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05/12/2022 | FRANCE | N°22/01550

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 05 décembre 2022, 22/01550


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/01550 - N° Portalis DBVH-V-B7G-INS7



CS



PRESIDENT DU TJ DE CARPENTRAS

15 avril 2022

RG :22/00116



S.A.R.L. GRIZPY



C/



[V]





Grosse délivrée

le

à











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 05 DECEMBRE 2022
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Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de CARPENTRAS en date du 15 Avril 2022, N°22/00116



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposi...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/01550 - N° Portalis DBVH-V-B7G-INS7

CS

PRESIDENT DU TJ DE CARPENTRAS

15 avril 2022

RG :22/00116

S.A.R.L. GRIZPY

C/

[V]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 05 DECEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de CARPENTRAS en date du 15 Avril 2022, N°22/00116

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 Décembre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.A.R.L. GRIZPY SARL Unipersonnelle

inscrite au RCS d'AVIGNON sous le n° B 901 006 346

représentée par son représentant légal en exercice Mme [O] [C], domiciliée ès qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Didier ADJEDJ de la SELASU AD CONSEIL AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

INTIMÉ :

Monsieur [L] [V]

né le 06 Juin 1965 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Lionel FOUQUET de la SELARL PYXIS AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 10 octobre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 05 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 18 juin 2021, M. [L] [V] a consenti à la société Grizpy, un bail commercial portant sur un local d'une surface de 350m² situé dans un bâtiment comportant deux autres locaux commerciaux, situé [Adresse 2].

Il était convenu que le paiement des charges serait partagé avec les occupants des locaux mitoyens occupés par la société Service Auto et par le bailleur qui y exerce sa propre activité.

Un conflit naissait entre les parties sur la répartition desdites charges, la société Grizly contestant devoir une somme de 3600 euros de charges pour une surface occupée de 350 m².

Soutenant que par mesure de rétorsion le bailleur lui a coupé l'alimentation en électricité et chauffage, elle le mettait en demeure, par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mars 2022, d'avoir à rétablir le chauffage, l'électricité, ainsi que de lui rendre l'exclusivité des places de parking qui lui étaient attribuées. Cette démarche est restée vaine.

Par ordonnance du 8 avril 2022, la société Grizpy a été régulièrement autorisée à assigner d'heure à heure M. [V] pour le voir condamner sous astreinte a :

- rétablir les fonctionnalités du thermostat pour lui permettre de régler à sa guise la température de chauffage,

- rétablir la totalité de l'alimentation électrique des locaux loués,

- installer un compteur électrique individuel,

- restituer la jouissance exclusive des places de parking prévues dans les termes du bail.

Elle sollicitait en outre la condamnation de M. [L] [V] à lui payer une provision de 1 750 € à titre de préjudice de jouissance et une somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire du 15 avril 2022, le président du tribunal judiciaire de Carpentras, statuant en référé, a :

- condamné M. [V] sous astreinte de 20 € par jour de retard à rétablir l'alimentation électrique ainsi que les fonctionnalités du thermostat ;

- rejeté la demande tendant au rétablissement de l'exclusivité des places de parking accessoires au local commercial notamment en installant une séparation entre les locaux de Services Auto et de la SARL Grizpy ;

- rejeté la demande de la SARL Grizpy tendant à la condamnation de M. [V] à installer un compteur électrique individuel au sein du local commercial exploité,

- rejeté la demande de la SARL Grizpy tendant au versement par M. [V] d'une indemnité provisionnelle de 1 750 € au titre du préjudice de jouissance,

- s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande tendant à l'annulation du commandement de payer les charges délivré le 12 avril 2022 par M. [V] à la SARL Grizpy,

- a condamné M. [V] à payer à la SARL Grizpy la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par déclaration du 2 mai 2022, la SARL Grizpy a interjeté appel de cette ordonnance sauf en ce qu'elle a condamné M. [V] à rétablir l'alimentation électrique dans la totalité du local commercial exploité par la SARL Grizpy et à rétablir les fonctionnalités du thermostat de nature à mettre en fonction le chauffage et lui permettre de régler la température.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 6 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SARL Grizpy, appelante, demande à la cour, au visa des dispositions de l'article 1719 du code civil, et de l'article 6b de la loi du 6 juillet 1989, de :

