RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/02279 - N°Portalis DBVH-V-B7F-ICOX
ET- AB
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON
30 juin 2020
RG:20/00295
[F]
C/
[R]
[M]
Grosse délivrée
le 08/12/2022
à Me Philippe PERICCHI
à Me Olivier COLLION
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 08 DÉCEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 30 Juin 2020, N°20/00295
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre,
Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,
Mme Séverine LEGER, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 Novembre 2022 et prorogé au 08 Décembre 2022.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Madame [Y] [I] [F] épouse [P]
née le 05 Mars 1948 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Natacha MARCHAL de la SCP YVES MARCHAL - NATACHA MARCHAL FLORENCE MAS-ISABELLE COLLINE T-MARCHAL-AS VERITE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
Monsieur [N] [R]
né le 12 Septembre 1949 à [Localité 8]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Olivier COLLION, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON
Madame [O]-[W] [M] épouse [R]
née le 19 Août 1947 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Olivier COLLION, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 08 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Par actes sous seing privé du 5 juin 2009 et du 3 juillet 2009, réitérés par acte authentique le 21 août 2009 devant Me [X], notaire à [Localité 5] (84), les époux [R] ont vendu à Mme [Y] [F] une maison à usage d'habitation avec terrain attenant située à [Localité 9] (84) au prix de 185 000 euros, outre 9 700 euros de mobilier.
Peu de temps après leur achat l' acquéreur s'est rendu compte que la maison présentait de l'amiante de manière excessive.
Par acte du 30 décembre 2009, Mme [F] a assigné M. [N] [R], Mme [O]-[W] [R], Me [X], la SCP Floccard Compte Berger [X] office notarial ainsi que la SARL Duo Immo devant le tribunal de grande instance d'Avignon aux fins de voir prononcer la nullité de la vente en raison du dol ayant vicié son consentement et à tout le moins, du vice caché affectant le bien immeuble.
Par jugement du 12 décembre 2013 le tribunal a prononcé la résolution de la vente sur la fondement des vices cachés, condamné les parties aux restitutions réciproques, condamné les époux [R] in solidum avec le notaire et la SCP dans laquelle il exerce au paiement de dommages et intérêts, condamné maître [X] et l'étude notariale à garantir les époux [R] de la condamnation mise à leur charge au titre des intérêts dus sur la somme de 185 000 euros, condamné maître [X] et l'étude notariale à payer à Mme [F] la somme de 33 756,06 euros au titre de son préjudice économique et 1 500 euros au titre de son préjudice moral, et enfin, a ordonné une expertise aux fins de déterminer les travaux de remise en état des lieux.
Par arrêt du 25 juin 2015 la cour d'appel a infirmé la décision en ce qu'elle a condamné maître [X] et l'étude notariale dans laquelle il exerçait à garantir les époux [R] de la condamnation mise à leur charge au titre des intérêts dus sur la somme de 185 000 euros et l'a confirmée pour le reste. La cour a également disjoint le recours formé par Maître [X] et l'étude notariale contre les époux [R] et la Sarl ACTIVA.
Par accord transactionnel forfaitaire établi au mois de janvier 2016, M. [N] [R] et Mme [O]-[W] [R] se sont engagés à verser à Mme [F] la somme de 167 205,68 euros à titre de règlement transactionnel afin de mettre un terme au litige les opposant à la demanderesse.
Suivant jugement du 2 mai 2016, Mme [F] s'est désistée de l'instance concernant les travaux de remise en état de la maison.
Par arrêt du 6 octobre 2016, la cour d'appel de Nîmes a condamné les époux [R] à relever et garantir Me [X] et la SCP Floccard Compte Berger [X] des condamnations prononcées à leur encontre au profit de Mme [F].
Par acte du 15 octobre 2019, les époux [R] ont assigné Mme [Y] [F] devant le tribunal judiciaire d'Avignon afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 68 107,68 euros sur le fondement de la responsabilité contractuelle et à titre subsidiaire, sur le fondement de l'enrichissement sans cause ou à titre très subsidiaire, sur la répétition de l'indu.
Ils reprochaient à Mme [F] de ne pas avoir respecté le protocole d'accord transactionnel en ne restituant pas les sommes qu'elle a perçues du notaire alors qu'elle aurait du y renoncer en raison du protocole. Ils ajoutaient que cette perception injustifiée des sommes leur a causé un préjudice puisque Me [X] a procédé à une saisie attribution de leurs comptes bancaires en application de l'arrêt du 6 octobre 2016.
