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08/12/2022 | FRANCE | N°21/03526

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 08 décembre 2022, 21/03526


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

















ARRÊT N°



N° RG 21/03526 -

N° Portalis DBVH-V-B7F-IGDF



MPF -AB



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

19 août 2021

RG:18/05911



[A]

S.A. PANACEA ASSURANCES



C/



[Z]

[V]

[Z]

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX

S.A.S. POLYCLINIQUE [17]

S.A. AXA FRANCE IARD

CPAM DU GARD















Grosse délivrée

le 08/12/2022

à Me Emmanuelle VAJOU

à Me Candice DRAY

à Me Philippe L'HOSTIS

à Me Nicolas JONQUET











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre





ARRÊT DU 08 DÉCEMBRE 2022





Décision déférée à la C...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/03526 -

N° Portalis DBVH-V-B7F-IGDF

MPF -AB

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

19 août 2021

RG:18/05911

[A]

S.A. PANACEA ASSURANCES

C/

[Z]

[V]

[Z]

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX

S.A.S. POLYCLINIQUE [17]

S.A. AXA FRANCE IARD

CPAM DU GARD

Grosse délivrée

le 08/12/2022

à Me Emmanuelle VAJOU

à Me Candice DRAY

à Me Philippe L'HOSTIS

à Me Nicolas JONQUET

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 08 DÉCEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Nîmes en date du 19 Août 2021, N°18/05911

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre,

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,

Mme Séverine LEGER, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Novembre 2022 et prorogé au 08 Décembre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

Monsieur [X] [A]

[Adresse 6]

[Localité 9]

S.A. PANACEA ASSURANCES GROUPE PASTEUR MUTUALITE

poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social

[Adresse 2]

[Localité 11]

Représentés par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentés par Me Amélie CHIFFERT de la SELEURL CABINET SELURL CHIFFERT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Monsieur [S] [Z]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 14]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Madame [B] [V] épouse [Z]

née le [Date naissance 5] 1948 à [Localité 18]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Monsieur [G] [Z]

né le [Date naissance 7] 1973 à [Localité 15] (07)

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentés par Me Candice DRAY de la SELEURL DRAY AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentés par Me Camille DI CINTIO, Plaidant, avocat au barreau de GRENOBLE

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX

[Adresse 20]

[Localité 13]

Représentée par Me Philippe L'HOSTIS de la SCP ALBERTINI-ALEXANDRE-L'HOSTIS, Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Sylvie WELSCH de la SCP UGGC AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. POLYCLINIQUE [17]

Société par actions simplifiées immatriculée au RCS de Nîmes sous le n°334 257 334, agissant poursuites et diligences de son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social sis

[Adresse 19]

[Localité 9]

S.A. AXA FRANCE IARD

Société anonyme inscrite au RCS de Nanterre sous le numéro 722 057 460 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège social sis

[Adresse 10]

[Localité 12]

Représentées par Me Nicolas JONQUET de la SCP SVA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

CPAM DU GARD

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social,

[Adresse 3]

[Localité 9]

Assignée à personne morale le 07 Décembre 2021

sans avocat constitué

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 08 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE:

[S] [Z] a consulté le 19 janvier 2009 le docteur [A], neurochirurgien notamment pour des dysesthésies des membres inférieurs et des douleurs importantes liées a une sciatalgie droite.

Le praticien a pratiqué sur son patient le 26 février 2009 au sein de la polyclinique [17] une intervention consistant en un recalibrage unilatéral du canal lombaire au niveau L2-L3 à droite et en une discectomie au même étage.

Les suites immédiates de |'intervention ont été douloureuses et marquées par la constitution d'un syndrome de la « queue de cheval » avec douleurs importantes, dès le lendemain, insensibilité, troubles sphinctériens et une insensibilité périnéale.

Après avoir fait réaliser en urgence le 28 février 2009 une imagerie à résonance médicale ( IRM), le docteur [A] a procédé à une ré-intervention en collaboration avec le docteur [I] pour décompression par laminectomie pluri-étagée.

Se plaignant de séquelles importantes dues à une atteinte neurogéne persistante et sévère des étages lombaires les plus bas (L5-S1), [S] [Z] a saisi, le 1er février 2011, la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux Languedoc Roussillon, laquelle, après avoir ordonné deux expertises a, dans un avis émis le 5 juillet 2012, estimé que le patient avait été victime d'un accident médical non fautif devant être indemnisé, pour moitié, par la solidarité nationale, la moitié restante étant due à l'état antérieur de la victime, atteinte d'une sténose du canal lombaire.

[S] [Z] a refusé l'offre d'indemnisation proposée par l'ONIAM d'un montant de 22 188,13 euros et a, par acte du 4 avril 2013, assigné l'ONlAM et la CPAM de [Localité 9] devant le tribunal de grande instance de Nîmes afin d'obtenir indemnisation de son préjudice.

Le Docteur [K], expert désigné par le juge de la mise en état, le 23 avril 2014, assisté d'un sapiteur, le Docteur [N], neurochirurgien, a déposé son rapport le 16 septembre 2015 et retenu la responsabilité du chirurgien et de la polyclinique [17].

[S] [Z] a alors assigné devant le tribunal, par acte en date du 18 janvier 2016, la polyclinique [17], son assureur la société AXA France, le docteur [X] [A], la société Panacea Assurances, son assureur, et la CPAM de [Localité 9] afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Le 6 avril 2017, le juge de la mise en état a joint les deux instances sous le même numéro.

Par jugement avant dire droit en date du 2 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Nîmes a déclaré recevable l'intervention volontaire de l'épouse et du fils de [S] [Z] et ordonné avant dire-droit une expertise médicale.

Le Dr [W], expert, a déposé son rapport le 27 juillet 2018.

Par jugement réputé contradictoire du 19 août 2021, le tribunal judiciaire de Nîmes a :

- dit que le dommage était imputable à hauteur de 80% à la faute du Dr [A] et à 20% à l'état antérieur du patient,

- dit que la Polyclinique [17] a commis un manquement à son obligation de surveillance sans lien de causalité avec les séquelles de M.[S] [Z],

- mis hors de cause l'ONIAM,

- débouté M. [S] [Z] de sa demande tendant à voir écarter des débats les rapports des docteurs [H], [M] et [D],

- fixé le préjudice de [S] [Z] comme suit:

Préjudice patrimonial

- dépenses de santé actuelles : 7 240,40 euros,

- frais divers : 2 820,80 euros,

- frais d'assistance temporaire par tierce personne : 186 969,90 euros,

- dépenses de santé futures : 36 802,48 euros,

- frais de fauteuil roulant : 50 206 euros,

- frais de logement adapté : 10 786,8 euros,

- frais de véhicule adapté : 34 022,29 euros,

- assistance tierce personne permanente : 1 347 702,46 euros.

Préjudice extra-patrimonial

- déficit fonctionnel temporaire : 21 436,92 euros,

- souffrances endurées : 32 000 euros,

- préjudice esthétique temporaire : 6 400 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 110 400 euros,

- préjudice esthétique permanent : 12 000 euros,

- préjudice d'agrément : 16 000 euros,

- préjudice sexuel : 12 000 euros

TOTAL 1 886 788,05 euros.

- condamné le Docteur [A] et son assureur, la société Panacea Assurance, à payer à [S] [Z] la somme de 1 886 788,05 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, lesquels seront capitalisés conformément aux règles de l'article 1243-2 du code civil,

- fixé la créance de la CPAM à la somme de 73 439,91 euros (80 %),

- condamné in solidum le Docteur [A] et son assureur, la société Panacea Assurance, à payer à [B] [Z] la somme de 28 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, lesquels seront capitalisés conformément aux règles de l'article 1243-2 du code civil,

- condamné in solidum le Docteur [A] et son assureur, la société Panacea Assurances, à payer à [G] [Z] la somme de 6 400 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, lesquels seront capitalisés conformément aux règles de l'article 1243-2 du code civil ;

- condamné in solidum le Docteur [A] et son assureur, la société Panacea Assurances, à payer à M. [S] [Z] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que 1 000 euros à Mme [B] [Z] et M. [G] [Z], pris ensemble;

Par déclaration du 24 septembre 2021, [X] [A] et son assureur la Sa Panacea Assurances ont interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 17 juin 2022, la procédure a été clôturée le 27 septembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 11 octobre 2022.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 septembre 2022, le Dr [A] et son assureur demandent à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions en ce qu'il a :

- débouté M. [S] [Z] de sa demande tendant à voir écarter des débats les rapports des docteurs [H], [M] et [D] ;

- rejeté toutes autres demandes ou demandes plus amples ;

- l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- débouter les consorts [Z] de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à leur encontre,

A titre subsidiaire,

- réduire leur part d'imputabilité des préjudices à 40 % compte tenu notamment de l'état antérieur pathologique et dégénératif présenté par le patient,

- fixer la date de consolidation de l'état séquellaire de M. [S] [Z] au 28 février 2011,

- limiter l'indemnité allouée au titre des dépenses de santé passées de M.[S] [Z] à la somme de 3 168 euros,

- débouter M. [S] [Z] de ses demandes formées au titre de frais d'annulation de voyage et de cure et de frais de télévision ;

- limiter l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne temporaire requise par M. [S] [Z] et à leur charge à la somme 15 098,40 euros selon un besoin journalier fixé à 4h30,

- débouter M. [S] [Z] de sa demande formée au titre de dépenses de santé futures, de frais de véhicule adapté, de frais d'adaptation voir d'acquisition d'un logement, de frais de jardinage,

- limiter l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne permanente échue à leur charge à la somme de 91 987,20 euros et au titre de l'indemnité à échoir sous forme de rente trimestrielle de 2 592 euros,

- débouter M. [S] [Z] de sa demande formée au titre d'un déficit fonctionnel temporaire total,

- limiter l'indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire partielle à 50 % et à leur charge à la somme de 2 330 euros,

- limiter l'indemnisation au titre des souffrances à leur charge à la somme de 12 000 euros,

- limiter l'indemnisation au titre du préjudice esthétique temporaire à leur charge à la somme de 6 000 euros,

- limiter le taux de déficit fonctionnel permanent de M. [S] [Z] en lien avec la complication post-opératoire survenue à 40 %,

- limiter l'indemnisation au titre du déficit fonctionnel permanent à leur charge à la somme de 36 800 euros,

- limiter l'indemnisation au titre du préjudice esthétique permanent à leur charge à la somme de 2 400 euros,

- limiter l'indemnisation au titre du préjudice d'agrément à leur charge à la somme de 8 000 euros,

-limiter l'indemnisation allouée au titre du préjudice sexuel de M. [S] [Z] et à leur charge à la somme de 6 000 euros,

-débouter M. [S] [Z] du surplus de ses demandes, fins et prétentions formées par voie d'appel incident,

- limiter l'indemnisation au titre des préjudices subis par [B] [Z] et à leur charge à la somme totale de 17 000 euros,

- débouter Mme [B] [Z] du surplus de ses demandes, fins et prétentions formées par voie d'appel incident,

- débouter [G] [Z] de toutes ses demandes, fins et prétentions formées par voie d'appel incident,

- débouter toutes les parties de leurs demandes plus amples et contraires formées par voie d'appel incident, comme étant mal fondées,

- déduire des indemnités précitées allouées aux consorts [Z] les sommes exécutées à la suite du jugement dont appel au titre de l'exécution provisoire,

- ordonner la restitution du surplus éventuellement perçu.

Le Dr [A] soutient qu'il n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité et que le prétendu manquement à son obligation de moyen ne saurait être retenu sur le simple avis isolé du Dr [W]:l'indication opératoire qu'il a retenu au regard des symptômes présentés par le patient et de l'étude de son historique médical était logique et a été reconnue comme telle par la majorité des experts et médecins consultés dans cette affaire. Il plaide par ailleurs que le caractère fautif de la technique opératoire qu'il a employée n'est pas non plus démontré ni son lien avec le dommage survenu. A titre subsidiaire, il sollicite la réduction des indemnités allouées par les premiers juges: le dommage étant multifactoriel, sa part de responsabilité doit être réduite à 40 %. Les appelants estiment qu'il y a lieu de réévaluer la date de consolidation de l'état séquéllaire de M. [Z] et relèvent que [B] [Z] et son fils [G] ne rapportent pas la preuve d'un préjudice d'affection ou d'une justification de l'imputabilité des frais de voyage dont l'indemnisation est sollicitée et devront être purement et simplement déboutés de toutes leurs demandes.

.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 septembre 2022, les consorts [Z], intimés et appelants à titre incident, demandent à la cour de :

- rejeter tout demande de nullité du rapport d'expertise comme irrecevable,

- juger recevable le rapport en ergothérapie réalisé par Mme [E] [O], expert judiciaire auprès de la cour d'appel de Grenoble,

- confirmer le jugement ce qu'il a :

- jugé responsable le Dr [A] de l'accident médical de M.[S] [Z],

- jugé que la Clinique [17] a commis une faute dans son obligation de surveillance

- mis hors de cause l'ONIAM

- indemnisé Monsieur [S] [Z] sous forme exclusive de capital.

