TERRAL

Grosse délivrée

le

à SCP DELRAN ...

SCP REY GALTIER

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 09 MARS 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 03 Mai 2021, N°17/03754

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, et Mme Laure MALLET, Conseillère, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Mme Laure MALLET, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 02 Février 2023 prorogé à ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [J] [G]

né le 04 Juillet 1944 à [Localité 4] (Algérie)

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représenté par Me Sylvie SERGENT de la SCP DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [A] [G]

né le 08 Janvier 1942 à [Localité 2]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Julien DUMOLIE de la SCP CABINET DEBEAURAIN, Plaidant, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Représenté par Me Jean philippe GALTIER de la SCP REY GALTIER, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [W] [G]

né le 18 Avril 1976 à [Localité 2]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Julien DUMOLIE de la SCP CABINET DEBEAURAIN, Plaidant, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Représenté par Me Jean philippe GALTIER de la SCP REY GALTIER, Postulant, avocat au barreau de NIMES

G.F.A. DOMAINE DE MARIE TERRAL prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège social

assignée à personne habilitée le 21 septembre 2021

Château de [Adresse 9]

[Localité 5]

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 03 Novembre 2022

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 09 mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

Le GFA Domaine de Marie Terral est propriétaire d'un vaste ensemble immobilier de 285 hectares, à vocation agricole, appelé Domaine de [Adresse 9], situé sur les communes de [Localité 5] et [Localité 8].

Lors de sa création en 1976, le GFA appartenait aux membres de la famille de M. [L] [G] : [B] [G], [A] [G] et son fils [W] [G], [N] [K], [X] [K], [F] [K] et [S] [K].

Son fondateur en sera le premier gérant.

Puis M. [B] [G] sera gérant à compter du 10 mars 1997.

En 2006, M.[J] [G] et ses enfants ([Z], [T] et [U]) rentreront dans le capital du GFA suite à diverses cessions de parts consenties par M.[B] [G] à M.[J] [G] entre 2006 et 2013, et une donation-partage de M. [J] [G] à ses enfants, étant précisé qu'il n'existe aucun lien de famille entre les associés du 1er et du 2ème groupe, si ce n'est un lien généalogique remontant à un ancêtre commun en 1763.

Du 5 juillet 2006 à 2014, il existait une cogérance entre M. [B] [G] et M.[J] [G] .

A compter de 2014, M.[J] [G] est devenu le seul gérant, M. [B] [G] étant rentré en maison de retraite en décembre 2014, ayant dés lors quitté le domaine près avoir démissionné.

Après diverses cessions, la répartition des 8 000 parts du GFA est donc à présent la suivante :

[J] [G] : 1 part en pleine propriété,

-[T] [G] : 1527 parts en pleine propriété,

[U] [G] : 4149 parts en pleine propriété,

-[S] [K] : 1083 parts en pleine propriété,

-[A] [G] : 6 parts en pleine propriété et 1228 parts en usufruit,

-[W] [G] : 6 parts en pleine propriété et 1228 parts en nue-propriété.

Ainsi, la famille de M.[J] [G] est majoritaire.

Depuis 1976, le GFA Domaine de Marie Terral a conclu divers baux ruraux d'une durée de 18 années avec la SCEA Domaine de Marie Terral, puis avec la SCEA Vignobles De [Localité 6] et De [Localité 5].

En 2006, la SCEA Domaine de Marie Terral a fusionné avec la SCEA Vignobles De [Localité 6] et De [Localité 5] et a changé sa dénomination en SCEA Château de [Adresse 9].

Le 28 juin 2006, à la suite de cette fusion, le GFA le Domaine de Marie Terral et la SCEA Château de [Adresse 9] ont décidé d'annuler les baux susvisés pour les refondre en un seul nouveau bail à long terme d'une durée de 18 ans, soit jusqu'au 31 décembre 2023.

Le fermage annuel était fixé de la manière suivante :

-12 000 € indexés pour les bâtiments d'habitation ;

-8 000 € indexés pour les bâtiments d'exploitation et les parcelles de terres.

Aux termes dudit bail, le preneur devait également supporter chaque année, en sus du fermage, un cinquième de la taxe foncière et habiter les lieux.

Le 6 septembre 2011, la SCEA Château de [Adresse 9] a fusionné avec l'EARL Vignobles [U] [G] dont le gérant est M. [U] [G], fils de M. [J] [G], et associé au sein du GFA.

