RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/01432 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IAGV
AL
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS
29 janvier 2021 RG :19/01442
[B]
[M]
C/
[X]
[O]
[V]
S.C.P. [K]-BOUDON - [T] R [K]
Grosse délivrée
le
à Me Aubery
Me Cottin
SCP Coulomb Divisia...
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 19 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CARPENTRAS en date du 29 Janvier 2021, N°19/01442
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. André LIEGEON, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre
Madame Laure MALLET, Conseillère
M. André LIEGEON, Conseiller
GREFFIER :
Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 Janvier 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
Madame [A] [B]
née le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 15]
[Adresse 9]
[Localité 13]
Représentée par Me Laura AUBERY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 214322 du 19/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
Monsieur [N] [M]
né le [Date naissance 4] 1988 à [Localité 17]
[Adresse 1]
[Localité 12]
Représenté par Me Laura AUBERY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS
INTIMÉS :
Madame [E] [X] veuve [O]
née le [Date naissance 7] 1929 à [Localité 16]
[Adresse 14]
[Localité 2]
Représentée par Me Xavier COTTIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Monsieur [U] [O]
né le [Date naissance 5] 1951 à [Localité 19]
[Adresse 8]
[Localité 2]
Représenté par Me Xavier COTTIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Madame [F] [V] comptable de l'office notariale SCP [K]- BOUDON [T]
chez SCP [K]-BOUDON [T]
[Adresse 6]
[Localité 12]
Représentée par Me Jean-Michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
S.C.P. [K]-BOUDON - [T] office notarial prise en la personne de ses représentants légaus en exercice domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 12]
Représentée par Me Jean-Michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTERVENANTE FORCEE
S.A.S. SPHINX SOLUTION 84, exerçant sous le nom commercial CREDIT BY SPHINX immatriculée au RCS d'Avignon sour le n° 478 953 193, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
assignée à personne habilitée le 09 juillet 2021
[Adresse 10]
[Localité 11]
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 20 Octobre 2022
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 19 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique du 25 avril 2019 reçu par Me [K], notaire à CARPENTRAS, M. [U] [O] et Mme [E] [X] veuve [O] ont consenti à M. [N] [M] et Mme [A] [B] une promesse unilatérale de vente portant sur une maison située à [Adresse 18], au prix de 200.000 EUR, venant à expiration le 25 juillet 2019, sous la condition suspensive d'obtention au plus tard le 25 juin 2019 d'un prêt par le bénéficiaire de la promesse d'un montant maximum de 250.000 EUR, remboursable sur 35 ans maximum, au taux de 2,50 % hors assurances maximum.
En outre, cet acte a prévu le séquestre entre les mains du notaire instrumentaire d'une somme de 20.000 EUR à titre d'indemnité d'immobilisation.
La somme de 1.000 EUR a été versée à l'office notarial.
Le 26 avril 2019, Mme [A] [B] et M. [N] [M] ont mandaté la société de courtage SPHINX SOLUTION 84, exerçant son activité sous le nom commercial CREDIT BY SPHINX, pour trouver un financement.
Suivant un avenant du 25 juillet 2019, les parties ont prorogé le délai d'expiration de la promesse au 6 septembre 2019, la date d'obtention du crédit étant reportée au 30 août 2019.
Par courrier du 13 septembre 2019, le notaire a informé les bénéficiaires de la promesse qu'en l'absence de justificatif, la condition suspensive était défaillie et l'avenant caduc.
Par courrier du 17 septembre 2019, M. [U] [O] a mis en demeure Mme [A] [B] et M. [N] [M] de lui verser la somme de 19.000 EUR au titre de l'indemnité d'immobilisation prévue dans la promesse.
Il n'a pas été donné suite à cette demande et par acte du 19 novembre 2019, M. [U] [O] et Mme [E] [X] veuve [O] ont assigné Mme [A] [B] et M. [N] [M] ainsi que la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et Mme [F] [V], comptable de l'office notarial, devant le tribunal judiciaire de CARPENTRAS aux fins d'obtenir le versement de l'indemnité d'immobilisation.