- condamné le Docteur [A] et la Société PANACEA à payer à M. [Z] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens,

- condamné le Docteur [A] et la Société PANACEA à payer aux victimes indirectes la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens,

- ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal,

- l'infirmer pour le surplus,

A titre principal,

- juger que [S] [Z] n'était atteint d'aucun état antérieur en lien avec son état de handicap actuel et définitif et fixer son droit à réparation à 100 %,

- à défaut, juger que son état antérieur ne peut être évalué qu'à 3 % et fixer son droit à indemnisation à 97 %;

A titre subsidiaire, si la cour indemnisait M. [S] [Z] sous forme de rente,

- ordonner la revalorisation de la rente en fonction du Smic,

- condamner in solidum la polyclinique [17], la compagnie Axa, M.[A] et la société Panacea Assurance à lui payer les sommes suivantes :

- préjudice d'impréparation : 50 000 euros.

Préjudices patrimoniaux :

- Dépenses de santé actuelles 10 341,4 euros.

- Frais divers :

- frais de déplacement : 338,20 euros;

- frais de télévision : 525 euros,

- assistance à expertise : 3 650 euros

- demande copie dossier médical : 2 euros

- frais d'annulation de voyage : 320, 00 euros

- Assistance par tierce personne temporaire : 815 621, 83 euros

- Dépenses de santé futures :

- Psychologue : 1.010, 00 euros

- Réflexologie : 22 053, 12 euros

- Fauteuil roulant : 74.280, 25 euros

- Literie : 5 449, 94 euros

- Protection : 48 516, 86 euros

- Frais de véhicule adapté : 182 724, 28 euros

- Frais de logement adapté :

- aménagements déjà réalisés : 13 483, 50 euros

- réserver pour le surplus lié à l'acquisition et l'aménagement d'un nouveau logement indispensable au handicap de M. [Z] en lien exclusif avec l'accident du 26 février 2009.

- Tierce personne après consolidation : 6 484.499, 40 euros

Décomposés ainsi :

- sécurité, dignité, déplacements et actes de la vie quotidienne : 6 314 690, 38 euros

- tierce personne pour l'entretien des extérieurs : 169 809, 2 euros

Préjudices extrapatrimoniaux :

- Déficit fonctionnel temporaire : 33 156, 69 euros

- Souffrances endurées : 50 000 euros

- Préjudice esthétique temporaire : 15 000 euros

- Déficit fonctionnel permanent : 240 288, 70 euros

- Préjudice esthétique : 30 000 euros

- Préjudice d'agrément : 80 000 euros

- Préjudice sexuel : 60 000 euros

- juger que les condamnations ainsi prononcées porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'accident soit le 26 février 2009 et, à titre subsidiaire, à compter de la saisine initiale de la CRCI par M. [Z], soit le 1er février 2011, à titre infiniment subsidiaire à compter de la consolidation du 6 novembre 2012 ou de la saisine initiale du tribunal le 4 avril 2013,

- condamner in solidum la polyclinique [17], la compagnie AXA, M.[A] et la société Panacea Assurances, à en régler le montant capitalisé par année entière.

Concernant les victimes indirectes,

- condamner in solidum la polyclinique [17], la compagnie AXA, M.[A] et la société Panacea Assurances à payer à Mme [B] [Z] les sommes suivantes :

- Préjudice d'affection : 45 000 euros

- Troubles dans les conditions d'existence et préjudice sexuel : 40 000 euros

- Frais de déplacement 2 434, 34 euros

- Frais d'annulation de voyage 174 euros.

- condamner in solidum la polyclinique [17], la compagnie AXA, M.[A] et la société Panacea Assurances à payer à M. [G] [Z] les sommes suivantes :

- Préjudice d'affection : 30 000 euros

- Troubles dans les conditions d'existence et préjudice sexuel : 20 000 euros.

- juger que les condamnations ainsi prononcées porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'accident soit le 26 février 2009, à titre subsidiaire à compter de la date de l'accident ou à compter de la saisine initiale de la CRCI ou à titre infiniment subsidiaire à compter de la consolidation du 6 novembre 2012 ou de la saisine initiale du tribunal le 4 avril 2013.

- condamner in solidum la polyclinique [17], la compagnie AXA, M. [A] et la société Panacea Assurances, à en régler le montant capitalisé par année entière.

A titre subsidiaire :

- juger que M. [S] [Z] a été victime d'un aléa thérapeutique corrélatif à la faute du Dr [A],

- juger que ses préjudices sont imputables :

- à l'ONIAM à hauteur de 2 %;

- au Dr [A] à hauteur de 98 %.

A titre subsidiaire,

- juger que ses préjudices sont imputables :

- à l'ONIAM à hauteur de 50 %

- au Dr [A] à hauteur de 50 %.

- condamner l'ONIAM d'une part, et le Dr [A] et la société Panacea Assurances d'autre part, à l'indemniser de son préjudice corporel de manière identique à ce qu'il vient d'être exposé au titre de la responsabilité in solidum du Dr [A] et de la polyclinique [17],

- juger que les condamnations ainsi prononcées porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'accident soit le 26 février 2009 et, à titre subsidiaire, à compter de la saisine initiale de la CRCI par M. [Z], soit le 1er février 2011, à titre infiniment subsidiaire à compter de la consolidation du 6 novembre 2012 ou de la saisine initiale du tribunal le 4 avril 2013,

- condamner l'ONIAM d'une part, et le Dr [A] et la société Panacea Assurances d'autre part, à en régler le montant capitalisé par année en entière.

Concernant les victimes indirectes,

- mettre à la charge de l'ONIAM l'indemnisation des préjudices de M.[G] [Z] et Mme [B] [Z] de manière identique à ce qu'il vient d'être exposé au titre de la responsabilité in solidum du Docteur [A] et de la polyclinique [17].

- juger que les condamnations ainsi prononcées porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'accident soit le 26 février 2009 et, à titre subsidiaire, à compter de la saisine initiale de la CRCI par M. [Z], soit le 1er février 2011, à titre infiniment subsidiaire à compter de la consolidation du 6 novembre 2012 ou de la saisine initiale du tribunal le 4 avril 2013, à titre encore plus subsidiaire à compter de la saisine initiale du tribunal le 4 avril 2013

- condamner l'ONIAM d'une part, et le Dr [A] et la société Panacea Assurances d'autre part, à en régler le montant capitalisé par année en entière.

En tout état de cause,

- rejeter toutes demandes, prétentions et actions principales et incidentes du docteur [A], de la société Panacea Assurances, de la Polyclinique [17], de la société AXA et de l'ONIAM.

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM,

- condamner in solidum la polyclinique [17], la compagnie AXA son assureur, le Dr [A] et la société Panacea Assurances son assureur et à titre subsidiaire l'ONIAM à payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Les intimés réfutent l'existence d'un état antérieur susceptible de réduire leur droit à indemnisation: si [S] [Z] souffrait bien d'une sténose lombaire, il ne souffrait d'aucun handicap particulier et menait une vie normale.

Le patient soutient que la faute du Dr [A] est caractérisée par un mauvais choix technique, par le défaut d'indication opératoire de la disectomie en l'absence de hernie discale avérée et par le manquement à l'obligation de délivrance d'une information claire, loyale et précise qui aurait été comprise par M. [S] [A], ainsi que l'impose l'article L.1110-2. Il soutient que la clinique a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en manquant à son obligation de surveillance et en veut pour preuve les conclusions du rapport d'expertise [K]-[N] dont la nullité est soulevée tardivement en cause d'appel et dont le contenu est étayé par des preuves complémentaires. Il en déduit que son dommage est imputable à 90% au Dr [A] et à 10% à la clinique. Si l'existence d'un aléa thérapeutique venait à être retenue par la cour, les appelants demandent la condamnation de l'ONIAM à supporter la part d'indemnisation des préjudices qui résultent de l'aléa thérapeutique.

Sur la liquidation de ses préjudices, [S] [Z] demande à la cour de tenir compte du rapport ergothérapie réalisé par Mme [O], notamment au titre du besoin de tierce personne, des frais de véhicule adapté et des frais de logement adapté. Il sollicite la réévaluation à la hausse du montant de son indemnisation au titre des différents postes de préjudice et de rejeter la demande de l'ONIAM visant à obtenir le sursis à statuer s'agissant du préjudice de l'assistance d'une tierce personne, avant et après consolidation. Les appelants considèrent que l'indemnisation sous forme de capital s'impose et que [B] et [G] [Z] rapportent les preuves nécessaires à l'indemnisation de leurs préjudices respectifs, liés au frais de déplacement pour l'épouse de M. [Z] et au préjudice d'affection pour son fils.

Les appelants font valoir que le refus opposé par le Dr [A] et son assureur de verser le moindre euro à [S] [Z] a maintenu ce dernier sous le seuil de pauvreté pendant plus de 13 ans et justifie qu'ils soient condamnés à l'indemniser de ses préjudices avec intérêts au taux légal à compter, à minima, de sa date de consolidation soit le 6 novembre 2012. Ils sollicitent l'application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil afin que le jugement soit confirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 mai 2022, la Polyclinique [17] et son assureur la société Axa France, demandent à la cour de :

A titre principal,

- déclarer nul le rapport d'expertise rendu par le Dr [K] sur la base de l'avis sapiteur du Dr [N],

- infirmer le jugement dont appel seulement en ce qu'il a dit que la Polyclinique avait commis un manquement à son obligation de surveillance,

- le confirmer pour le surplus.

Statuant à nouveau,

- débouter les consorts [Z], le Dr [A] et son assureur de l'ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre.

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu que M. [Z] présentait un état antérieur de pathologie rachidienne dégénérative évalué à une part de 20% dans son état séquellaire,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu l'absence de lien de causalité entre un éventuel défaut de surveillance avec les séquelles présentées par M. [Z],

- débouter les consorts [Z], le Dr [A] et son assureur de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la Polyclinique [17].

A titre très subsidiaire, sur l'éventuelle part de responsabilité de la Polyclinique [17]:

- limiter la part d'imputabilité des préjudices à la Polyclinique [17] et son assureur à 30 % compte tenu notamment de l'état antérieur pathologique et dégénératif présenté par le patient

- juger que l'indemnisation de M. [Z] interviendra tel qu'il suit, avant application du pourcentage de 30%,

-réduire les indemnités allouées par les premiers juges

- fixer l'indemnisation de [B] [Z] tel qu'il suit, avant application du pourcentage de 30% :

- Préjudice d'affection : 15 000 euros

- Préjudice extrapatrimonial exceptionnel : 10 000 euros

- fixer l'indemnisation d' [G] [Z] , avant application du pourcentage de 30% :

- Préjudice d'affection : 8 000 euros

- Préjudice extrapatrimonial exceptionnel : le débouter

En tout état de cause,

- condamner tout succombant à verser à la Polyclinique [17] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

La polyclinique et son assureur font valoir que le rapport du Dr [K] leur est inopposable puisqu'ils n'ont pas été présents ou représentés lors des opérations d'expertise et que le Dr [N], sapiteur au Dr [K], présentait un conflit d'intérêt manifeste et justifiait qu'il refuse d'intervenir en tant que sapiteur. En l'absence de preuve complémentaire susceptible de rapporter la preuve d'une faute qui lui soit imputable, aucun manquement ou faute ne sera retenu à son encontre puisque le rapport d'expertise du Dr [W] relève que les soins dispensés par la clinique ont été adaptés, consciencieux et conformes aux bonnes pratiques. Au demeurant, les consorts [Z] ne rapportent la preuve d'un lien de causalité entre la gravité des séquelles présentées par M.[S] [Z] et les fautes qu'ils entendent lui imputer.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 mai 2022, l'ONIAM, intimé et appelant à titre incident, demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et en particulier en ce qu'il a mis l'ONIAM hors de cause,

A titre très subsidiaire

- limiter la part d'imputabilité à charge de l'ONIAM à un pourcentage ne pouvant excéder 2% et faire application de cette part dans l'allocation de toute indemnité qui serait mise à la charge de l'ONIAM,

- dire qu'une indemnisation par l'ONIAM s'entend sous déduction des prestations indemnitaires versées du même chef par les organismes sociaux ou conventionnels,

- débouter les consorts [Z] de leurs demandes faites au titre de leur appel incident,

- réduire les montants d'indemnisation au titre des postes de préjudices suivants: dépenses de santé future, frais de véhicule adapté, frais de fauteuil roulant, déficit fonctionnel temporaire (total et partiel), souffrances endurées, préjudice esthétique permanent, préjudice d'agrément, préjudice sexuel, aide temporaire par tierce personne, assistance par tierce personne pour les arrérages échus après consolidation jusqu'à la date du 7 novembre 2022,

- fixer s'agissant des arrérages à échoir au titre de l'assistance par tierce personne une rente annuelle à compter du 8 novembre 2022 de 25 030,80 euros versée trimestriellement, sous déduction des sommes reçues du même chef et sous déduction des périodes d'hospitalisation ou de placement dans un établissement spécialisé, ce dont il sera justifié auprès de l'ONIAM par M. [Z] à chaque échéance,

- débouter M. [Z] de sa demande au titre de frais de logement adapté,

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

- condamner le docteur [A] et Panacea Assurances à payer à l'ONIAM la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ONIAM fait valoir que les manquements du Dr [A], reconnus dans le rapport d'expertise [K] et [W], excluent toute indemnisation au titre de la solidarité nationale,

Les conclusions de l'appelant et la déclaration d'appel ont été signifiées le 7 décembre 2021 à la CPAM laquelle n'a pas constitué avocat.

