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16/02/2023 | FRANCE | N°21/02276

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 16 février 2023, 21/02276


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





























ARRÊT N°



N° RG 21/02276 - N°Portalis DBVH-V-B7F-ICOT



SL - NR



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

14 mai 2021 RG:19/03546



[J]



C/



Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC





















Grosse délivrée

le 16/0

2/2023

à Me Marie-ange SEBELLINI

à Me Pascale COMTE

à Me Laure REINHARD









COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre



ARRÊT DU16 FÉVRIER 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de NIMES en date du 14 Mai 2021, N°19/03546



COMPOSITION DE LA COUR L...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02276 - N°Portalis DBVH-V-B7F-ICOT

SL - NR

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

14 mai 2021 RG:19/03546

[J]

C/

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC

Grosse délivrée

le 16/02/2023

à Me Marie-ange SEBELLINI

à Me Pascale COMTE

à Me Laure REINHARD

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU16 FÉVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de NIMES en date du 14 Mai 2021, N°19/03546

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Séverine LEGER, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère

Mme Séverine LEGER, Conseillère

GREFFIER :

Mme Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 Décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 26 Janvier 2023 et prorogé au 16 Février 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [V] [J]

née le 03 Juin 1960 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie-ange SEBELLINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC

Société Coopérative à capital et personnel variables, régie par les articles L.512-20 et L.512-54 du Code Monétaire et Financier et par l'ancien Livre V du Code Rural, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de MONTPELLIER sous

le n° 492 826 417, ayant son siège social [Adresse 6], agissant par son Président du Conseil d'Administration en exercice, domicilié audit siège

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Pascale COMTE de la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

PARTIE INTERVENANTE

S.A. CNP ASSURANCES

prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Laure REINHARD de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 16 Février 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par acte du 10 juillet 2015, la SCI Pertusato a souscrit auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc (ci-après CRCAM) deux prêts, en rachat de crédits souscrits par Mme [J], caution dirigeante de la SCI, ayant opté pour une assurance incapacité :

- un prêt n° 00000560865 d'un montant de 217 521 euros,

- un prêt n° 00000560866 d'un montant de 333 179 euros.

Par acte du 7 décembre 2015, Mme [J] a souscrit auprès de la CRCAM un prêt habitat n°00000790648 d'un montant de 152 758 euros pour l'acquisition et la rénovation d'un bien situé à Boucoiran et Noziere, avec souscription à l'assurance-emprunteur.

A compter de décembre 2018, Mme [J] a dû cesser son activité en raison de maladie.

Cette dernière, en outre, était gérante-salariée de la SARL Tendance Peinture.

Elle a déclaré son sinistre auprès de la CNP, assureur des prêts, lequel a pris en charge le prêt souscrit par Madame [J].

En revanche, les prêts souscrits par la SCI Pertusato n'ont pas été pris en charge.

Par acte en date du 18 juillet 2019, la SCI Pertusato et Mme [J] ont assigné la CRCAM du Languedoc devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins de condamnation à paiement de la somme de 468 406,42 euros en réparation du préjudice subi au titre du manquement de la banque à ses obligations d'information, de mise en garde et de conseil sur le fondement des articles 1231 et suivants du code civil.

Par jugement contradictoire du 14 mai 2021, le tribunal judiciaire de Nîmes a :

- débouté Mme [V] [J] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné Mme [V] [J] aux entiers dépens de l'instance ;

- condamné Mme [V] [J] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le tribunal a retenu qu'aucun manquement au devoir de mise en garde ne pouvait être imputé à la banque au regard du caractère averti de la caution. Il a également écarté un manquement à l'obligation de conseil en ayant retenu que Mme [J] avait fait le choix, en sa qualité de gérante de la SCI emprunteuse de souscrire une assurance décès et PTIA en excluant les garanties invalidité.

Par déclaration du 13 juin 2021, Mme [V] [J] a interjeté appel de cette décision.

Par acte du 22 mars 2022, Mme [J] et la SCI Pertusato ont assigné en intervention forcée la SA CNP Assurance aux fins de voir ordonner à cette dernière de produire l'original de la demande d'adhésion à l'assurance emprunteur.

