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09/02/2023 | FRANCE | N°21/00743

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 09 février 2023, 21/00743


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 21/00743 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H6QQ



LM



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PRIVAS

08 décembre 2020

RG:19/02945



[V]

[V]

[V]

[V]

[V]



C/



[W]





























Grosse délivrée

le

à Me Darnoux
r>Selarl Bard















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 09 FEVRIER 2023







Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PRIVAS en date du 08 Décembre 2020, N°19/02945



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Anne DAMPF...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00743 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H6QQ

LM

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PRIVAS

08 décembre 2020

RG:19/02945

[V]

[V]

[V]

[V]

[V]

C/

[W]

Grosse délivrée

le

à Me Darnoux

Selarl Bard

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 09 FEVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PRIVAS en date du 08 Décembre 2020, N°19/02945

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,

Madame Laure MALLET, Conseillère,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 Janvier 2023, prorogé à ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

Monsieur [Z] [V]

[Adresse 7]

[Localité 21]

Représenté par Me Roland DARNOUX de la SELAFA AVOCAJURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

Madame [M] [V]

[Adresse 7]

[Localité 21]

Représentée par Me Roland DARNOUX de la SELAFA AVOCAJURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

Monsieur [K] [V]

[Adresse 1]

[Localité 21]

Représenté par Me Roland DARNOUX de la SELAFA AVOCAJURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

Monsieur [G] [V]

[Adresse 18]

[Localité 21]

Représenté par Me Roland DARNOUX de la SELAFA AVOCAJURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

Madame [P] [V]

[Adresse 6]

[Localité 21]

Représentée par Me Roland DARNOUX de la SELAFA AVOCAJURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

INTIMÉ :

Monsieur [T] [W]

né le 21 Janvier 1982 à [Localité 17]

[Adresse 2]

[Localité 21]

Représenté par Me Emmanuel BARD de la SELARL CABINET BARD AVOCATS ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 20 Octobre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 09 février 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique en date du 16 novembre 2017, M. [T] [W] a acheté une maison d'habitation avec terrain attenant, situés [Adresse 2]), cadastrés ZD [Cadastre 8] et ZD [Cadastre 9].

L'accès à la maison d'habitation située sur la parcelle [Cadastre 9] se faisait avant la vente par le biais d'une tolérance sur la parcelle voisine n°ZD [Cadastre 3] appartenant en indivision à M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V], Mme [M] [V] et Mme [P] [V] (les consorts [V]), sans qu'aucune servitude conventionnelle ne soit conclue.

Sur assignation de M. [W], le juge des référés du tribunal judiciaire de Privas a ordonné le 12 juillet 2018 une expertise judiciaire sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, aux fins notamment de dire si les parcelles appartenant à M. [W] se trouvent en état d'enclave et dans l'affirmative de relever et proposer toutes solutions permettant l'accès aux parcelles précitées, en évaluant les avantages et les inconvénients respectifs ainsi que l'indemnité susceptible d'être due.

L'expert judiciaire a clôturé son rapport le 14 octobre 2019.

Par acte du 25 novembre 2019, M. [W] a fait assigner les consorts [V] devant le tribunal de grande insatnace de privas devenu tribunal judiciaire aux fins notamment d'établissement d'une servitude de passage.

Par jugement du 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Privas a :

Vu les articles 455 et 753 du code de procédure civile,

-dit que la parcelle DZ [Cadastre 9] appartenant à M. [T] [W] est enclavée,

-dit qu'une servitude de passage desservant la parcelle DZ [Cadastre 9] est fixée selon l'actuelle desserte d'une surface de 88m2 sans qu'un élargissement ne puisse être réalisé,

-fixé l'indemnité d'éviction à la somme de 6.600 euros,

-condamné M. [T] [W] à payer à M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] ladite somme de 6.600 euros à titre d'indemnité d'éviction,

-rejeté l'ensemble des demandes de M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V],

-condamné M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] à payer à M. [T] [W] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] aux entiers dépens,

-rappelé que la présente décision bénéfice de l'exécution provisoire,

-rejeté toute autre demande.

