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19/01/2023 | FRANCE | N°21/03420

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 19 janvier 2023, 21/03420


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 21/03420 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IFXQ



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'ALES

30 juillet 2021

RG:21/00622



[J]



C/



[W]

[A]





























Grosse délivrée

le

à Me Pomiès-Richaud

SCP AKCIO



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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 19 JANVIER 2023







Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALES en date du 30 Juillet 2021, N°21/00622



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/03420 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IFXQ

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'ALES

30 juillet 2021

RG:21/00622

[J]

C/

[W]

[A]

Grosse délivrée

le

à Me Pomiès-Richaud

SCP AKCIO

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 19 JANVIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALES en date du 30 Juillet 2021, N°21/00622

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,

Madame Laure MALLET, Conseillère,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 Janvier 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [R] [U] [J]

née le 28 Septembre 1984 à [Localité 8] (34)

[Adresse 1]

[Localité 10]

Représentée par Me Camille AUGIER de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [L] [W]

né le 02 Juin 1955 à [Localité 9] (Algérie)

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 10]

Représenté par Me Pascale COMTE de la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [T] [A] épouse [W]

née le 11 Novembre 1963 à [Localité 11] (13)

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 10]

Représentée par Me Pascale COMTE de la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 18 Octobre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 19 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Alès le 30 juillet 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

' condamne Madame [J] à réaliser sur ses parcelles cadastrées A [Cadastre 4] et [Cadastre 6] à [Localité 10] les travaux préconisés par l'expert judiciaire , M [X], dans son rapport du 20 octobre 2020 et dans le rapport complémentaire de Monsieur [G] du 29 juin 2020, s'agissant du mur numéro un entre les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 4] et s'agissant du mur numéro deux entre les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 6],

' dit que Madame [J] devra effectuer en priorité les travaux nécessaires à la remise en état du mur numéro deux compte tenu du risque accru d'effondrement qu'il présente,

' dit que l'ensemble des travaux devra être réalisé dans un délai de cinq mois après la signification du jugement et qu'à défaut d'exécution complète, Madame [J] sera redevable envers Monsieur et Madame [W] d'une astreinte de 100 € par jour de retard pour une durée de six mois, le juge de l'exécution étant chargé de la liquidation de cette astreinte,

' condamne Madame [J] à payer à Monsieur et Madame [W] la somme de 5000 € au titre de leur préjudice de jouissance, la somme de 5000 € au titre de leur préjudice moral et de la résistance abusive,

' rejette les demandes de Monsieur et Madame [W] en production sous astreinte contre Madame [J] de l'attestation d'assurance de la société réalisant les travaux et rejette la demande de Madame [J] pour voir enjoindre à Monsieur et Madame [W] de laisser libre accès à leur parcelle sous astreinte,

' dit que Monsieur et Madame [W] doivent permettre l'accès à leur parcelle pour la nécessité des travaux,

' rejette la demande de dommages et intérêts de Madame [J],

' condamne Madame [J] à verser à Monsieur et Madame [W] la somme de 3500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire et de la procédure de référé,

' ordonne l'exécution provisoire.

Vu l'appel interjeté le 14 septembre 2021 par Madame [J].

Vu les conclusions de Madame [J] en date du 9 juin 2022 demandant de :

' au visa des articles 544,545, 1242 du Code civil et du trouble anormal de voisinage,

' réformer le jugement,

' sur les demandes de Monsieur et Madame [W], juger qu'elle ne conteste pas son obligation de supprimer l'empiètement et de supprimer l'effondrement, mais qu'elle n'a pas d'autres obligations, que Monsieur et Madame [W] empêchent la réalisation des travaux, et rejeter toutes leurs demandes,

' subsidiairement, sur le délai de réalisation des travaux et l'astreinte, juger qu'elle devra réaliser les travaux dans un délai qui ne pourra être inférieur à six mois suivant la signification de l'arrêt et que l'astreinte ne pourra courir qu'à l'issue d'un délai qui ne pourra être inférieur à six mois suivant la signification de l'arrêt,