Par ordonnance contradictoire du 16 juin 2022, le conseiller de la mise en état a :

- déclaré recevable l'intervention forcée de la SA CNP Assurances ;

- ordonné à la SA CNP Assurances de produire l'original de la demande d'adhésion à l'assurance emprunteur signée par Mme [V] [J] dans le contrat n° 1229 L ;

- débouté la SA CNP Assurances de sa prétention au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamnons la SA CNP Assurances à régler les dépens de l'incident ;

- rappelé que la présente ordonnance est susceptible d'être déférée à la cour dans le délai de quinze jours de son prononcé sur le fondement des dispositions de l'article 916 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 23 septembre 2022, la procédure a été clôturée le 17 novembre 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 1er décembre 2022 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 26 janvier 2023 prorogé au 16 février 2023.

Par ordonnance du 30 novembre 2022, la clôture a été révoquée et fixée au 30 novembre 2022.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions notifiées par voie électronique le 24 novembre 2022, Mme [J] et la SCI Pertusato demandent à la cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a estimé que la CRCAM n'avait pas manqué à ses obligations d'information et de conseil en qualité de souscripteur de l'assurance groupe dont Mme [V] [J] est bénéficiaire et, statuant à nouveau de :

- prendre acte des déclarations de l'assureur CNP qui est dans l'incapacité d'exécuter l'ordonnance du conseiller de la mise en état au motif qu'elle ne détient pas l'original du contrat

d'assurance,

- condamner la CRCAM à indemniser le préjudice subi par Mme [J] du fait de l'absence de prise en charge au titre des deux prêts n°00000560865 et n° 00000560866 ;

- condamner la CRCAM au paiement d'une somme de 180 000 euros de dommages-intérêts au titre du prêt 00000560865 et à la somme de 280 000 euros de dommages intérêts au titre du prêt n° 00000560866 au profit de Mme [V] [J] ;

Subsidiairement,

- condamner la CRCAM au paiement des échéances des deux crédits au profit de la SCI Pertusato à hauteur de 1 379,82 euros pour le prêt 00000560865 et 2 113euros 49 pour le prêt n°00000560866 soit un montant total de 3 493,31 euros et ce jusqu'à la fin des crédits,

- débouter la CRCAM de toutes ses demandes fins et conclusions,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a estimé que Mme [J] ne pouvait bénéficier de somme au titre de l'article 700 en première instance ;

- condamner la CRCAM au paiement d'une somme de 2 400 euros TTC au titre de l'article 700 au titre des frais exposés dans le cadre de la procédure de première instance au profit de Mme [J],

- condamner à payer une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de Mme [J].

L'appelante fait valoir que :

- elle a souscrit l'assurance litigieuse en qualité d'associée et de gérante de la SCI,

- le contrat d'assurance étant un contrat d'adhésion, il convient de l'interpréter en sa faveur au regard des ambiguïtés contenues par la notice et ce, en application des articles 1190 du code civil et L211-1 du code de la consommation,

- la banque a engagé sa responsabilité en manquant à son obligation d'information et à son devoir de conseil alors qu'elle avait clairement exprimé sa volonté de souscrire une telle garantie,

- elle est en conséquence fondée à obtenir réparation de son préjudice en lien direct avec les manquements précités au titre de la perte de chance d'être indemnisée en application de la garantie ITT ou à obtenir la prise en charge des échéances dues par le SCI Pertusato au titre de chacun des prêts et ce, jusqu'à la fin des contrats de crédit soit un montant total de 3 493,31 euros.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 avril 2022, la CRCAM, intimée, demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- débouter Mme [J] de toutes ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger que le montant des dommages et intérêts réclamés par Mme [J] est excessif,

- le ramener à de plus justes proportions,

En tout état de cause,

- condamner Mme [J] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en sus des frais irrépétibles auxquels elle a été condamnée en première instance,

- la condamner aux entiers dépens en sus de ceux auxquels elle a été condamnée en première instance.

Elle fait valoir que :

- la preuve d'un manquement à son devoir de conseil et d'information n'est pas établie eu égard

à la renonciation délibérée à la garantie ITT/Invalidité par Mme [J], assurée expérimentée et parfaitement informée par la banque, qui a pris ce risque proportionné à sa situation personnelle en contrepartie d'une économie non négligeable de primes supplémentaires,

- de surcroît, elle ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait tout de même souscrit un contrat prenant en charge un risque plus important mais à un prix également plus important,

- subsidiairement, le préjudice de la perte de chance évoqué par l'appelante ne peut être égal au montant des sommes restant dues par le débiteur de sorte qu'il convient, en cas de condamnation, de réduire à de plus justes proportions les montant arbitraires formulés par Mme [J].

Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 juin 2022, la CNP Assurances, intervenante forcée, demande à la cour de :

- lui donner acte qu'elle produira l'original de la demande d'adhésion de Mme [J] dans le contrat numéro 1229 L dès que ladite pièce aura été déclassée,

- constater qu'il n'est formé aucune autre demande à l'encontre de CNP Assurances, lesquelles seraient en tout état de cause irrecevables et à tout le moins infondées,

- condamner in solidum Mme [J] et la SCI Pertusato à lui porter et payer une indemnité de

1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que :

- aux termes de l'article L114-1 du code des assurances et de la jurisprudence versée aux débats, toute éventuelle demande de prise en charge à son encontre serait prescrite puisque l'assignation en intervention forcée du 22 mars 2022 a été introduite plus de deux ans après le courrier du 28 juin 2018 par le biais duquel la CRCAM a informé Mme [J] de l'absence de prise en charge au titre de la garantie ;

- Mme [J] a renoncé à la garantie ITT de sorte qu'aucune prise en charge à ce titre ne saurait être effectuée.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les parties au litige :

La déclaration d'appel ayant été régularisée pour le compte de Mme [J] en sa seule qualité de personne physique, la SCI Pertusato dont Mme [J] est la gérante n'est pas partie à l'instance d'appel.

C'est donc vainement que Mme [J] présente des conclusions pour le compte de la SCI Pertusato et les prétentions formées pour le compte de cette dernière, tendant notamment à obtenir subsidiairement, la condamnation de la CRCAM du Languedoc au paiement des échéances des deux crédits au profit de la SCI Pertusato à hauteur de 1 379,82 euros pour le prêt 560865 et 2113,49 euros pour le prêt 560866 soit un montant total de 3493,31 euros jusqu'à la fin des crédits seront déclarées irrecevables.

Sur le manquement allégué à l'obligation d'information et de conseil :

Il résulte des contrats de prêt signés par Mme [J] le 10 juillet 2015 en qualité de représentante légale de la SCI Pertusato, emprunteuse, pour lesquels Mme [J] s'est également portée caution qu'il y est clairement stipulé que l'assurance souscrite est de 100 % pour le risque décès/PTIA et ce, pour chacun des deux prêts ainsi que renseigné dans les tableaux afférents aux conditions financières des prêts figurant en page 2 et 3 du contrat paraphées par Mme [J].

Il est ainsi établi que Mme [J] n'a pas souscrit l'assurance incapacité temporaire/invalidité pour les deux prêts susvisés.

Mme [J] reproche à la banque d'avoir manqué à son obligation d'information et de conseil en ce qu'elle n'a pas été suffisamment informée de l'étendue des risques couverts et de l'adéquation de l'assurance souscrite par ses soins à sa situation personnelle.

La banque conteste avoir commis un quelconque manquement à ses obligations et se prévaut de la renonciation formelle de Mme [J] aux garanties ITT/INV en se fondant sur les mentions figurant sur le bulletin d'adhésion à l'assurance. Elle soutient en outre avoir pleinement satisfait à son obligation de conseil au regard des indications renseignées dans la fiche d'information et de conseil signée par Mme [J] préconisant la souscription d'une assurance pour les garanties litigieuses.

En application de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, la banque, qui propose à son client auquel elle consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'elle a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenue de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation.

Cette obligation d'information et de conseil incombe également à la banque à l'égard de la caution du prêt consenti et ce, en dépit de la qualité avertie de l'emprunteur ou de la caution.

Les parties s'opposent en l'espèce sur l'accomplissement de cette obligation dont la preuve pèse sur la banque qui en est débitrice.

La banque produit la fiche d'information et de conseil signée par Mme [J] le 3 juillet 2015 aux termes de laquelle la banque a conseillé d'assurer :

'- 100 % du capital emprunté au titre de la garantie décès,

- 100 % du capital emprunté au titre de la garantie PTIA si vous y êtes éligible,

- 100 % des échéances au titre des garanties incapacité temporaire totale/invalidité totale si vous y êtes éligible,

- et vous garantir également contre le risque de perte d'emploi si vous y êtes éligible'.

Dans le paragraphe afférent au niveau de couverture, ce document indique que Mme [J] a souhaité assurer 100 % du capital emprunté pour les garanties décès et PTIA et 0 % des échéances pour la garantie incapacité temporaire totale/invalidité totale et que compte tenu de sa situation, elle envisageait de souscrire les seules garanties décès et PTIA, lesquelles ont été cochées sur le document, à l'exclusion des garanties ITT/INV et perte d'emploi.

C'est donc vainement que Mme [J] excipe d'une erreur sur les modalités de l'assurance souscrite, aucun élément ne permettant d'établir qu'elle avait l'intention de souscrire à l'ensemble des garanties proposées.