Réformer l'ordonnance du 15 avril 2022 rendu par la présidente du tribunal judiciaire de Carpentras, statuant en matière de référé en ce qu'elle a :

- Fixé le montant de l'astreinte à la somme de 20 € par jour de retard en lieu et place de la somme sollicitée de 500 € par jour de retard passé un délai de 8 jours après la signification de la décision ;

- Débouté la Société Grizpy de sa demande tendant à la condamnation de M. [V] sous 1 mois à compter de la notification de la décision et au-delà sous astreinte de 500 € par jour de retard à installer un compteur électrique au sein du local commercial loué, non seulement au titre des obligations qui lui incombent sinon également dans la mesure où la revente d'électricité est interdite ;

- Débouté la Société Grizpy de sa demande tendant à la condamnation de M. [V] sous 1 mois à compter de la notification de la décision et au-delà sous astreinte de 500€ par jour de retard à restituer la jouissance exclusive des places de parking désignées par le contrat de bail notamment en installant une séparation entre le local du garage Services Auto et celui de la Société Grizpy ;

- Débouté la Société Grizpy de sa demande tendant à la condamnation de M. [V] à lui verser à titre de provision en réparation du préjudice de jouissance causé une indemnité équivalente à 50 % du montant des loyers des mois de mars et avril soit la somme de 1 750 € ainsi que des mois à venir jusqu'à parfaite exécution de la décision ;

- Condamné M. [V] à verser à la société Grizpy une indemnité de 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en lieu et place de la somme sollicitée de 2 000€.

La confirmera en ce qu'elle a :

- Condamné M. [V] à rétablir l'alimentation électrique dans la totalité du local commercial exploité par la SARL Grizpy,

- Condamné M. [V] à rétablir les fonctionnalités du thermostat de nature à mettre en fonction le chauffage et à permettre à la SARL Grizpy de régler la température,

En conséquence,

- fixer le montant de l'astreinte concernant le rétablissement des fonctionnalités du thermostat à la somme de 500 € par jour de retard passé un délai de 8 jour après la signification de la décision,

- condamner M. [V] sous 1 mois à compter de la notification de la décision et au-delà sous astreinte de 500 € par jour de retard à installer un compteur électrique individuel au sein du local commercial loué par la SARL Grizpy, non seulement au titre des obligations qui lui incombent sinon également dans la mesure où la revente d'électricité est interdite,

À titre subsidiaire,

- dire et juger qu'il incombera à M. [V] de produire des factures mentionnant l'énergie consommée par la SARL Grizpy ainsi que le mode de calcul basé sur le prorata de la surface louée et ce, avant de procéder à toute régularisation,

- dire et juger qu'à défaut de présentation de tels justificatifs, la SARL Grizpy sera fondée à refuser de s'acquitter de toute somme supplémentaire à celle fixée par le contrat de bail, soit 170 €,

En tout état de cause,

- condamner M. [V] sous 1 mois à compter de la décision et au-delà sous astreinte de 500 € par jour de retard à restituer la jouissance exclusive des places de parking désignées par le contrat de bail,

- condamner M. [V] sous 1 mois à compter de la décision et au-delà sous astreinte de 500 € par jour de retard à installer une séparation entre le local du garage Services Auto et celui de la Société Grizpy,

- condamner M. [V] à verser à la société Grizpy à titre de provision en réparation du préjudice de jouissance causé une indemnité équivalente à 50% du montant des loyers des mois de mars et avril soit la somme de 1 750 € ainsi que des mois à venir jusqu'à parfaite exécution de la décision,

À titre reconventionnel,

- condamner M. [L] [V] à verser à la SARL Grizpy la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et la somme de 2 000 € supplémentaire pour la procédure d'appel,

- condamner M. [L] [V] en tous les dépens.

Au soutien de son appel, la SARL Grizpy expose tout d'abord qu'en la privant volontairement d'électricité et de chauffage, M. [V] a sciemment manqué aux obligations qui lui incombaient au titre du contrat de bail. Elle soutient que plus de 5 mois après sa condamnation à rétablir les fonctionnalités du thermostat, le bailleur n'a toujours pas satisfait à cette obligation ce qui souligne l'insuffisance de l'astreinte prononcée qui devra être augmentée pour le convaincre de s'exécuter.