Par déclaration du 22 février 2021, M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V], Mme [M] [V] et Mme [P] [V] ont relevé appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 18 mai 2021, auxquelles il est expressément référé, M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V], Mme [M] [V] et Mme [P] [V] demandent à la cour de:

- recevoir M. et Mme [Z] [V], M. [G] [V], M. [K] [V] et Mme [P] [V] en leur appel et le déclarer bien fondé.

Réformer la décision du tribunal judiciaire de Privas du 8 décembre 2020,

A titre principal.

-débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes faute d'avoir appelé à la cause l'ensemble des propriétaires concernés,

-dire et juger que la parcelle ZD [Cadastre 9], propriété de M. [T] [W], n'est pas enclavée à charge pour lui de réaliser des travaux d'aménagement et de faire une demande de permission de voirie, fort des travaux accomplis.

A titre subsidiaire.

-débouter M. [T] [W] de sa demande de désenclavement depuis la parcelle [Cadastre 3] et voir tenir la solution telle que définie par l'expert, selon le tracé A-B, avec accès [Adresse 16].

A titre infiniment subsidiaire.

-constater le dommage subi par le fonds servant propriété des consorts [V] et condamner M. [W] au paiement d'une indemnité de 50.000 € ou à défaut à la somme de 18.480 € telle que calculée par M. l'expert.

-débouter M. [W] de ses autres demandes.

-le condamner au paiement d'une indemnité de 2.000 € au profit de chaque indivisaire appelant en application de l'article 700 du code de procédure civile.

-condamner M. [W], demandeur à l'instance, aux dépens, en particulier les frais d'expertise alors que celle-ci ne sert qu'exclusivement à son fonds dont il a fait l'acquisition pour un prix d'achat très réduit et en toute connaissance de cause.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 7 juin 2021, auxquelles il est expressément référé, M. [T] [W] demande à la cour de :

Vu les articles 682 et suivants du code civil,

-confirmer le jugement du 8 décembre 2020 en toutes ses dispositions,

-débouter les consorts [V] de toutes leurs demandes

-condamner les consorts [V] à verser une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-condamner les consorts [V] aux dépens d'appel.

La clôture de la procédure est intervenue le 20 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces du dossier d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

Sur l'état enclave,

Selon l'article 682 du code civil « Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de son fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ».

Le droit pour le propriétaire d'un fonds enclavé de réclamer un passage sur les fonds de ses voisins est accordé en fonction de l'utilisation normale dudit fonds, quelle qu'en soit la destination.

Se trouve en état d'enclave le fonds qui n'a aucune issue ou qu'une issue insuffisante sur la voie publique, le passage devant s'entendre de tout ce qui est indispensable afin d'assurer les communications en vue de l'utilisation normale du fonds enclavé.

Les appelants soutiennent que la parcelle cadastrée [Cadastre 9] appartenant à M. [W] n'est pas enclavée puisqu'elle possède une façade directe sur la [Adresse 20] et qu'il lui appartient de réaliser les travaux d'aménagement nécessaires pour accéder à son fonds et de solliciter une permission de voirie.

Il est constant que la desserte de la propriété de l'intimé résultait d'une tolérance sur la parcelle cadastrée [Cadastre 3] qui a cessé.

Par ailleurs, il ressort de la lecture du plan cadastral, des photographies versées aux débats et du rapport d'expertise judiciaire que la parcelle [Cadastre 9] possède une façade sur la [Adresse 20], appellation en agglomération de la commune de [Localité 21] de la route départementale N° 379.

Cependant, il résulte du rapport d'expertise judiciaire ( pages 13 et 14) que le règlement relatif à la voirie départementale de l'Ardèche impose des conditions de visibilité pour obtenir une permission de voirie qui ne sont pas remplies en l'espèce et qui serait donc refusée.