Il ne saurait en effet se déduire de la souscription d'une assurance couvrant le risque ITT/INV pour les prêts personnels une volonté de Mme [J] de couverture de ce risque pour le prêt consenti à la SCI Pertusato, alors que les prêts s'inscrivaient dans un contexte contractuel différent.

La fiche d'information et de conseil indique que les garanties sont détaillées dans la notice d'information du contrat d'assurance-emprunteur et fait référence à l'évocation des risques liés au non-remboursement total ou partiel des prêts en cas de décès/PTIA et des échéances en cas de problèmes de santé privant de pouvoir exercer une activité ITT/INV ou en cas de licenciement mais aucune des cases 'oui/non' afférente à l'exécution de cette formalité n'a été cochée, ni s'agissant des garanties proposées et des modalités de paiement des cotisations et leur évolution éventuelle alors qu'il est indiqué la nécessité de 'cocher obligatoirement la case concernée'.

La banque produit la copie d'un formulaire de demande d'adhésion à l'assurance emprunteur pour les deux prêts litigieux mentionnant la couverture de la garantie décès et de la garantie PTIA et l'absence de couverture des garanties ITT/INV et perte d'emploi et comportant une renonciation formelle à ces deux dernières garanties.

Mme [J] produit de son côté la copie de la demande d'adhésion assurance emprunteur qu'elle expose avoir obtenu par l'intermédiaire de son agence bancaire comportant l'apposition de sa signature sous la seule clause afférente à la renonciation formelle à la garantie perte d'emploi, la case afférente à la renonciation formelle aux garanties ITT/INV n'ayant pas été cochée et ne portant pas l'apposition de sa signature.

Il ressort cependant de l'examen comparé de ces deux pièces que ces exemplaires ne sont pas strictement identiques, la signature apposée sous la renonciation à la garantie perte d'emploi n'étant pas strictement similaire, ce qui atteste d'ailleurs du caractère variable de la signature de Mme [J].

En l'absence de production du document original de souscription en la possession de l'assureur, la contradiction entre les deux documents respectivement produits par les parties ne permet pas d'établir avec certitude que Mme [J] ait effectivement formellement renoncé aux garanties d'assurance litigieuses.

Il découle de l'ensemble de ces éléments que la banque ne justifie pas avoir éclairé Mme [J] sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle en ce qu'il n'est pas établi que celle-ci ait été clairement informée des risques liés au non-remboursement des prêts dans les différentes hypothèses concernées et notamment en cas d'incapacité temporaire totale ou d'invalidité.

La banque a ainsi manqué à son obligation d'information et de conseil à l'égard de Mme [J] lors de la souscription de l'assurance groupe proposée par ses soins à la caution personnelle des prêts octroyés à la SCI Pertusato.

Sur le préjudice :

Contrairement à l'argumentation développée par la banque, le préjudice résultant du manquement à son obligation d'information et de conseil s'analyse en une perte de chance de contracter une assurance adaptée à sa situation personnelle et toute perte de chance ouvre droit à réparation, à condition qu'elle soit certaine.

La perte de chance se mesure à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée et Mme [J] n'est par conséquent pas fondée à réclamer le montant du capital restant dû au titre des deux prêts litigieux en réparation du préjudice allégué.

Si Mme [J] justifie connaître des problèmes de santé depuis le mois de septembre 2017, il est établi que la déchéance du terme des prêts litigieux n'a pas été prononcée par la banque, les crédits étant honorés par l'emprunteur de sorte que Mme [J] n'a pas été actionnée en paiement en vertu du cautionnement souscrit par ses soins.

Les prêts litigieux ont d'ailleurs été souscrits aux fins d'acquisition d'un immeuble à usage locatif.

Mme [J] est ainsi défaillante dans la preuve d'un préjudice et sera par conséquent déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté Mme [J] de l'intégralité de ses prétentions.

Sur les autres demandes :

Succombant à l'instance, Mme [J] sera condamnée à en régler les entiers dépens, de première instance et d'appel, sur le fondement des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile sans que l'équité commande de faire application de l'article 700 de ce même code, ni au profit de la Caisse régionale de crédit agricole, ni au profit de la CNP Assurances, lesquelles seront déboutées de leur prétention au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevables les prétentions formées pour le compte de la SCI Pertusato, non partie en cause d'appel ;

Confirme le jugement déféré en l'intégralité de ses dispositions soumises à la cour ;

Condamne Mme [V] [J] aux entiers dépens de l'appel ;

Déboute les parties de leur prétention respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/02276
Date de la décision : 16/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-16;21.02276 ?
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