Elle indique par ailleurs que la seule possibilité pour elle de pouvoir jouir paisiblement du local loué est d'avoir un compteur individuel, lui permettant de pouvoir justifier de sa consommation personnelle d'électricité et qu'en l'état, aucune pièce justificative ne vient étayer la pose d'un compteur individuel raccordé au local commercial exploité par la SARL bien qu'alléguée par le bailleur. Elle entend rappeler en outre que la revente d'électricité est soumise à une autorisation délivrée par l'autorité administrative conformément à l'article L.333-1 alinéa 1 code de l'énergie et nécessité la pose de ce compteur.

Ensuite, elle soutient que le contrat de bail lui attribue des places à usage exclusif et qu'en dépit des stipulations contractuelles, les clients du garage Services Auto continuent de se garer sur ses places, lui causant une gêne certaine par les incivilités à répétition dont ils font preuve à son égard. Elle considère donc que ce comportement justifie que l'exclusivité des emplacements, notamment la place de stationnement réservée aux personnes handicapées, soit actée et matérialisée, en précisant qu'un emplacement ne peut être exclusif que si la jouissance exclusive est également reconnue.

Sur le refus d'indemnité provisionnelle, elle rappelle que les articles 1719 du code civil et 6b de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs mettent à la charge du bailleur la garantie d'une jouissance paisible du bien loué, obligation confirmée par la jurisprudence, qui a reconnu le principe de la réparation du préjudice subi par le preneur en cas de troubles de jouissance se caractérisant notamment par la restitution d'une partie des loyers perçus. Il considère qu'en l'espèce le préjudice de jouissance perdure puisque les fonctionnalités du thermostat ne sont pas rétablies ce qu'il justifie par des échanges de mails, des procès-verbaux de constat d'huissier et un dépôt de plainte.

Enfin, s'agissant des frais irrépétibles, elle considère que la somme de 500 € accordée n'est pas acceptable, tant les procédures qu'elle a dû engager en urgence ont été coûteuses. Elle explique avoir été contrainte d'assigner en référé d'heure à heure M. [V], puisque sa résistance abusive lui causait un préjudice important d'une part, alors qu'elle a tenté par tous moyens de résoudre ce litige à l'amiable.

M. [V] [L], en sa qualité d'intimé, par conclusions en date du 7 octobre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, des articles 1101, 1103 et 1104 du code civil, de :

- confirmer l'ordonnance de référé entreprise le 15 avril 2022 en toutes ses dispositions ;

- débouter la SARL Grizpy de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la SARL Grizpy à payer à M. [V] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

M. [V] [L] sollicite la confirmation de l'ordonnance déférée soutenant avoir fait de son mieux pour remettre en fonction la chaudière commune et avoir à effectuer la pose du compteur électrique individuel dans les meilleurs délais.

Il entend indiquer à la cour avoir individualisé le compteur d'eau ainsi que le compteur EDF de sa locataire et avoir procédé à la pose d'un portail électrique avec digicode sur le parking d'entrée, qu'il justifie par la production de la totalité des factures afférentes. En dépit de ses efforts, il relève que la société Grizpy refuse de se comporter en locataire de bonne foi.

Il soutient que l'appelante ne rapporte absolument pas la preuve d'une obligation à la charge du bailleur de réserver à l'usage exclusif de la SARL Grizpy et sa clientèle l'espace extérieur de l'immeuble qu'elle entend voir clôturer à son bénéfice, rappelant que celui qui se prévaut de l'exécution d'une obligation doit encore la prouver, conformément à l'article 1353 du code civil. Par ailleurs, il fait valoir qu'en raison de cette contestation sérieuse, le juge des référés ne peut accueillir cette demande puisque cela reviendrait de fait à procéder à une interprétation ou révision du contrat, ce qui n'est pas de son ressort de compétence.

Il conclut au rejet de la demande en paiement d'une somme à titre provisionnel d'un montant de 1.750 € à valoir sur l'indemnisation de son trouble de jouissance formée par l'appelante, considérant qu'elle se heurte à une absence évidente de démonstration d'un quelconque préjudice.