Exposant que depuis la prise de possession des lieux la SCEA Le Château de [Adresse 9] et l'EARL Vignobles [U] [G] ne se sont pas acquittés du fermage et des taxes foncières dus, le GFA Domaine de Marie Terral, par courrier du 1er juillet 2014, a mis en demeure l'EARL Vignobles [U] [G] de lui payer la somme de 50 646,01 € au titre des fermages arriérés de 2006 à 2013 ainsi que la somme de 20 928,84 € au titre des taxes foncières dues sur la même période.

Estimant ne pas avoir reçu de réponse satisfaisante de M. [J] [G], les associés minoritaires ont sollicité la convocation d'une assemblée générale du GFA par courrier du 4 février 2016 aux fins notamment qu'une action soit engagée contre le fermier.

Par acte en date du 11 mai 2016, M.[B] [G], Mme [N] [G], M.[A] [G], M. [W] [G], et mesdames [X] et [S] [K] ont fait assigner notamment le GFA en référé devant le tribunal de grande instance de Narbonne pour solliciter la désignation d'un administrateur provisoire.

Par ordonnance en date du 20 septembre 2016, le président du tribunal de grande instance de Narbonne les a déboutés de leur demande tendant à voir désigner un administrateur provisoire mais a désigné maître Bernard [P], ainsi que maître [E] [R], en cas de refus ou d'empêchement du premier, en qualité de mandataire pour convoquer une assemblée générale du GFA, ayant pour ordre du jour:

-le lancement, ou non, d'une procédure afin de résilier le bail rural, pour défaut de paiement des fermages de l'EARL [U] [G], ainsi que sa condamnation au paiement des fermages au titre des années 2006 à 2013, conformément à la mise en demeure en date du 1er juillet 2014, soit 50 646,01 € au titre des arriérés de fermage, et la somme de 20 928,84 € au titre de l'arriéré des taxes foncières.

-la signification, ou non, d'une nouvelle mise en demeure au titre du solde du règlement du fermage 2014, soit un total de 7 292,85 €,

-le lancement, ou non, d'une procédure concernant l'absence de conformité aux dispositions du bail notamment l'obligation d'habitation sur place du fermier,

-la nécessité, ou non, de recourir à une mesure d'expertise judiciaire dans les rapports du GFA et de l'EARL [U] [G].

Par assignation du 8 novembre 2016, l'EARL [U] [G] a fait assigner le GFA, bailleur, devant devant le tribunal paritaire des baux ruraux aux fins de désignation d'un expert judiciaire.

Par jugement du 20 novembre 2017, le tribunal paritaire des baux ruraux de Narbonne a :

-déclaré recevable l'intervention volontaire des associés minoritaires,

-ordonné une mesure d'expertise, confiée à M. [H] [D] [V], expert près la cour d'appel de Montpellier.

L'expert a déposé son rapport le 11 janvier 2019.

Par ordonnance de référé du 25 avril 2017, Messieurs [A] [G] et [W] [G] ont été déboutés de leur nouvelle demande de désignation d'un administrateur provisoire.

Par actes d'huissier en date 14 février 2017 et du 15 février 2017, M.[A] [G] et M.[W] [G] ont fait assigner le GFA Domaine de Marie Terral et M. [J] [G] devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins de voir:

-condamner M. [J] [G] à payer au GFA Domaine de Marie Terral la somme de 90 000 euros à titre de dommages-intérêts toutes causes de préjudices confondues,

-condamner M. [J] [G] à payer aux requérants la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi par chacun d'entre eux en raison des fautes de gestion commises par ce dernier,

-condamner M. [J] [G] à leur payer la somme de 2 620,04 euros en remboursement des frais de constat engagés par eux ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par jugement contradictoire du 3 mai 2021, le tribunal judiciaire de Nîmes a :

-dit que M. [J] [G] en qualité de cogérant puis gérant du GFA du Domaine de Marie Terral a commis plusieurs fautes de gestion génératrices de préjudices à l ' encontre du GFA du Domaine de Marie Terral et des associés dudit GFA, requérants à l'instance, MM. [W] [G] et [A] [G] ;