Par jugement du 29 janvier 2021, le tribunal judiciaire de CARPENTRAS a :
- dit que Mme [A] [B] et M. [N] [M] sont solidairement tenus, en vertu d'une promesse de vente du 25 avril 2019, modifiée par avenant du 25 juillet 2019, envers Mme [E] [X] veuve [C] [O] et M. [U] [O] au paiement d'une indemnité d'immobilisation d'un montant forfaitaire global de 20.000 EUR,
- ordonné le versement par la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et Mme [F] [V] de la somme de 1.000 EUR détenue à titre de séquestre, sur justificatif du caractère définitif de la décision,
- condamné solidairement Mme [A] [B] et M. [N] [M] à payer à Mme [E] [X] veuve [C] [O] et à M. [U] [O] la somme complémentaire de 19.000 EUR avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- rejeté la demande de Mme [E] [X] veuve [C] [O] et M. [U] [O] à l'encontre de Mme [A] [B] et de M. [N] [M] au titre des frais irrépétibles,
- rejeté la demande de la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et de Mme [F] [V] à l'encontre de Mme [E] [X] veuve [C] [O] et de M. [U] [O] au titre des frais irrépétibles,
- dit n'y avoir lieu à assortir la décision de l'exécution provisoire,
- condamné Mme [A] [B] et M. [N] [M] aux entiers dépens.
Par déclaration d'appel du 10 avril 2021 enregistrée le 12 avril 2021, Mme [A] [B] et M. [N] [M] ont interjeté appel de ce jugement en ce qu'il les a condamnés au paiement des sommes de 19.000 EUR et 1.000 EUR ainsi qu'aux dépens.
Par acte du 9 juillet 2021, Mme [A] [B] et M. [N] [M] ont assigné en intervention forcée devant la cour la SAS SPHINX SOLUTION 84.
Aux termes des dernières écritures de Mme [A] [B] et M. [N] [M] déposées le 9 juillet 2021, il est demandé à la cour de :
- vu les articles L. 271-1 et L. 271-2 du code de la construction et de l'habitation,
- vu les articles 1217 et 1231-5 du code civil,
- vu la promesse unilatérale de vente en date du 25 avril 2019,
- vu l'avenant en date du 25 juillet 2019,
- vu le mandat de recherche de financement en date du 26 avril 2019,
- déclarer l'appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement entrepris en ses chefs de jugement critiqués et le confirmer pour le surplus,
Statuant à nouveau sur les chefs de jugement critiqués :
A titre principal :
- constater l'exercice du droit de rétractation de M. [N] [M] et Mme [A] [B],
- ordonner la restitution des fonds en séquestre,
A titre subsidiaire :
- requalifier la clause intitulée « indemnité d'immobilisation » en clause pénale,
- ordonner la réduction du montant de la pénalité à de plus justes proportions,
- condamner la SAS SPHINX SOLUTION 84 à relever et garantir M. [N] [M] et Mme [A] [B] de toutes pénalités prononcées à leur encontre,
En tout état de cause :
- condamner in solidum M. [U] [O] et Mme [E] [X] veuve [O] aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- condamner in solidum M. [U] [O] et Mme [E] [X] veuve [O] au paiement de la somme de 2.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SAS SPHINX SOLUTION 84 à relever et garantir M. [N] [M] et Mme [A] [B] de toutes condamnations prononcées à leur encontre au titre des dépens et frais irrépétibles.
Au soutien de leur appel, Mme [A] [B] et M. [N] [M] exposent que la promesse unilatérale de vente portant sur un immeuble à usage d'habitation entre dans le champ d'application des articles L. 271-1 et L. 271-2 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation, de sorte qu'ils sont fondés, agissant en qualité d'acquéreurs non professionnels, à exercer leur droit de rétractation, ce délai n'ayant pas commencé à courir en l'absence de toute notification de la promesse.
A titre subsidiaire, ils font valoir que la clause objet du litige constitue une clause pénale qu'il y a lieu, par application de l'article 1231-5 du code civil, de réduire. Ils ajoutent, sur ce point, qu'ils ont fait preuve de bonne foi dans l'exécution de la condition suspensive d'obtention de prêt et que le seul préjudice indemnisable résulte du retard subi par les vendeurs dans la recherche d'un nouvel acquéreur, recherche qu'ils ont pu entreprendre dès le 30 août 2019.