MOTIFS:

SUR LA RESPONSABILITE:

Sur les fautes alléguées du Docteur [A]:

Sur les fautes liées à l'intervention chirurgicale elle-même:

1/ le recalibrage unilatéral du canal lombaire au niveau L2-L3 à droite associé à une discectomie, geste chirurgical retenu par le Dr [A], était-il adapté'

[S] [Z] qui présentait à la date de l'intervention chirurgicale litigieuse une pathologie lombaire d'aggravation progressive depuis 10 ans liée à l'étroitesse congénitale de son canal lombaire (sténose) a été adressé par son médecin traitant au Dr [A] lequel a décidé un recalibrage unilatéral du canal lombaire au niveau des vertèbres L2 et L3 associé à une discectomie au même étage.

Pour retenir la faute du praticien, le tribunal, se fondant sur les conclusions de l'expert [W], a considéré que le geste chirurgical choisi par le praticien n'était pas adapté à l'ensemble de la symptomatologie du patient car il a consisté à décomprimer isolément la racine de la vertèbre L3 droite alors que la symptomatologie était bilatérale et dépassait largement le cadre de cette racine.

[X] [A] et son assureur font grief au tribunal d'avoir seulement pris en considération les conclusions du Dr [W] alors même qu'elles sont contredites par tous les avis de tous les autres médecins préalablement désignés dans le cadre soit de la saisine de la commission de conciliation et d'indemnisation soit des consultations au stade amiable des médecins recours par le propre assureur du patient. Ils en concluent que le tribunal ne disposait pas d'éléments médicaux lui permettant de retenir avec certitude et sans risquer de commettre une erreur la faute du praticien.

Les appelants contestent en outre le caractère inadapté du geste chirurgical choisi dès lors qu'avant l'intervention, le patient ne présentait pas une sténose lombaire symptomatique mais une douleur épisodique de la jambe droite découlant essentiellement de la compression de la racine L3 de sorte que le praticien à juste titre a privilégié un geste chirurgical limité lequel a été validé par cinq neurochirurgiens consultés dans le cadre de la présente affaire.

[S] [Z] soutient que le Dr [A] en limitant son geste chirurgical à L2 L3 à droite a commis une faute consistant en un mauvais choix technique engageant sa responsabilité. Il fait valoir que les cinq professionnels de santé qui ont émis précédemment un avis ne disposaient pas de tout le dossier médical, notamment les imageries: il considère que leurs rapports sont tendancieux et de nulle valeur. Il rappelle que les Drs [K] et [N], expert et sapiteur neurochirurgien intervenus dans le cadre de l'expertise ordonnée par le juge de la mise en état ont aussi retenu des manquements du chirurgien à l'origine de son dommage.

La cour relève à titre préliminaire que le Dr [P] [W], neurochirurgien des hôpitaux de Marseille, expert désigné par jugement avant-dire droit du tribunal, a pris pleinement la mesure de la difficulté de sa mission portant sur la question très discutée de la responsabilité du Dr [A], En effet, il a rappelé au début de son rapport ( page 46) qu'il a pris connaissance des avis émis par les experts médicaux des compagnies d'assurance ( Dr [H], Dr [D], Dr [M], neurochirurgien, sapiteur du Dr [D] ), par les experts successivement désignés par la commission de conciliation et d'indemnisation ( Dr [F], neurochirurgien, et Pr [L], neurochirurgien) ainsi que par l'expert désigné par le juge de la mise en état, le Dr [K] et son sapiteur neurochirurgien le Dr [N]. Le Dr [W] a exposé en préambule de la partie «  discussion » de son rapport qu'en l'état des avis contradictoires des autres experts, il a fondé son analyse sur une sereine et nécessaire réflexion neurochirurgicale en tenant compte à la fois des données acquises de la science à la date du fait litigieux, des pièces médicales et des données réelles de l'imagerie médicale.

Contrairement à ce qu'affirme le Dr [A], l'avis du Dr [W] retenant une faute commise par le Dr [A] dans le choix du geste chirurgical n'est pas isolé, le précédent expert judiciaire désigné au stade de la mise en état, le Dr [K], assisté du Dr [N], neurochirurgien désigné comme sapiteur, ayant lui aussi conclu à un geste chirurgical inadapté. Le grief fait aux premiers juges d'avoir retenu un avis isolé contredit par tous les autres n'est donc pas fondé.

La cour constate ensuite que dans son certificat médical du 19 janvier 2009, le Dr [A] a explicité le choix du geste chirurgical qu'il a effectué: après avoir indiqué que le scanner, le myéloscanner et l'IRM lombaire mettaient en évidence un canal lombaire étroit congénital particulièrement marqué au niveau L2-L3, le praticien a choisi de procéder à un recalibrage unilatéral du canal lombaire à droite associé à une discectomie au même étage, ce geste opératoire ayant l'avantage à ses dires de ne pas déstabiliser davantage la colonne vertébrale et étant suffisant à décompenser l'ensemble des gaines articulaires.

Le Dr [W] a conclu que la pathologie lombaire du patient était arrivée à un stade chirurgical mais que le geste opératoire choisi ne pouvait suffire que dans le cas d'une souffrance radiculaire L 3 droite et qu'il n'était donc pas adapté car insuffisant à soulager le patient de ses troubles fonctionnels. L'expert a considéré qu'un geste chirurgical plus étendu en hauteur ( L2 à L 5) et en largeur ( bilatéral) était indiqué.

Le Dr [A] critique l'avis de l'expert en affirmant qu'avant l'intervention chirurgicale, le patient ne se plaignait que d'une douleur épisodique de la jambe droite découlant essentiellement de la compression de la racine L3 et qu'il a en conséquence à juste titre privilégié un geste chirurgical limité au niveau L2 L3 et à droite.

Le Dr [W] a répondu très précisément et de manière convaincante à cette critique en indiquant qu'il semblait bien exister avant l'intervention litigieuse une souffrance radiculaire L3 et que le Dr [A] avait d'ailleurs constaté un léger déficit du psoas droit et du quadriceps droit mais que cette douleur n'était pas isolée en l'état des symptômes décrits par le chirurgien lui-même tels que les dysesthésies dans les membres inférieurs, le dérobement des membres inférieurs, la lombosciatalgie bilatérale, lesquels évoquaient une étroitesse canalaire mixte et bilatérale de L2 à L5.

Ce choix chirurgical limité a également été jugé inadapté par l'expert [K] et son sapiteur neurochirurgien [N]. Les arguments du Dr [K] en page 17 de son rapport sont particulièrement pertinents: «  Devant un homme qui souffre depuis des années de lombosciatalgies bilatérales, surtout droites, il sera fait le choix d'un traitement chirurgical focal en L2 L3 droit. Les différents neurochirurgiens impliqués dans l'analyse du dossier n'auront pas d'objections quant à ce choix thérapeutique qui omettra le traitement des lésions situées plus bas et autrement parlantes, à l'origine de dérobements des membres inférieurs. En effet, une lésion discale située en L2-L3 ne peut pas être responsable d'une sciatique ou sciatalgie ( ici droite), or Mr [Z] souffrait essentiellement de sciatalgies plutôt droites intéressant donc les étages L4-L5 et/ou L5-S1.....Il n'est pas pris en considération la totalité de l'histoire clinique du patient....A l'analyse du dossier...on comprend très bien que le traitement chirurgical focal en L2 L3 constituait un choix économique sur un plan tissulaire disco-vertébral mais on constate qu'il n'y a pas eu de traitement global d'un véritable canal lombaire étroit, bien connu, allant de L 2 à S1 et pas seulement cantonné en L2-L3 droit ».

Il apparaît donc que non seulement les symptômes intéressant le membre inférieur droit et le niveau L2 ' L3 du canal lombaire étaient associés à d'autres symptômes intéressant aussi le membre inférieur gauche mais aussi qu'ils s'inscrivaient dans le contexte d'une pathologie révélée par l'imagerie médicale à savoir une étroitesse congénitale du canal lombaire dite sténose lombaire allant de L2 à S1 et donc connue du chirurgien avant sa prise de décision.

Dès lors, les avis du professeur [L] et du Dr [F], lesquels ont validé l'intervention ciblée à la zone L2-L3 côté droit au motif que dans la phase pré-opératoire, le patient ne présentait pas une sténose lombaire symptomatique mais une radiculalgie L2-L3 unilatérale et latérisée à droite ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions du Dr [W] comme celles du Dr [K], la sténose lombaire étant mise en évidence par l'imagerie médicale et la douleur de la racine L2-L3 unilatérale et latérisée à droite n'étant pas le seul symptôme constaté.

Les premiers juges ont donc à juste titre retenu qu'en choisissant un geste chirurgical inadapté à la situation de son patient, le Dr [A] avait commis une faute engageant sa responsabilité.

2/ Le geste chirurgical choisi et réalisé par le Dr [A] a-t-il majoré le risque du syndrome de la queue de cheval'

L'intervention chirurgicale litigieuse a été suivie d'une complication neurologique dite syndrome de la queue de cheval, c'est-à-dire un oedème réactionnel des racines de la queue de cheval se manifestant par des troubles moteur imposant de se déplacer en fauteuil roulant, des troubles sensitifs des membres inférieurs, des troubles vésicaux sphinctériens à type de vessie neurologique atonique et d'incontinence avec béance anale.

Après avoir rappelé que le syndrome de la queue de cheval est un risque inhérent à toute intervention sur le rachis lombaire, le Dr [A] conteste avoir commis une faute dans la mise en oeuvre de la technique opératoire employée lors de l'intervention chirurgicale litigieuse et conteste tout lien de causalité entre ladite technique opératoire et le syndrome de la queue de cheval présenté par le patient après l'intervention. Il souligne que l'expert [W] n'a émis qu'une hypothèse sur le rôle causal de la technique opératoire employée et qu'un autre expert, le Dr [N], a imputé cette complication neurologique à un hématome postopératoire compressif évacué avec retard.

[S] [Z] soutient quant à lui que l'acte de discectomie pratiqué par le chirurgien a provoqué l'apparition du syndrome de la queue de cheval car il concernait l'étage L2-L3 où se trouve le niveau le plus dense de la queue de cheval avec seize racines de sorte que les racines ont été déplacées dans des conditions anatomiques défavorables ' canal lombaire très étroit- : le manque de place à l'origine de la souffrance des racines a donc inévitablement provoqué le syndrome de la queue de cheval.

Le Dr [W] a conclu que le geste opératoire choisi et réalisé, outre qu'il était inadapté, a été nocif car il a augmenté incontestablement le risque de complication neurologique désignée sous le nom de syndrome de la queue de cheval.

Selon l'expert, si toute intervention rachidienne comporte un risque de complication neurologique de l'ordre de 1 à 2% en dehors de toute faute médicale, le choix de procéder à un recalibrage limité du canal lombaire, unilatéral et à droite au niveau de L2-L3, a majoré le risque de complication neurologique. L'expert a expliqué en effet que la moëlle épinière descend dans le canal rachidien jusqu'à la jonction L1- L2 de sorte que la partie la plus haute et la plus dense de la queue de cheval (ensemble formant un volumineux paquet de racines nerveuses destinées à innerver les membres inférieurs, les organes pelviens et le périnée) se situe précisément au niveau L2-L3.

C'est aussi à cet endroit précis que le canal lombaire était le plus rétréci : dans son certificat médical du 19 janvier 2009, le Dr [A] a en effet noté que le scanner, le myéloscanner et l'IRM lombaire mettaient en évidence un canal lombaire étroit congénital particulièrement marqué au niveau L2-L3. Pour l'expert, les 16 racines se trouvaient dans le fourreau dural situé lui-même dans un canal lombaire rétréci dont le diamètre antéro-postérieur n'était que de 9,5 mm: il ne fait donc aucun doute selon lui que les racines étaient agglutinées dans le fourreau dural, à l'étroit, sans l'environnement liquidien protecteur des espaces sous-arachnoïdiens.

La zone L2-L3 concernée par l'intervention présentait donc un danger résultant de la présence de la partie la plus dense de la queue de cheval dans la partie du canal lombaire la plus étroite.