Le premier juge a pertinemment relevé que suite à la demande de M. [W], le responsable de l'entretien routier de la commune dans un courriel du 8 novembre 2017 et la direction des routes et des mobilités du département dans son courrier du 12 juin 2018 ont indiqué qu'il n'est pas possible de créer un accès à la route départementale par cette face, en raison de la configuration des lieux : dénivelé du terrain, courbe entraînant une absence de visibilité dangereuse au regard des vitesses constatées à cet endroit de la route et qu'une permission de voirie n'est pas envisageable pour des raisons de sécurité.

Au demeurant, M.[L] indique que même si la visibilité était possible, ce qui n'est pas le cas, l'aménagement à réaliser pour l'accès serait très conséquent.

Dès lors les travaux à réaliser seraient disproportionnés.

Le fait que M.[W] ait été averti de l'enclave de son terrain lors de son acquisition est indifférent à la situation d'enclave et ainsi à la nécessité d'établir une servitude.

En conséquence le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 9].

Sur le tracé de désenclavement,

Selon l'article 685 du code civil « l'assiette et le mode de servitude pour cause d'enclave sont déterminés par trente ans d'usage continu.»

Comme l'a pertinemment apprécié le premier juge, si l'accès actuel à la propriété de M. [W] ( tracé H-I) existe depuis au moins 1946, ce dernier ne rapporte pas la preuve que ce chemin d'accès a été utilisé de manière continue pendant trente ans.

Par conséquent, le moyen tenant à la prescription trentenaire de l'assiette de la servitude ne saurait prospérer.

Selon l'article 683 du code civil « Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique.

Néanmoins, il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé. »

Les appelants font valoir que l'ensemble des propriétaires n'a pas été appelé à la cause alors, d'une part, que l'expert judiciaire a examiné quatre tracés possibles sur les propriétés voisines et, d'autre part, que le tracé H-I par le fonds des consorts [V] suppose un élargissement sur les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] dont les propriétaires ne sont pas dans la cause.

La rédaction de l'article 683 du code civil n'implique pas nécessairement la mise en cause de tous les propriétaires concernés dès lors que les juges sont en mesure, au vu des constatations et des pièces produites, de déterminer le chemin approprié répondant aux conditions de ce texte.

Or, en l'espèce, le chemin de désenclavement revendiqué par M. [W] concerne uniquement le fonds [Cadastre 3] des consorts [V] sur une largeur de 2 mètres tel qu'il existe actuellement et qui débouche sur une voie publique (l'[Adresse 18]), l'intimé ne sollicitant nullement un élargissement de ce chemin sur les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5].

Dès lors, en l'état de ces demandes et la cour disposant compte tenu de l'étude expertale des éléments lui permettant d'apprécier le chemin le plus court et le moins dommageable, la mise en cause d'autres propriétaires par l'intimé est inopérante.

Il appartenait aux appelants, qui soutiennent que le passage devrait être pris sur une autre propriété selon le tracé A-B, d'appeler en cause M. [H] et Mme [C].

L'expert judiciaire a étudié quatre tracés de désenclavement:

-tracé A-B : desserte par la parcelle [Cadastre 15] suivant le tronçon A-B situé dans la propriété de M. [H] et Mme [C],

-tracé C-D : desserte par la parcelle [Cadastre 10] suivant le tronçon C-D situé dans la propriété de Mme [A] née [O],

-tracé E-F-G : desserte par les parcelles [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 13] suivant les tronçons E-F-G situés dans les propriétés de M. [D] et Mme [B] pour la parcelle [Cadastre 11] et Pierre Avenir Immobilier pour les parcelles [Cadastre 12] et [Cadastre 13],

-tracé H-I : desserte par la parcelle [Cadastre 3] suivant le tronçon H-I situé dans la propriété de l'indivision [V] correspondant à l'accès bétonné existant.