Enfin, ils exposent que la société de courtage a commis une faute dans l'accomplissement de sa mission en s'abstenant de rechercher un financement auprès de deux organismes bancaires, ce qui les a contraints à déposer hors délai une deuxième demande de prêt.
Aux termes des dernières conclusions de Mme [E] [X] veuve [O] et de M. [U] [O] déposées le 18 octobre 2022, il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter Mme [A] [B] et M. [N] [M] de toutes leurs demandes,
- débouter la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et Mme [F] [V] de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre des consorts [O],
- condamner solidairement Mme [A] [B] et M. [N] [M] à payer à M. [U] [O] et Mme [E] [X] veuve [O] la somme de 3.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [A] [B] et M. [N] [M] aux entiers dépens.
A l'appui de leur demande de confirmation, ils font valoir que les appelants sont de mauvaise foi dès lors qu'ils n'ont déposé aucune demande de financement dans les délais, et ce en violation de leurs obligations contractuelles, agissant avec une légèreté blâmable sans réelle intention de concrétiser l'achat du bien. Par ailleurs, ils exposent que la promesse de vente a été notifiée par le notaire par voie électronique, conformément aux dispositions légales et à ladite promesse. Enfin, ils indiquent que les parties ont fait le choix d'une indemnité d'immobilisation et non d'une clause pénale, et que les appelants ne peuvent unilatéralement revenir sur cette clause, a fortiori dès lors qu'ils ont fait preuve de la plus grande inertie suite à la signature de la promesse de vente dans l'exécution de la condition suspensive d'obtention de prêt.
Aux termes des conclusions de la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et de Mme [F] [V] déposées le 17 septembre 2021, il est demandé à la cour de :
- recevant la SCP concluante dans un appel incident,
- réformant pour partie,
- statuer ce que de droit sur la demande de libération des fonds et prendre acte de ce que le notaire exécutera immédiatement la décision,
- condamner les demandeurs [X] ' [O] qui ont appelé à tort le notaire devant la juridiction de première instance et les consorts [B] ' [M] qui ont appelé à tort le notaire devant la cour d'appel à payer aux deux concluants, la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et Mme [F] [V], indivisément, la somme de 3.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la partie succombante aux dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de leurs prétentions, ils indiquent que le notaire n'est pas impliqué dans le contentieux opposant les deux parties cocontractantes, ce qui justifie que le jugement soit réformé concernant les frais irrépétibles.
La SAS SPHINX SOLUTION 84 n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction est intervenue par ordonnance du 20 octobre 2022.
MOTIFS
SUR L'INDEMNITE D'IMMOBILISATION
En application de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, l'acquéreur d'un bien immobilier à usage d'habitation bénéficie d'un délai de rétractation de dix jours à compter de la première présentation de la lettre de notification.
L'acte du 25 avril 2019 stipule que « Le BENEFICIAIRE donne son accord pour que la notification lui soit faite par lettre recommandée par courrier électronique à l'adresse indiquée dans l'acte, et ce conformément aux dispositions de l'article 1126 du code civil », et précise les adresses électroniques de Mme [A] [B] et M. [N] [M].
Ainsi qu'il en est justifié au vu des documents intitulés « PREUVE DE RECEPTION d'une lettre recommandée électronique avec accusé de réception » portant les numéros d'identification AR1513040 et AR1513008, il a été procédé le 24 avril 2019 par l'étude notariale aux formalités de notification prévues à l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation.
Aussi, Mme [A] [B] et M. [N] [M], destinataires de cette notification comportant en pièces jointes le « courrier SRU » et la promesse unilatérale de vente avec ses annexes, ne sont pas fondés à soutenir que le délai de rétractation n'a pas commencé à courir, et celui-ci étant expiré, ils ne peuvent prétendre de ce chef à la restitution de l'indemnité d'immobilisation.
A titre subsidiaire, ces derniers demandent que la clause intitulée « indemnité d'immobilisation » soit requalifiée en clause pénale et sollicitent la réduction à de plus justes proportions de la pénalité.
La promesse unilatérale de vente du 25 avril 2019 prévoit une indemnité d'immobilisation de 20.000 EUR. Elle précise, concernant le sort de cette indemnité d'immobilisation :
« La somme ci-dessus versée ne portera pas intérêts.