-condamné M. [J] [G] à payer au GFA du Domaine de Marie Terral la somme de 77 234,89 euros à titre de dommages-intérêts représentant la dette locative non recouvrée du fermier de ce dernier l'EARL Vignobles [U] [G] entre 2006 et 2017 ;

-condamné M. [J] [G] à payer à chacun des requérants, MM. [W] [G] et [A] [G], une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral ;

-ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

-condamné M. [J] [G] au paiement des entiers dépens dont seront exclus le coût du remboursement des procès-verbaux de constat d'huissier;

-condamné M. [J] [G] à payer à MM. [W] [G] et [A] [G] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 16 juin 2021, M. [J] [G] a relevé appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 21 octobre 2022, auxquelles il est expressément référé, M. [J] [G] demande à la cour de :

Vu les articles 1240 et 1843-5 du code civil,

Vu l'article L 411-31 du code rural et de la pêche maritime,

Tenant l'appel interjeté le déclarer recevable et bien fondé,

Infirmer la décision déférée ;

A titre principal,

Sur le fondement de l'article 2224 du code civil,

-statuer que l'action est prescrite,

-débouter en conséquence Messieurs [A] et [W] [G] de l'intégralité de leurs demandes,

A titre subsidiaire,

Vu les articles 1240 et 1843-5 du code civil,

Vu l'article L 411-31 du code rural et de la pêche maritime,

-statuer que le cogérant M. [J] [G] n'a commis aucune faute,

-débouter Messieurs [A] et [W] [G] de toutes leurs demandes

A titre plus subsidiaire,

-statuer que le préjudice subi ne peut excéder la somme de 60 683,70 €,

-débouter Messieurs [A] et [W] [G] de leur demande d'indemnisation d'un préjudice moral,

-débouter Messieurs [A] et [W] [G] de leurs demandes de remboursement des frais d'expertise et des frais d'huissier,

-condamner Messieurs [A] et [W] [G], solidairement au paiement d'une somme de 5 000 € au titre de l'indemnisation du préjudice moral de Monsieur [J] [G],

-condamner Messieurs [A] et [W] [G], solidairement au paiement d'une somme de 12.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-les condamner sous la même solidarité aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 26 octobre 2022, auxquelles il est expressément référé, M. [A] [G] et M.[W] [G] demandent à la cour de :

Vu les articles 1843-5 du code civil ,

Vu les nouveaux articles 1240 et 1241 du code civil,

Vu les manquements imputables à M. [J] [G],

Vu le préjudice subi par le GFA,

Vu le préjudice moral qui en est résulté pour chacun des requérants,

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

-dit que M. [J] [G] en qualité de cogérant puis gérant du GFA du Domaine de Marie Terral a commis plusieurs fautes de gestion génératrices de préjudices à l ' encontre du GFA du Domaine de Marie Terral et des associés dudit GFA, requérants à l'instance, MM. [W] [G] et [A] [G] ;

-condamné M. [J] [G] à payer au GFA du Domaine de Marie Terral la somme de 77 234,89 euros à titre de dommages-intérêts représentant la dette locative non recouvrée du fermier de ce dernier l'EARL Vignobles [U] [G] entre 2006 et 2017 ;

-condamné M. [J] [G] à payer à chacun des intimés, Messieurs [W] [G] et [A] [G], la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;

-condamné M. [J] [G] à payer à chacun des intimés la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné Monsieur [J] [G] aux entiers dépens.

Réformer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes tendant au remboursement de la somme de 4.589,38 euros correspondant aux frais de constats engagés par Messieurs [A] et [W] [G];

Réformer le jugement en ce qu'il a débouté Messieurs [A] et [W] [G] de leur demande de remboursement de la somme de 2.500 euros correspondant aux frais d'expertise ordonnés par l'ordonnance de référé du tribunal paritaire des baux ruraux de Narbonne;

-condamner Monsieur [J] [G] à rembourser aux requérants la somme de 4.589,38 euros au titre des frais de constat d'huissier ;

-condamner Monsieur [J] [G] à rembourser aux concluants la somme de 2.500 euros au titre des frais d'expertise correspondant à l'ordonnance de référé du tribunal paritaire des baux ruraux de Narbonne;

-condamner en cause d'appel Monsieur [J] [G] à la somme de 7.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, en ceux compris les frais afférents à la procédure d'incident, distraits au profit de maître Jean-Philippe Galtier, avocat sur son affirmation de droit.