Par jugement réputé contradictoire du 30 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Avignon a :
- condamné Mme [Y] [F] à payer à M. [N] [R] et à Mme [O]-[W] [R] au titre de l'enrichissement sans cause les sommes de :
60 766,46 euros,
1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [Y] [F] aux entiers dépens,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Le tribunal a estimé que si la transaction liant les parties n'avait d'effet qu'entre les époux [R] et Mme [F], l'effet relatif des contrats ne pouvait faire obstacle à l'appel en garantie des notaires résultant d'une décision de justice postérieure à la transaction en l'espèce, l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 6 octobre 2016. Dès lors, le tribunal a considéré que la somme de 167 265,8 versée par les époux [R] à Mme [F] en exécution du protocole comprenait déjà et également la somme de 60 766,46 euros versée à la défenderesse par les notaires et l'a condamnée à restitution au titre d'un enrichissement sans cause.
Par déclaration du 14 juin 2021, Mme [Y] [F] a interjeté appel de cette décision.
Parallèlement, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lille saisi par acte du 25 mai 2021 introduit par Mme [F] a, par jugement du 29 novembre 2021, rejeté sa demande tendant à voir annuler et ordonner la mainlevée de la saisie attribution pratiquée sur ses comptes bancaires à la demande des époux [R]. Le juge de l'exécution a 'rejeté l'exception de nullité de l'assignation du 15 octobre 2019" et a estimé que les époux [R] disposaient d'un titre exécutoire.
Par conclusions d'incident notifiées par voie électronique le 1er décembre 2021, les époux [R] ont demandé au conseiller de la mise en état de prononcer l'irrecevabilité de l'appel jugé tardif et, à titre subsidiaire, d'ordonner la radiation de l'appel pour défaut d'exécution.
Par ordonnance du 21 avril 2022, le conseiller de la mise en état a :
- annulé l'acte établi le 13 août 2020 aux fins de signification à Mme [Y] [F] du jugement rendu le 20 juin 2020 par le tribunal judiciaire d'Avignon ;
- déclaré l'appel recevable et débouté les époux [R] de leur exception d'irrecevabilité de l'appel,
- condamné les époux [R] à payer à Mme [F] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par ordonnance du 17 juin 2022, la procédure a été clôturée le 19 septembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 4 octobre 2022.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 12 septembre 2022, l'appelante demande à la cour de :
A titre principal,
- prononcer la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée suivant acte du 15 octobre 2019,
- prononcer la nullité subséquente du jugement dont appel,
- le déclarer nul et non avenu à défaut de notification régulière dans le délai de six mois à compter de sa date,
- renvoyer les parties à mieux se pourvoir, sans statuer au fond, en l'absence d'effet dévolutif du litige.
A titre subsidiaire,
- prononcer la nullité du jugement, par suite de la violation du principe du contradictoire,
Subsidiairement,
- réformer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes plus amples ou contraires formées par les époux [R],
Statuant à nouveau, par suite de l'effet dévolutif du litige,
- déclarer les époux [R] irrecevables en leurs demandes,
- les débouter de l'intégralité de leurs demandes.
En tout état de cause,
- débouter les époux [R] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
- les condamner in solidum à lui payer la somme de 8 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions Mme [F] fait valoir que la recevabilité de son appel ne peut être remise en cause en l'absence de recours formé contre la décision du conseiller de la mise en état.
Elle ajoute en ce sens que la procédure en relevé de forclusion prévue à l'article 540 du code de procédure civile, est inapplicable en cas de contestation de la régularité de la signification du jugement.
Elle précise que les époux [R] ne peuvent non plus remettre en cause l'ordonnance du conseiller de la mise en état en opposant le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lille le 29 novembre 2021 en excipant de l'autorité de la chose jugée dès lors que seul le dispositif de la décision est revêtu de l'autorité de la chose jugée en application de l'article 1355 du code civil et qu'il ne se prononce pas sur la nullité de la signification du jugement.
Elle s'estime bien fondée à reprendre devant la cour l'argumentation développée devant le juge de l'exécution en vue d'obtenir la nullité de la signification de l'assignation et, de manière subséquente, la nullité du jugement en l'absence de vérification suffisante de la part de l'huissier. Elle prétend également que le jugement encourt en toute hypothèse la nullité en l'absence de notification dans les six mois de sa date, par application des dispositions de l'article 478 du code de procédure civile.
Enfin, elle rappelle que cette cause de nullité est de nature à priver l'appel de son effet dévolutif et ce, au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation rendue au visa de l'article 562 du code de procédure civile, la cour d'appel ne pourra que renvoyer les parties à mieux se pourvoir.
