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02/03/2023 | FRANCE | N°22/00098

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 02 mars 2023, 22/00098


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/00098 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IJYE



VH



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

25 novembre 2021

RG:21/01961



[H]

[AN]

[H]

[H]



C/



[B]-[FB]

[D]-[EU]















Grosse délivrée

le

à Me Dorier-Sammut

Selarl Lexavoue




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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 02 MARS 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 25 Novembre 2021, N°21/01961



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/00098 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IJYE

VH

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

25 novembre 2021

RG:21/01961

[H]

[AN]

[H]

[H]

C/

[B]-[FB]

[D]-[EU]

Grosse délivrée

le

à Me Dorier-Sammut

Selarl Lexavoue

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 02 MARS 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 25 Novembre 2021, N°21/01961

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,

Mme Laure MALLET, Conseillère,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 02 Mars 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

Monsieur [E] [H]

né le 17 Mai 1951 à [Localité 14]

[Adresse 5]

[Localité 11]

Représenté par Me Nicole DORIER-SAMMUT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000138 du 09/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Madame [L] [AN] épouse [H]

née le 13 Octobre 1974 à [Localité 10] (MAROC)

[Adresse 9]

[Localité 11]

Représentée par Me Nicole DORIER-SAMMUT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000139 du 09/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Monsieur [KW] [H] mineur représenté par ses représentants légaux M. [E] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H], né le 1er juillet 2010

né le 01 Juillet 2010 à [Localité 1]

[Adresse 9]

[Localité 11]

Représenté par Me Nicole DORIER-SAMMUT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000141 du 09/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Madame [Y] [H] mineure représentée par ses représentants légaux M. [E] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H], né le 22 août 2005

née le 22 Août 2005 à [Localité 1]

[Adresse 9]

[Localité 11]

Représentée par Me Nicole DORIER-SAMMUT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000140 du 09/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉS :

Madame [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU]

née le 26 Janvier 1953 à [Localité 1] (84) [Localité 1]

[Adresse 4]

[Localité 11]

Représentée par Me Pierre-françois GIUDICELLI de la SELARL CABINET GIUDICELLI, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [W] [D]-[EU]

né le 31 Août 1944 à [Localité 13] (Espagne)

[Adresse 4]

[Localité 11]

Représenté par Me Pierre-françois GIUDICELLI de la SELARL CABINET GIUDICELLI, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON

Représenté par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 15 décembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 02 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Les consorts [D] [B] [FB] sont propriétaires d'une parcelle cadastrée AP n° [Cadastre 2], anciennement section I n°[Cadastre 8] sise [Adresse 6] .

Les consorts [H] sont propriétaires d'une parcelle voisine cadastrée AP [Cadastre 3] anciennement section I n° [Cadastre 7] au [Adresse 5].

Lorsque Mme [A] [B]-[FB] a souhaité vendre son bien en 2020, elle a fait appel à un géomètre expert, lequel s'est rendu compte que la remise dont elle se prétend propriétaire n'apparaissait pas sur sa parcelle sur le cadastre.

Pensant qu'il s'agissait d'une simple erreur de cadastre suite à un changement de numérotation du cadastre en 2004, Mme [A] [B]-[FB] a souhaité faire modifier le cadastre. Ses voisins s'y sont opposés considérant que la remise leur appartenait.

Le 27 novembre 2020, les consorts [H] ont délivré une sommation à M. [W] [D] et Mme [A] [D] d'avoir à libérer la remise selon eux illégalement occupée.

Par courrier recommandé avec avis de réception daté du 5 février 2021 adressé aux époux [D]-[EU], M. [E] [H] a notifié la reprise de possession de la remise occupée, selon lui, en toute illégalité par les époux [D]-[EU].

Le 8 février 2021, Mme [A] [B]-[FB] a porté plainte contre son voisin.

Les consorts [D]-[EU] et [B]-[FB] ont saisi le juge des référés, lequel par ordonnance en date du 31 Mai 2021 a dit n'y avoir lieu à référé en présence d'une contestation sérieuse et en l'absence de dommages imminents et trouble manifestement illicite et a rejeté l'intégralité des demandes de Mme [A] [B]-[FB] et M. [W] [D]-[EU].

