RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT No
No RG 20/01064 - No Portalis DBVH-V-B7E-HWD7
MS/EB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ANNONAY-SECT. ENCADREMENT
17 février 2020 RG :F19/00009
[O]
C/
S.A.S. LES RAPID'BLEUS
Grosse délivrée
le
Ã
COUR D'APPEL DE NÃŽMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 13 DECEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANNONAY-SECT. ENCADREMENT en date du 17 Février 2020, NoF19/00009
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Monsieur Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Leila REMILI, Conseillère
M. Michel SORIANO, Conseiller
GREFFIER :
Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 29 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Décembre 2022.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [F] [O] retraité
né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 5]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.S. LES RAPID'BLEUS
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 15 Septembre 2022
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 13 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
M. [F] [O] a été engagé par la SAS Les Rapid'Bleus à compter du 21 novembre 1977, au dernier état en qualité de directeur de ladite société.
Il était actionnaire de la société Les Rapid'Bleus à hauteur de 38 parts sur les 5000 parts composant le capital social.
Le 31 décembre 2017, le contrat de travail était rompu et la société Les Rapid'Bleus notifiait à M. [O] ses documents de fin de contrat.
Le 30 janvier 2019, M.[O] saisissait le conseil de prud'hommes d'Annonay aux fins de voir requalifier la rupture de son contrat de travail en un licenciement nul ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse et voir en conséquence son employeur condamné à lui verser diverses sommes à caractère indemnitaire.
Par jugement contradictoire du 17 février 2020, le conseil de prud'hommes d'Annonay a :
- débouté M. [F] [O] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné M. [F] [O] à verser à la SAS Les Rapid'Bleus la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens à la charge de M. [F] [O].
Par acte du 16 mars 2020, M. [O] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 22 mai 2020, M. [F] [O] demande à la cour de :
- réformer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay du 17 février 2020 ;
- dire et juger qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé ;
- dire et juger que la rupture de son contrat de travail, le 31 décembre 2017, s'analyse en un licenciement nul et de nul effet ;
- en conséquence, condamner la société Les Rapid'Bleus à lui payer les sommes suivantes :
* 11.970 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
* 1.197 euros au titre des congés payés sur préavis ;
* 51.376,40 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
* 25.935 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur ;
* 81.478 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;
* 5.404,60 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés ;
Subsidiairement,
- dire et juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
- en conséquence, condamner la société Les Rapid'Bleus à lui payer les sommes suivantes :
* 11.970 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
* 1.197 euros au titre des congés payés sur préavis ;
* 51.376,40 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
* 81.478 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
* 5.404,60 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés ;
Encore plus subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour jugerait que la rupture du contrat de travail s'analyserait en un départ à la retraite,
- condamner la société Les Rapid'Bleus à lui payer la somme 12.967,50 euros à titre d'indemnité de départ en retraite ;
Dans tous les cas,
- condamner la société Les Rapid'Bleus à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel ;
- condamner la même aux entiers dépens de l'instance.
Il soutient que :
Sur la rupture du contrat de travail :
- alors qu'il était âgé de 63 ans et sans s'être explicitement manifesté auprès de son employeur de quelque intention de faire valoir ses droits à la retraite, il a été évincé de la société Les Rapid'Bleus le 31 décembre 2017 et cela sans respect de quelque procédure que ce soit et sans même une lettre valant rupture du contrat de travail.
- l'employeur ne démontre pas qu'il a manifesté une volonté claire, non équivoque et définitive de partir à la retraite au 31 décembre 2017 comme l'exige la jurisprudence.
- il reconnaît que depuis la fin de l'année 2016 il nourrissait le projet de partir à la retraite au 31 décembre 2017. Pour autant, il n'a jamais donné suite à ce projet lorsqu'il a constaté le montant de la retraite qu'il aurait dû toucher.
- son licenciement est nul et de nul effet, ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où, au moment de la rupture, il bénéficiait encore du statut de salarié protégé. Il était conseiller prud'homal à [Localité 6].
- il a été contraint et forcé de faire liquider sa retraite alors qu'il souhaitait travailler encore quelques années.
Sur le rappel d'indemnité compensatrice de congés payés :
- il fait valoir qu'il est créancier à l'égard de la société de 24 jours ouvrables de congés payés.