A titre subsidiaire, elle sollicite la nullité du jugement rendu en violation des dispositions de l'article 14 du code de procédure civile puisqu'il a été adopté selon la procédure sans audience alors qu'elle n'était pas représentée et ne comportant aucune mention permettant de justifier qu'elle ait été avisée du déroulement de la procédure et du délai de quinze jours pour s'y opposer.
Plus subsidiairement, elle soulève l'irrecevabilité de la demande des époux [R] fondée sur l'enrichissement sans cause se heurtant aux termes du protocole d'accord transactionnel.
Elle prétend que si l'arrêt de la cour d'appel du 20 octobre 2016 est postérieur à la signature du protocole, les consorts [R] avaient connaissance du caractère pendant de cette procédure au jour de la signature et ne peuvent formuler une quelconque demande en paiement en lien avec la vente de l'immeuble objet du protocole, sauf à contrarier l'autorité de chose jugée qui y est attachée.
De plus elle soutient que les conditions de l'enrichissement sans cause telles que prévues à l'article 1303 du code civil ne sont pas réunies et que le manquement des consorts [R] à leur devoir d'information dans le cadre de la vente de l'immeuble les privent de toute action sur un tel fondement.
D'autre part, il n'existe selon elle aucune identité entre le montant total des sommes payées par les notaires et l'indemnité forfaitaire objet du protocole d'accord puisque les sommes ont été versées plus d'un an avant la signature du protocole et relèvent seulement de la condamnation à titre personnel du notaire.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 août 2022, les époux [R], intimés, demandent à la cour de :
- déclarer Mme [F] irrecevables en ses demandes,
- juger que les actes de procédures effectués jusqu'à présent sont valides,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon ,
- débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner Mme [F] au paiement de la somme de 5 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- juger qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir, et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du Décret du 08 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par le défendeur.
Ils soutiennent s'agissant de la recevabilité des demandes présentées en cause d'appel que conformément aux articles 122, 125 540, 916 et 1355 du code de procédure civile ainsi qu'à l'article 1355 du code civil, Mme [F] avait jusqu'au 29 juin 2021 pour solliciter un relevé de forclusion auprès de M. le Premier président de la présente cour pour pouvoir interjeté appel en dehors des délais impartis, ce qu'elle n'a pas fait et ce qui la rend irrecevable dans ses demandes.
Ils s'estiment par ailleurs fondés au regard du choix procédural qui leur est offert, d'opter pour la contestation de l'ordonnance rendue par Mme le conseiller de la mise en état devant la présente cour en formation collégiale.
Enfin , contrairement à la position retenue par le conseiller de la mise en état, ils font valoir que l'huissier de justice a parfaitement rempli sa mission et effectué les diligences nécessaires afin de rechercher Mme [F] en respect des conditions édictées par l'article 659 du code de procédure civile de sorte que la signification de l'assignation et du jugement est régulière. Ils rappellent que le juge de l'exécution de Lille a reconnu qu'ils disposaient d 'un titre exécutoire valide et a rejeté l'argumentation de l'appelante sur la prétendue nullité de la signification du jugement et enfin qu'aucune violation du principe du contradictoire ne peut être imputée au premier juge puisque Mme [F], qui n'avait pas transmis son adresse à ce stade de la procédure, ne pouvait s'attendre à être informée de l'évolution de son dossier.
Au fond, ils considèrent que les conditions de l'enrichissement sans cause sont réunies puisque l'arrêt de la cour d'appel du 20 octobre 2016 prononçant leur condamnation solidaire avec les notaires est postérieur à la transaction de sorte qu'ils ne pouvaient renoncer à un droit qu'ils ignoraient au moment de la signature du protocole d'accord. Ainsi selon eux, Mme [F] ne peut se fonder sur l'autorité d'une chose jugée d'une décision qui n'existait pas au moment de la signature de l'acte transactionnel. Ils rappellent enfin que le but du protocole d'accord transactionnel était de mettre fin au litige. Dès lors, les condamnations des notaires ne pouvaient plus être prononcées à titre personnel puisque l'arrêt du 6 octobre 2016 les a condamnés à relever et garantir les notaires. Enfin, ils ajoutent que l'appelante fait une mauvaise interprétation de l'article 1302-2 du code civil puisque, seule la faute de l'appauvri est une cause de modération de l'indemnisation et non une condition d'admission de l'action.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
1-Sur la recevabilité des demandes de Mme [F]
Pour soutenir que Mme [F] ne serait plus recevable à invoquer aucune demande, les époux [R] invoquent en premier lieu, d'une part , qu'ils sont en droit de contester ce qui a été décidé par la conseiller de la mise en état devant la cour et d'autre part, que la signification du jugement est régulière de sorte que l'appel de Mme [F] est tardif.