Le GFA Domaine de Marie Terral, auquel la déclaration d'appel a été signifiée ainsi que les conclusions de M. [J] [G] n'a pas constitué avocat. Elle a été assignée à personne habilitée le 21 septembre 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces du dossier d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

Sur la prescription,

Messieurs [A] et [W] [G] recherchent la responsabilité de M.[J] [G], gérant du GFA du domaine de Marie Terral, sur le fondement des articles 1843-5, 1240, et 1241 du code civil.

Dès lors, le délai de prescription applicable est un délai quinquennal en application de l'article 2224 du code civil selon lequel « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.»

Il convient de noter qu'au terme de ses dernières conclusions l'appelant a renoncé à invoquer l'article L 223 -23 du code de commerce.

M.[J] [G] soutient, au regard des deux conventions des 28 juin 2006 et 31 août 2006 mais également de celle du 17 octobre 2006, que l'ensemble des associés minoritaires ne pouvait ignorer une situation imposée par les relations familiales et demande de constater en réalité que si le GFA n'a jamais réclamé au fermier les fermages pour le bâtiment d'habitation, c'est en raison de la présence de [B] [G], qu'ainsi le fait dommageable (non réclamation du fermage) permettant aux associés minoritaires d'intenter une action contre le co-gérant du GFA, M.[J] [G], est en date de 2006 et se prescrivait en 2011, alors que l'action intentée à son encontre a été engagée en 2017, se trouvant donc prescrite.

En l'espèce, par le bail du 28 juin 2006 conclu entre le GFA le Domaine de Marie Terral et la SCEA Château de [Adresse 9], cette dernière s'est engagée à régler le fermage annuel, soit 12 000 € indexés pour les bâtiments d'habitation et 8 000 € indexés pour les bâtiments d'exploitation et les parcelles de terres.

S'il est constant que par conventions du 31 août 2006 puis du 10 septembre 2012, il était convenu entre M. [B] [G], le GFA et les fermiers successifs que M. [B] [G], pourrait « rester sa vie durant, gratuitement, dans les locaux qu'il occupe actuellement et qui constitue son habitation principale, ou éventuellement dans d'autres locaux situés sur le domaine de [Adresse 9] », il ne ressort aucunement de ces conventions une dispense de paiement de fermage pendant cette période.

Par ailleurs, il convient de constater que la convention du 17 octobre 2006 invoquée par l'appelant conclu uniquement entre Messieurs [B] [G], co-gérant du GFA et M.[J] [G], gérant de la SCEA château de [Adresse 9] aux termes de laquelle ils conviennent que le fermier n'aurait pas à payer la partie du fermage correspondant à la maison d'occupation, intervient après la convention du 31 août 2006 mais avant celle du 10 septembre 2012, cette dernière ne faisant curieusement aucune référence à cette convention du 17 octobre 2006 alors même que Messieurs [B] et [J] [G] étaient parties aux deux conventions.

En outre, aucune assemblée générale n'a entériné cette convention du 17 octobre 2006 alors qu'elle remettait en cause le bail du 28 juin 2006 concernant le paiement du fermage.

M [J] [G], par courriel du 6 mai 2011, répondant à une demande de son frère [A], indiquait : «Nouveau support juridique et place de [M]. Pour l'instant je n'envisage pas de sortir les bâtiments du GFA qui en est propriétaire, ni de la SCEA qui en est fermière, et qui paye un fermage pour cela. En outre l'EARL de [U] reprend les engagements de mise à disposition pour [M], et je ne tiens pas vis à vis du reste de la famille à remettre cet accord en cause, de quelque manière que ce soit.

Cette structure juridique à inventer et à mettre en place ne se fera que quand [M] ne sera plus là, et que nous serons tous face à des échéances. Et qu'au préalable un projet sera bâti. Ce qui est encore loin d'être le cas.»

Dès lors, encore à cette date, les associés minoritaires ne pouvaient avoir connaissance du non paiement des fermages puisqu'au contraire l'appelant indiquait que le fermage était payé sans rappeler la convention du 17 octobre 2006, ne faisant référence qu' « aux engagements de mise à disposition pour [M]. »

Enfin, il ressort de la présentation des comptes de la SCEA château de [Adresse 9] de 2006 à 2011 que le poste fermage pour la somme de 20 000 € apparaît annuellement.