' supprimer toute astreinte précédente,

' reconventionnellement,

' ordonner à Monsieur et Madame [W] de laisser libre accès à leur parcelle en application du rapport d'expertise judiciaire sous une astreinte de 500 € par jour de retard, juger qu'elle les informera par lettre recommandée avec accusé de réception ou courrier officiel d'avocat du début des travaux au moins 15 jours avant leur démarrage,

' condamner Monsieur et Madame [W] au paiement de la somme de 4000 € pour résistance abusive, à celle de 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Vu les conclusions de Monsieur et Madame [W] en date du 14 octobre 2022, demandant de :

' au visa des articles 544, 1242, 1240 du Code civil, du trouble anormal de voisinage, des articles 133,134,564 et 565 du code de procédure civile,

' confirmer le jugement sauf en ce qu'il a limité leur préjudice de jouissance subi depuis 2016 à la somme de 5000€,

' rejeter toutes les demandes formées à leur encontre,

' rejeter les demandes de Madame [J],

' condamner Madame [J] à réaliser les travaux préconisés par l'expert sous une astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la présente décision concernant le mur numéro deux, sa reconstruction devant se faire en passant uniquement par la propriété [J] et également ceux concernant le mur numéro un,

' pour cela, condamner Madame [J] à démolir les travaux entrepris à ses frais sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la présente décision,

' dire que les travaux sur le mur numéro deux doivent impérativement être réalisés en premier,

' condamner Madame [J] à leur payer, à titre de dommages et intérêts, la somme de 20'000 €, décomposée comme suit : 6000 € pour préjudice moral et résistance abusive, 15'000 € pour préjudice de jouissance,

' condamner Madame [J] à leur payer la somme de 8000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, y compris les frais de la procédure de référé et les frais d'expertise.

Vu la clôture du 18 octobre 2022.

Vu les dernières conclusions avec demande de rabat de l'ordonnance de clôture de Madame [J] en date du 8 novembre 2022 et les nouvelles pièces accompagnant ces conclusions.

Aucune cause grave n'étant justifiée, elles seront écartées des débats.

MOTIFS

Monsieur et Madame [W] sont propriétaires, à [Localité 10], des parcelles cadastrées A [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 5].

Madame [J] est propriétaire de parcelles voisines, cadastrées A [Cadastre 4] et [Cadastre 6] qui dominent la parcelle de Monsieur et Madame [W] et sont constituées de terrasses et espaliers successifs.

Un mur de soutènement, qui s'est écroulé, se trouve entre les deux propriétés.

Par ordonnance du 8 novembre 2018, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire et l'expert a déposé son rapport le 20 octobre 2020 ; un désaccord étant cependant, ensuite, survenu sur les travaux à réaliser, Monsieur et Madame [W] ont délivré la présente assignation.

Il résulte du rapport d'expertise que le mur numéro deux, situé entre les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 6] est fragilisé par l'action naturelle de l'écoulement des eaux de pluie et par la proximité de cèdres de grande hauteur; qu'il est effondré sur 12ml et sur 2,5m de haut ; que le mur numéro un situé entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] est aussi fragilisé par l'écoulement des eaux de pluie engendrant des poussées hydrostatiques incompatibles avec l'état du mur ; qu'il est effondré sur 5ml et sur une hauteur moyenne de 2,80m; que pour mettre définitivement fin aux désordres, il faut réaliser l'abattage des arbres, dont les souches se sont retrouvées partiellement à l'air libre après l'effondrement, le dessouchage et l'enlèvement des racines encore en place pour le mur numéro deux, l'expert ayant relevé que le développement des souches exerce une pression directe sur l'ouvrage et que les racines secondaires participent à la destruction de l'appareillage des pierres; qu'il faut reconstruire les deux murs, l'expert énonçant par ailleurs un certain nombre de préconisations pour chacun, à savoir :