Ils soutiennent ainsi que le jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lille du 29 novembre 2021 a autorité de la chose jugée en ce qu'il a jugé régulière la signification du jugement et l'existence d'un titre exécutoire valable.
Cependant il sera rappelé que par ordonnance d'incident du 21 avril 2022, le conseiller de la mise en état de la 1ère chambre de la cour a :
-annulé l'acte établi le 13 août 2020 aux fins de signification à [Y] [F] épouse [P] du jugement rendu le 30 juin 2020 par le tribunal judiciaire d'Avignon,
-déclaré l'appel recevable et débouté les époux [R] de leur exception d'irrecevabilité de l'appel,
-condamné les époux [R] à payer à [Y] [F] épouse [P] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'incident.
Aucun déféré n'a été élevé contre cette décision, seule voie de recours ouverte à son encontre conformément aux dispositions de l'article 916 du code de procédure civile.
Dès lors, cette décision est définitive et il est constant qu'elle a autorité de la chose jugée. La cour ne peut ainsi comme il le lui est demandé au terme de la motivation de la demande d'irrecevabilité des demandes de Mme [F], revenir sur cette ordonnance, ce litige ne pouvant lui être dévolu à ce stade.
La cour ne peut pas plus faire application des dispositions de l'article 540 du code de procédure civile relevant de la compétence du Premier président de la cour d'appel, et en toute hypothèse , l'appelante aurait-elle sollicité le relevé de forclusion prévue à cet article, sa demande n'aurait pu aboutir dés lors qu'elle contestait la régularité de la signification du jugement.
La cour ne peut pas plus enfin, considérer que la décision du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lille a autorité de la chose jugée qui remettrait en question la décision du conseiller de la mise en état et la recevabilité de l'appel, dés lors que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif, et qu'en l'espèce le dispositif du jugement du 29 novembre 2021 ne statue nullement sur la nullité de la signification du jugement et a expressément mentionné qu'il 'rejeté le moyen tiré de la nullité de l'assignation du 12 décembre 2019" mention prise à la lumière de sa motivation par laquelle il a relevé qu'il n'était pas dans son pouvoir de statuer sur cette demande, et doit être interprété comme une irrecevabilité et non un rejet de la l'exception de nullité de l'assignation.
Il s'en déduit que d'une part la recevabilité de l'appel a été définitivement tranché de sorte que la cour ne peut retenir une quelconque irrecevabilité des demandes à ce titre, et d'autre part que la nullité de l'assignation du 12 décembre 2019 n'a pas été pour sa part jugée puisqu'elle n'était ni de la compétence du juge de l'exécution ni du conseiller de la mise en état.
Mme [F] est dés lors recevable en ses demandes.
2-Sur l'exception de nullité relative à l'assignation du 12 décembre 2019, et du jugement subséquente
Mme [F] demande l'annulation de l'acte introductif d'instance ayant fait l'objet d'un procès-verbal de recherches infructueuses et du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon en soutenant qu'en faisant délivrer son assignation à une adresse inconnue ne correspondant pas à la sienne, les époux [R] l'ont privée de son double degré de juridiction et de la possibilité de contester les demandes de ces derniers. Elle ajoute que l'huissier n'a pas relaté avec précision dans son procès-verbal les diligences qu'il avait accomplies pour trouver son adresse ce que le conseiller de la mise en état a parfaitement relevé s'agissant de la nullité de la signification du jugement.
Les époux [R] lui opposent qu'ils ont fait délivrer leur assignation à l'adresse du jugement initial et qu'en toute hypothèse, elle reconnaît ne plus résider à l'adresse figurant dans l'arrêt du 6 décembre 2016 et ajoutent que l'huissier de justice a parfaitement rempli sa mission.
Aux termes de l'article 651 du code de procédure civile les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification qui leur en est faite.
La notification faite par acte d'huissier de justice est une signification.
La notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l'aurait prévue sous une autre forme.
Aux termes de l'article 659 du code de procédure civile lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.
Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.
Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité.
Par ailleurs, aux termes de l'article 693 du code de procédure civile ce qui est prescrit par les articles 654 à 659, 663 à 665-1, 672, 675, 678, 680, 683 à 684-1, 686, le premier alinéa de l'article 688 et les articles 689 à 692 est observé à peine de nullité.
