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15/12/2022 | FRANCE | N°21/01214

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 15 décembre 2022, 21/01214


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/01214 - N°Portalis DBVH-V-B7F-H7V6



MPF-AB



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

16 février 2021 RG:11-20-0826



S.A.S. CBA INFORMATIQUE LIBERALE



C/



[F]





























Grosse délivrée

le 15/12/2022

à Me Emmanuelle VAJOU

à Me Floren

t ESCOFFIER









COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre



ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'Avignon en date du 16 Février 2021, N°11-20-0826



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Mari...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/01214 - N°Portalis DBVH-V-B7F-H7V6

MPF-AB

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

16 février 2021 RG:11-20-0826

S.A.S. CBA INFORMATIQUE LIBERALE

C/

[F]

Grosse délivrée

le 15/12/2022

à Me Emmanuelle VAJOU

à Me Florent ESCOFFIER

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'Avignon en date du 16 Février 2021, N°11-20-0826

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère

Mme Séverine LEGER, Conseillère

GREFFIER :

Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 27 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 15 Décembre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.A.S. CBA INFORMATIQUE LIBERALE

poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Christine GATEAU du PARTNERSHIPS HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Madame [Y] [F]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Thibaud VIDAL de AARPI CHOLEY&VIDAL AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représentée par Me Florent ESCOFFIER, Postulant, avocat au barreau de NIMES

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 15 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

Par bon de commande du 27 décembre 2013, [Y] [F], infirmière libérale, a souscrit auprès de la SAS CBA Informatique Libérale, société de services en ingénierie informatique adaptée aux professionnels de santé, un abonnement au logiciel de télétransmission de feuilles de soins aux caisses et aux mutuelles « My Agathe Connect » moyennant la somme de 39 euros par mois pour une durée de quatre ans. Elle a également souscrit par bon de commande du 20 août 2015 et pendant la même durée un abonnement au logiciel d'aide à la gestion de comptabilité « My Apollon ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er octobre 2017, [Y] [F] a fait connaître à la SAS CBA Informatique Libérale sa volonté de ne pas reconduire son abonnement au logiciel « My Agathe Connect » en raison de difficultés rencontrées avec ledit logiciel.

Invoquant la violation des dispositions d'ordre public du code de la santé publique relatives à l'hébergement des données de santé à caractère personnel ainsi que des dysfonctionnements graves du logiciel comme des insuffisances des services de maintenance et d'assistance, [Y] [F] a mis en demeure la SAS CBA Informatique Libérale par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 juillet 2018 de lui restituer toutes les mensualités versées au titre de l'abonnement au logiciel « My Agathe Connect » et de réparer l'ensemble des préjudices subis.

Par acte en date du 6 août 2018, Mme [F] a assigné son fournisseur devant le tribunal judiciaire d'Avignon aux fins d'annulation du contrat conclu le 27 décembre 2013.

Par jugement contradictoire en date du 16 février 2021, le tribunal judiciaire d'Avignon a :

- prononcé la nullité du contrat du 27 décembre 2013,

- condamné la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 1872 euros en remboursement des mensualités versées en exécution du contrat précité,

- condamné la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS CBA Informatique Libérale aux entiers dépens,

- rejeté toutes les autres demandes.

Par acte en date du 25 mars 2021, la SAS CBA Informatique Libérale a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions d'appel notifiées par voie électronique le 23 juin 2021, elle demande à la cour d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau: à titre principal,

- dire que le contrat d'abonnement au logiciel My Agathe Connect conclu entre la société

CBA Informatique Libérale et Madame [Y] [F] le 27 décembre 2013 est valable,

à titre subsidiaire:

dans l'hypothèse où la nullité du contrat conclu le 27 décembre 2013 serait confirmée par la cour, dire que Madame [Y] [F] devra verser à la société CBA Informatique Libérale une somme de 1.872 euros à titre d'indemnité d'utilisation du logiciel My Agathe Connect durant quatre années,

En tout état de cause,

- débouter [Y] [F] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

- la condamner à verser une somme de 6.000 euros à la société CBA Informatique Libérale en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

En premier lieu, la notion d''objet' comme condition de validité d'un contrat avant l'entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats doit être comprise de manière restreinte comme couvrant uniquement l'objet de l'obligation des contractants, tel qu'exprimé par le contrat, et

non les effets du contrat ou les prestations qui pourraient être rendues nécessaires du fait de l'exécution du contrat. Or, en l'espèce, l'objet des obligations des parties contenues dans le contrat relatif au logiciel My Agathe Connect porte, d'une part, sur la mise à disposition par CBA

Informatique Libérale d'un logiciel de télétransmission de feuilles de soin électroniques et, d'autre part, sur le paiement par Madame [Y] [F] du prix de l'abonnement à ce service.