Selon l'expert, l'accès au disque et le curage discal, geste opératoire choisi et réalisé par le neurochirurgien, lui a nécessairement imposé d'écarter vers l'intérieur le fourreau dural contenant les seize racines. Dans cette zone d'étroitesse canalaire majeure, il n'y avait matériellement pas la place de déplacer le fourreau dural sans causer une souffrance aux racines qu'il contenait: les conditions anatomiques défavorables contre-indiquaient de vouloir intervenir par un abord si limité, l'étroitesse canalaire majeure en L2-L3 imposant un recalibrage canalaire non pas seulement unilatéral à droite mais bi-latéral, lequel aurait permis un déplacement latéral des racines.

L'expert a donc conclu que le geste chirurgical choisi et réalisé avait été nocif et que ce manquement du Dr [A] avait participé à la complication neurologique.

La réalisation du geste chirurgical choisi par le Dr [A] dans une zone à risque élevé en raison de conditions anatomiques défavorables ( la zone L2-L3 où se trouve la partie la plus dense de la queue de cheval emprisonnée dans la partie la plus rétrécie du canal lombaire ) et impliquant nécessairement le déplacement de la queue de cheval pour accéder au disque ne pouvait qu'entraîner la complication neurologique très grave manifestée par un oedème des racines de la queue de cheval et désigné sous le nom de «  syndrome de la queue de cheval ».

C'est à tort que les appelants soutiennent que l'expert [W] n'a pas retenu comme certaine l'imputabilité de la complication neurologique au geste chirurgical.

En effet, si le Dr [W] a relaté dans son rapport que l'écartement du fourreau dural pour permettre l'accès au disque avait pu être un facteur traumatique à l'origine de la souffrance de la queue de cheval, il a aussitôt ajouté que dans un tel contexte le geste chirurgical n'était pas pertinent, que l'étroitesse canalaire majeure de la zone L2-L3 imposait un recalibrage canalaire bilatéral c'est-à-dire sur une zone plus large pour permettre le déplacement latéral des racines puis affirmé que le geste chirurgical avait été nocif et constituait un manquement ayant participé à la complication neurologique. Les termes clairs et dénués d'équivoque employés par l'expert dans la partie «  discussion » de son rapport tout comme ceux de sa conclusion en page 74 ne laissent aucun doute sur le fait que l'expert a retenu l'existence d'un lien de causalité certain entre le geste chirurgical fautif et la complication neurologique survenue. La seule phrase ambigüe que les appelants ont relevé dans le rapport s'explique seulement par le fait que l'expert n'a pas retenu que la faute du Dr [A] était la cause exclusive du dommage lequel selon lui découlerait de l'implication conjuguée de la faute du praticien ( 40%), de l'aléa thérapeutique ( 40 %) et de l'état antérieur de la victime ( 20%).

L'existence d'un hématome compressif du site opératoire susceptible d'être à l'origine de la complication neurologique survenue après l'opération n'a pas été constatée par le Dr [W] à la lecture des images de l'IRM lombaire réalisé en urgence à la suite des premiers troubles moteurs apparus après l'intervention. La présence de cet hématome n'a d'ailleurs pas été davantage constatée par le radiologue et le Dr [A] qui ont alors considéré que la complication neurologique avait pour origine une décompensation de l'étroitesse canalaire. Si le Dr [K] a conclu à la présence de cet hématome et précisé que son développement et le retard dans son traitement était à l'origine du syndrome de la queue de cheval, il précise toutefois qu'il déduit la présence de l'hématome d'un argument clinique ' la survenue décalée des douleurs ' et d'un argument paraclinique - «  traces d'hématome visualisées sur coupe d'IRM ». La présence d'un hématome compressif post-opératoire repose donc sur des arguments ténus et les images de l'IRM lombaire ne permettent pas de l'établir avec un degré de certitude satisfaisant car elles ont donné lieu à des interprétations divergentes, le Dr [K] ayant vu de simples traces d'hématome tandis que le radiologue qui a pratiqué l'Irm et le Dr [W] n'ont rien vu.

Le lien de causalité certaine et directe entre la technique opératoire non pertinente choisie par le Dr [A] et le dommage subi par [S] [Z] est donc établi.

Sur le manquement à l'obligation d'information:

Le tribunal a examiné le document daté du 19 janvier 2009 signé par [S] [Z] et versé aux débats par le Dr [A] intitulé: « formulaire de consentement à une intervention chirurgicale » et considéré que les risques susceptibles de survenir étaient suffisamment explicites et que selon l'expert, les pièces médicales attestaient que le chirurgien avait expliqué tant par écrit qu'oralement à son patient les techniques et les risques opératoires ainsi que les alternatives thérapeutiques. Les premiers juges ont donc écarté tout manquement du Dr [A] à son obligation d'information telle que prescrite par l'article L 1111-2 du code de la santé publique.

[S] [Z] dénonce l'absence d'informations sur le risque de paralysie et sur les risques génito-sphinctériens et estime son préjudice d'impréparation à la somme de 50000 euros.

La cour observe que le risque de paralysie, les troubles sensitifs et des fonctions sexuelles, les troubles sphinctériens avec troubles de la vidange de la vessie et des intestins étaient mentionnés dans le formulaire signé le 19 janvier 2009 par [S] [Z]. Le Dr [K] tout comme le Dr [W] ont d'ailleurs conclu qu'il avait été pleinement informé des risques encourus.

Le tribunal a donc à bon droit rejeté la demande d'indemnisation du préjudice d'impréparation et sa décision sera sur ce point confirmée.

Sur la faute de la polyclinique [17]:

Le tribunal a estimé que la polyclinique avait commis une faute en ne mettant pas en place une surveillance post-opératoire du patient mais n'a pas retenu sa responsabilité en l'absence de preuve d'un lien de causalité entre le défaut de surveillance et le préjudice du patient résultant du syndrome de la queue de cheval.

[S] [Z] soutient au contraire que le défaut de surveillance a été à l'origine d'un retard de diagnostic lequel a entraîné un retard de soins préjudiciable. L'intimé estime à l'inverse du Dr [W] que le syndrome de la queue de cheval est une urgence absolue nécessitant une prise en charge immédiate pour éviter des séquelles irréversibles: l'oedème écrasant les racines nerveuses, il était nécessaire de donner de l'espace en ouvrant largement le canal rachidien. Le patient considère que la deuxième intervention aurait dû être réalisée la veille et que son retard est imputable au défaut de surveillance de la Polyclinique.

Le Dr [W] a expliqué que la seule véritable urgence de réintervention chirurgicale était la constitution d'un hématome compressif sur le fourreau dural mais que la présence d'un tel hématome n'avait pas été décelée par l'IRM lombaire pratiqué en urgence le 28 février 2009. En l'absence d'hématome compressif, la réintervention chirurgicale n'est plus aux dires de l'expert une urgence absolue où chaque heure compte. L'oedème des racines nerveuses dont souffrait [S] [Z] ne nécessitait pas de l'avis de l'expert un diagnostic strictement urgent avec une sanction chirurgicale immédiate.

En l'état des conclusions du Dr [W], aucun lien de causalité n'est établi entre le défaut de surveillance reproché à l'établissement de soins et le dommage subi par [S] [Z]. En l'absence d'une des trois conditions requises pour engager la responsabilité de la polyclinique [17], il n'y a pas lieu de répondre à l'argumentaire relatif à la caractérisation de la faute de cet établissement.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de la polyclinique [17].

Sur la mise hors de cause de l'Oniam:

Contrairement à l'avis de l'expert qui a estimé que le dommage était imputable à hauteur de 40 % à la faute du Dr [A], à hauteur de 20% à l'état antérieur de la victime et à hauteur de 40 % à un aléa thérapeutique, le tribunal a estimé qu'il n'était pas possible d'imputer même partiellement le dommage subi par le patient à un aléa thérapeutique dès lors qu'il était établi que l'acte médical était fautif.

L'Oniam retient que, par un geste chirurgical jugé par les experts [K] et [W] non indiqué et nocif, le Dr [A] a fait courir un risque majoré de décompensation au patient et que sa responsabilité découlant de ses manquements est exclusive de toute indemnisation au titre de la solidarité nationale, un même acte médical constituant un fait générateur unique ne pouvant recevoir qu'une seule qualification juridique.

Aux termes de l'article L 1142-1 du code de la santé publique, un accident médical ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale seulement dans les cas où la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement n'est pas engagée.

La responsabilité du Dr [A] étant retenue, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a mis hors de cause l'Oniam.

Sur l'étendue du droit à indemnisation:

[S] [Z], intimé et appelant incident, fait grief au tribunal d'avoir estimé que son droit d'indemnisation était limité à 80% de son préjudice et retenu une incidence de son état antérieur à hauteur de 20%. S'il souffrait auparavant d'une sténose lombaire, pathologie l'ayant d'ailleurs conduit à consulter le Dr [A], il menait à ses dires avant l'intervention chirurgicale litigieuse une vie normale en dehors des périodes de crise et avait à titre d'exemple participé à une randonnée de quatre heures moins d'un mois avant le 26 février 2009. Il fait valoir que de nombreuses victimes du syndrome de la queue de cheval à la suite d'une intervention imposée par leur pathologie lombaire ont été indemnisées de l'intégralité de leur préjudice et que la seule existence d'un antécédent médical n'est pas de nature à limiter son droit à indemnisation, toute personne opérée souffrant par définition d'une pathologie. Selon l'intimé, à défaut de retenir une réparation de son préjudice intégral indépendamment de tout état antérieur, l'incidence de l'état antérieur dans la réalisation de son préjudice ne saurait être évaluée à plus de 3%.

Dans l'hypothèse où la responsabilité du Dr [A] serait retenue par la cour, ce dernier et son assureur demandent d'entériner les conclusions de l'expert [W], lequel a limité à 40% la part d'imputabilité du dommage à la faute du praticien.

Comme le rappelle [S] [Z], l'état antérieur représente les troubles ou affections pathologiques que présente un individu au moment du fait générateur et qui est de nature à modifier la gravité des séquelles consécutives à l'accident. Le Dr [P] [W] dans son rapport d'expertise a conclu à une imputabilité du dommage à hauteur de 20 % à l'état antérieur du patient en expliquant qu'il était âgé de 60 ans au moment de l'intervention et présentait un état antérieur rachidien lombaire, la pathologie s'étant manifestée en 1999 soit dix ans plus tôt. Selon l'expert, cet état antérieur était symptomatique selon les divers documents relatifs à un suivi rhumatologique suscité par l'apparition progressive de douleurs, de troubles sensitifs des membres inférieurs, de troubles moteurs. De surcroît, les examens avaient révélé une étroitesse canalaire lombaire mixte, à la fois constitutionnelle et acquise, osseuse et disco-ligamentaire. Le Dr [W] a précisé que l'étroitesse canalaire mixte s'aggrave spontanément et inéluctablement au cours du temps en se manifestant par des troubles de plus en plus sévères: claudication intermittente des membres inférieurs, apparition de troubles neurologiques déficitaires moteurs, sensitifs et plus tard génito-sphinctériens et sexuels, impotence fonctionnelle sévère conduisant à des déplacements en fauteuil roulant. Ainsi, l'indication opératoire bien posée permet aux dires de l'expert d'éviter ou de minimiser l'évolution péjorative spontanée de la pathologie.

La victime a droit à la réparation intégrale de son dommage sans perte ni profit mais seul doit être mis à la charge du responsable le dommage qu'il a réellement causé.

[S] [Z] ne souffrait pas simplement de lombalgies avant l'intervention chirurgicale pratiquée le 26 février 2009 par le Dr [A]: depuis dix ans, une pathologie rachidienne lombaire découlant d'une étroitesse canalaire lombaire congénitale et acquise s'était manifestée par différents symptômes tels que des douleurs, des troubles sensitifs des membres inférieurs et une incapacité au moins intermittente à la marche normale. S'il affirme qu'il menait une vie normale avant le 26 février 2009 et était en mesure de pratiquer la randonnée, il reste que depuis 1999 étaient apparus des symptômes de plus en plus sévères de sa pathologie et que la dimension très étroite de son canal lombaire était apparue dès le premier IRM pratiqué en 1999.

Cette pathologie rachidienne lombaire aurait évolué de manière défavorable indépendamment de l'intervention chirurgicale et entraîné des séquelles identiques à celles qui se sont manifestées immédiatement après l'intervention dans le tableau du syndrome de la queue de cheval. L'évolution spontanée de la pathologie aurait donc abouti au même résultat dommageable que celui provoqué par la complication neurologique apparue à la suite de l'intervention litigieuse. Il se déduit donc des conclusions de l'expert que la pathologie du patient a contribué partiellement à la réalisation de son dommage et que l'intervention chirurgicale fautive du Dr [A] a contribué à accélérer l'aggravation de la pathologie.