Par exploit en date du 5 juillet 2021, Mme [A] [B]-[FB] et M. [W] [D]-[EU] ont assigné les consorts [H] à jour fixe devant le tribunal judiciaire d'Avignon sur le fondement des articles 544, 711, 1369, 2258 et suivants du code civil aux fins de voir constater la propriété de la remise litigieuse et voir condamner les époux [H] à des dommages et intérêts outre libération des lieux sous astreinte.

Par jugement en date du 25 novembre 2021, le tribunal judiciaire d'Avignon a :

- Dit que la remise située [Adresse 6] est la propriété de Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU].

- Ordonné la libération des lieux occupés par M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à compter de la signification de la présente décision.

- Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte.

- Débouté Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

- Condamné in solidum M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 000 euros à Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU].

- Rejeté toutes autres demandes ou plus amples formées par les parties.

- Condamné in solidum M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] aux dépens.

Par déclaration d'appel en date du 6 Janvier 2022, M. [E] [H], Mme [L] [AN] épouse [H], M. [KW] [H] et Mme [Y] [H] ont interjeté appel du jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] de leurs demandes de prononcer une astreinte et de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Les consorts [D]-[EU] quant à eux sollicitent la confirmation du jugement sauf en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes formulées au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de condamnation sous astreinte.

Par ordonnance du 05 septembre 2022, la procédure a été clôturée le 15 décembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 03 janvier 2022 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 2 mars 2023.

EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 02 août 2022, les consorts [H], appelants demandent à la cour de :

Vu les articles 544, 2272 et 2261 du code civil,

Vu le jugement en date du 25 novembre 2021 rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon,

Vu l'appel interjeté par les consorts [H] suivant déclaration d'appel n°22/00127 en date du 6 janvier 2022 enrôlée devant sous le numéro de rôle 22/00098 devant la 2 ème chambre civile section A de la cour d'appel de Nîmes,

Vu les 145 et 146 du code de procédure civile,

Vu les pièces visées,

Dire et juger recevable l'appel interjeté par M. [E] [H], Mme [L] [AN] épouse [H], Mme [Y] [H] mineure représentée par ses représentants légaux M. [E] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] et M. [KW] [H] représenté par ses représentants légaux M. [E] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H], le 6 Janvier 2022 à l'encontre du jugement en date du 25 novembre 2021 tant sur la forme que sur le fond. Y faire droit.

Réformer le jugement en date du 25 Novembre 2022 rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon en ce qu'il a :

- Dit que la remise située [Adresse 6] est la propriété de Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU].

- Ordonné la libération des lieux occupés par M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à compter de la signification de la présente décision.

- Condamné in solidum M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 000 euros à Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU].

- Rejeté toutes autres demandes ou plus amples formées par M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H].

- Condamné in solidum M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] aux dépens.

Et statuant à nouveau :

Ordonner une mesure d'expertise judiciaire et la confier à tel expert qu'il plaira à la juridiction de désigner avec pour missions de :

Convoquer les parties,

Se rendre sur les lieux du litige,

Recueillir et consigner les explications des parties, se faire remettre les documents de la cause ainsi que tous les documents nécessaires à sa mission y compris actes et plans de bornage,

Recueillir toutes informations utiles relatives à la chronologie visée par les actes authentiques de chacune des parties au litige,

Visiter l'ouvrage litigieux et le décrire,

Donner son avis sur la propriété de la remise ou desserte objet du litige sis [Adresse 6],

Dire si l'une des parties subit un trouble de jouissance et le chiffrer,

Faire toutes observations utiles à la résolution du litige,

Constater l'accord des parties s'il y a lieu,

Mettre à la charge des époux [D]-[EU] la provision à valoir sur les honoraires de l'expert judiciaire.

Débouter M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] de l'intégralité de leur demandes, fins et conclusions.

Débouter M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] de leur appel incident.

