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27/01/2023 | FRANCE | N°22/02368

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 27 janvier 2023, 22/02368


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/02368 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IP6V



CS



JURIDICTION DE PROXIMITE D'UZES

19 avril 2022

RG :1222000135



[B]



C/



[Y]





Grosse délivrée

le

à







COUR D'APPEL DE NÃŽMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 27 JANVIER 2023



Décision défÃ

©rée à la Cour : Ordonnance du Juridiction de proximité d'UZES en date du 19 Avril 2022, N°1222000135



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des av...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/02368 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IP6V

CS

JURIDICTION DE PROXIMITE D'UZES

19 avril 2022

RG :1222000135

[B]

C/

[Y]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÃŽMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 27 JANVIER 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juridiction de proximité d'UZES en date du 19 Avril 2022, N°1222000135

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Corinne STRUNK, Conseillère faisant fonction de Présidente

M. André LIEGEON, Conseiller

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Janvier 2023, prorogé au 27 Janvier 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [T] [B]

né le 24 Avril 1984 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Isabelle PORCHER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

Madame [S] [C] [Y] divorcée [B]

née le 25 Mai 1954 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Philippe HILAIRE-LAFON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 28 novembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Corinne STRUNK, Conseillère faisant fonction de Présidente le 27 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [S] [Y] et M. [R] [B] ont contracté mariage le 18 août 1976, sans contrat préalable, et ont eu deux enfants : M. [X] [B] et M. [T] [B], nés respectivement le 9 décembre 1979 et le 24 avril 1984.

Par jugement rendu le 9 mars 2007, le tribunal de grande instance de Nîmes a prononcé le divorce des époux [Y]/[B], ordonné la liquidation des intérêts patrimoniaux et a dit que M. [B] versera à Mme [Y] une prestation compensatoire sous la forme d'un capital de 40.000 euros à compter de la vente de l'immeuble commun et, au plus tard, dans un délai de deux ans à partir de la signification de la décision.

Suivant jugement rendu le 14 août 2018, cette même juridiction a notamment :

- fixé à 175.000 euros la valeur du bien sis aux [Localité 3], au numéro [Adresse 2], ayant constitué le domicile conjugal,

- attribué à Mme [S] [Y] ce bien immobilier, au visa des articles 831 et suivants et 1476 du code civil,

- fixé la date de la jouissance divise de cet immeuble à la date du prononcé du présent jugement,

- fixé à 450 euros le montant de l'indemnité mensuelle due par Mme [S] [Y] à l'indivision à compter du 1er août 2011 jusqu'à la date du présent jugement.

Se prévalant d'une occupation du rez-de-chaussée de cet immeuble depuis plusieurs années, et dénonçant le changement de serrures des portails et portillon d'accès de la maison par Mme [Y] au mois de juillet 2021, M. [T] [B] faisait constater, par huissier de justice le 27 juillet 2021, l'impossibilité qu'était la sienne de rentrer dans ledit logement.

Sur requête présentée par M. [T] [B] et par ordonnance du 10 septembre 2021, le juge des contentieux de la protection d'Uzès l'a autorisé à rentrer dans les lieux, accompagné si besoin de Maître [A] [K], Huissier de Justice à [Localité 5], assisté d'un serrurier.

Par exploit d'huissier du 2 mars 2022, Mme [S] [Y] divorcée [B] a fait assigner M. [T] [B] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Uzès afin de solliciter la rétractation de l'ordonnance rendue le 10 septembre 2021 et le voir déclarer occupant sans droit ni titre de l'immeuble [Adresse 2]) et ordonner son expulsion avec toutes conséquences de droit.

Par ordonnance de référé-rétraction en date du 19 avril 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Uzès a :

- jugé n'y avoir lieu à rétracter l'ordonnance rendue sur requête le 10 septembre 2021, mais seulement à en modifier les dispositions comme il suit :

- « Autorisons M. [T] [B] à pénétrer dans la propriété de Mme [S] [Y] sis à [Adresse 2], accompagné d'un huissier de justice et, si besoin d'un serrurier, afin de débarrasser et évacuer tous ses effets personnels, matériels et autres encombrants lui appartenant ou délaissés dans l'appartement précédemment occupé ainsi que sur le terrain et autres espaces au sein de ladite propriété ;

- Assortissons cette mesure d'une astreinte comminatoire de 150 euros par jour de retard UN MOIS après la notification de la présente décision ;

En application de l'article L.131-3 de code des procédures civiles, nous réservons le pouvoir de liquider ladite astreinte ; »

- décidé du partage des dépens ;

- débouté Mme [S] [Y] de sa demande au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit ne pas avoir lieu à statuer sur ses demandes plus amples et la renvoyons à mieux se pourvoir.