' pour le mur numéro 1 : dépose d'une clôture séparant les deux propriétés, accès au bas du mur sur la propriété [W] par le chemin de la propriété [J] ; dans la propriété [W], délimitation d'une zone de travail de 5 m par 4 m avec la pose d'un grillage ; protection d'un olivier se trouvant dans la zone de travail ; reconstruction du mur en pierres, évacuation des pierres et des terres provenant de la propriété [W] et remise en état de la zone après travaux,

' pour le mur numéro 2: zone de travail de 15 m de long par 4 m de large délimitée par la pose d'un grillage ; l'accès à cette zone se fait par la propriété [J], les moyens employés pour dessouchage sont laissés au choix de l'opérateur, mais il faut que toutes les racines soient extraites et évacuées de l'emprise du mur ; reconstruction du mur en pierres, évacuation des pierres et terres provenant de la propriété [W] et remise en état de la zone après travaux, repose la clôture séparant les deux propriétés.

Madame [J], après avoir annoncé un début des travaux en novembre, a finalement entrepris leur réalisation le 14 décembre 2020 .

Monsieur et Madame [W] ont alors estimé qu'ils n'étaient pas exécutés conformément aux préconisations de l'expert.

Au soutien de son appel, Madame [J] expose essentiellement qu'il y a un effondrement du mur numéro un sur une longueur de 5,40 m et un effondrement du mur numéro deux sur une longueur de 12 m ; que l'expert constate que cet effondrement est lié à l'ancienneté du mur et à la présence de deux cèdres dont les racines pourraient déstabiliser le mur ; que l'expert a défini l'accès et les zones de travail sur le fond [W] et qu'il a déterminé les modalités de dessouchage ainsi qu'il suit : la méthode est laissée au choix de l'opérateur.

Elle affirme que sa seule obligation est de supprimer l'empiètement de son fonds sur le fonds [W], à savoir, l'apport de terre et de pierres résultant de l'écoulement du mur numéro deux, qu'aucune prescription technique ne saurait s'imposer à elle en ce qui concerne la construction du mur, les modalités de sa réalisation et le dessouchage ; que la réparation réelle du dommage consiste simplement à supprimer les terres et les pierres résultant de l'éboulement ; que l'éboulement du mur n'est pas un trouble anormal de voisinage et qu'en toute hypothèse, elle n'est tenue qu'à la cessation du trouble, ne pouvant se voir imposer la réalisation des travaux préconisés par l'expert judiciaire ; qu'elle n'est pas opposée à la reprise des travaux, mais que l'entreprise s'est vue refuser l'accès et a interrompu ses travaux du fait des intimés ; que l'expert n'a jamais interdit de débuter les travaux relatifs au mur avant la réalisation complète du dessouchage, l'excavation de la souche étant plus aisée si les terres du remblai autour ont été évacuées.

Monsieur et Madame [W] opposent, en substance, que Madame [J] a réalisé les travaux de reconstruction en contradiction avec les préconisations de l'expert et les termes du jugement, que les travaux, non seulement ne sont pas conformes aux règles techniques, mais qu'ils empiètent sur leur propriété et constituent une atteinte à la sécurité des personnes et des biens telle que cela ressort des procès-verbaux de constat qu'ils ont fait dresser ; que les travaux de Madame [J] ont débuté le 14 décembre 2020, mais que Madame [J] n'a pas procédé au dessouchage, se contentant de rogner les souches ; qu'elle a toujours refusé de faire les travaux depuis son fonds, alors pourtant que l'expert judiciaire a conclu qu'il n'y avait aucune impossibilité ; qu'elle confond la zone de travail délimitée par l'expert et les passages ; que le procès-verbal de constat du mois de janvier 2021 confirme que le dessouchage n'est pas intégral et que le mur a été commencé sans fondation ; que le mur de pierres sèches en cours de construction se situe sur leur parcelle car la partie éboulée n'a pas été dégagée ; qu'il s'agit d'un empiètement inadmissible ; que le procès-verbal de constat d'huissier du 3 février 2022 confirme que Madame [J] n'exécute pas loyalement le jugement; ils soulignent enfin que les travaux finalement exécutés ne l'ont pas été dans le délai imparti par le tribunal, qu'ils ne sont pas ceux préconisés par l'expert judiciaire et que demeurent donc à la fois une atteinte à la sécurité des personnes et des biens ainsi que l'empiètement.