Confirmer le jugement querellé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à astreinte et en ce qu'il a débouté M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

En tout état de cause :

Condamner solidairement M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] à porter et à payer aux Consorts [H] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance.

Condamner solidairement M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] à porter et à payer aux Consorts [H] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d'appel avec distraction faite au profit de Me Nicole Dorier Sammut.

Condamner solidairement M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] aux entiers dépens de première instance et d'appel outre les frais supportés par les consorts [H] au titre du procès-verbal de constat d'huissier de justice en date du 22 Mars 2022 établi par la SCP Claudine Maze et Frédéric Baude huissiers de justice Associés à [Localité 14].

En l'état de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 mai 2022 contenant appel incident, les intimés demandent à la cour de :

Vu les articles 544, 711 et 1369 du coade civil,

Vu les articles 2258 et suivants du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,

Statuant sur l'appel formé par M. [E] [H], M. [KW] [H], Mme [Y] [H], Mme [L] [AN] Epouse [H], à l'encontre du jugement rendu le 25 novembre 2021 par le tribunal judiciaire d'Avignon,

- Confirmer le jugement en ce qu'il :

- Dit que la remise située [Adresse 6] est la propriété de Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU].

- Ordonné la libération des lieux occupés par M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à compter de la signification de la présente décision.

- Condamné in solidum M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 000 euros à Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU].

- Rejeté toutes autres demandes ou plus amples formées par M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H].

- Condamné in solidum M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] aux dépens.

Faisant droit à l'appel incident de Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU],

-Infirmer le jugement en ce qu'il :

- Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte,

- Débouté Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

Statuant à nouveau,

- Ordonner la libération des lieux occupés illégalement par les consorts [H] sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et jusqu'à la libération complète des lieux,

- Condamner M. [E] [H], M. [KW] [H], Mme [Y] [H], Mme [L] [AN] Epouse [H] à payer à Mme [A] [B]-[FB] épouse [D]-[EU] et M. [W] [D]-[EU] la somme de 10 000 euros au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive,

Y ajoutant,

- Dire que la libération des lieux occupés par M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] ainsi que de celle de tous occupants de son chef sera procédée par tous moyens et notamment, si besoin est, avec le concours de la force publique,

- Débouter M. [E] [H], M. [KW] [H], Mme [Y] [H], Mme [L] [AN] Epouse [H] de toutes leurs demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires,

- Condamner M. [E] [H], M. [KW] [H], Mme [Y] [H], Mme [L] [AN] Epouse [H] à payer à M. [W] [D]-[EU] et Mme [A] [B]-[FB] Epouse [D]-[EU] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.

Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

I - Sur l'action en revendication de la propriété de la remise :

Les deux parties revendiquent la propriété de la remise située sur la parcelle AP [Cadastre 3] selon le cadastre modifié en 2004.

L'indivision [H] considère que le cadastre mentionne cette parcelle sur sa propriété, que dans les actes de vente il est fait mention d'une surface de 50 centiares alors que selon un procès- verbal d'huissier de justice il est fait état d'une surface au sol de 21,65 m2 seulement et qu'ainsi la remise fait nécessairement partie du bien acheté en 1976. Elle fait aussi remarquer que les consorts [D]-[EU] veulent vendre le bien et ne sont plus occupants de celui-ci et qu'ils ne rapportent pas la preuve d'une possession trentenaire.

Les consorts [D]-[EU] affirment qu'outre les titres de propriété depuis 1919 faisant état de cette remise, ils établissent une possession depuis plus de trente ans. Ils font remarquer que les consorts [H] ont formulé avant de faire appel, une proposition d'achat de la remise à hauteur de 20 000 euros ou de leur maison avec la remise à hauteur de 80 000 euros.

Réponse de la cour :

L'article 711 du code civil dispose que « la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l'effet des obligations. »

L'article 544 du code civil dispose que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. »

L'article 2272 du code civil dispose que « le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ».

L'article 2258 du même code dispose que « la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi ».

L'article 2261 du code civil dispose que « Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ».