Les taux d'imputabilité respectifs de 20% pour l'état antérieur de la victime et de 80 % pour la faute médicale du Dr [A], retenus par le tribunal, seront donc confirmés.

Si la cour faisait en effet droit à la demande de l'appelant tendant à la réduction à 40% du taux d'imputabilité de sa faute, un tel partage impliquerait de reconnaître que l'état antérieur de la victime a contribué à hauteur de 60% à la réalisation de son dommage, ce qui serait totalement disproportionné par rapport aux éléments médicaux versés aux débats ainsi qu'aux conclusions de l'expert.

SUR LA LIQUIDATION DU PREJUDICE DE [S] [Z]:

Les premiers juges ont retenu à juste titre la date de consolidation au 6 novembre 2012 car selon le Dr [W], expert, l'IRM du 8 mars 2011 a mis en évidence un épisode de discopathie inflammatoire L2-L3 qui a majoré les troubles fonctionnels et dont la régression n'est apparue que sur l'IRM du 6 novembre 2012.

Les appelants soutiennent donc à tort que la consolidation doit être fixée au 28 février 2011.

A/ Le préjudice patrimonial:

1/ avant consolidation:

Sur les dépenses de santé actuelles:

Les dépenses de santé actuelles correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation restés à la charge de la victime (frais d'orthèse, de prothèses, paramédicaux, d'optique.... ) et sont indemnisés seulement s'ils sont étayés par des pièces justificatives.

Les premiers juges ont retenu que les dépenses de santé actuelles de [S] [Z] s'élevaient à la somme totale de 9050,50 euros et comprenaient le forfait journalier ( 1042 euros) , les protections ( 7920 euros) et les chaussettes ( 88,50 euros).

[X] [A], appelant principal, sollicite la réduction de ce poste de préjudice à la somme de 7920 euros comprenant les seules protections. Il estime en effet que ce poste de préjudice est constitué par les frais médicaux et paramédicaux réellement exposés et en lien direct avec l'accident médical: doivent être écartés selon lui le forfait hospitalier correspondant à des frais que la victime aurait exposés indépendamment de l'accident médical et les dépassements d'honoraires ainsi que les achats de chaussettes médicales qu'en raison de sa pathologie préexistante il aurait dû supporter.

[S] [Z], intimé et appelant incident, sollicite la somme de 10 341,04 euros comprenant le forfait journalier de la clinique [17] [16] ( 1042 euros), sept factures oubliées par le tribunal, l'IRM du 28 février 2009 et l'achat de chaussures spécialisées ( total:1290,54).

L'intimé ne justifiant pas que les frais d'IRM du 28 février 2009 sont restés à sa charge, le tribunal a eu raison de ne pas les retenir ( 73 euros).

Parmi les sept factures produites, seules les factures correspondant à l'achat de protections seront retenues, représentant une somme totale de 758,17 euros, les autres factures correspondant à des dépenses dont le lien de causalité direct et certain avec le dommage subi n'est pas démontré.

A l'instar des premiers juges, la cour considère que le forfait journalier est un préjudice indemnisable, son montant excédant les dépenses d'entretien que la victime aurait exposés indépendamment de l'accident médical. De même, il n'est pas contestable qu'en l'état de l'atteinte des membres inférieurs provoquée par la complication neurologique dite du syndrome de la queue de cheval, il a été prescrit des chaussettes médicales à la victime qui justifie que la somme de 88,50 euros est restée à sa charge.

Ce poste de préjudice sera donc évalué à la somme de 9808,67 euros ( 7920+1042+88,50+758,17 euros).

Compte-tenu de la limitation à 80% de l'imputabilité du dommage à la faute du Dr [A], il sera alloué à [S] [Z] la somme de 7 846,93 euros.

Sur les frais divers:

Le tribunal a estimé ce poste de préjudice à la somme totale de 3526 euros.

Il a retenu les frais de transport ( 329 euros), les forfaits télévision ( 525 euros), les frais d'assistance à expertise ( 2350 euros), les frais de reproduction du dossier médical ( 2 euros), les frais d'annulation de voyage et de cure ( 320 euros).

[S] [Z] sollicite l'infirmation du jugement seulement en ce qui concerne les frais d'assistance à expertise: il réclame la somme de 3650 euros correspondant à l'assistance du Dr [C] ( 850 euros), celle du Pr [T] ( 500 euros), celle du Dr [Y] qui l'a assisté lors de l'expertise du Dr [W] ( 1000 euros) et enfin l'assistance de [E] [O], ergothérapeute, aux services de laquelle il a eu recours pour rapporter la preuve de l'étendue de son besoin en tierce personne.

[X] [A] et son assurance sont au rejet de toutes les demandes de la victime au titre des frais divers. Ils contestent être tenus d'indemniser les frais de télévision, estiment que l'intimé ne prouve pas avoir réellement supporté les frais d'annulation de son voyage et de sa cure alors qu'il est supposé avoir contracté une assurance-annulation lors du règlement de son voyage par carte bancaire, et considèrent que le bilan réalisé par l'ergothérapeute choisie par la victime n'étant pas contradictoire n'a pas à être indemnisé au titre des frais imputables à l'accident.

Les frais de location de télévision supportés par la victime durant ses deux périodes d'hospitalisation ont à bon droit été retenus par le tribunal, seul l'accident étant à l'origine de cette dépense.

Les frais d'annulation de voyage et de cure, dûment justifiés, seront remboursés, la victime justifiant s'en être elle-même acquittée.

Les honoraires réglés par [S] [Z] à des experts qu'il a sollicités pour établir des rapports soit sur les causes soit sur les conséquences de la complication neurologique qu'il a subie à la suite de l'intervention chirurgicale du 26 février 2009 constituent un préjudice réparable dès lors que, en l'absence de l'accident médical dont il a été victime, il n'aurait pas supporté ces dépenses. La charge de la preuve de l'étendue de son préjudice lui incombant, et en l'état de la gravité de ses séquelles, le caractère non contradictoire du rapport de l'ergothérapeute qu'il a versé aux débats n'exclut pas qu'il a été établi pour évaluer le poste de préjudice d'assistance de tierce personne et qu'il soit imputable à l'intervention chirurgicale du 26 février 2009.

L'intimé affirme que la limitation de son droit à indemnisation à 80 % de son préjudice ne s'applique pas aux frais d'assistance à expertise lesquels devraient selon lui être remboursés dans leur intégralité. Ces frais sont toutefois la conséquence directe de son dommage lequel est imputable à hauteur de 20 % à son état pathologique antérieur et à hauteur de 80% à la faute médicale commise par le Dr [A]. La limitation du droit à indemnisation de la victime est donc globale et s'applique sans distinction à tous les postes de son préjudice.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a alloué une indemnité de 2820,80 euros en réparation de ce chef de préjudice.

Sur l'assistance tierce personne:

Pour allouer à la victime la somme de 186 969,90 euros , les premiers juges ont arbitré à 12 heures par jour selon un taux horaire de 18 euros le besoin en tierce personne avant consolidation de [S] [Z] aux motifs qu'à cette période, son état nécessitait six auto-sondages par jour, qu'il ne pouvait pas rester debout et que la marche avec cannes était réduite et qu'il avait besoin d'être aidé pour s'habiller, faire sa toilette et exécuter toutes les tâches de la vie courante.

[S] [Z], intimé et appelant incident, demande à la cour de fixer ce besoin à 24 heures par jour au taux horaire de 27,80 euros durant la période du 19 novembre 2009, date de la fin de son hospitalisation, au 6 novembre 2012, date de la consolidation, et réclame la somme de 815 621,83 euros en réparation de ce chef de préjudice.

Rappelant que la victime n'était ni paraplégique ni grabataire mais pouvait, à sa sortie de l'hôpital, parcourir une cinquantaine de mètres en marchant avec des béquilles, les appelants sollicitent à l'inverse la réduction de l'indemnité allouée par les premiers juges.

Après avoir constaté que [S] [Z] présentait des troubles neurologiques consistant en un syndrome incomplet de la queue de cheval, le Dr [W], expert, a relevé que l'état fonctionnel de [S] [Z] avait nécessité dès son retour à domicile et jusqu'à sa consolidation une aide non spécialisée, assurée par son épouse et par son fils, pour les déplacements et les activités domestiques évaluée à trois heures par jour ainsi qu'une aide spécialisée, assurée par une infirmière ou une aide-soignante, pour les toilettes et les soins, évaluée à une heure trente par jours, soit au total un besoin d'aide par tierce personne avant consolidation estimé à 4 H 30.

[S] [Z] fait observer à la cour qu'il lui est impossible de se relever en cas de chute, qu'il a besoin de son épouse pour se rendre aux toilettes, devant être aidé et supervisé par un tiers, qu'une aide humaine est nécessaire pour pousser son fauteuil roulant: il estime en conséquence que son état de dépendance nécessite une assistance 24 h/24. L'intimé rappelle qu'avant la consolidation, son état général était encore plus détérioré et souffrait d'un déficit fonctionnel entre 60 et 75 % de sorte qu'il était dans l'incapacité durant plusieurs mois d'effectuer seul les transferts à partir de son fauteuil roulant et nécessitait une surveillance permanente pour préserver sa sécurité. Il insiste sur le fait qu'il a besoin d'une aide extérieure dès qu'il se souille. L'évaluation retenue par le tribunal correspondrait selon lui à une assistance diurne alors que son épouse et son fils se sont relayés auprès de lui jour et nuit afin de ne jamais le laisser seul. Il estime que pour préserver sa dignité, la présence d'un tiers à ses côtés en permanence lui permettrait de se passer de protections. Il déduit que l'impossibilité qui était la sienne au cours de la période considérée de se rendre seul aux toilettes, de se relever en cas de chute ou de fuir un danger immédiat impose la présence permanente d'une tierce personne susceptible d'intervenir immédiatement. L'intimé fait valoir enfin qu'il a besoin de l'aide d'une tierce personne pour effectuer les actes de la vie quotidienne ( préparation d'un repas, courses...), les actes d'entretien personnels ( se raser, s'habiller, se chausser...) et les déplacements médicaux ( rééducation, examens divers...) et personnels pour maintenir sa vie sociale.

L'intimé fait par ailleurs grief au tribunal d'avoir fixé arbitrairement à la somme de 18 euros le tarif horaire et demande à la cour de retenir un tarif horaire de 27 euros.

Les appelants demandent à la cour de limiter le besoin de tierce personne avant consolidation au titre de l'aide humaine non spécialisée à 4 h 30 par jour, soit 37 746 euros. Ils soulignent que la victime est atteinte d'un syndrome incomplet de la queue de cheval, qu'elle demeurait apte à la conduite de sorte que le besoin de tierce personne évalué à 12 heures par jour par les premiers juges est manifestement excessif et injustifié.

L'expert, après examen des pièces médicales, a constaté une récupération neurologique partielle après le séjour du patient au centre de rééducation fonctionnel Valdegour jusqu'au 19 novembre 2019 mais observé toutefois la persistance de déficits senstivo-moteurs des membres inférieurs et de troubles vésico-sphinctériens et ano-sphinctériens. Selon lui, les séquelles neurologiques entrant dans le cadre du syndrome incomplet de la queue de cheval se sont manifestées par des difficultés à la station debout et à la marche découlant de troubles moteurs prédominants à droite mais aussi de troubles sensitifs ne permettant pas de prendre conscience du sens, de la position et du mouvement des segments inférieurs de ses jambes ainsi que du contact au sol. Ces troubles selon l'expert ont nécessité l'utilisation quasi permanente du fauteuil roulant et celle, plus épisodique, de la marche avec cannes anglaises sur une distance réduite à quinze mètres.

Le Dr [W] a par ailleurs constaté la persistance de troubles sphinctériens sévères imposant de réaliser quatre auto-sondages urétro-vésicaux par jour et le port de couches culottes en raison d'incontinences épisodiques imprévisibles d'urine et de matières fécales.

Cet expert a conclu que le besoin d'aide non spécialisée était de 3 heures, l'aide spécialisée soit les soins par infirmière ou aide soignante étant d'une heure trente.

La cour remarque que les Drs [R], [K] et [L], experts précédemment désignés pour évaluer le préjudice subi par [S] [Z], ont retenu un nombre d'heures d'aide non spécialisée par tierce personne de 2 heures.

Seule l'aide non spécialisée doit être prise en compte pour déterminer le préjudice d'assistance par tierce personne.

[E] [O], ergothérapeute, a établi à la demande de la victime un rapport dans lequel elle a conclu à une assistance modérée pour la toilette, légère pour les soins d'apparence comme le rasage, et a besoin d'une aide extérieure pour se rendre aux toilettes, se dévêtir et se chausser. La préparation des repas est rendue impossible à la fois par l'impossibilité d'accéder à la cuisine en fauteuil roulant et son incapacité à rester debout. Selon l'ergothérapeute, il a besoin d'une aide humaine pour les tâches ménagères auxquelles il ne peut plus du tout participer ainsi que pour le bricolage et l'entretien de la maison et de la piscine. Il peut se propulser sur son fauteuil roulant sur une courte distance et à condition que le revêtement du sol soit lisse et sans pente et a donc besoin d'être accompagné par son épouse en voiture afin de ne pas se retrouver bloqué seul en fauteuil roulant en cas d'obstacle qu'il lui est impossible de franchir seul ( pente, trottoir, pavés, graviers...).