Comme l'ont retenu les juges en première instance, l'hébergement des données de santé n'est pas l'objet premier et principal du contrat conclu entre CBA Informatique Libérale et Madame [Y] [F] et n'en constitue qu'un simple moyen d'exécution. En d'autres termes, le choix

de l'hébergeur était non un élément de formation du contrat mais un élément relatif à son exécution. En tout état de cause, le Code de la santé publique ne prévoit nullement que le défaut d'agrément de l'hébergeur doit entraîner la nullité du contrat. La Cour d'appel infirmera donc le jugement et dira que le contrat portant sur la mise à disposition du logiciel My Agathe Connect a été valablement conclu.

Dans ses dernières conclusions d'intimée et d'appel incident, notifiées par voie électronique le 12 octobre 2022, [Y] [F] demande à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande de restitution de la somme payée au titre des mensualités de l'abonnement au logiciel « My Apollon » ainsi que les demandes de réparation des préjudices,

Et ainsi, statuant de nouveau, de:

- prononcer la nullité du contrat du 27 décembre 2013 souscrit par Mme [F] auprès de la SAS CBA Informatique Libérale concernant l'abonnement au logiciel « My Apollon »

- condamner la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 3540 euros en remboursement des mensualités versées en exécution du contrat précité,

- condamner la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 3 500€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de désorganisation

- condamner la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de trouble d'activité ;

- condamner la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 2 034 Euros au titre des frais comptables engagés

- condamner la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] la somme de 2 000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral

Subsidiairement,

- prononcer la résolution des contrats pour dysfonctionnements et inexécutions graves.

En tout état de cause,

- condamner la SAS CBA Informatique Libérale à payer à Mme [F] une somme de 5 000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[Y] [F] précise à titre liminaire que ce sont les inexécutions graves et réitérées de la société CBA qui l'ont conduit à engager une action judiciaire à son encontre. Elle estime que le bon de commande produit ne permet pas de justifier de l'existence d'un contrat conclu en bonne et due forme entre elle et cette société. De plus, elle affirme que le contrat est nul en raison de son objet illicite. A titre subsidiaire, elle sollicite la résolution du contrat en raison des inexécutions graves et renouvelées de la société CBA depuis le jour de sa conclusion. Elle sollicite également l'indemnisation des préjudices dont elle a été victime.

Par ordonnance du 22 juin 2022, la procédure a été clôturée le 13 octobre 2022 et l'examen de l'affaire a été renvoyé à l'audience du 27 octobre 2022.

MOTIFS:

La société CBA Informatique Libérale est un éditeur français de logiciels médicaux pour les professionnels de santé en exercice libéral. Le 27 décembre 2013, elle a conclu un contrat à durée déterminée avec Madame [Y] [F], qui exerce la profession d'infirmière libérale. Ce contrat portait sur la mise à disposition par CBA Informatique Libérale d'un logiciel appelé 'My Agathe Connect' permettant, grâce à un lecteur de carte Vitale, la télétransmission des feuilles de soins aux caisses d'assurance maladie et aux mutuelles.

Sur la preuve des contrats:

Comme l'a jugé à bon droit le tribunal, la preuve de l'existence des contrats est rapportée par la société CBA qui verse aux débats:

-le bon de commande signé par [Y] [F] le 27 décembre 2013 lequel précise les obligations respectives des parties, s'agissant pour l'éditeur du logiciel de télétransmission «  My Agathe -connect » de le mettre à disposition de sa contractante moyennant le prix d'une redevance mensuelle de 39 euros par mois pour une durée de quatre ans.

-le bon de commande signé par [Y] [F] le 20 août 2015 portant sur la mise à disposition du logiciel d'aide à la gestion de comptabilité « My Apollon » pour une durée de quatre ans.