En l'espèce, les parties versent aux débats les éléments suivants :

Concernant la propriété de M. et Mme [D]-[EU] :

- l'acte authentique de vente du 25 juillet 1919 :

Il s'agit de l'acte authentique de vente en date du 25 juillet 1919 passé en l'étude de Maître [Z] [J], notaire à [Localité 11], selon lequel M. [NP] [M] et son épouse Mme [CA] ont vendu à M. [YA] [K] un immeuble à usage d'habitation sis à [Adresse 12], ainsi 'qu'une autre petite maison au même quartier servant de remise avec grenier à foin (...)' .

- l'acte de partage du 25 mai 1946 :

Il s'agit d'un acte authentique passé devant Maître [FI] [OE], notaire à [Localité 11] en date du 25 mai 1946 qui établit le partage entre Mme [P] [K], M. [LD] [K] et M. [YA] [C] [K] comprenant « une petite maison d'habitation, située à [Adresse 12] (...) figurant au cadastre de ladite commune, sous le numéro [Cadastre 8] de la section I ». Ce même acte mentionne également 'une remise située à [Adresse 12], (...) cadastrée section I, numéro [Cadastre 8]".

Ainsi, chacun de ces 2 actes authentiques, qui fait partie de la chaîne des titres de propriété antérieurs à l'acquisition des consorts [D]-[EU] mentionne bien la remise présentement en litige.

Au fil du temps, la référence précise à cette remise n'apparaît cependant plus dans les actes.

Il est versé aux débats :

- l'acte authentique de vente du 20 février 1991 :

Il s'agit d'un acte authentique en date du 20 février 1991 selon lequel les époux [D]-[EU], ont acquis de Mme [V] [K] le bien immobilier à usage d'habitation sis [Adresse 5] élevé d'un étage sur rez-de-chaussée, à [Localité 11], cadastré Section I, numéro [Cadastre 8], lieudit « Le Village» pour une contenance de 60 ca, moyennant le prix de 120 000 francs.

- l'attestation de propriété immobilière en date du 19 juillet 1985 établie par le notaire Maître [XL] [OE], selon laquelle en raison du décès de M. [C] [K], son épouse, [V] [K] née [OL] hérite du bien, ci-après désigné dans l'acte : 'une maison d'habitation sise [Adresse 12], figurant au cadastre rénové de ladite commune : section I, numéro [Cadastre 8], lieudit le village, pour une contenance de 60 centiares. Tel que l'immeuble existe, s'étend, se poursuit et comporte avec toutes les aisances, appartenances et dépendances et tous les droits y attachés, sans aucune exception ni réserve'.

Concernant les consorts [H] :

- l'acte authentique de vente du 31 mai 1976 :

Il s'agit d'un acte authentique de vente en date du 31 mai 1976 reçu en l'étude de Maître [XL] [OE] Notaire à [Localité 11], selon lequel M. [HV] [NX] acquiert de M. [HV] [N] 'une petite maison d'habitation en mauvais état avec remise et dépendance' sise à [Adresse 15], cadastrée numéro [Cadastre 7] de la section 1 'pour une superficie cadastrale au sol de 50 m2" (...) « tel que cet immeuble existe, s'étend, se poursuit et comporte, avec tous ses droits, attenances et dépendances, sans aucune exception ni réserve. ». La cour relève qu'il est mentionné dans l'acte que la propriété des lieux, imprécise, provient de la possession des lieux pendant plus de trente ans.

- l'attestation immobilière du 21 octobre 1983 passée en l'étude de Maître [XL] [OE], notaire à [Localité 11], lequel atteste la propriété de M. [HV] [NX] et Mme [X] [NX], d'un bien immobilier 'avec remise et dépendances' sise [Adresse 15], cadastré section I, numéro [Cadastre 7] pour une contenance de 50 centiares suite au décès de Mme [I] [SF] épouse [NX].