L'assistance permanente par une tierce personne telle que sollicitée par [S] [Z] n'est justifiée ni par les constatations et conclusions de tous les experts qui ont procédé à l'évaluation de ce poste de préjudice ni même par les conclusions de [E] [O], ergothérapeute, laquelle a estimé à 11 heures par jour les besoins quotidiens en assistance par tierce personne ( auxiliaire de vie 7 heures, aide-ménagère 2 heures et transports, 2 heures). Il n'est pas établi que l'intimé se trouve dans un état de dépendance totale nécessitant l'assistance permanente d'une tierce personne.

L'assistance par une tierce personne évaluée à douze heures par jour par le tribunal est pareillement excessive au regard des conclusions des experts. [S] [Z] dispose d'une autonomie certaine quoique limitée pour effectuer seul ses transferts à partir de son fauteuil roulant à condition de disposer de points d'appui suffisants, il peut conduire et se déplacer seul à l'extérieur en fauteuil roulant sur de courtes distances et sur revêtement lisse et plat. La difficulté des déplacements en fauteuil roulant à l'intérieur de sa maison sont en grande partie imputables selon les indications de l'ergothérapeute à la configuration des lieux ( étroitesse des toilettes nécessitant de sortir le fauteuil roulant avant utilisation du WC, étroitesse de la salle de bains et de la douche, marches entre le séjour et la cuisine...). Il est établi par ailleurs qu'il souffre de troubles sphinctériens faisant essentiellement obstacle à toute vidange spontanée de la vessie et imposant l'auto-sondage pluri-quotidien selon le certificat médical du Dr [J] repris dans l'expertise du Dr [L]. Si des incontinences peuvent survenir selon le Dr [W], elles sont imprévisibles et imposent de ce fait de porter des protections : il n'est donc pas démontré que la présence permanente d'une tierce personne dispenserait la victime de porter des protections et que [S] [Z] n'est pas en mesure en cas d'incontinence d'assurer lui-même son hygiène en changeant sa protection.

L'assistance par tierce personne sera donc évaluée à 5 heures par jour.

L'intimé produit deux devis effectués par des sociétés prestataires dans lesquels le tarif horaire est compris entre 22, 30 euros et 26, 60 euros. Le tarif horaire retenu sera de 23 euros.

La dépense pour l'assistance de tierce personne pour la période du 19 novembre 2009,date de la fin de son hospitalisation, au 6 novembre 2012, date de la consolidation, s'établit donc à 167 900 euros ( 5 heures par jour X 23 euros X 365 jours X 4 ans). Après limitation de son droit à indemnisation de 20 % en raison de son état antérieur, il lui sera allouée une indemnité de 134 320 euros pour ce poste de préjudice.

2/ après consolidation:

Sur les dépenses de santé future:

Après avoir rappelé que ce poste de préjudice comprend les frais médicaux, paramédicaux et pharmaceutiques rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation, a retenu des séances de psychologue pour un montant de 460 euros, des dépenses de protections d'un montant de 36 802,48 euros, la prise en charge d'un fauteuil roulant pour un montant de 43 513,51 euros, des frais d'adaptation de véhicule d'un montant de 42 526 euros et des frais d'adaptation de logement d'un montant de 13 483,50 euros.

[S] [Z] reproche aux premiers juges de ne pas avoir retenu les séances de réflexologie au motif qu'elles relevaient d'une discipline qualifiée de médecine alternative et qu'elles n'avaient pas été évoquées par l'expert alors même que ces dépenses ont été effectivement exposées à la suite à l'accident médical et que leur lien de causalité n'est pas contestable.

Les appelants soutiennent que la victime ne démontre pas l'utilité des séances de réflexologie dont elle estime l'efficacité discutable.

Pratique thérapeutique fondée sur le massage, la réflexologie relève des médecines douces destinées à procurer confort et détente au patient mais dont l'efficacité n'est pas reconnue sur le plan scientifique, raison pour laquelle elles ne sont pas remboursées par l'assurance maladie. Le tribunal a donc à juste titre écarté ces dépenses et sa décision sera confirmée.

L'intimé soutient aussi qu'il s'est écroulé psychologiquement en raison de son handicap et que son état psychologique a rendu nécessaire un suivi par une psychologue clinicienne et produit un devis et deux factures d'un montant total de 1010 euros. La cour observe que [S] [Z] ne demande pas à la cour d'indemniser des frais de suivi psychologique qu'il exposera dans l'avenir mais le remboursement de séances qui ont déjà eu lieu, le 3 octobre 2019 et du 12 octobre 2019 au 9 mars 2020 et qui ont d'ailleurs été facturées. Le tribunal a donc à bon droit écarté le remboursement de la somme de 500 euros au titre du devis du 10 octobre et du 2 novembre 2019 portant sur dix séances dès lors que les séances visées par le devis soit ont donné lieu à facturation soit n'ont pas été suivies.

Les Drs [F] et [L], experts, ont tous deux indiqué que le patient avait besoin de trois couches par 24 heures, et la nécessité de cette dépense a été confirmée par le Dr [W]. La demande d'indemnisation est donc justifiée: la dépense sera donc évaluée à la somme de 21 120 euros au titre de ce préjudice de la date de consolidation le 6 novembre 2012 au 6 novembre 2022 ( dépense mensuelle 176 euros X 12 mois X 10 ans) outre celle de 27 396 euros pour les dépenses postérieures au 6 novembre 2022 compte-tenu de l'âge de l'intimé ( 2112 euros, montant annuel de la dépense X 12,972, euro de rente viagère pour un homme âgé de 73 ans en 2022 selon le barème de capitalisation de la gazette du Palais 2020).

Le montant total des dépenses de santé futures retenues s'élève donc à la somme de 48 976 euros ( 460 + 21 120 + 27 396 ).

Après limitation de son droit à indemnisation de 20 % en raison de son état antérieur, il sera alloué à la victime une indemnité de 39 180,80 euros pour ce poste de préjudice.

Sur les frais de fauteuil roulant:

L'intimé fait grief au tribunal d'avoir retenu l'euro de rente viagère en prenant en compte son âge à la date du jugement ' 72 ans ' alors qu'il a eu besoin du fauteuil roulant dès la date de sa consolidation en 2012.

Les appelants estiment que le besoin d'un fauteuil roulant mécanique et à fortiori électrique n'est pas démontré, la victime étant en mesure de se déplacer avec deux cannes voire avec une seule à son retour au domicile en novembre 2009. Ils estiment par ailleurs que les premiers juges ont fixé arbitrairement à 5 ans la période de renouvellement du fauteuil roulant.

En page 70 de son rapport, le Dr [W], expert, a conclu que postérieurement à la consolidation, l'état séquellaire de [S] [Z] nécessitait l'utilisation d'un fauteuil roulant, mécanique, avec possibilité de changement tous les 5 à 10 ans et éventuellement électrique, avec possibilité de renouvellement tous les un à trois ans.

Le fauteuil électrique retenu par l'expert n'ayant pas encore été acheté, il y a lieu de fixer l'indemnité au vu des justificatifs produits par la victime sur le prix et la part remboursée par l'organisme social puis de capitaliser au jour du premier renouvellement, fixé en 2017 par la victime.

Coût initial du fauteuil : 17 244 euros selon devis de l'entreprise Bagnols Médical du 27 mars 2017 ( pièce 87)

Au premier renouvellement en 2017, il y a lieu de multiplier le montant annuel de la dépense sur trois ans ( 17 244 : 3) , soit 5748 euros, par 16 538 ( euro de rente viagère pour un homme âgé de 68 ans en 2017 lors du premier renouvellement).

Les frais de fauteuil roulant s'élèvent donc à la somme de euros.

Après limitation de son droit à indemnisation de 20 % en raison de son état antérieur, il sera alloué à la victime une indemnité de 76 049 euros pour ce poste de préjudice.

Sur les frais de literie:

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les frais de literie dont l'intimé demande l'indemnisation en l'absence de toute constatation médicale démontrant que l'état séquellaire de [S] [Z] impose l'utilisation d'un matelas et d'un coussin adapté, le certificat médical rédigé par le Dr [U], médecin traitant, ne donnant aucune information à cet égard.

Sur les frais d'adaptation de véhicule:

Les premiers juges, sur la base d'un devis et d'un extrait du journal l'Argus et d'un renouvellement tous les cinq ans ont alloué la somme de 42 526 euros.

Les appelants concluent au débouté de la demande d'indemnisation de ce poste de préjudice en l'absence de preuve d'un réel besoin constaté et évalué médicalement.

L'intimé sollicite la somme de 182 348,91 euros correspondant aux frais d'acquisition et de renouvellement du véhicule adapté ( 116 348 ) et aux dépenses d'aménagement ( 66 375 euros). [S] [Z] fait en effet valoir que son état séquellaire lui impose d'acheter un véhicule aménagé avec boîte automatique et commandes manuelles au volant pour remplacer les pédales outre la place nécessaire à un fauteuil roulant. Il demande à la cour de tenir compte du prix d'acquisition d'un véhicule suffisamment spacieux pour contenir un fauteuil roulant et fait valoir que ledit véhicule doit être renouvelé périodiquement tous les sept ans. Il verse par ailleurs un devis de l'année 2017 concernant le coût des aménagements à prévoir sur le véhicule acheté: accélérateur satellitaire gauche, porte coulissante et robot chargeur, ce matériel étant à renouveler tous les cinq ans.

Le Dr [W], expert, en page 70 de son rapport, a conclu que l'état de [S] [Z] justifiait l'aménagement d'un véhicule automobile avec commande manuelle et estimé qu'un véhicule spécifiquement aménagé pour l'accès direct en fauteuil roulant par un plateau incliné ou un plateau élévateur arrière pouvait être nécessaire.

Les frais d'adaptation de véhicule sont donc médicalement justifiés.

L'indemnisation de ce poste de préjudice est fondée sur le surcroît de dépenses au niveau de l'achat même du véhicule, par rapport à la valeur de celui dont se satisfaisait ou se serait satisfait la victime avant l'accident, auquel on ajoute le coût de l'adaptation.

L'intimé a produit un listing des prix d'un véhicule de marque Volkswagen modèle Touran variant de 30 805 euros à 38 636 euros selon la motorisation et les finitions.

Le véhicule qu'il détenait avant son accident était un véhicule Renault Mégane revendue en 2010 après l'accident médical.

La preuve est donc rapportée d'un surcroît de dépenses lié à l'achat d'un véhicule suffisamment spacieux pour y installer un fauteuil roulant électrique dès lors qu'avant l'accident, il détenait un véhicule de marque Renault Mégane dont le volume était totalement insuffisant pour y charger un fauteuil roulant électrique. Le surcroît de dépense engendré sera estimé à la somme de 10 000 euros, correspondant à la différence de prix entre le modèle de voiture dont se satisfaisait la victime avant son accident et le modèle de voiture rendu nécessaire depuis son accident.

Il y a lieu de surcroît à prendre en compte le coût de renouvellement du véhicule tous les sept ans. Il convient donc de diviser la somme de 10 000 euros par sept, ce qui correspond à un surcoût de renouvellement de véhicule de 1429 euros par an. Cette somme sera multipliée par 17 275, montant de l'euro de rente viagère pour un homme âgé de 67 ans au jour du premier renouvellement en 2016 ( 24 686 euros).

Le préjudice découlant du surcroît de dépenses imposé par le changement de véhicule sera donc évalué à 34 686 euros ( 10 000 au titre du surcroît du coût initial + 24 686 au titre du surcroît du coût du renouvellement tous les sept ans).

La victime verse en outre aux débats un devis relatif à la pose et à la fourniture de commandes manuelles à la place des pédales (accélérateur, frein), d'une porte coulissante et d'un robot chargeur d'un montant total de 14 651,84 euros. La mention suivante: «  matériel à renouveler tous les cinq ans » figure sur le devis.

Les frais d'aménagement du véhicule seront donc évalués à la somme de 15 408,90 euros après actualisation du devis, soit une dépense de 3081,78 euros par an durant cinq ans, délai au bout duquel le matériel doit être remplacé selon le fournisseur. A cette somme de 15 408,90 euros s'ajoute le coût de renouvellement du matériel s'établit donc à la somme de 3081,78 euros multipliée par l'euro de rente viagère pour un homme âge de 68 ans lors du premier renouvellement en 2017, soit 50 966,47, ce qui correspond à une dépense totale de 66 375,37 euros.

La totalité des frais d'adaptation de véhicule s'élève donc à la somme de 101 062 euros ( 34 686 + 66 375,37 ).