Sur la nullité du contrat du 27 décembre 2013 pour violation de l'article L 1111-8 du code de la santé publique:

L'article L 1111-8 dans sa rédaction applicable au présent litige dispose: «  toute personne qui héberge des données de santé à caractère personnel recueillies à l'occasion d'activités de prévention, de diagnostic, de soins...pour le compte de personnes physiques ou morales à l'origine de la production ou du recueil de ces données ou pour le compte du patient lui-même, doit être agréée à cet effet... ».

Le tribunal a fait droit à la demande d'annulation du contrat fondée sur l'illécéïté de son objet aux motifs que le fournisseur ne rapportait la preuve que la société OVH à laquelle il sous-traitait l'hébergement des données de santé à caractère personnel recueillies à l'occasion de l'utilisation du logiciel «  My Agathe Connect » disposait de l'agrément avant la signature du contrat litigieux.

La société CBA soutient que les dispositions de l'article L 1111-8 du code de la santé publique ne sont pas applicables aux opérateurs qui, dans le cadre de leurs services, participent à la chaîne de transmission des données sans jamais les héberger durablement à titre principal. Elle en déduit que ces dispositions ne sont pas applicables au contrat la liant à l'appelante: le contrat n'ayant pas pour objet l'hébergement de données de santé mais seulement la télétransmission assurée par le logiciel, la contractante ne peut se prévaloir de l'absence d'agrément de l'hébergeur pour soutenir que l'objet du contrat d'abonnement au logiciel est illicite.

[Y] [F] estime que les contrats signés par la société CBA sont nuls de nullité absolue pour objet illicite parce que cette société, au mépris des dispositions de l'article L 1111-8 du code de la santé publique, ne dispose d'aucun agrément, qu'elle n'a signé aucun contrat en vue de cette prestation d'hébergement, n'a pas recueilli le consentement des patients concernés et a retenu illégalement des données de santé à caractère personnel lorsqu'il a été mis fin au contrat. L'intimée fait valoir que la société CBA a commencé son activité sans respecter le cadre réglementaire, ce dont sa représentante a convenu dans une interview disponible sur la plateforme Youtube, et que la société OVH n'a obtenu son agrément que le 14 octobre 2016. Elle en déduit qu'est illicite l'objet du contrat qu'elle a conclu avec la société CBA laquelle ne disposait d'aucun agrément l'autorisant à héberger des données de santé à caractère personnel.

les données de santé sont des données sensibles dont le traitement est soumis à des conditions particulières. Leur accès est encadré par la loi pour protéger les droits des personnes.

L'éditeur du logiciel «  MyAgathe-connect» met à disposition du professionnel de santé son logiciel afin de lui permettre de télétransmettre les feuilles de soins concernant ses patients aux caisses et aux mutuelles. Il assure par son logiciel de télétransmission l'acheminement des données vers un serveur qui en assure le stockage physique pour les rendre accessibles à leurs destinataires, les caisses et les mutuelles.

S'il assure lui-même l'hébergement des données télétransmises, l'éditeur du logiciel doit lui-même être agréé. Si l'éditeur sous-traite l'hébergement des données de santé télétransmises à un tiers, un contrat doit les lier et l'hébergeur doit être agréé.

Comme l'a justement relevé le tribunal, la télétransmission de données de santé à caractère personnel et leur hébergement sont donc indissociables : le contrat de mise à disposition d' un logiciel permettant la télétransmission des feuilles de soins aux caisses et aux mutuelles implique nécessairement leur hébergement dans un support physique de stockage de données. Le fait qu'elle ait confié à une société tierce la prestation d'hébergement est indifférente, la société CBA était tenue de fournir à ses contractants une prestation d'hébergement conforme aux dispositions d'ordre public protégeant les données de santé à caractère personnels. L'objet du contrat est donc illicite si le stockage des données télétransmises par les abonnés via le logiciel mis à leur disposition n'est pas assuré par un hébergeur agréé.

Le tribunal a donc à bon droit annulé le contrat, la société CBA ne justifiant pas qu'à la date de sa signature la prestation d'hébergement des données de santé à caractère personnel était assurée par une personne disposant de l'agrément requis.

Le jugement sera confirmé aussi en ce qu'il a condamné la société CBA à restituer la somme de 1872 euros en remboursement des mensualités versées en exécution du contrat annulé.