Madame [J] ne conteste pas la réalité des effondrements des murs lui appartenant, qui sont des murs anciens en pierres sèches de soutènement de ses terres en surplomb du fond de Monsieur et Madame [W].

La lecture des rapports de l'expert judiciaire et du sapiteur permet de retenir qu'après avoir constaté les effondrements du mur un sur 5,40 m et du mur deux sur 12m, il a été retenu que l'effondrement du premier résulte de sa fragilisation avec le temps par l'action naturelle des écoulements d'eau de pluie qui désorganisent l'appareillage des pierres et qui engendrent des poussées hydrostatiques incompatibles avec l'état du mur, les déformations subies se cumulant jusqu'à provoquer, lors d'un épisode pluvieux, l'effondrement partiel ; que l'effondrement du second est lié à son ancienneté et à la présence de deux grands cèdres dont les racines, en participant à la déstructuration de l'appareillage des pierres, déstabilisent le mur ; que les souches enracinées en talus sont susceptibles de basculer vers le bas en cas de rupture des racines traçantes supérieures qui stabilisaient les arbres jusqu'alors ; que leur enlèvement est « impératif pour la reconstruction du muret », que la « suppression préalable est donc requise », ce qui, au demeurant, se comprend aisément dans la mesure où l'expert et son sapiteur expliquent précisément que les souches peuvent basculer vers le bas et que la dégradation de leur matière organique en amont peut aussi générer des cavités propices à la création de poches d'eau ainsi que des risques de glissement du sol susceptibles de déstabiliser le nouvel ouvrage créé.

La conclusion des réunions tenues après l'abattage des arbres conduit également l'expert à considérer que le risque d'éboulement des terres sur la propriété [W] persiste lors d'épisodes pluvieux et que le stockage des grumes sur la propriété [J] doit se faire dans des conditions ne présentant pas de risque d'éboulement sur la propriété [W].

Il sera, dans ces conditions, jugé que si la méthode pour parvenir au dessouchage complet, nécessaire avant la réalisation du mur est effectivement laissé au libre choix de l'opérateur chargé des travaux, le dessouchage préalable doit cependant être réalisé avant le début de l'édification du nouveau mur ; qu'il en est de même des rémanents de coupe, lesquels doivent être stockés de manière à ne pas présenter de risque d'éboulement sur la propriété; que l'expert a également défini, de façon précise, le déroulement et la consistance des travaux nécessaires à la reprise des désordres, réitérant alors que le dessouchage devait être préalable et que la réalisation des travaux sur le mur numéro un devait se faire après les travaux sur le mur numéro deux .

Madame [J] ne peut, dans ces conditions, soutenir que l'expert n'a jamais interdit de débuter les travaux relatifs au mur avant la réalisation complète du dessouchage, étant observé par la cour qu'aucune impossibilité technique n'est, en outre, démontrée du chef de l'ordre ainsi prévu, et ce, quand bien même les travaux pourraient être, selon elle, plus faciles si les terres de remblai autour des souches étaient extraites, ce qui ne procède que de ses affirmations .

Elle ne saurait pas plus utilement faire valoir qu'un entrepreneur devait intervenir afin de terminer le dessouchage à l'aide d'un tire fort alors qu'il résulte des constats d'huissier des 11 janvier 2021 et 3 février 2021 que des souches de cèdre ne sont pas enlevées au-dessus de la partie du mur éboulé, l' huissier précisant qu'une souche encore en terre se situe à 30 cm environ du mur en cours d'édification et que la reconstruction du mur numéro deux a précisément été entreprise en présence de souches subsistant aux côtés du système racinaire des deux cèdres encore présents, ce que l'expert a prohibé.