Après limitation de son droit à indemnisation de 20 % en raison de son état antérieur, il sera alloué à la victime une indemnité de 80 849 euros pour ce poste de préjudice.

Sur les frais d'adaptation du logement:

Le tribunal a arbitré à la somme de 13 483,50 euros le montant des dépenses d'adaptation du logement rendues nécessaires par le handicap de la victime consécutif à l'accident médical, ces dépenses ayant été justifiées par la production de deux devis, le premier relatif à l'élargissement des portes et des accès à l'intérieur du domicile pour permettre le passage d'un fauteuil roulant le second pour l'installation d'une rampe d'accès.

Les appelants estiment que la demande de [S] [Z] au titre des dépenses d'adaptation de son logement doivent être rejetées en l'absence de preuve d'un réel besoin constaté et évalué par des professionnels de santé.

L'intimé sollicite la confirmation du jugement sur les frais d'adaptation de son logement.

Le tribunal a estimé à juste titre les frais d'adaptation du logement à la somme de 13 483,50 euros en se fondant sur les conclusions du Dr [W], dernier expert désigné, lequel a retenu la nécessité d'adapter le logement pour l'accès du fauteuil roulant au domicile. Les devis produits concernent des travaux d'élargissement des portes et des accès pour permettre le passage d'un fauteuil roulant. Les photographies versées aux débats de l'intérieur du logement de la victime qui doit désormais se mouvoir en fauteuil roulant démontrent que l'aménagement actuel de l'espace ne permet pas le passage aisé d'un fauteuil roulant et que les travaux décrits par le devis s'imposent.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur l'assistance par tierce personne:

Reprenant le raisonnement tenu pour évaluer le besoin en tierce personne temporaire, les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait se déplacer seul dans la mesure où il lui était impossible de plier son fauteuil roulant et de le porter pour le sortir de son véhicule: la durée de douze heures a donc été retenue pour les tâches ménagères, les courses, la cuisine, l'aide à la toilette, l'habillement et les déplacements. Une indemnité de 1 347 702,62 euros a donc été allouée à [S] [Z] après réduction de son droit à indemnisation à 80% de son préjudice.

[S] [Z] estimant son besoin de tierce personne à 24 H sur 24 sollicite la somme de 6 314 690,38 euros outre 169 809,02 euros au titre des frais de jardinage.

Les appelants concluent à la réduction de l'indemnité allouée au titre de l'assistance par tierce personne. Ils se fondent sur l'évaluation de l'état séquellaire de la victime réalisée durant sa période d'hospitalisation pour rééducation neuro-orthopédique du 6 au 29 mars 2013, laquelle avait permis de relever: «  prise en charge rééducative d'évolution favorable....on note une nette amélioration du périmètre de marche passé de 200 mètres à plus d'un kilomètre sur tapis roulant ». Le Dr [A] et son assureur font observer par ailleurs à la cour que l'expert [W] n'avait pas indiqué qu'il était complètement dépendant mais qu'il bénéficiait au contraire d'une bonne indépendance pour l'usage des toilettes et les transferts. Ils proposent une indemnité de 91 987,20 euros au titre des arrérages échus du 20 Novembre 2012 à la date du jugement outre la rente trimestrielle de 2 592 euros par trimestre.

Le Dr [W], expert, a examiné [S] [Z] le 19 juin 2018. En page 37 à 39 de son rapport, il a évalué avec une grande précision à partir des constatations cliniques et de l'interrogatoire du patient et de son entourage la mobilité de [S] [Z] et retenu les scores suivants: 6/7 pour les transferts ( aide légère pouvant être requise dans certaines circonstances), 5/7 pour son autonomie pour se rendre aux toilettes ( aidé par son épouse pour se positionner sur la lunette des WC), 5/7 pour le bain ou la douche ( se lave seul sauf le dos, les jambes et les pieds), 4/7 pour la marche ( périmètre de marche limité avec cannes anglaises à une quinzaine de mètres, essentiel des déplacements en fauteuil roulant).

Incluant les activités domestiques et les déplacements, le Dr [W] a estimé que le besoin d'assistance par tierce personne était de 4 heures par jour.

Reprenant le même raisonnement que pour l'évaluation du besoin en tierce personne avant la consolidation, la cour remarque que les Drs [R], [K] et [L], experts précédemment désignés pour évaluer le préjudice subi par [S] [Z], ont retenu un nombre d'heures d'aide non spécialisée par tierce personne de 2 heures et que [E] [O], ergothérapeute, a établi à la demande de la victime un rapport dans lequel elle a conclu à une assistance modérée pour la toilette, légère pour les soins d'apparence comme le rasage, et à un besoin d'une aide extérieure pour se rendre aux toilettes, se dévêtir et se chausser. La préparation des repas est rendue impossible à la fois par l'impossibilité d'accéder à la cuisine en fauteuil roulant et son incapacité à rester debout. Selon l'ergothérapeute, il a besoin d'une aide humaine pour les tâches ménagères auxquelles il ne peut plus du tout participer ainsi que pour le bricolage et l'entretien de la maison et de la piscine. Il peut se propulser sur son fauteuil roulant sur une courte distance et à condition que le revêtement du sol soit lisse et sans pente et a donc besoin d'être accompagné par son épouse en voiture afin de ne pas se retrouver bloqué seul en fauteuil roulant en cas d'obstacle qu'il lui est impossible de franchir seul ( pente, trottoir, pavés, graviers...).

L'assistance permanente par une tierce personne telle que sollicitée par [S] [Z] n'est donc justifiée ni par les constatations et conclusions de tous les experts qui ont procédé à l'évaluation de ce poste de préjudice ni même par les conclusions de [E] [O], ergothérapeute, laquelle a estimé à 11 heures par jour les besoins quotidiens en assistance par tierce personne ( auxiliaire de vie 7 heures, aide-ménagère 2 heures et transports, 2 heures). Il n'est donc pas établi que l'intimé se trouve dans un état de dépendance totale nécessitant l'assistance permanente d'une tierce personne.

L'assistance par une tierce personne évaluée à douze heures par jour par le tribunal est pareillement excessive au regard des conclusions des experts. [S] [Z] dispose d'une autonomie certaine quoique limitée pour effectuer seul ses transferts à partir de son fauteuil roulant à condition de disposer de points d'appui suffisants et a selon l'expert besoin d'aide extérieure seulement dans certaines circonstances. Il peut conduire et se déplacer seul à l'extérieur en fauteuil roulant sur de courtes distances et sur revêtement lisse et plat. La difficulté des déplacements en fauteuil roulant à l'intérieur de sa maison sont en grande partie imputables selon les indications de l'ergothérapeute à la configuration des lieux ( étroitesse des toilettes nécessitant de sortir le fauteuil roulant avant utilisation du WC, étroitesse de la salle de bains et de la douche, marches entre le séjour et la cuisine...). Il est établi par ailleurs qu'il souffre de troubles sphinctériens faisant essentiellement obstacle à toute vidange spontanée de la vessie et imposant l'auto-sondage pluri-quotidien selon le certificat médical du Dr [J] repris dans l'expertise du Dr [L]. Si des incontinences peuvent survenir selon le Dr [W], elles sont imprévisibles et imposent de ce fait de porter des protections: il n'est donc pas démontré que la présence permanente d'une tierce personne dispenserait la victime de porter des protections et que [S] [Z] n'est pas en mesure en cas d'incontinence d'assurer lui-même son hygiène en changeant sa protection.

L'assistance par tierce personne sera donc évaluée à 5 heures par jour.

L'intimé produit deux devis effectués par des sociétés prestataires dans lesquels le tarif horaire est compris entre 22, 30 euros et 26, 60 euros. Le tarif horaire retenu sera de 23 euros.

La dépense pour l'assistance de tierce personne pour la période du 6 novembre 2012, date de la consolidation au 6 novembre 2022 s'établit donc à: 419 750 euros ( 5 heures par jour X 23 euros X 365 jours X 10 ans).

La dépense pour l'assistance de tierce personne à partir du 6 novembre 2022 s'établit à: ( 5 heures par jourX 23 euros X 365 jours X 12.972 ' euro de rente viagère pour un homme âgé de 73 ans en 2022) = 544 499,70 euros.

Après limitation de son droit à indemnisation de 20 % en raison de son état antérieur, il lui sera allouée une indemnité de 771 399,76 euros pour ce poste de préjudice.

Sur les travaux de jardinage:

L'intimé fait grief au tribunal d'avoir écarté les frais de jardinage au motif qu'il n'en avait pas justifié par la production de factures alors même qu'il s'agit selon lui d'un besoin de tierce personne lequel s'évalue selon la réalité du besoin et non selon la dépense effective. Il rappelle à la cour qu'il assumait seul avant l'accident l'entretien de son jardin et celui de sa piscine et que l'expert n'a pas pris en compte ces deux tâches pour évaluer son besoin en tierce personne.

Les travaux de jrdinage et d'entretien de la piscine sont des frais divers futurs dont la réalité n'est pas contestable, [S] [Z] n'étant plus en mesure d'assumer ces tâches lui-même en raison de son handicap. La somme qu'il réclame en produisant un devis est néanmoins excessive, les travaux de jardinage et d'entretien de la piscine étant très variables selon la saison et ne pouvant correspondre à une dépense annuelle de près de 7292 euros.

Pour ce motif, ce chef de préjudice sera évalué à la somme de 42 453 euros, correspondant au quart de la somme réclamée.

Après limitation de son droit à indemnisation de 20 % en raison de son état antérieur, il lui sera allouée une indemnité de 33 962 euros pour ce poste de préjudice.

B/ Le préjudice extra-patrimonial:

Les préjudices extrapatrimoniaux temporaires:

Sur le déficit fonctionnel temporaire:

L'expert a conclu à une période de déficit fonctionnel temporaire total allant du 28 février au 19 novembre 2009, soit 265 jours, moins 5 jours correspondant à la période habituelle d'hospitalisation, soit 260 jours.

Le déficit fonctionnel partiel a ensuite été évalué à 65 % du 20 novembre 2009 au 28 février 2011 et à 70% du 1er mars 2011 au 6 novembre 2012.

Le tribunal a retenu une base d'évaluation de 27 euros par jour ( 810 euros par mois) et alloué une indemnité totale de 26 796,15 euros.

Si [S] [Z] est d'accord avec les périodes et les taux retenus, il critique la base d'évaluation adoptée par le tribunal égale à 27 euros par jour et demande à la cour de retenir la somme de 33, 33 euros par jour car il estime qu'avant sa consolidation, la perte de qualité de vie et la privation des joies usuelles était extrême, ayant perdu toute autonomie avec un déficit fonctionnel à 75 % durant deux ans et demi. Il rappelle que le préjudice sexuel temporaire et le préjudice d'agrément temporaire qu'il a endurés sont indemnisables au titre du déficit fonctionnel temporaire et justifient de fixer ce dernier à 1000 euros par mois, soit 33,33 euros par jour.

Les appelants estiment que les conclusions de l'expert sont imprécises et que la cour n'étant pas en mesure de déterminer la période d'hospitalisation à déduire de celle effectivement en lien avec la complication intervenue ne peut statuer et doit donc rejeter la demande indemnitaire au titre du DFTT. Ils considèrent excessif le taux de 65 % de DFTP retenu par l'expert et le tribunal pour la période de deux ans suivant l'intervention.

L'expert a déterminé de manière précise et pertinente la durée de cinq jours durant laquelle le patient aurait été hospitalisé en l'absence de toute complication liée à l'intervention chirurgicale. Quant au taux de déficit fonctionnel temporaire partiel, l'expert a justifié le taux de 65 % en expliquant que la période du 20 novembre 2009 au 28 février 2011, le patient avait présenté des troubles moteurs et surtout des troubles sensitifs rendant la marche et la station debout pénibles et imposant l'utilisation quasi-permanente d'un fauteuil roulant ainsi que des troubles sphinctériens sévères. Le taux retenu est donc justifié.

Les premiers juges ont fixé à juste titre la date de consolidation au 6 novembre 2022 car l'IRM du 8 mars 2011 a mise en évidence un épisode de discopathie inflamattoire L 2-L3 qui a majoré les troubles fonctionnels et n'a régressé que sur l'IRM du 6 novembre 2012.

En retenant à la somme de 810 euros par mois soit 27 euros par jour pour réparer ce poste de préjudice, le tribunal a fait une juste appréciation de la situation et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les souffrances endurées:

L'expert les a évalué à 5 sur une échelle de 7.

Les premiers juges, prenant en considération l'ensemble des souffrances morales et physiques endurées par la victime pendant 1349 jours, les ont évalué à la somme de 40 000 euros et alloué à [S] [Z] après réduction de 20% de son droit à indemnisation une indemnité de 32 000 euros.

Les appelants estiment que ce poste de préjudice avant limitation doit être arbitré à la somme de 30 000 euros.