Le point de départ de la prescription ne peut, en conséquence, être fixé en 2006.

En revanche, il ressort du procès verbal de constat dressé par Me [O], huissier de justice, lors de l'assemblée générale du 30 juin 2015 que c'est à cette date que les associés minoritaires ont été informés de l'absence de paiement de fermage, M. [J] [G] déclarant en réponse à M. [W] [G] l'interrogeant sur l'existence d'un tel accord : « Il y avait une tenue des comptes entre nous qui fait que nous avions un accord avec non seulement ton oncle pour toi et ta famille. Il y avait deux points essentiels, le premier est qu'il ne fallait pas qu'il y ait de résultats sur le GFA pour que ton frère n'ait pas de taxe d'habitation, ça c'était le premier point, et le deuxième point à partir du moment où il occupait la maison il n'y avait pas de loyer sur cette maison »

À supposer même qu'il puisse être considéré, malgré ses termes confus et énigmatiques, que le courrier du 5 février 2013 adressé par M. [J] [G] à Madame [C] [Z] [Y] informait du non-paiement du loyer, l'action des associés minoritaires n'est pas prescrite.

En effet, que le point de départ du délai de prescription soit fixé au 5 février 2013 ou au 30 juin 2015, l'assignation a été délivrée les 14 et 15 février 2017, soit dans le délai quinquennal.

L'action de Messieurs [A] et [W] [G] sera en conséquence déclarée recevable comme non prescrite.

Sur la responsabilité de M. [J] [G],

Selon l'article 1843-5 alinéa 1 du code civil « Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation du préjudice subi par la société ; en cas de condamnation, les dommages-intérêts sont alloués à la société.»

Messieurs [A] et [W] [G] reprochent à l'appelant :

-le non recouvrement des fermages à l'encontre des fermiers,

-la défense inappropriée par M.[J] [G] des intérêts du fermier à l'encontre des intérêt du GFA du domaine de Marie Terral,

-le défaut d'approbation des comptes et l'absence de régularité des comptes.

Il est constant et d'ailleurs non contesté que les fermiers, la SCEA château de [Adresse 9] puis l'EARL Vignobles [U] [G] ne se sont pas acquittées des fermages de 2006 à mai 2014.

Pour les motifs exposés ci-avant, l'appelant ne peut pas se prévaloir d'un accord unanime pour justifier la dispense des loyers par les fermiers de 2006 jusqu'à l'entrée de M.[B] [G] en maison de retraite, d'autant que le paiement du fermage apparaît en comptabilité.

Comme l'a pertinemment relevé le premier juge, il résulte de la lecture du rapport de l'expert judiciaire M. [V], que nonobstant le départ de l'habitation du château du domaine par M.[B] [G] au mois de mai 2014 qui faisait que l'accord invoqué en date du 17 octobre 2006 se trouvait nécessairement caduc car privé d'objet et d'effet, le fermier l'EARL Vignobles [U] [G] est demeurée débitrice de fermages envers le GFA du domaine de Marie Terral entre 2013 et 2017 c'est-à-dire pour une période majoritairement postérieure au départ de l'habitation du château du domaine par M. [B] [G] au mois de mai 2014, invalidant ainsi l'argument de l'appelant qui explique sa décision de ne pas recouvrer la créance locative du GFA à l'encontre du fermier par l'existence de l' accord conclu du 17 octobre 2006 selon lequel le fermier était dispensé de payer le fermage correspondant à l'habitation du domaine tant que celle-ci serait occupée par M. [B] [G], accord en toute hypothèse non approuvé par la majorité des associés présents ou représentés lors d'une assemblée générale du GFA.

Par ailleurs,à suivre la position de l'appelant, le non paiement du fermage ne pourrait se justifier que pour la partie habitation mais en aucun cas pour les bâtiments d'exploitation et les terres.

M. [J] [G] justifie encore le non recouvrement des loyers par le défaut de délivrance du lieu d'habitation au fermier et par l'obligation pour le GFA bailleur d'exécuter des travaux de remise aux normes eu égard à l'état du lieu habitation.

Il convient de noter que ces moyens soulevés par M. [J] [G], gérant du GFA, sont en réalité des moyens qui relèvent du fermier, qui n'est autre que son fils, et non du bailleur, révélant ainsi la confusion de M.[J] [G] entre ses obligations de gérant du GFA et celles de l'EARL Vignobles [U] [G].