Doivent être également observées, à peine de nullité, les dispositions des articles 4, 6, 7 et 8, paragraphes 1, 2, 4 et 5, du règlement (CE) n°1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 en cas d'expédition d'un acte vers un autre Etat membre de l'Union européenne.
Enfin, aux termes de l'article 114 du code de procédure civile aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
La nullité ne peut donc être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
Ainsi, en application des articles 114 et 693 du code de procédure civile, l'irrégularité de la signification entraîne la nullité de l'assignation de l'adversaire s'il est démontré que l'irrégularité lui a causé un grief.
En l'espèce, comme relevé par le conseiller de la mise en état dans sa motivation s'agissant de la signification du jugement, l'acte de signification de l'assignation litigieuse de la même manière que l'acte de signification du jugement du 13 août 2020 'contiennent au mot près les mêmes indications relatives aux vérifications accomplies par l'huissier de sorte que la page de l'acte intitulé'modalités de remise de l'acte' s'apparente à un document type préétabli ne rendant pas compte des diligences effectives réalisées par l'huissier dans la cadre de la remise d'un acte déterminé mais égrenant une série de vérifications dans des termes évasifs et indifférenciés.'
Il ressort en effet d'une telle reproduction à l'identique et surtout de son caractère général, une absence de vérification réelle et suffisante, la Cour de cassation exigeant que soient énoncées les investigations concrètes ayant permis ces affirmations à l'huissier instrumentaire.
Il s'en déduit que l'huissier de justice ne pouvait se borner à mentionner dans l'acte de remise de l'acte des phrases types ( en ce qu'il les a reprises mots pour mot dans la signification du jugement) sans mentionner précisément ce qu'il avait fait au cas d'espèce pour découvrir la nouvelle adresse de Mme [F].
De plus, certaines mentions de l'acte de signification sont incohérentes par rapport à l'acte lui même s'agissant notamment des recherches auprès de l'employeur alors que l'acte mentionne que Mme [F] est ' retraitée'. Il aurait pu en revanche interroger les organismes de retraite et notamment l'organisme de retraite du générale de la Cpam, ce qu'il n'a visiblement pas fait.
Il en est de même sur les mentions auprès du service de la poste qu'il n'a pas interrogé, motivant cette absence de diligence par le secret professionnel alors même que Mme [F] justifie avoir fait procéder à un changement d'adresse et à un suivi de son courrier.
Par ailleurs, l'huissier se devait d'interroger les requérants sur les éléments dont ils disposaient pour localiser Mme [F], ou se servir des éléments dont il avait connaissance lui -même, ce qu'il n'a visiblement pas fait en rédigeant l'acte d'assignation à l'adresse qui n'était pas la dernière adresse connue par lui, Mme [F] ayant sollicité son intervention en date du 8 septembre 2015 et avait communiqué une adresse différente ([Adresse 2]), de celle qu' a mentionné l'huissier.
Enfin, Mme [F] démontre un grief en ce qu'elle a été privée de la possibilité de comparaître en première instance pour pouvoir contester les demandes des époux [R] et a ainsi été privée d'un double degré de juridiction.
Il y a donc lieu d'annuler l'assignation litigieuse et la nullité de l'acte introductif d'instance emporte par voie de conséquence la nullité du jugement subséquent.
3-Sur l'effet dévolutif sur le fond
En l'absence d'acte introductif d'instance, l'appel est dépourvu d'effet dévolutif, les conclusions au fond étant sans portée dès lors qu'elles sont subsidiaires.
En l'espèce, la dévolution ne peut s'opérer, faute pour Mme [F] d'avoir conclu au fond à titre principal, ses autres demandes étant invoquées à titre subsidiaire. En conséquence, la cour ne peut statuer sur le fond de l'affaire et doit renvoyer les parties à mieux se pourvoir.
4-Sur les frais et dépens
Il y a lieu de condamner les époux [R] aux dépens de première instance et d'appel et de débouter les parties de toutes demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Rejette la demande de M.[N] [R] et Mme [O] [M] épouse [R] tendant à l'irrecevabilité des demandes présentées par Mme [Y] [F] épouse [P] ;
Annule l'assignation du 15 octobre 2019 délivrée par M.[N] [R] et Mme [O] [M] épouse [R] à Mme [Y] [F] épouse [P] ;
Annule le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon le 30 juin 2020 ;
Dit qu'elle n'est pas saisie du fait de l'absence d'effet dévolutif et renvoie les parties à mieux se pourvoir ;
Condamne M.[N] [R] et Mme [O] [M] épouse [R] aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,