Les tracés C-D et E-F-G ne sont revendiqués par aucune des parties. Il ressort par ailleurs des constatations de l'expert, qui les a écartés :

-que le tracé C-D (longueur 32 mètres, largeur 4 mètres, emprise 256 m2 environ) se heurte à l'aménagement existant à l'accès de la route de [Localité 19] (bordure de trottoir et accotement en talus léger bordant cette vois communale) et nécessiterait eu égard au terrain fortement pentu et boisé de gros travaux de terrassement qui amputeraient significativement l'espace sur la parcelle [Cadastre 10],

-que le tracé E-F-G (longueur 112 mètres, largeur 4 mètres, emprise 448 m2 environ) dans le tronçon E-F n'est plus praticable en véhicule de par la construction bâtie sur la parcelle [Cadastre 14] et les aménagements des abords, que les parcelles [Cadastre 12] et [Cadastre 13] sont noyées dans la végétation et présentent de forts dénivelés, et que ce tracé de grande longueur porte sur plusieurs propriétés différentes.

Restent deux tracés, celui revendiqué par M. [W] (H-I) et celui (A-B) indiqué par les appelants.

L'homme de l'art précise que même si ce tracé existe dans sa première partie, il exige pour atteindre le fonds [W] le franchissement du ruisseau de Limousin avec un ouvrage pouvant laisser passer l'eau en cas de forte pluviométrie, que par ailleurs la parcelle [Cadastre 15] est soutenue par un enrochement ce qui créé un dénivelé supplémentaire entre les terrains et complique le franchissement du ruisseau, que de gros travaux seraient donc à réaliser pour concilier franchissement du ruisseau et pente du terrain.

Eu égard à l'ampleur et la technicité des travaux, ce tracé ne peut être retenu.

En revanche, le tracé H-I qui correspond à l'actuelle desserte, et qui existe depuis au moins 1946 comme le révèle l'analyse des photographies aériennes effectuée par l'expert, se présente à la fois comme le tracé le plus court et ne nécessitant aucun aménagement particulier.

Quant à la largeur de deux mètres, comme indiqué ci-avant, M. [W] ne sollicite pas son élargissement à quatre mètres et, comme noté par le premier juge, il est constant que le chemin d'accès, tel qu'il existe actuellement était utilisé par l'ancien propriétaire de la maison de M. [W], lequel n'a jamais eu de difficulté au regard de la largeur de l'impasse attenante comprise entre l,50 et 2 mètres.

Par conséquent, le chemin d'accès tel qu'il existe à ce jour est suffisant pour permettre l'accès au fonds de l'intimé, il est le plus court et le moins dommageable.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu le tracé H-I comme tracé de désenclavement.

Sur l'indemnisation des consorts [V],

Le propriétaire du fonds au bénéfice duquel est reconnu un droit de passage doit verser à celui du fonds grevé de cette servitude une indemnité proportionnée au dommage qui peut en résulter.

L'indemnité doit être calculée en tenant compte du seul dommage occasionné au fonds servant, et elle doit être proportionnelle au dommage subi.

L'expert judiciaire propose une indemnité d'un montant de 18 480 € selon le calcul suivant :

Indemnité de base : 150 € x 88 m2 = 13 200€

Coefficient correctif pour cession forcée : 2

Coefficient correctif pour utilisation par le fonds servant : 0,70

Le premier juge a fixé l'indemnité à la somme de 150 euros (valeur vénale) x 88 m2 (surface du terrain) x 0,5 (coefficient de pondération) = 6.600 €

L'intimé sollicite la confirmation du jugement déféré tandis que les appelants sollicitent la somme de 50 000 € et à titre subsidiaire, celle de 18 480 € .

Ils font valoir que la parcelle [Cadastre 3] est un terrain constructible et que la maison qui pourrait être construite sur la parcelle [Cadastre 3] subirait de manière très rapprochée le passage des voitures, occasionnant une gêne, notamment sonore puisque le terrain de Monsieur [W] monte jusqu'à la maison, subissant ainsi une dépréciation.