- il conteste, contrairement à ce qu'a retenu le conseil de prud'hommes, avoir reconnu être responsable de la paie pour les mois de juillet et août 2017.
- il soutient n'avoir pris qu'un seul jour de congés payés en juillet.
En l'état de ses dernières écritures en date du 03 août 2020, la SAS Les Rapid'Bleus demande à la cour de :
- confirmer l'ensemble du jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Annonay en date du 17 février, en ce qu'il a :
* dit et jugé que la rupture du contrat de travail est intervenue à l'initiative de M. [F] [O]
* dit et jugé que la rupture du contrat de travail s'est inscrite dans le cadre d'un départ à la retraite
* dit et jugé que la rupture du contrat de travail à l'initiative de M. [F] [O] résulte d'une volonté claire, non équivoque, libre et consentie
Et en conséquence, en ce qu'il a :
* débouté M. [F] [O] de l'ensemble de ses demandes afférentes à la nullité du licenciement à titre principal, et à sa demande à titre subsidiaire de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* débouté M. [F] [O] de sa demande de paiement au titre des congés payés et de la prime de 14ème mois.
* condamné M. [F] [O] au paiement de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.
En tout état de cause,
- déclarer irrecevable la demande d'indemnité de départ en retraite de M. [F] [O], ou à défaut, le débouter de sa demande infondée,
- débouter M. [F] [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner M. [F] [O] à lui verser la somme de 3000 euros en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens en cause d'appel.
Elle fait valoir que :
Sur l'absence de requalification :
- la rupture du contrat de travail de M. [O] doit s'analyser en une rupture à l'initiative de ce dernier dans la mesure où il a exprimé une volonté claire et non équivoque, libre et consentie, de rompre son contrat de travail dans le cadre d'un départ en retraite, et ce de manière irrévocable au 31 décembre 2017.
- elle expose que le salarié l'a informée (en début d'année 2017), sans aucune réserve et sans aucune condition, de son départ en retraite le 31 décembre 2017.
- le salarié n'a formulé aucune contestation à son encontre lors de la remise des documents de rupture le 31 décembre 2017, ce qui prouve que son départ à la retraite était clair et non équivoque. Il ne démontre aucunement sa volonté de ne pas partir en retraite
- le salarié n'apporte aucun élément permettant de prouver le préjudice moral et économique au titre de sa demande d'indemnité pour licenciement nul, et violation du statut protecteur.
Sur l'indemnité de départ en retraite :
- elle soutient que, en application de l'article 564 du code de procédure civile, la demande de M. [O] au titre de l'indemnité de départ en retraite est irrecevable puisqu'il s'agit d'une prétention nouvelle.
Sur l'indemnité de congés payés :
- M. [O] a été réglé de l'ensemble de ses congés payés.
- le salarié ne justifie d'aucun élément pour démontrer qu'elle est redevable du paiement de 15 jours de congés payés manquants.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 11 juillet 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 15 septembre 2022. L'affaire a été fixée à l'audience du 29 septembre 2022.
MOTIFS
Sur la rupture du contrat de travail
Les parties sont en désaccord sur les causes de la rupture, à savoir un départ à la retraite pour l'employeur, un licenciemet nul ou sans cause réelle et sérieuse pour le salarié.
Selon l'article L.1237-9 du code du travail, le départ à la retraite est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste sa volonté claire et non équivoque de mettre fin au contrat de travail.
La loi n'impose aucun formalisme au salarié qui entend faire connaître à son employeur sa volonté de partir à la retraite.
Le départ à la retraite est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail pour bénéficier d'une pension de vieillesse.
La convention collective des transports routiers, en ses dispositions applicables aux cadres, prévoit que "l'ingénieur ou le cadre désireux de prendre sa retraite doit en aviser son employeur six mois à l'avance."
L'appelant reconnaît avoir émis le souhait de partir à la retraite au 31 décembre 2017, à la fin de l'année 2016, mais indique ne pas avoir donné suite.
Cette volonté est également confirmée par les attestations produites par l'employeur (pièces no2 à 11).
Le 2 février 2017, M. [R] de Sacdrop courtage d'assurance écrit à M. [O] en ces termes :
"...