Sur l'indemnité d'utilisation réclamée par le fournisseur:

Le tribunal a estimé que, ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude, lasociété CBA était mal-fondée à solliciter une indemnité d'utilisation évaluée au montant des mensualités dues pendant la durée d'utilisation d'un logiciel dont le contrat d'abonnement est frappé de nullité à ses torts exclusifs, ce qui reviendrait à annihiler les effets de la nullité du contrat.

La société CBA fait grief au tribunal d'avoir rejeté sa demande et considère qu'ayant mis à disposition le logiciel «  My Agathe-connect » durant quatre ans, [Y] [F] en a eu la jouissance de sorte qu'au titre de la remise des parties dans leur état antérieur à la conclusion du contrat, elle lui est redevable d'une indemnité d'utilisation d'un montant de 1.872 euros.

Selon [Y] [F], la nullité pour objet illicite intervenant en raison des manquements de la société CBA, cette dernière ne saurait être fondée à demander des restitutions.

A la suite de l'annulation, le contrat, rétroactivement anéanti, est censé ne jamais avoir existé: ses effets passés sont effacés et les parties remises dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant de conclure le contrat.

Aux termes des conditions générales de vente, la société CBA est propriétaire des droits d'auteur du logiciel «  My Agathe-connect » qu'elle met à la disposition de ses clients en vue de la réalisation de prestations de services et moyennant le règlement d'une redevance mensuelle. Le même document contractuel indique que le client est «  responsable du choix du progiciel dont il a acquis la licence d'utilisation auprès de CBA ».

Le contrat informatique conclu par les parties s'analyse donc en un contrat de location.

Le bénéficiaire de la mise à disposition du logiciel de télétransmission ne peut donc pas restituer en nature la jouissance du logiciel dont il a bénéficié: il ne peut donc y avoir restitution que par un équivalent monétaire, l'indemnité d'utilisation laquelle constitue la restitution en valeur de la prestation obtenue.

Le fait que l'annulation du contrat lui soit imputable ne prive pas le contractant de son droit d'obtenir la restitution en valeur de la prestation qu'il a fournie.

La valeur locative du logiciel «  My Agathe-Connect » étant de 39 euros par mois, l'indemnité d'utilisation sera arbitrée à la somme de 1872 euros ( 39 X48 mois).

Sur l'indemnisation du préjudice découlant de l'annulation du contrat pour objet illicite:

Si l'annulation du contrat cause une préjudice à l'un des contractants, il peut en demander réparation en engageant la responsabilité délictuelle de l'autre partie au contrat annulé.

Aucun des préjudices dont [Y] [F] demande réparation ' préjudice moral, préjudice de désorganisation, préjudice de trouble d'activité - ne sont la conséquence directe de l'annulation du contrat pour objet illicite. En effet, les préjudices dont elle se plaint ont tous à ses dires pour origine les graves dysfonctionnements du logiciel lui-même, sa lenteur et ses anomalies de connexion. [D]. n'a évoqué dans ses écritures aucun préjudice découlant de l'annulation-m^eme du contrat'

Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation des préjudices allégués.

Sur la nullité du contrat du 20 août 2015 relatif à la mise à disposition du logiciel d'aide à la gestion de comptabilité « My Apollon »:

A la fin du paragraphe consacré à l'annulation du bon de commande du 27 décembre 2013 portant sur la mise à disposition du logiciel de télétransmission des feuilles de soins appelé «  My Agathe-connct », fondée sur l'illécéïté de l'objet du contrat pour défaut d'agrément de l'hébergeur, [Y] [F] a conclu: «  Il est demandé dans le même temps à la présente cour d'annuler l'abonnement au logiciel MY APOLLON du 27 décembre 2013, dans la mesure où le même raisonnement s'applique. »

Le logiciel «  My Apollon » permettant au professionnel de santé de faciliter la tenue de sa comptabilité, rien n'établit que son utilisation implique le traitement et l'hébergement de données de santé à caractère personnel et soit donc soumis, en ce qui concerne l'hébergement des données, aux dispositions d'ordre public de l'article 1111-8 du code de la santé publique.

Aucune autre cause de nullité n'étant soulevée, l'appelante sera déboutée de sa demande d'annulation concernant ce contrat.