Il ne peut exister de défaut de délivrance puisqu'à côté du bail et postérieurement à sa conclusion, il a été conclu entre le GFA, les fermiers et M.[B] [G] un commodat sans qu'il ne soit établi, comme démontré ci avant, qu'une dispense ou une suspension des loyers concernant le château ait été accordée.

Il convient d'ajouter que M.[B] [G] occupait uniquement le château alors qu'il ressort du rapport expertise judiciaire de M. [V], page 4, que le domaine comprenait d'autres lieux d'habitation.

Au demeurant, force est de constater qu'il n'est absolument pas justifié qu'au départ de M.[B] [G] et alors que M. [U] [G] a repris possession des lieux, ce dernier ait justifié le non paiement des loyers par l'état de dégradation du lieu d'habitation ou la réclamation d'exécution de travaux au GFA bailleur, ou même le remboursement de réparations engagées pour le compte du bailleur.

En effet, le courrier remis en main propre par M. [U] [G] à M.[J] [G] le 17 décembre 2014 doit être mis en perspective avec la demande d'explication des associés minoritaires concernant le non-paiement des loyers et de régularisation de la situation, et la mise en demeure du 1er juillet 2014 d'avoir à payer les fermages envoyée par le GFA alors même que l'action de l'EARL Vignobles [U] [G] devant le tribunal paritaire des baux ruraux n'est intervenue que le 8 novembre 2016, soit postérieurement à la révélation aux associés minoritaires du défaut de paiement des fermages en l'état de l'accord du 17 octobre 2006 invoqué par l'appelant.

Par ailleurs, le courrier en date du 17 décembre 2014 ne repose que sur des affirmations de M. [U] [G] sans qu'aucune pièce ne soit produite, pas même des photographies ou un constat d'huissier, pour les corroborer.

M.[J] [G] ne peut donc sérieusement soutenir qu'il a omis de recouvrer les loyers auprès de l'EARL Vignobles [U] [G] dont le gérant est son fils, pour éviter que ce dernier ne réclame l'exécution de travaux coûteux.

Or, l'appelant a omis d' effectuer les démarches nécessaires et d'engager les actions pour recouvrer les fermages dus.

Ainsi, seul M.[B] [G] a adressé le 1er juillet une lettre de mise en demeure au fermier, l'EARL Vignobles [U] [G], de payer les fermages.

M.[J] [G] conteste l'authenticité de la signature de ce document par M.[B] [G] mais il n'en demeure pas moins que le fermier ne conteste pas l'avoir reçu et M.[J] [G], qui en était informé, a été inactif alors qu'il est demeuré seul gérant après la démission de M.[B] [G] pour solliciter le règlement des fermages.

Au contraire, malgré les demandes réitérées des associées majoritaires, le gérant du GFA livrait des explications confuses quant « à l'ajustement du montant des fermages aux charges »

Cependant, comme l'a relevé pertinemment le premier juge, les procès-verbaux d'assemblée générale du GFA du domaine de Marie Terral depuis 2006 ne font nullement mention d'une autorisation de la majorité des associés présents d'approuver la perte de recettes annuelles pour le GFA du domaine de Marie Terral qui résulte de cette décision d'ajuster le montant des fermages aux charges du fermier .

La lecture des courriers du 10 juillet 2010 de M. [U] [G] ainsi que du 5 février 2013 et du 17 juillet 2014 de M. [J] [G] confirme que ce dernier a agi manifestement à l'encontre de l'intérêt général du GFA domaine de Marie Terral et que ce dernier a bien présenté de manière erronée les comptes du GFA domaine de Marie Terral lors des assemblées générales ordinaires en 2007, 2008, 2009 et 2010 en mentionnant un montant de fermage annuel réglé par le fermier inexact de 20 000 €.

Par ailleurs, malgré la demande des associés majoritaires dans leur courrier du 4 février 2016 de, notamment, convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour l'engagement d'une procédure de résiliation du bail pour défaut de paiement des fermages à l'encontre du fermier et la signification d'une nouvelle mise en demeure au titre du solde des fermages et des taxes foncières, aucune assemblée ne sera tenue comportant cet ordre du jour.