Avant de nous voir pour votre départ à la retraite, je vous rappelle qu'il est important que les cadres que nous garantissons en santé respectent bien le circuit des demandes de remboursements des frais de santé...
Je reste à votre écoute pour préparer ensembles votre départ à la retraite ..."
Cet email démontre que le salarié avait engagé la procédure de départ à la retraite dès le début de l'année 2017 et en avait informé son employeur ainsi qu'il résulte d'un courriel de Mme [H], responsable comptable, à Aviva du 14 mars 2017 :
"Bonjour,
Merci de bien vouloir nous envoyer par retour de mail une projection du montant de la rente trimestrielle pour le départ à la retraite au 01/07 de Monsieur [O] [F] affilié no00002.
Dans cette attente et avec tous nos remerciements,
Cordialement."
Celle-ci atteste également que :
"Ayant travaillé au Rapid'Bleus d'octobre 1996 à septembre 2017, j'ai pu assister et aider monsieur [O] dans ses demandes de retraite. Il a commencé en 2016 à rassembler les documents nécessaires et à prendre rendez-vous avec les caisses (CPAM et KLESIA). Il a d'ailleurs reçu dans son bureau un représentant de la retraite complémentaire afin de préparer le dossier.
De plus, il avait également reçu des personnes d'UFF (organisme où l'on versait la retraite supplémentaire 83) afin d'avoir une estimation du capital qu'il percevrait lors de son départ.
Monsieur [O] avait bien l'intention de partir en fin d'année 2017 et étant né en décembre il devait terminer le dernier trimestre 2017.
..."
Le 1er septembre 2017, M. [N], dirigeant de la société Les Rapid'Bleus écrit à l'agence GBS en ces termes :
"A l'attention de pierre.
[F] part en retraite le 31.12.17.
Merci de m'indiquer la procédure à suivre dans le cadre de notre contrat.
Amitiés."
L'employeur produit encore un courrier de l'appelant à l'UFF, non daté, ainsi libellé :
"Monsieur,
Suite à notre dernier entretien, je vous demande par la présente de m'adresser une estimation de ma rente. Je désire prendre ma retraite au 01/01/2018.
Pouvez-vous également me confirmer tous les documents qui sont nécessaires pour procéder au dénouement de mon contrat ainsi que le choix de rente.
Veuillez..."
Est annexé à ce courrier, un "bulletin réponse de choix d'option à nous retourner", renseigné et signé de la main de M. [O], daté du 26 décembre 2017, soit avant la remise des documents de fin de contrat au salarié (le 31 décembre 2017).
Dès lors, et contrairement aux allégations du salarié, il n'a nullement été contraint de procéder à la liquidation de ses droits à retraite complémentaire à la suite de la remise des documents actant la fin de son contrat de travail.
Le 21 janvier 2018, M. [O] envoie un email à l'agence GBS, dont l'objet est le suivant "DOC RETRAITE [O] [F]", pièce jointe "AXA.pdf" :
"A [E] [P]
EN PJ LES DOCUMENTS MANQUANTS POUR LE DOSSIER DE RETRAITE DE [O] [F]
BONNE RÉCEPTION"
Ce courriel faisait suite à un précédent mèl de l'agence GBS au salarié, du 19 janvier 2018, ainsi libellé :
"Bonjour Mr [O],
Suite à votre appel de ce matin, j'ai eu le service de gestion des liquidations de retraite.
Votre dossier est donc incomplet. Il convient de me retourner complété le formulaire que vous trouverez en pièce jointe accompagné :
-d'une demande écrite de votre part
- de la copie recto/verso de votre carte d'identité
- de vos actes de naissance pour vous et Mme de - 3 mois.
Concernant le montant, les arrêtés au 31/12/17 ne sont pas encore sortis, vous aurez cette information lorsque votre dossier sera au complet. Le versement de la rente s'effectue par trimestre aux alentours du 20. Cette information vous sera aussi communiqué lorsque votre dossier sera complet.
Dans l'attente de votre retour..."
Enfin, le 23 janvier 2018, la compagnie AXA adresse un courrier à l'employeur concernant la mise en paiement d'une retraite supplémentaire AXA au bénéfice de l'appelant.