Sur la résolution pour exécution défectueuse du contrat du 20 août 2015 relatif à la mise à disposition du logiciel d'aide à la gestion de comptabilité « My Apollon :

Excipant d'inexécutions graves et renouvelées du contrat, [Y] [F] a demandé, à titre subsidiaire, la résolution du contrat.

Elle expose que le logiciel « My Apollon », lequel devait permettre aux termes du bon de commande la synchronisation des écritures bancaires du compte professionnel de ses clients et l'accompagnement dans l'élaboration et l'édition de la comptabilité et des obligations déclaratives (notamment l'établissement de la déclaration fiscale 2035), ne fonctionnait pas.

La seule réponse alors obtenue était que le problème de connexion entre le logiciel et les comptes bancaires professionnels venait de son établissement bancaire. Après avoir souscrit selon les conseils de sa banque en vue de régler la difficulté au service dématérialisation, elle a constaté que le problème perdurait et la société CBA ne pouvant rien faire pour l'année en cours, s'engageait à trouver une solution pour que le prochain exercice comptable soit fonctionnel.

Elle explique que cette situation l'a contrainte à saisir manuellement, ligne par ligne, l'intégralité des écritures bancaires de ses relevés de compte durant toute sa première année d'abonnement et que, même après ce travail fastidieux, elle s'est trouvée dans l'incapacité d'éditer sa déclaration fiscale 2035: le logiciel ne fonctionnait pas et des messages d'erreur apparaissaient sans cesse sans qu'il soit possible d'en déterminer l'origine. La fin de l'exercice approchant, elle a dû recourir aux services d'un comptable afin de pouvoir effectuer sa déclaration 2035, ce qui a correspondu à une dépense de 2.034 euros.

La société CBA n'a pas conclu sur la demande subsidiaire de l'intimée tendant à la résolution du contrat de mise à disposition du logiciel «  My Apollon ».

Le bon de commande du 20 août 2015 communiqué par l'intimée en pièce n°10 par lequel elle a souscrit un abonnement d'une durée de 48 mois au logiciel My Apollon stipule la mise à disposition du logiciel et « l'assistance pour l'utilisation du logiciel permettant l'établissement de la déclaration fiscale de résultats 2035 et de ses annexes pour l'établissement de la liste des informations complémentaires demandée par votre AGA ( association de gestion agréée)».

Pour justifier des dysfonctionnements du logiciel My Apollon, [Y] [F] verse aux débats des courriels échangés le 2 mai 2016, le 11 mai 2016, le 14 septembre 2016 avec la société CBA ainsi que des captures d'écran d'ordinateur dont la date est ignorée affichant des messages d'erreur.

Elle produit aussi une lettre de résiliation du contrat My Apollon du 1er juin 2016 dans laquelle elle invoque des difficultés liées à la récupération de ses relevés bancaires et l'impossibilité de finaliser la sauvegarde pour permettre à son fournisseur de créer en temps voulu la déclaration 2035 de l'année 2015.

La difficulté liée à l'impossibilité de récupérer les relevés bancaires laquelle aurait obligé l'infirmière à saisir manuellement ligne par ligne ses relevés bancaires est, selon le courriel de [H] [T], conseiller bancaire, lié au format des fichiers concernés: les relevés ne peuvent être transférés au client que sur fichier PDF et non sur fichiers OFX. Le conseiller bancaire précise qu'il existe des logiciels gratuits convertissant les fichiers PDF en fichiers OFX.

Les dysfonctionnements graves et répétés allégués par [Y] [F] ne sont pas établis en l'état des seules pièces justificatives qu'elle a versé aux débats.

Sur l'article 700 du code de procédure civile:

L'équité justifie de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles. Chaque partie succombant dans ses prétentions, les dépens seront répartis par moitié entre elles.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement , contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme partiellement le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la société CBA Informatique Libérale de sa demande tendant au paiement d'une indemnité d'utilisation de 1872 euros,

Statuant à nouveau,

Condamne [Y] [F] à payer à la société CBA Informatique Libérale une indemnité d'utilisation de 1872 euros,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Déboute [Y] [F] de sa demande de nullité et de résolution du contrat du mise à disposition du logiciel d'aide à la gestion de comptabilité «  My Apollon »,

Déboute les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront répartis par moitié entre elles.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01214
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;21.01214 ?
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