- l'acte de vente immobilière du 05 juillet 2000 selon lequel Mme [CH] [H] a acquis des consorts [NX] l'immeuble par acte authentique de vente passé en l'étude de Maître [XL] [OE], notaire à [Localité 11], la pleine propriété du bien désigné comme suit : 'un immeuble à usage de remise sis à [Adresse 5] élevé de deux étages sur rez-de-chaussée et comprenant au rez-de-chaussée : garage, au premier étage : un grenier et au deuxième étage : autre'; figurant au cadastre rénové de ladite Commune sous les références suivantes Section 1, N°[Cadastre 7], Lieudit [Adresse 5] de contenance 50 centiares ; « tel que cet immeuble existe, s'étend, se poursuit et comporte, avec tous ses droits, appartenances et dépendances, sans aucune exception ni réserve. »

- l'attestation de propriété immobilière du 24 mars 2014 : suite au décès de Mme [XT] [H], l'attestation immobilière en date du 24 Mars 2014 reçue en l'étude de Maître [T] [S] notaire à [Localité 11] lequel atteste la propriété des héritiers Mme [G] [H], M. [R] [H] et M. [E] [H] sur le patrimoine immobilier de la succession : 'sis à [Adresse 5] un immeuble à usage de remise élevé de deux étages sur rez-de-chaussée et comprenant au rez-de-chaussée : un garage, au premier étage : un grenier et au deuxième étage : autre ; cadastré section AP, N°[Cadastre 3], Lieudit [Adresse 5] Surface 50 centiares. L'acte précise « ladite parcelle antérieurement cadastrée section 1 N°[Cadastre 7] ainsi qu'il résulte d'un procès-verbal de remaniement du cadastre en date du 15 décembre 2004 publié au service de la publicité foncière d'[Localité 1] premier bureau le 15 décembre 2004 volume 2004P numéro 8977. »

- l'acte authentique de vente à titre de licitation du 26 mai 2014 selon lequel M. [E] [H] a acquis les deux tiers de Mme et M. [H] en pleine propriété de l'immeuble sis [Adresse 5] suivant l'acte, passé en l'étude de Maître [T] [S], notaire suppléant à [Localité 11], du bien désigné comme suit : ' A [Adresse 5] un immeuble à usage de remise élevé de deux étages sur rez-de-chaussée et comprenant au rez-de-chaussée garage, au premier étage un grenier, au deuxième étage autre ; cadastré section AP N°[Cadastre 3] Lieudit [Adresse 5] de surface 50ca.'

- l'acte authentique de divorce et partage amiable du 17 mars 2016 suite au divorce de M. [E] [H] et Mme [L] [AN] désigne le bien objet du litige comme suit : 'Sur la commune de [Adresse 5] un immeuble à usage de remise élevé de deux étages sur rez-de-chaussée et comprenant au rez-de-chaussée un garage, au premier étage un grenier, au deuxième étage autre ; cadastré Section AP, n°[Cadastre 3], Lieudit [Adresse 5] contenance 50 ca'.

* * *

En conséquence, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que les actes n'étaient pas suffisamment précis pour établir de manière certaine la propriété de la remise par un acte de propriété. D'ailleurs, les parties ne contestent pas cette motivation du raisonnement des premiers juges. La cour relève qu'effectivement les actes ne sont pas suffisamment précis dans la description de la remise qui change au cours d'une même chaîne de transmission de propriété et que les actes sont imprécis, rendant impossible la localisation précise de la remise au cours des 100 dernières années.

Sur la possession discutée par les parties :

L'origine de propriété des consorts [H] remonte à l'acte authentique de vente en date de 1976 dans lequel M. [HV] [NX] acquiert 'la petite maison en mauvais état avec remise et dépendance d'une superficie de 50 m2" , maison, qu'il revend à Mme [CH] [H] en octobre 1983.

M. [HV] [NX] atteste le 22 février 2021, en sa qualité d'ancien propriétaire : « j'ai jamais vendu cette remise qui est derrière nord est car elle était pas à moi, remise surélevée d'une fenière » (Sic).

L'acte de vente de 1919 et l'acte de partage de 1949 mentionnent bien la remise dans les actes de propriété des consorts [K], auteurs des consorts [D]-[EU] avant de disparaître de leur acte de vente du bien à M. et Mme [D]-[EU] en 1991.