L'intimé rappelle qu'il a été hospitalisé durant neuf mois mais que la maladie traumatique a duré plus de 44 mois, qu'il a dû poursuivre une rééducation intensive, a beaucoup souffert moralement de sa nouvelle situation de handicap: il réclame la somme de 50 000 euros.

En évaluant à la somme de 40 000 euros les souffrances endurées par [S] [Z], et en fixant après limitation de son droit à indemnisation l'indemnité à 32 000 euros, le tribunal a fait une juste appréciation de la gravité de ce préjudice: l'expert a indiqué en effet qu'elles provenaient des douleurs rachidiennes et radiculaires, de la paralysie et des troubles de l'orthostatism et de la marche, de la deuxième intervention, de la réalisation itérative d'examens, des troubles sphinctériens et des sondages plusieurs fois par jour, aux infections urinaires, à l'incontinence anale, aux troubles du transit intestinal,à la longue période de rééducation et à la souffrance morale.

Sur le préjudice esthétique temporaire:

Evalué à 4 sur une échelle de 7 par l'expert, ce chef de préjudice a été estimé à 8000 euros par le tribunal et, après limitation de son droit à indemnisation, à la somme de 6400 euros.. L'intimé réclame la somme de 15 000 euros et les appelants demandent la réduction de l'indemnité allouée à la somme de 6000 euros.

La déambulation en fauteuil roulant, la marche malaisée avec deux cannes anglaises et le port de protections justifient le montant de 8000 euros retenu par le tribunal pour évaluer le préjudice esthétique temporaire subi par la victime. Compte-tenu de la limitation de son droit à indemnisation, l'indemnité de 6400 euros allouée sera confirmée.

Les préjudices extrapatrimoniaux permanents:

Sur le déficit fonctionnel permanent:

Les premiers juges ont évalué le DFP de 60 % fixé par l'expert à la somme de 138 000 euros sur la base d'une valeur de point de 2300 euros pour un homme âgé de 63 ans le 6 novembre 2012, date de la consolidation.

[S] [Z] réclame la somme de 240 288,70 euros: il fait valoir que ce poste de préjudice intègre trois éléments, le déficit fonctionnel stricto sensu c'est-à-dire la réduction du potentiel physique, les souffrances permanentes et définitives après consolidation et l'impact sur la qualité de vie. Il estime que l'indemnisation forfaitaire sur la base d'un prix moyen du point d'incapacité à la date de consolidation comme il est habituel de le faire empêche de réparer les différentes composantes de ce préjudice de DFP et elle ignore les facteurs non lésionnels que sont les douleurs et la perte de qualité de vie.

Les appelants sollicitent la réduction du taux de DFP à 40 % car ils estiment injustifié le taux de 60% retenu et surtout affirment que les troubles rachidiens et la douleur neuropathique découlent exclusivement de l'état antérieur du patient.

Il s'agit d'évaluer d'abord le déficit fonctionnel permanent causé à la victime par tous les troubles dont elle souffre après consolidation et ensuite de limiter son droit à indemnisation pour tenir compte de la part d'imputabilité de son préjudice à son état antérieur. La méthode de calcul proposée par les appelants qui aboutit à limiter doublement le droit à indemnisation de la victime n'est donc pas pertinente.

Le déficit fonctionnel permanent tend à indemniser la réduction définitive, après consolidation, du potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s'ajoute les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence (personnelles, familiales et sociales).

L'expert pour fixer à 60 % le taux de DFP a pris en compte les séquelles ( troubles neurologiques, troubles rachidiens, douleurs neuropathiques). Il a rappelé que le taux habituel de DFP imputable à un syndrome de la queue de cheval était compris entre 15 et 50% en fonction de l'importance des troubles moteurs, sensitifs et sphinctériens, que le taux de DFP imputable aux troubles rachidiens correspondant à une douleur chronique était de 5 à 20% et que le taux de DFGP imputable aux douleurs neuropathiques des membres était en général évalué de 5 à 10%.

L'expert a donc pris en compte les phénomènes douloureux permanents pour fixer à 60 % le taux de DFP.


Quant aux troubles dans les conditions d'existence, il n'y a pas lieu d'allouer comme le demande l'intimé une indemnité séparée en procédant à une distinction totalement artificielle qui n'a pour objet que d'obtenir une majoration indirecte de la valeur du point, alors que ces troubles sont précisément l'objet même de la définition du déficit fonctionnel permanent.

Selon le barème de capitalisation 2020, la valeur moyenne du point pour une personne âgée de 63 ans atteinte d'un taux compris entre 56 et 60 % est de 2420.

Compte-tenu de cette actualisation, le jugement sera infirmé: ce poste de préjudice sera évalué à la somme de 145 200 euros ( 2420X60%) et, après limitation du droit à indemnisation de la victime, l'indemnité sera fixée à la somme de 116 160 euros.

Sur le préjudice esthétique permanent:

Evalué à 3,5/7 par l'expert, ce préjudice a été arbitré à la somme de 15 000 euros et l'indemnité allouée à la somme de 12000 euros après limitation du droit à indemnisation de la victime.

L'intimé sollicite une évaluation à la somme de 30 000 euros car il est confiné en fauteuil roulant, que sa démarche est très altérée, qu'il présente des tremblements et porte des protections.

Les appelants demandent à la cour de ramener ce poste de préjudice à la somme de 6000 euros.

Le jugement sera confirmé, le tribunal ayant fait une juste appréciation du préjudice esthétique permanent subi par [S] [Z] et lié selon l'expert à la cicatrice lombaire, la boiterie, l'utilisation d'une attelle de cheville droite, le port de protections et l'usage du fauteuil roulant

Sur le préjudice d'agrément:

Les premiers juges ont considéré que [S] [Z] rapportait la preuve de son impossibilité de poursuivre ses activités bénévoles au sein de diverses associations, ont fixé à la somme de 20 000 euros le montant de ce préjudice et lui ont alloué la somme de 16 000 euros après limitation de son droit à indemnisation.

Considérant son préjudice d'agrément comme hors norme, étant privé de toutes ses activités particulièrement ses activités associatives qui tenaient une place primordiale dans sa vie, [S] [Z] sollicite la somme de 80 000 euros.

Le jugement sera confirmé: le préjudice d'agrément réparant en effet l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs, et la victime justifiant ne plus pouvoir participer à ses nombreuses activités associatives, l'évaluation retenue par le tribunal est justement proportionnée à l'ampleur du préjudice d'agrément subi par la victime.

Sur le préjudice sexuel:

L'expert a constaté que l'atteinte de queue de cheval concernait les dernières racines nerveuses S3, S4 et S5 impliquées dans la sensibilité génitale, l'érection et les capacités d'éjaculation. Il a estimé ce préjudice définitif et expliqué que l'utilisation d'artifices médicamenteux pouvait partiellement y remédier.

Le tribunal a évalué le préjudice sexuel de la victime à la somme de 15 000 euros.

[S] [Z] réclame la somme de 60 000 euros et les appelants ont conclu à sa réduction à la somme de 6000 euros.

La somme arbitrée par le tribunal est proportionnée au caractère définitif du préjudice sexuel subi par la victime.

SUR LA LIQUIDATION DU PREJUDICE DE [B] ET [G] [Z]:

sur les frais divers:

[B] [Z] justifie de ses frais de déplacement quotidiens durant l'hospitalisation de son mari longue de neuf mois ainsi que de frais d'annulation d'un voyage à New York.

Il lui sera donc alloué l'indemnité de 2608 euros en remboursement des frais susvisés.

Sur le préjudice d'affection:

Les premiers juges ont alloué à [B] [Z], épouse de [S] [Z], une indemnité de 20 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi compte-tenu de la nature des lésions dont son époux a été atteint et de leurs graves répercussions sur leur vie quotidienne et à [G] [Z] la somme de 8000 euros en réparation de son préjudice d'affection.

Les appelants concluent à la réduction de l'indemnité allouée à l'épouse laquelle correspondrait au montant moyen accordé par les tribunaux en réparation du préjudice causé par le décès de l 'époux. Ils contestent que l'accident médical ait causé au fils de la victime un préjudice d'affection et un bouleversement de ses conditions d'existence.

[B] [Z] sollicite la somme de 45 000 Euros en réparation de son préjudice d'affection: âgée de 60 ans à la date de l'accident médical, elle fait valoir qu'elle a assisté impuissante à la souffrance de son mari ce qui l'a plongée dans une grave dépression dont elle souffre encore.

[G] [Z] sollicite la somme de 30 000 euros. Il explique qu'il vivait à New York à la date de l'accident de son père et que l'éloignement et l'impossibilité de se rendre au chevet de son père quotidiennement a augmenté ses souffrances.

Les premiers juges ont fait une juste appréciation des préjudices d'affection causés à l'épouse et au fils de la victime à la suite de son accident médical et leur décision sera confirmée.

Sur le préjudice extrapatrimonial exceptionnel de [B] [Z]:

Le tribunal a rejeté la demande d'[G] [Z] au motif qu'il ne justifiait pas de ses conditions d'existence passées et actuelles de sorte qu'il ne rapportait pas la preuve de leur bouleversement imputable à l'accident de son père.

Quant au préjudice de [B] [Z], le tribunal l'a considéré établi, estimant que ses conditions d'existence avaient été profondément modifiées après le 26 février 2009 notamment sa vie sexuelle: une indemnité de 15 000 euros lui a été allouée.

[B] [Z] expose que sa vie a basculé brutalement lors de l'accident médical de son mari, que ses projets ont tourné court et qu'elle a dû renoncer à la retraite active qu'elle avait imaginée aux côtés de son mari. Sa vie conjugale a été aussi profondément bouleversée et elle a dû reprendre une activité professionnelle pour financer les soins nécessaires à son mari. Elle subit en outre un retentissement sexuel inhérent au handicap de son mari. Elle réclame la somme de 40 000 euros.

[G] [Z] fait valoir que ses conditions de vie ont été aussi bouleversées, étant revenu vivre au domicile de ses parents pour les soutenir alors qu'il avait pris son indépendance.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté [G] [Z] de sa demande car en cause d'appel pas davantage qu'en première instance il n'a justifié du bouleversement de ses conditions d'existence causé par l'accident de son père.

Le préjudice extrapatrimonial de [B] [Z] a été justement évalué à la somme de 15 000 euros, propre à réparer le profond et brutal bouleversement de ses conditions d'existence qu'elle a connu à l'âge de 60 ans.

Sur les intérêts et leur capitalisation:

L'indemnité allouée en appel, aux termes de l'article 1231-7 du code civil, porte intérêts à compter de la décision d'appel. En application de l'article 1243-2 du code civil, la capitalisation des intérêts sera ordonnée.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ET LES DEPENS:

Il est équitable de condamner [X] [A] et la Sa Panacea Assurances à payer à [S], [B] et [G] [Z] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Les dépens en ce compris les frais des expertises seront supportés par les appelants qui succombent avec distraction au profit de Maître Candice Dray.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement , par arrêt réputé contradictoire, en matière civile, et en dernier ressort,

Infirme partiellement le jugement sur l'évaluation du préjudice corporel de [S] [Z] et sur le préjudice de [B] [Z] au titre des frais de déplacement et d'annulation de voyage,

Statuant à nouveau,

Fixe la part de préjudice revenant à [S] [Z] comme suit:

Préjudice patrimonial

- dépenses de santé actuelles : 7 846,93 euros

- frais divers : 2 820,80 euros,

- frais d'assistance temporaire par tierce personne : 134 320 euros

- dépenses de santé futures : 39 180,80 euros

- frais de fauteuil roulant : 76 049 euros

- frais de logement adapté : 10 786,8 euros,

- frais de véhicule adapté : 80 849 euros

-assistance tierce personne permanente : 771 399,76 euros

- frais de jardinage: 33962 euros

Préjudice extra-patrimonial

- déficit fonctionnel temporaire : 21 436,92 euros,

- souffrances endurées : 32 000 euros,

- préjudice esthétique temporaire : 6 400 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 116 160 euros

- préjudice esthétique permanent : 12 000 euros,

- préjudice d'agrément : 16 000 euros,

- préjudice sexuel : 12 000 euros

TOTAL 1 373 212 euros

Condamne in solidum [X] [A] et la société Panacea Assurance à payer à [S] [Z] la somme de 1 373 212 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, lesquels seront capitalisés conformément aux règles de l'article 1243-2 du code civil,

Dit que l'indemnité susvisée portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et ordonne la capitalisation des intérêts,

Condamne in solidum [X] [A] et la société Panacea Assurance à payer à [B] [Z] la somme de 2608 euros au titre de ses frais de déplacement et d'annulation de voyage,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne in solidum [X] [A] et la société Pancéa Assurances à payer à [S], [B] et [G] [Z] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Les condamne aux dépens en ce compris les frais des expertises avec distraction au profit de Maître Candice Dray.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/03526
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;21.03526 ?
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