Elle sera versée au PROMETTANT ou au BENEFICIAIRE selon les hypothèses suivantes :
a) en cas de réalisation de la vente promise, elle s'imputera sur le prix et reviendra en conséquence intégralement au PROMETTANT devenu VENDEUR .
b) en cas de non réalisation de la vente promise selon les modalités et délais prévus au présent acte, la somme ci-dessus versée restera acquise au PROMETTANT à titre d'indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains de l'immeuble formant l'objet de la présente promesse de vente pendant la durée de celle-ci ;
- Observation étant ici faite que l'intégralité de cette somme restera acquise au
- PROMETTANT même si le BENEFICIAIRE faisait connaître sa décision de ne pas acquérir
- avant la date d'expiration du délai d'option. En aucun cas, cette somme ne fera l'objet d'une
- répartition prorata temporis dans la mesure où son montant n'a pas été fixé en considération de la durée de l'immobilisation.
c ) toutefois, dans cette même hypothèse de non réalisation de la vente promise, la somme ci-dessus versée sera intégralement restituée au BENEFICAIRE s'il se prévalait de l'un des cas suivants :
- si l'une au moins des conditions suspensives stipulées aux présentes venait à défaillir selon les modalités et délais prévus au présent acte ;
- ('.)
- et enfin si la non réalisation de la vente promise était imputable au seul PROMETTANT.
S'il entend se prévaloir de l'un quelconque des motifs visés ci-dessus pour se voir restituer la somme versée au titre de l'indemnité d'immobilisation, le BENEFICIAIRE devra le notifier au notaire soussigné par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au plus tard dans les sept (7) jours de la date d'expiration de la promesse de vente.
A défaut pour le BENEFICIAIRE d'avoir adressé cette lettre dans le délai convenu, le PROMETTANT sera alors en droit de sommer le BENEFICAIRE par acte extra-judiciaire de faire connaître sa décision dans un délai de sept (7) jours.
Faute pour le bénéficiaire de répondre à cette réquisition dans le délai ci-dessus, il sera déchu du droit d'invoquer ces motifs et l'indemnité restera alors acquise au PROMETTANT. »
Il est de principe que l'indemnité d'immobilisation stipulée par une promesse unilatérale de vente au profit du promettant constitue, ainsi que le rappelle au demeurant la promesse objet du litige, le prix de l'exclusivité consentie au bénéficiaire. Aussi, elle n'a pas la nature d'une clause pénale dont l'objet est aussi bien de contraindre la partie à l'exécution de son obligation que de fixer forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée. Le fait que celle-ci puisse, selon la promesse, donner lieu à restitution en cas de défaut non imputable au bénéficiaire de réalisation de la condition suspensive d'obtention de prêt est sans incidence sur sa qualification puisqu'il ne s'agit là que de l'application des articles L. 313-40 et L. 313-41 du code de la consommation, ce dernier article disposant que lorsque la condition suspensive d'obtention de prêt n'est pas réalisée, toute somme versée est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit.
Il s'ensuit que les dispositions de l'article 1231-5 du code civil permettant au juge, même d'office, de modérer ou augmenter la pénalité convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire, ne sont pas applicables au cas d'espèce, s'agissant d'une indemnité d'immobilisation qui peut uniquement donner lieu, si les conditions prévues à l'acte sont remplies, à restitution.
Mme [A] [B] et M. [N] [M] seront donc déboutés, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur l'imputabilité de la non réalisation de la condition suspensive d'obtention de prêt, de leur demande tendant à la requalification de la clause d'immobilisation en clause pénale et à la réduction de celle-ci à de plus justes proportions, et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a d'une part, ordonné le versement par la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et Mme [F] [V] de la somme de 1.000 EUR détenue à titre de séquestre et d'autre part, condamné les appelants à la somme de 19.000 EUR avec intérêts à compter du jugement au titre du solde de l'indemnité d'immobilisation.
SUR LA DEMANDE EN RELEVE ET GARANTIE
La SAS SPHINX SOLUTION 84 a été, en cause d'appel, appelée en intervention forcée par Mme [A] [B] et M. [N] [M] afin qu'elle les relève et garantisse de toute condamnation prononcée à leur encontre sur le fondement de l'article 1217 du code civil.