Cependant, Mme [RJ] [IC] indique également que « je connaissais la maison avec la remise et la fenière. Mes parents étant très amis avec Mr et Mme [K] [WX] et [YA]. J'ai travaillé pendant 35 ans dans un comptoir agricole et je livrai et déposai les bouteilles de gaz dans cette remise ou était entreposer le bois et le charbon » (sic).

Mme [F] [RY] épouse [RR], nièce de Mme [K] atteste que : (la) « maison de mes grands-parents et cette remise a toujours fait partie de la maison, une dépendance au-dessus de la remise ».

Mme [U] [CH] [O] épouse [KO] indique que « j'ai habité de 1965 à 1981 dans ce quartier [Adresse 5], ma cuisine étant mitoyenne de cette remise qui appartenait à Mr et Mme [K] [YA] et en aucun cas à un autre propriétaire. Cette remise servait à entreposer le bois et le charbon, mes enfants ont joué dedans jusqu'à ce que l'on parte. D'autre part mon mari qui était entrepreneur de maçonnerie a refait toute la toiture de cette remise. La facture a été payée par Mr et Mme [K] ».

Mme [FI] [SM] indique quant à elle que « je connaissais la maison depuis 1963, celle-ci comprenait une remise qui servait à entreposer le charbon et le bois pour le chauffage ainsi que les bicyclettes, l'entrée se faisait par la rue de la Calade ».

Les consorts [H] ne versent aux débats aucun élément ou témoignage pouvant indiquer qu'ils ont eu possession de la remise litigieuse avant le mois de février 2021.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que probablement dès 1919 mais de manière certaine dès 1976, la remise objet du litige a fait l'objet d'une possession paisible, continue, non interrompue, non équivoque des consorts [K] puis [D]-[EU] jusqu'en début d'année 2021, soit pendant plus de trente ans, date à laquelle, ils ont perdu la possession de la remise par l'occupation de celle-ci pour la première fois par les consorts [NX].

Il importe peu que les consorts [D]-[EU] aient voulu vendre le bien et n'en aient plus été occupants, la possession n'exigeant pas une résidence.

L'argument selon lequel le cadastre situe la remise en 2004 sur leur parcelle est inopérant étant donné que le cadastre n'a aucune valeur juridique probatoire permettant de prouver la propriété de ladite remise.

C'est aussi à juste titre que le premier juge a refusé la demande d'expertise, le tribunal comme la cour s'estimant suffisamment éclairés.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur ces points.

II - Sur la demande de dommages et intérêts des consorts [D]-[EU] :

L'exercice d'une action en justice étant un droit et la preuve d'une intention malveillante ou d'une erreur grossière équipollente au dol n'étant pas rapportée, la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée des intimés sera rejetée.

Le jugement déféré sera donc aussi confirmé sur ce point.

III - sur la demande d'astreinte :

En vertu de l'article L.131-1 du code des procédures civiles d'exécution, « tout juge peut ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision ».

L'astreinte est prononcée dans un premier temps, à titre provisoire et pour une durée que le juge détermine selon l'article L 131-2 du même code.

Si en première instance elle n'a pas été ordonnée, force est de constater que les lieux n'ont toujours pas été libérés depuis début 2021 et qu'ainsi la demande de libération sous astreinte devient en cause d'appel justifiée.

Elle sera donc ordonnée pour un montant de 50 euros par jours passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision et pour une durée de trois mois.

Le recours à la force publique n'est en revanche à ce stade de la procédure pas nécessaire.

IV - Sur les frais du procès :

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile, et en dernier ressort,

- Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'astreinte,

Statuant à nouveau de ces chefs :

- Ordonne la libération des lieux occupés (à savoir la remise située sur la parcelle AP [Cadastre 3] anciennement [Cadastre 7], dont l'entrée s'effectue par la rue de la calade) par les consorts [H] sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir et pour une durée de trois mois,

Y ajoutant,

- Condamne M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] à payer la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel,

- Condamne M. [E] [H], Mme [Y] [H], M. [KW] [H] et Mme [L] [AN] épouse [H] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 22/00098
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;22.00098 ?
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