Il en résulte pour Madame [J], qui n'a pas pour seule obligation de supprimer l'empiètement consécutif à l'effondrement de son mur numéro 2, et qui a aussi l'obligation de réaliser des travaux efficaces et pérennes, la nécessité de respecter les préconisations motivées de l'expert ci-dessus énoncées .

Toute mise en 'uvre ne se pliant à ces préconisations expose, en effet, le fonds de Monsieur et Madame [W] à un risque d'effondrement par suite du non-respect des contraintes destinées à une maîtrise impérative des terres, ce qui constitue un trouble anormal de voisinage compte tenu de la situation respective des lieux et des risques sévères de sécurité caractérisés par l'expert, cette situation les empêchant, en outre, de jouir normalement de leur terrain et leur créant un préjudice moral tenant à l'insécurité de leur bien depuis 2016.

La réalisation des travaux sans respect des préconisations de l'expert interdit par ailleurs à Mme [J] de se prévaloir de ce qu'ils seraient trouvés à l'arrêt par la faute de Monsieur et Madame [W] et également de leur reprocher d'avoir fait obstacle à ses interventions, y compris au cours de l'expertise, compte tenu, au terme même des explications de l'expert, des longs débats qu'a nécessité la détermination exacte des travaux et des modalités de leur réalisation, notamment sur la question du passage et de la délimitation des zones de travail.

En ce qui concerne le comportement des époux [W] qui auraient, selon Mme [J], retardé le début des travaux mois en novembre 2020 pour lui avoir répondu tardivement, il sera observé qu'elle n'en fait pas la preuve dès lors qu'elle a, au contraire, écrit, par le truchement d'un courrier officiel de son conseil, que les travaux étaient retardés par un souci de dernière minute de son entrepreneur et que par ailleurs, l'arrêt du chantier sollicité par Monsieur et Madame [W] dès le mois de janvier 2021 est justifié au regard de la présence des souches alors que la reconstruction du mur avait débuté et que l'expert avait donc préconisé la réalisation du mur deux avant celle du mur un.

Madame [J] ne saurait pas plus reprocher à Monsieur et Madame [W] un refus de réalisation des travaux sur le mur numéro un puisque l'expert avait préconisé une priorité d'intervention sur le mur numéro deux qui est justifiée et que rien ne démontre la réalité de l'opposition ainsi alléguée, le seul incident susceptible d'être retenu étant celui relatif à l'intervention d'un maçon fin juin 2022 pour le mur un, auquel M et Mme [W] ont seulement demandé de reporter de quelques jours le début de ses travaux au motif, démontré, qu'ils n'en ont été avertis que tardivement et dont ils se sont immédiatement plaints, ce qui ne saurait leur être reproché comme faute .

Madame [J] sera donc déboutée des fins de son recours et également de ses demandes indemnitaires, mal fondées en raison de sa succombance.

M et Mme [W] ne démontrent, pour leur part, pas l'empiètement qu'ils reprochent à Mme [J], le constat d'huissier invoqué à ce propos étant impropre, en l'absence d'éléments topographiques précis sur les limites divisoires des deux fonds, à faire cette preuve et le plan du géomètre, unilatéralement établi produit en pièce 31 du dossier des intimés, n'étant pas opérant de ce chef.

Il sera, en revanche, fait droit à leur demande de démolition des travaux réalisés sur les murs un et deux, hors le respect des préconisations expertales, étant précisé qu'il incombe à Monsieur et Madame [W] de se ménager la preuve de l'état actuel de réalisation des travaux.