Cet article dispose :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
Il est constant, au vu de la convention régularisée le 26 avril 2019 et versée aux débats, que Mme [A] [B] et M. [N] [M] ont confié à la SAS SPHINX SOLUTION 84, moyennant une rémunération de 2.400 EUR, le mandat de négocier, obtenir et mettre en place un ou plusieurs crédits d'un montant maximum de 246.650 EUR et d'une durée de 35 ans maximum, conformément au montant et à la durée mentionnés dans la promesse unilatérale de vente du 25 avril 2019. Par ailleurs, il est manifeste, au vu des échanges de mails entre Mme [A] [B] et M. [I] [S] de la SAS SPHINX SOLUTION 84, que la société de courtage a eu connaissance de la promesse unilatérale de vente et des clauses qu'elle contient, ses demandes de renseignements complémentaires portant uniquement sur des éléments concernant la situation familiale et financière du couple.
Au visa des dispositions précitées et de celles des articles 1231-1 et suivants du code civil relatifs à la réparation résultant de l'inexécution du contrat, il appartient aux appelants de rapporter la preuve d'une faute de la SAS SPHINX SOLUTION 84 en lien de causalité direct et certain avec leur préjudice lié à l'obligation de paiement de l'indemnité d'immobilisation.
Ainsi que l'exposent les appelants, la promesse de vente prévoit le dépôt de deux demandes de prêt d'un montant maximum de 250.000 EUR, remboursable sur une durée de 35 ans (soit 420 mois) au taux maximum de 2,50 % (hors assurances), la condition suspensive étant réalisée en cas d'obtention d'une ou plusieurs offres définitives de prêt au plus tard le 25 juin 2019, ladite date ayant été prorogée au 30 août 2019 par l'avenant du 25 juillet 2019.
Or il est constant que la SAS SPHINX SOLUTION 84 a été défectueuse dans l'exécution de son mandat puisqu'elle n'a pas été diligente en ne déposant, au demeurant tardivement au regard du premier délai fixé, qu'une seule demande de prêt le 17 juillet 2019 auprès de la BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE qui devait être rejetée par cette dernière suivant un courrier du 17 septembre 2019, obligeant les appelants à tenter de suppléer sa carence en présentant eux-mêmes hors délai une demande de prêt auprès du CREDIT AGRICOLE qui devait également être rejetée.
Ce faisant, elle a commis une faute dans l'exécution de son mandat et cette faute a causé un préjudice à Mme [A] [B] et M. [N] [M] qui n'ont pu remettre, avant le terme fixé, les justificatifs des refus de prêts, et ont ainsi été privés de toute possibilité de recouvrir le montant de l'indemnité d'immobilisation.
Il s'ensuit que la responsabilité de la SAS SPHINX SOLUTION 84 est engagée et en réparation, elle sera condamnée à relever et garantir Mme [A] [B] et M. [N] [M] de la condamnation au paiement des sommes de 19.000 EUR et 1.000 EUR, ainsi que des autres condamnations prononcées à l'encontre de ces derniers.
SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [E] [X] veuve [O] et M. [U] [O] de leur demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'équité ne commande pas, en cause d'appel, de faire application de ces dispositions en leur faveur.
Mme [A] [B] et M. [N] [M], qui succombent en leurs demandes dirigées à l'encontre des consorts [O], seront également déboutés de leur demande présentée au titre de leurs frais irrépétibles.
Enfin, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCP [Y] [K]-BOUDON, [P] [T], [H] [K]-[T] et Mme [F] [V] de leur demande formée au titre des frais irrépétibles dès lors, ainsi que l'a relevé le premier juge, que leur présence était utile, et pas davantage, et il ne sera fait application, en cause d'appel, de ces dispositions en leur faveur.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort :
CONFIRME en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu par le tribunal judiciaire de CARPENTRAS le 29 janvier 2021,
et y ajoutant,
CONDAMNE la SAS SPHINX SOLUTION 84 à relever et garantir Mme [A] [B] et M. [N] [M] de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre,
DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Mme [A] [B], M. [N] [M] et la SAS SPHINX SOLUTION 84 aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,