Enfin, au regard de la mauvaise foi et de la résistance abusive de l'appelante, il sollicite la condamnation de la SARL Grizpy aux frais irrépétibles faisant valoir qu'il a engagé des frais pour se défendre alors que celle-ci a interjeté appel de l'ordonnance du 15 avril 2022 sans produire de nouvelles pièces, et en réitérant des demandes hors de la compétence du juge des référés.

La clôture de la procédure est intervenue le 10 octobre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 17 octobre 2022, pour être mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 5 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

-Sur le montant d'astreinte en lien avec le rétablissement de l'électricité et les fonctionnalités du thermostat :

Aux termes de l'alinéa 1 de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans l'ordonnance déférée, le premier juge a constaté que « la contestation élevée par la société Grizpy s'agissant de la répartition des charges ne dispense pas M. [V] de son obligation de fournir le gaz, l'électricité et le chauffage afin d 'assurer à son locataire la jouissance paisible des locaux » et que « l'interruption des fournitures d'électricité et de chauffage constitue pour le locataire un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser ».

Il s'ensuit que M. [V] a été condamné sous astreinte de 20 euros par jour de retard à rétablir l'alimentation de gaz, électricité et chauffage dans la totalité des locaux loués ainsi qu'à rétablir les fonctionnalités du thermostat de nature à mettre en fonction le chauffage et permettre au locataire de régler la température.

Il n'est pas contesté que la société Grizly a été privée à compter du 19 mars 2022 d'électricité et de chauffage comme en atteste le procès-verbal dressé le 19 mars 2022 par Me [S], huissier de justice, en sorte que c'est à bon droit au visa des dispositions de l'article 1719 du code civil et de l'article 3 du décret du 30 janvier 2002 relatifs aux obligations du bailleur et à l'accès dans les locaux loués à un réseau électrique suffisant, mais également au regard de l'urgence et de l'existence d'un trouble manifestement illicite, que le premier juge a ordonné le rétablissement de l'électricité et des fonctionnalités du thermostat ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par les parties dans le cadre de l'appel.

La société Grizly dénonce toutefois le montant de l'astreinte fixé à la somme de 20 euros par jour de retard qu'elle considère insuffisant expliquant notamment qu'à ce jour, les fonctionnalités du thermostat n'ont pas été rétablies ce qui est d'ailleurs contesté par le bailleur.

Elle produit en ce sens un procès-verbal de constat daté du 12 septembre 2022 relevant que « le thermostat ne déclenche pas le chauffage même lorsqu'il est en commande forcée avec un maximum de 30 degrés' et que les tableaux électriques, dans leur partie visible, sont inchangés depuis mon précédent constat du 29 mars 2022 ».

En l'état, si les constatations faites par l'huissier de justice le 12 septembre 2022 sont identiques à celles opérées le 29 mars 2022 s'agissant des fonctionnalités du thermostat pouvant traduire le non-respect de l'ordonnance déférée, pour autant le montant de l'astreinte est suffisant et présente un caractère suffisamment contraignant pour obliger l'autre partie à s'exécuter.

La fixation à la somme de 500 euros par jour de retard, comme réclamée par l'appelant, paraît disproportionnée s'agissant d'une première astreinte provisoire.

Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le premier juge a constaté l'existence d'un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser. La condamnation du bailleur à rétablir la fourniture d'électricité et les fonctionnalités du thermostat, sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision, sera en conséquence confirmée.

Il n'y a pas lieu de fixer l'astreinte jusqu'au rétablissement de l'électricité et du système de chauffage. Celle-ci sera fixée sur une durée maximale d'une année, afin d'être préalablement liquidée. Une nouvelle astreinte, éventuellement définitive, pourra être alors sollicitée.

-Sur la demande au titre de l'occupation des places de parking :

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il est acquis que le contrat de bail liant les parties porte sur un local commercial. Aucune mention n'est faite dans ce contrat quant à l'usage exclusif de places de parking qui seraient mises à la seule disposition de la société Grizly.