Sur l'évaluation du préjudice tel qu'arrêté au jugement et critiqué par les intimés, qui demandent les sommes de 15 000 € au titre de leur préjudice de jouissance subi depuis 2016 et de 6000 € au titre du préjudice moral et de la résistance abusive, il sera considéré qu'un préjudice moral distinct du préjudice de jouissance n'est pas prouvé ; que le préjudice de jouissance doit être fixé à la somme de 10 000€ compte tenu de la durée des troubles subis de façon anormale par Monsieur et Madame [W] sur une partie de leur terrain jouxtant leur habitation et consistant à la fois dans la nécessité de supporter le désordre esthétique de l'effondrement des murs et l'inquiétude générée par les risques encourus du fait de l'instabilité des terres à laquelle il n'a pas été remédié correctement ; enfin, que malgré la persévérance de Madame [J] à s'abstraire des préconisations techniques de l'expert, ni la volonté de nuire, ni l'intention malicieuse ne sont établies de sorte que la demande au titre de la résistance abusive sera rejetée.

Le jugement sera donc confirmé.

La demande tendant à l'augmentation du montant de l'astreinte sollicitée par Monsieur et Madame [W] à 500 € par jour de retard à compter de la présente décision sera rejetée, la démolition devant préalablement intervenir dans les deux mois de la signification de la présente décision et passé ce délai sous une astreinte de 100€ par jour de retard et les travaux de reconstruction devant se faire dans les 6 mois de la signification de la présente décision sous la même astreinte passé ce délai, toute demande contraire à ces modalités étant rejetée .

Il sera, enfin, dit que les travaux du mur numéro deux seront réalisés en premier lieu, avant ceux du mur deux.

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile et la succombance de Madame [J].

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant après débats en audience publique, par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Ecarte des débats les conclusions tardives du 8 novembre 2022 et les dernières pièces communiquées à cette date par Madame [J] ,

Rejette toutes les demandes de Madame [J] et confirme le jugement en toutes ses dispositions,

1/ sauf à préciser, vu l'évolution du litige :

' que les travaux de reconstruction des deux murs, qui doivent se faire conformément aux préconisations expertales, seront précédés de la démolition des travaux déjà réalisés, les préconisations expertales de réalisation étant par ailleurs les suivantes :

- pour le mur numéro 1 : dépose d'une clôture séparant les deux propriétés, accès au bas du mur sur la propriété [W] par le chemin de la propriété [J] ; dans la propriété [W], délimitation d'une zone de travail de 5 m par 4 m avec la pose d'un grillage ; protection d'un olivier se trouvant dans la zone de travail ; reconstruction du mur en pierres, évacuation des pierres et des terres provenant de la propriété [W] et remise en état de la zone après travaux,

- pour le mur numéro 2: zone de travail de 15 m de long par 4 m de large délimitée par la pose d'un grillage ; l'accès à cette zone se fait par la propriété [J], les moyens employés pour dessouchage sont laissés au choix de l'opérateur, mais il faut que toutes les racines soient extraites et évacuées de l'emprise du mur ; reconstruction du mur en pierres, évacuation des pierres et terres provenant de la propriété [W] et remise en état de la zone après travaux, repose la clôture séparant les deux propriétés.

' que les obligations de Madame [J] de démolition et de construction sont assorties des astreintes suivantes :

la démolition devra intervenir dans les deux mois de la signification de la présente décision et passé ce délai, sous une astreinte de 100€ par jour de retard et les travaux de reconstruction se feront dans les 6 mois de la signification de la présente décision sous la même astreinte, passé ce délai, toute demande contraire à ces modalités étant rejetée,

' que les travaux sur le mur numéro deux doivent être réalisés en premier,

2/ sauf à condamner Madame [J] à payer au titre de leur préjudice de jouissance à Monsieur et Madame [W] la somme de 10 000 € et à rejeter toute demande au titre du préjudice moral,

Y ajoutant :

Condamne Madame [J], par application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à Monsieur et Madame [W] la somme supplémentaire de 2500 €,

Rejette les demandes plus amples,

Condamne Madame [J] aux entiers dépens.

Arrêt signé par la présidente et la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/03420
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;21.03420 ?
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