Le salarié produit des attestations desquelles il résulte qu'il aurait abandonné son projet de départ en retraite au 31 décembre 2017, et ce dès le mois de septembre 2017, ce qui est contesté d'une part par les témoignages figurant au dossier de l'employeur, et d'autre part par les démarches de l'appelant telles que rappelées supra.
M. [T], agent d'assurances Axa, atteste :
"Au cours de l'année 2017 mon associé [C] [D] et moi-même avons eu plusieurs réunions avec la direction des Rapid'Bleus afin de retravailler le contrat de santé non cadres collectif de l'entreprise. Lors de l'une d'elles, Monsieur [N] a demandé à Monsieur [O] de venir afin que nous lui expliquions les différentes options possibles qui s'offraient à lui au niveau du contrat retraite Cadres "Article 39".
Mon associé a donc expliqué directement à Mr [O], en ma présence et celle de
Monsieur [N], les différentes options possibles et a répondu à ses questions."
M. [D], agent d'assurances AXA, ajoute :
"Je soussigné [C] [D] Agent Général d'Assurances AXA atteste par la présente avoir assisté à plusieurs réunions au cours de l'année 2017 dans les locaux de la société
Rapid'Bleus.
Comme prévu avec Mr [N] nous avons abordé au cours d'une de ces réunions le départ à la retraite de Mr [O] [F] au niveau du contrat Article 39 "Cadre".
A cette occasion Mr [N] a donc demandé à Mr [O] de se joindre à nous afin d'évoquer les conditions de mise en place de cette rente. J'ai répondu à toutes les
questions de Mr [O], notamment sur le montant prévisionnel de la rente, le coût de la réversion en faveur de son épouse et enfin les documents à m'envoyer. Mr [O] m'est apparu non pas comme un spectateur de son départ à la retraite mais comme un acteur pleinement conscient de celle-ci."
Bien plus, il appartenait au salarié de produire l'ensemble de ses demandes de pensions déposées auprès des différents organismes concernés, communication sollicitée par l'employeur, en vain, afin de démontrer les dates auxquelles ces demandes ont été présentées, ce qui lui aurait permis de prouver ses allégations, l'employeur ne pouvant rapporter la preuve d'un fait négatif, à savoir que le salarié n'aurait pas souhaiter prendre sa retraite au 31 décembre 2017.
Ainsi, l'appelant ne produit aucun élément démontrant qu'il aurait alerté son employeur de sa volonté claire et non équivoque de ne plus partir en retraite au 31 décembre 2017.
Il convient, dans ces conditions, de retenir que la décision de mettre fin à son contrat de travail par une demande de mise à la retraite émane, en l'espèce, d'une volonté claire et non équivoque du salarié de sorte que le jugement déféré encourt la confirmation à ce titre.
Sur la demande au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés
Il résulte des bulletins de salaire produits aux débats que :
- au 31/05/2017 : il restait 30 jours de congés
- au 30/06/2017 : il restait 30 jours de congés sur la période N-1 et 2,5 jours sur la période N
- au 31/07/2017 : il restait 15 jours de congés sur la période N-1 (15 jours pris du 1er au 15 juillet) et 5 jours sur la période N
- au 31/08/2017 : les congés sur la période N-1 ont tous été pris (15 jours pris du 1er au 15 août) et 7,5 jours sur la période N
- au 30/09/2017 : il restait 10 jours sur la période N
- au 31/10/2017 : il restait 12,5 jours sur la période N
- le bulletin de salaire du mois de novembre n'est pas produit
- au 31/12/2017 : il restait 17,5 jours sur la période N.
Les décomptes de l'indemnité de congés payés de la caisse interprofessionnelle des congés payés de la région rhodanienne confirment les bulletins de salaire:
- il restait 15 jours de congés à prendre au 3 août 2017
- les 30 jours de congés pour la période 2016/2017 ont été pris au 5 septembre 2017
- il reste à prendre 17,5 jours de congés au 20 décembre 2017.
M. [O] soutient que les bulletins de salaire établis par l'employeur sont "totalement faux". Il reconnaît n'avoir pris que 7 jours ouvrables de congés. Il lui resterait ainsi 7,5 jours au titre de la période N en cours et 30-7 soit 23 jours au titre de la période N-1, soit un total de 30,5 jours.