La méthode d'évaluation dite « classique » consiste à calculer la superficie de l'assiette du futur droit de passage sur le fonds servant, en la multipliant par la valeur estimée du terrain au mètre carré puis en appliquant un taux d'abattement, ou coefficient de pondération.

L'expert a retenu à tort un coefficient correcteur pour vente forcée puisqu'il ne s'agit pas d'une vente forcée, la servitude n'entraînant pas une dépossession totale du propriétaire du fonds servant.

Quant au coefficient pour utilisation par le fonds servant, elle est comprise dans l'abattement.

Il convient dès lors d'examiner les différents critères de fixation de l'indemnité.

En l'espèce, la superficie de l'assiette de la servitude est de 88 m2.

L'expert a fixé la valeur vénale du m2 à la somme de 150 €.

Force est de constater que les appelants n'ont pas contesté cette évaluation dans leurs dires adressés à l'expert.

Par ailleurs, le premier juge a pertinemment retenu que l' avis de valeur du 22 janvier 2020 produit par les consorts [V] estimant à 50.000 € le coût de la dépréciation subie par une servitude desservant la parcelle ZD [Cadastre 9] d'une assiette foncière d'environ 100 m2 pour détacher un terrain à bâtir sur ce secteur, en considérant que le terrain restant serait plus difficile à vendre est en contradiction avec la proposition d'achat de la parcelle entière alléguée par les appelants s'élevant à 120.000 euros, les sommes en jeu semblant peu compatibles.

En outre, le taux correcteur pour indisponibilité du terrain d'assiette doit être justement fixé à 40 % du prix, étant rappelé que l'assiette se situe donc sur un chemin déjà existant depuis au moins 1946, que l'établissement de la servitude n'exige aucune construction sur le fonds servant, que les nuisances sonores invoquées ne sont qu'hypothétiques, les consorts [V] ne justifiant pas de leur intention de détacher cette portion de terrain pour la vendre indépendamment de l'intégralité de la parcelle [Cadastre 3] et que si effectivement le terrain est constructible, critère qui se doit d'être retenu puisque une partie du terrain d'une superficie de 300 m2 sera séparée du reste de la propriété, l'expert judiciaire a cependant clairement indiqué que « conserver le passage existant n'est pas un frein à la création d'un terrain à bâtir concrètement vendable, dès lors que cette superficie pourrait être augmentée en ne tenant pas compte du mur existant faisant clôture de la maison [V] ou en y intégrant l'accès qui servirait alors d'accès à la maison à construire et à la maison [W] par servitude »

En conséquence, infirmant le jugement déféré, l'indemnité due par M. [W] aux consorts [V] sera fixée à la somme de 150 euros (valeur vénale du m2 ) x 88 m2 (surface de l'assiette de la servitude ) x 0,6 (coefficient de pondération) = 7 920 €

Sur les demandes accessoires,

Les condamnations au titre des dépens et des frais irrépétibles de première instance seront infirmées.

S'agissant d'une action en désenclavement, M.[W] supportera les dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise judiciaire.

Il n'est pas inéquitable de laisser supporter aux appelants leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement après en avoir délibéré conformément à la loi par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé l'indemnité d'éviction à la somme de 6.600 €, condamné M. [T] [W] à payer à M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] ladite somme de 6.600 € à titre d'indemnité d'éviction, condamné M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] à payer à M. [T] [W] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a condamné M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] aux entiers dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Fixe l'indemnité due par M. [T] [W] à M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] à la somme de 7 920 €,

Condamne M. [T] [W] à payer à M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] la somme de 7 920 € à titre d'indemnité,

Condamne M. [T] [W] aux dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise judiciaire,

Déboute M. [Z] [V], M. [K] [V], M. [G] [V] et Mme [P] [V] de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Arrêt signé par la présidente et la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/00743
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;21.00743 ?
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