Enfin, l'analyse du document établi par M.[J] [G] intitulé « note N°1 paiement des fermages » lors de l'expertise judiciaire de M. [V] dans le cadre de l'action de l'EARL Vignobles [U] [G] devant le tribunal paritaire des baux ruraux à l'encontre du GFA domaine de Marie Terral, révèle que le gérant du GFA a pris fait et cause pour le fermier qui n'était autre que son fils, au détriment des intérêts du GFA.

En conséquence, il y lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que M. [J] [G] en qualité de cogérant puis de gérant du GFA du Domaine de Marie Terral a commis plusieurs fautes de gestion.

Sur le préjudices,

Sur la demande au titre du non recouvrement des fermages,

Messieurs [A] et [W] [G] pour le compte du GFA sollicitent la somme de 77 234, 89 € à titre de dommages et intérêts représentant la dette locative non recouvrée du fermier de ce dernier, l'EARL Vignobles [U] [G].

Le non recouvrement des loyers par le GFA résulte de la faute de l'appelant.

L'expert judiciaire M. [V] a évalué la dette locative à la somme de 77 234,89 € pour la période de 2006 à 2017 si le fermage du château est dû, et si aucune dépense réalisée par l'EARL n'est à prendre en compte.

L'appelant ne conteste pas l'évaluation de M. [V] mais soutient qu'aucune somme n'est due en raison du «consensus familial » pour la dispense de paiement des fermages.

Or, pour les motifs ci-avant rappelés, il n'existe aucune dispense de paiement des fermages et de plus fort après 2014.

Par ailleurs, M.[J] [G] fait valoir subsidiairement qu'il convient de déduire de la somme de 77 234,89 € les travaux de reprise de la toiture d'un montant de 16 683, 70 €.

Cependant, [J] [G], gérant du GFA, ne peut réclamer une créance qui n'appartiendrait qu'au fermier.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné M.[J] [G] à payer au GFA Domaine de Marie Terral la somme de 77 234,89 €.

Sur la demande de messieurs [A] et [W] [G] au titre du préjudice moral,

Par des motifs que la cour adopte, le premier juge a pertinemment relevé que les fautes de gestion imputables à M.[J] [G] ont été commises, pendant plusieurs années et avaient manifestement pour objet de priver Messieurs [A] et [W] [G] de l'exercice de leurs droits de vote en qualité d'associés au sein du GFA et de leur droits à être informés périodiquement ou à tout le moins annuellement de la situation du GFA, ceci manifestement afin de permettre à M.[J] [G] gérant du GFA bailleur d'avantager son fils [U] [G], gérant de l'EARL Vignobles [U] [G].

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef .

Sur la demande au titre du remboursement des frais de constat d'huissier,

Messieurs [A] et [W] [G] demandent le remboursement des frais de constat d'huissier dont ils ont obtenu la désignation par ordonnance sur requête du président de la juridiction de [Localité 8] .

Or, d'une part, ils ne détaillent pas cette demande se contentant de renvoyer à leur pièce 68 comprenant des factures d'huissier pour l'établissement de constats dont le lien avec le présent litige n'est pas démontré.

D'autre part, ils ne justifient pas s'être acquittés personnellement desdites factures alors que les requêtes étaient présentées au nom de tous les associés minoritaires.

En conséquence, le jugement déféré sera également confirmé de ce chef.

Sur la demande au titre du remboursement des frais d'expertise,

La mesure d'instruction a été ordonnée par jugement du tribunal paritaire des baux ruraux de Narbonne en date du 20 novembre 2017.

Dès lors, le sort des frais d'expertise sera réglé dans le cadre des dépens de cette procédure.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur les demandes accessoires,

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance seront confirmées.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, l'appelant sera condamné aux dépens d'appel distraits au profit de maître Jean-Philippe Galtier conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il n'est pas équitable de laisser supporter à Messieurs [A] et [W] [G] leurs frais irrépétibles d'appel.Il leur sera alloué la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement après en avoir délibéré conformément à la loi par arrêt réputé contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Déclare recevable comme non prescrite l'action de M. [A] [G] et M.[W] [G],

Confirme le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M.[J] [G] aux dépens d'appel distraits au profit de maître Jean-Philippe Galtier conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne M.[J] [G] à payer à M. [A] [G] et M.Raymond-Bernard [G] la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/02338
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;21.02338 ?
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