Par déclaration du 2 août 2022, M. [T] [B] a interjeté appel de cette ordonnance en ce qu'elle a :

- autorisé M. [T] [B] à pénétrer dans la propriété de Mme [S] [Y] sis à [Adresse 2], accompagné d'un huissier de justice et, si besoin d'un serrurier, afin de débarrasser et évacuer tous ses effets personnels, matériels et autres encombrants lui appartenant ou délaissés dans l'appartement précédemment occupé ainsi que sur le terrain et autres espaces au sein de ladite propriété ;

- assorti cette mesure d'une astreinte comminatoire de 150 euros par jour de retard un mois après la notification de la présente décision, le tribunal s'étant réservé le pouvoir de liquider ladite astreinte ;

- décidé du partage des dépens.

Par ordonnance de référé du 23 septembre 2022, le Premier Président de la cour d'appel de Nîmes a notamment ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance du 19 avril 2022 au profit de M. [T] [B].

Aux termes de conclusions notifiées le 3 novembre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, M. [T] [B], appelant, demande à la cour, de :

- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- la condamner à lui verser la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

M. [T] [B] expose, à l'appui de son appel, que sa mère occupe le premier étage de l'immeuble litigieux depuis 2011 tandis qu'il réside au rez-de-chaussée avec l'autorisation de cette dernière et de son père. Il se prévaut d'un accord passé avec ces deux parents, attestés par deux courriers séparés, consistant en une occupation gratuite de l'habitation en échange de la réalisation de travaux d'entretien et de gardiennage.

Il affirme donc que l'appartement en rez-de-chaussée constitue bien son logement, et ce, depuis plusieurs années, ce dont il justifie par les taxes habitation, des papiers administratifs et attestations.

Il précise d'ailleurs qu'aucun jugement n'a prononcé son expulsion et ajoute qu'il n'est privé de son habitation que par les voies de fait commises par Mme [Y] consistant au changement de serrures des portails et portillon d'accès à la maison, outre la pose d'une chaîne, par le saccage de son appartement, la coupure de l'eau courante, la détérioration de sa boîte aux lettres et le vol de ses affaires personnelles.

Cette voie de fait a été constatée dans un procès-verbal établi le 27 juillet 2021 par Me [K], huissier de justice, et il déclare avoir déposé plainte contre Mme [Y] pour le vol de ses affaires personnelles et les dégradations. Il est aujourd'hui privé de l'accès à son domicile.

Enfin, il indique que si sa mère entend obtenir son départ, elle devra préalablement obtenir une décision du juge des contentieux de la protection afin de voir prononcer son expulsion, en précisant que n'étant pas la seule propriétaire de ce bien, qui est en indivision post-communautaire avec son ex-mari, M. [R] [B], la procédure d'expulsion sera à engager par les deux parties.

Par conclusions notifiées le 2 décembre 2022, l'appelant demande à la cour de :

- prononcer le rabat de l'ordonnance de clôture en date du 28 novembre 2022,

- le recevoir en ses conclusions et l'y dire bien fondé,

- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- la condamner à lui verser la somme de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Tout en maintenant les moyens repris dans les conclusions notifiées par RPVA le 3 novembre 2022, il sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture au motif que l'intimée a régularisé de nouvelles conclusions et transmis de nouvelles pièces le 24 novembre 2022 auxquelles il n'a pu répondre en présence d'une clôture des débats intervenue le 28 novembre 2022, ce qui est contraire au principe du contradictoire.