L'appelant indique encore, en totale contradiction avec ses propres demandes, qu'il est créancier à l'égard de la société de 24 jours ouvrables de congés payés.
La cour relève non seulement la contradiction du salarié sur ce point, mais également l'incohérence de son calcul des jours de congés prétendument dus et qui ne correspond pas au nombre de jours acquis pendant la période de référence N, pris en compte par l'employeur pour calculer l'indemnité compensatrice de congés payés.
Enfin, l'appelant élude totalement la somme versée par l'employeur à ce titre et ne donne aucune explication sur les 17,5 jours acquis sur la période du 1er juin au 31 décembre 2017, lesquels ont donné lieu au versement de l'indemnité compensatrice correspondante.
Ce faisant, et même si la charge de la preuve de la prise des congés payés incombe à l'employeur, les éléments développés supra ne permettent pas de faire droit à la demande du salarié.
Le jugement sera confirmé en ce sens.
Sur la demande au titre de l'indemnité de départ à la retraite
L'employeur considère qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.
L'appelant n'a pas répondu à l'irrecevabilité ainsi soulevée.
Il n'est pas contestable que cette prétention n'avait pas été formulée par le salarié en première instance.
Aux termes des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, "à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait."
L'article 565 du code de procédure civile dispose que : "les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent".
L'article 566 du code de procédure civile dispose que : "les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire".
L'indemnité de départ à la retraite ne se cumule pas avec l'indemnité de licenciement car elles ont le même objet qui est de verser une somme au salarié quittant son emploi en fonction de son ancienneté.
M. [O] avait ainsi sollicité en première instance la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de la nullité du licenciement et notamment une indemnité de licenciement.
Il est constant que dès l'introduction de l'instance, M. [O] a contesté les conditions de son départ en retraite. Il ne s'agit donc pas d'un élément nouveau.
Pour autant, et dans la mesure où l'indemnité de licenciement et l'indemnité de départ à la retraite ont le même objet qui est de verser une somme au salarié quittant son emploi en fonction de son ancienneté, les deux prenant naissance dans la rupture du contrat de travail, elles poursuivent la même fin, de sorte que la demande nouvelle présentée à ce titre par l'appelant est recevable.
Sur le fond :
Les parties visent les dispositions de l'article 18 de la convention collective applicable, mais en tirent des conclusions différentes.
Le salarié considère que le versement de cette indemnité est automatique en cas de départ à la retraite, l'employeur estimant, à raison, que son versement est subsidiaire en application du paragraphe III de l'article 18, duquel il résulte :
"Les employeurs qui, en dehors du régime complémentaire de retraite et de
prévoyance des cadres, accordent déjà certains avantages aux ingénieurs et cadres Ã
l'occasion de leur départ à la retraite ne sont pas tenus au versement de la prime définie
ci-dessus dans la mesure où ces avantages sont plus favorables aux intéressés."
Il n'est pas contestable que l'appelant s'est vu attribuer, à son départ à la retraite, les avantages suivants :
- une rente viagère réversible à 60% par la compagnie Axa Assurances d'un montant de 282.184,99 euros,
- une rente réversible à 50% au profit du conjoint de 2265,90 euros par an auprès d'UFF.
Lesdites sommes sont versées à l'occasion du départ à la retraite du salarié et doivent dès lors être considérées comme des avantages tels que visés ci-dessus et excluant le paiement de l'indemnité de départ à la retraite prévue aux paragraphes I et II de l'article 18 de la convention collective nationale des transports routiers.
M. [O] sera dans ces circonstances débouté de sa demande.
Sur les demandes accessoires
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.
Il en sera de même pour la procédure de première instance, par voie de réformation de la décision critiquée.
Les parties conserveront à leur charge les dépens exposés en appel et en première instance.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 17 février 2020 par le conseil de prud'hommes d'Annonay sauf en ce qui concerne la condamnation de M. [F] [O] au paiement de la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens,
Y ajoutant,
Déclare la demande d'indemnité de départ à la retraite recevable mais au fond, déboute M. [F] [O] de ce chef de prétention,
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en appel,
Dit que chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens de première instance et d'appel,
Arrêt signé par le président et par la greffiere.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,