Mme [S] [Y] divorcée [B], en sa qualité d'intimée, par conclusions en date du 22 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa de l'article 901 du code de procédure civile, de :

- juger nulle la déclaration d'appel pour adresse mensongère et injustifiée,

- débouter M. [T] [B] de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions,

Subsidiairement et au fond,

- débouter M. [T] [B] de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions comme non établies et non fondées,

- confirmer en toutes ses dispositions la décision dont appel,

Reconventionnellement,

- condamner M. [T] [B] à porter et payer à Mme [Y] les sommes suivantes :

' 10.000 € pour procédure abusive en application de l'article 1240 du code civil,

' 3.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [T] [B] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A titre liminaire, Mme [S] [Y] rappelle que, suivant jugement définitif en date du 14 août 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Nîmes, l'immeuble litigieux lui a été attribué, en application des dispositions des articles 831 et suivants du code civil ainsi que l'article 1476 du code civil, avec la fixation de la date de jouissance divise de ce bien à celle du prononcé du jugement. Elle conteste donc la propriété indivise de l'immeuble telle qu'elle est revendiquée par son fils.

Elle expose par ailleurs que M. [T] [B] squatte le local du rez-de-chaussée avec la bénédiction de son père, bien qu'il n'ait plus aucun droit sur l'immeuble en l'état du jugement de liquidation. L'intimée évoque à cet égard une simple tolérance quant à la présence de son fils au sein de l'habitation. Après lui avoir demandé à de nombreuses reprises de quitter les lieux, elle a constaté son départ définitif au mois de février 2021, date à laquelle elle a procédé au changement de serrures.

Elle conteste donc toute voie de fait et affirme qu'en sa qualité de propriétaire des lieux, elle était en droit de procéder au changement de serrures après son départ définitif en février 2021.

Elle souhaite mettre fin à ce commodat, lasse de vivre dans cette déchetterie, même si elle a pu autoriser une occupation sur le bien indivis. Elle ajoute que M. [T] [B] a transformé sa maison en une décharge d'ordures et une casse de véhicules, mais encore qu'il a vécu à ses crochets puisqu'elle payait tout, y compris l'électricité du logement occupé par son fils et ce pendant près de 10 ans.

Elle dénonce ainsi la violation par son fils des dispositions de l'article 1880 du code civil, compte tenu de l'état dans lequel se trouve le bien mis à sa disposition, comme cela résulte du procès-verbal de constat dressé par l'huissier de justice.

Elle relate enfin que M. [T] [B] n'est jamais venu récupérer ses effets personnels bien qu'autorisé par l'ordonnance déférée du 19 avril 2022, signifiée le 28 juin 2022, alors que rien ne l'empêchait de le faire.

Pour finir, elle fait valoir qu'en saisissant la cour d'un appel injustifié avec une fausse domiciliation dans le cadre de celui-ci, M. [T] [B] a commis un abus de droit d'ester en justice qui devra être réparé par application des dispositions de l'article 1240 du code civil. Elle met enfin en exergue que le comportement de M. [T] [B], avec la complicité de son père, a des répercussions extrêmement importantes sur son état de santé psychologique justifiant ainsi sa demande indemnitaire.

La clôture de la procédure est intervenue le 28 novembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 5 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur le rabat de l'ordonnance de clôture :

M. [T] [B] a notifié de nouvelles écritures le 2 décembre 2022, soit postérieurement à la clôture de la procédure fixée au 28 novembre 2022 par l'ordonnance du 1er septembre 2022.

Il sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture expliquant que l'intimée a régularisé de nouvelles conclusions et pièces auxquelles il n'a pu répondre en présence d'une clôture des débats intervenue le 28 novembre 2022, et ce, en méconnaissance du principe du contradictoire.

Aux termes de l'article 803 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

M. [B] ne justifie d'aucune cause grave à l'appui de sa demande de révocation et ne démontre pas l'impossibilité de répondre avant la clôture aux conclusions notifiées par l'intimé le 22 novembre 2022, puisqu'il disposait d'un délai de 6 jours.

Il sera donc débouté de la demande de rabat de l'ordonnance de clôture et ses écritures notifiées par RPVA, le 2 décembre 2022, seront, par conséquent, déclarées irrecevables.

Sur la nullité de la déclaration d'appel :

Mme [Y] sollicite la nullité de la déclaration d'appel au motif que M. [T] [B] a déclaré une adresse mensongère et injustifiée chez M. [U] [Adresse 1], qui est le père de sa concubine avec qui il vit.

Il n'est pas établi que l'adresse mentionnée dans l'acte d'appel soit erronée alors même que M. [B] s'est trouvé contraint de trouver une adresse différente en raison de l'impossibilité d'accéder au logement des [Localité 3] du fait des dispositions prises par l'intimée visant à lui en interdire l'accès.

De surcroît, et dans l'hypothèse où est retenue une erreur d'adresse, celle-ci est constitutive d'un vice de forme au sens de l'article 114 du code de procédure civile susceptible de motiver la nullité de l'acte s'il est rapporté la preuve d'un grief. Or, Mme [Y] ne justifie pas la preuve d'un grief causé par cette situation.

La demande de nullité de la déclaration d'appel sera rejetée.

Sur le bien-fondé de demande :

Selon l'article 496 alinéa 2 du code de procédure civile, dès lors que la partie a saisi, aux fins de rétractation, le juge qui a rendu l'ordonnance sur requête, celui-ci statue en exerçant les pouvoirs du juge des référés.

En appel, la cour examine l'instance en rétractation de l'ordonnance sur requête au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 835 alinéa 1er, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il résulte des éléments du dossier et des déclarations respectives des parties que M. [T] [B] a occupé à partir de l'année 2011 l'immeuble litigieux qui constituait alors l'ancien domicile conjugal des époux [B]/[Y].

Cette occupation résulte d'une autorisation donnée par ses deux parents qui peut être vérifiée s'agissant de Mme [Y] au moyen de trois courriers qu'elle a établis les 28 juillet 2011, 13 novembre et 10 décembre 2020.

Dans le premier, elle se déclare résidente avec son fils [T] à partir du 1er août 2011 de l'habitation litigieuse afin qu'elle puisse lui venir en aide et précise à ce titre qu'il va assurer l'entretien et le gardiennage du bien en fonction de son état de santé.

Dans le second courrier, elle évoque la présence de l'appelant dans les lieux depuis 2011, sans la contester dans son principe, faisant grief pour l'essentiel à M. [T] [B] de ne pas participer aux charges générées par son occupation en-dehors de la fourniture du bois pour l'habitation. Il résulte enfin de la dernière correspondance que M. [T] [B] dispose des clés de la partie basse de la maison litigieuse que Mme [Y] souhaite récupérer.

Il s'en déduit que l'occupation est effective et acceptée par l'intimée à compter du 1er août 2011, date à laquelle M. [T] [B] a établi sa domiciliation au [Adresse 2]. L'appelant justifie par ailleurs de l'occupation permanente du bien depuis une dizaine d'années par la production de diverses attestations concordantes et de divers documents fiscaux (avis d'impôt, taxe d'habitation de 2012 à 2020), outre une facture.

Par courrier du 11 décembre 2020, Mme [Y] a fait part à l'appelant de sa volonté de le voir quitter le rez-de-chaussée de la maison dont elle occupe le premier étage, faisant valoir notamment que ce dernier refuse toute participation aux charges de l'habitation.

En première instance et en appel, elle prétend que son fils a quitté définitivement le logement litigieux en février 2021, comme en attestent selon elle les factures EDF traduisant une baisse de la consommation, ce qui l'autorisait de ce fait, en sa qualité de propriétaire des lieux, à procéder aux changements de serrures, ce qu'elle reconnaît, et sans que cela ne constitue une voie de fait.

M. [T] [B] conteste ce départ volontaire du logement en février 2021 et considère avoir été privé de l'accès à son appartement par la seule voie de fait commise par sa mère. Il produit en ce sens un procès-verbal de constat d'huissier de justice en date du 27 juillet 2021 ainsi qu'une main-courante datée du 25 septembre 2021 dans laquelle il dénonce les obstacles mis en place par sa mère le privant ainsi de tout accès.

Outre le différend opposant les parties sur l'effectivité d'un départ en février 2021, elles s'opposent sur la qualification juridique de cette occupation, Mme [Y] évoquant son droit de propriété sur le bien litigieux et la possibilité de mettre un terme à ce commodat quand elle le souhaite, M. [B] se prévalant quant à lui d'une occupation gratuite en échange de la réalisation de travaux d'entretien et de gardiennage.

En l'état, s'il n'appartient pas au juge des référés, juge de l'évidence, d'examiner la qualification juridique de cette occupation ni les modalités légales pour y mettre un terme, il est toutefois de sa compétence d'apprécier si la décision prise par Mme [Y] consistant au changement de serrures des portails et portillon d'accès à la maison, outre la pose d'une chaîne, constitue ou non un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser.

En premier lieu, et conformément aux éléments visés supra, M. [B] justifie d'un domicile aux [Localité 3] au numéro [Adresse 2] depuis l'année 2011, et ce, pendant une durée continue d'une dizaine d'années sans que la légitimité de son occupation initiale ne soit remise en cause.

En deuxième lieu, Mme [Y] n'apporte pas la preuve du départ volontaire et définitif de son fils à compter du mois de février 2021, la production de factures EDF attestant d'une réduction de la consommation électrique à cette date ne pouvant suffire à établir un changement volontaire de résidence, de sorte que son domicile était établi à l'adresse litigieuse en juillet 2021.

Par ailleurs, qu'il s'agisse d'un commodat comme le soutient l'intimée ou d'un bail payable en « nature » comme allégué par l'appelant, il n'en demeure pas moins que Mme [Y] ne pouvait se dispenser du respect de certaines formalités notamment judiciaires pour récupérer le logement, dont elle s'estime propriétaire, en l'absence de départ volontaire de son fils et procéder ainsi par voie de fait.

En outre, faute pour l'intimée de rapporter la preuve suffisante du départ volontaire de son fils à compter du mois de février 2021 et de l'établissement d'une nouvelle résidence, il convient de considérer que le changement de serrures des portails et portillon d'accès de la maison par Mme [Y] au mois de juillet 2021 ont eu pour effet de priver M. [T] [B] de son logement et constituent une atteinte au droit de l'appelant au respect de son domicile protégé telle qu'énoncé par l'article 8 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme (CESDH).

En conséquence, en présence d'un trouble manifestement illicite qui ne peut cesser qu'en autorisant l'appelant à réintégrer son domicile, il convient de confirmer l'ordonnance de référé-rétraction du 19 avril 2022 rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Uzès en ce qu'elle a jugé n'y avoir lieu à rétracter l'ordonnance rendue sur requête le 10 septembre 2021, mais de l'infirmer en ce qu'elle en a modifié les dispositions en autorisant M. [T] [B] à pénétrer dans la propriété de Mme [S] [Y] sis à [Adresse 2], accompagné d'un huissier de justice et, si besoin d'un serrurier, afin de débarrasser et évacuer tous ses effets personnels, matériels et autres encombrants lui appartenant ou délaissés dans l'appartement précédemment occupé ainsi que sur le terrain et autres espaces au sein de ladite propriété, cette obligation étant assortie d'une astreinte dont le juridiction se réserve la liquidation, et en ce qu'elle a décidé du partage des dépens.

S'agissant de la demande reconventionnelle de Mme [Y], l'appelant ne saurait être à l'origine d'un abus de droit puisqu'il est fait droit en appel à ses prétentions. Il s'ensuit que la demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive sera rejetée.

Mme [Y], succombant, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel. L'ordonnance déférée sera infirmée sur ce point.

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Déboute M. [T] [B] de la demande de rabat de l'ordonnance de clôture et déclare irrecevables les écritures notifiées par l'appelant le 2 décembre 2022,

Rejette la demande de Mme [S] [Y] aux fins de nullité de la déclaration d'appel,

Pour le surplus,

Confirme l'ordonnance de référé rétraction du 19 avril 2022 rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Uzès en ce qu'elle a jugé n'y avoir lieu à rétracter l'ordonnance rendue sur requête le 10 septembre 2021,

L'infirme en ce qu'elle en a modifié les dispositions en autorisant M. [T] [B] à pénétrer dans la propriété de Mme [S] [Y] sis à [Adresse 2], accompagné d'un huissier de justice et, si besoin d'un serrurier, afin de débarrasser et évacuer tous ses effets personnels, matériels et autres encombrants lui appartenant ou délaissés dans l'appartement précédemment occupé ainsi que sur le terrain et autres espaces au sein de ladite propriété, cette obligation étant assortie d'une astreinte dont le juridiction se réserve la liquidation et en ce qu'elle a décidé du partage des dépens,

Déboute Mme [S] [Y] de ses demandes reconventionnelles,

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [S] [Y] aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par la conseillère faisant fonction de présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/02368
Date de la décision : 27/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-27;22.02368 ?
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