La lecture du bail commercial et la partie « désignation des locaux » font état en effet de la mise à disposition de locaux situés au [Adresse 2] décrits de la manière suivante :

« Grand espace d'un seul tenant de 12.3 m * 28.6 m environ

Superficie totale : 350 m²

Equipements présents dans la location : Box sanitaire WC + douche et lavabo

' le Bâtiment étant tourné pour être protégé du vent dominant local qui est le Mistral (nord) le locataire devra se méfier des bourrasques d'est puissantes, qui peuvent entraîner le soulèvement des plafonds' »

L'état des lieux signé par les parties le 28 juin 2021 ajoute les indications suivantes :

« local de 28 m * 12,5 m avec mise à disposition des places de parking situées très exactement en façade sud du bâtiment et exclusivement devant les 28 mètres du local, sans toutefois avoir l'autorisation de boucher le passage pour aller jusqu'au fond du parking. Plus une place handicapée définie devant le mur Est à côté de la double porte d'entrée principale'

Dessiner éventuellement les places de parking sur la surface qui lui est concédée sans toutefois bloquer le passage pour aller au fond du parking (livraison).

Mettre les panneaux de réservation de place ».

Cette mention ne peut suffire à voir reconnaitre au preneur un usage exclusif des emplacements visés mais traduit au contraire une limitation des emplacements dont il peut faire usage.

La société Grizly n'apporte aucune pièce au soutien de cette prétention.

Tenant ces éléments, il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande présentée par l'appelant aux fins de voir rétablir l'exclusivité des places de parking accessoires du local commercial, notamment en installant une séparation entre les locaux de Services Auto et la société appelante.

-Sur la demande d'installation d'un compteur individuel :

Conformément à l'article 835 du code de procédure civile susvisé, le juge des référés peut lorsqu'un trouble manifestement illicite est démontré prendre les mesures nécessaires pour faire cesser celui-ci.

Il appartient à celui qui se prévaut d'un trouble manifestement illicite d'en rapporter la preuve.

Le juge des référés a rejeté cette demande considérant que le bail commercial ne mettait nullement à la charge du bailleur la pose d'un compteur individuel alors que l'article 4 dudit bail prévoyait l'impossibilité pour le preneur d'exiger de son bailleur l'exécution de travaux de remise en état ni de remise aux normes ni l'adjonction d'équipements supplémentaires.

En l'espèce, il n'est pas contesté qu'au jour de l'ordonnance déférée le local commercial loué par la société Grizly ne disposait pas d'un compteur individuel et que le compteur général électrique alimentant l'ensemble du bâtiment se situe dans le local voisin occupé par le bailleur.

Le contrat de bail liant les parties ne contient aucune obligation pour le bailleur de faire procéder à l'installation d'un compteur électrique individuel ni d'effectuer des démarches en ce sens alors même qu'elles ont convenu d'une répartition des charges, dont les dépenses courantes d'eau, de gaz et d'électricité, au prorata de chacun des occupants de l'immeuble.

C'est donc à bon droit que le juge des référés a rejeté la demande relative à l'obtention de la pose d'un compteur d'électricité individuel.

De même, la demande subsidiaire tendant à obtenir que M. [V] produise les factures mentionnant l'énergie consommée par la Sarl Grispy ainsi que le mode de calcul basé sur le prorata de la surface louée et ce, avant de procéder à toute régularisation, et qu'il soit dit qu'à défaut de présentation de tels justificatifs, elle sera fondée à refuser de s'acquitter de toute somme supplémentaire à celle fixée par le contrat de bail, n'est pas justifiée dans la mesure où les conditions relatives à la répartition des charges et leur paiement sont déjà définies dans le contrat de bail rendant inutile l'intervention du juge des référés.

L'ordonnance déférée sera confirmée de ce chef et la société appelante sera déboutée de sa demande subsidiaire.

L'ordonnance déférée sera confirmée de ce chef.

-Sur la demande de provision :

Aux termes de l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il est établi que la société Grizly a été privée d'électricité et de chauffage à compter du 29 mars 2022, date du procès-verbal de constat d'huissier de justice.

Il résulte des débats que l'électricité a été remise à la veille de l'audience de référé soit le 13 avril 2022. Il s'ensuit que la société Grizly a été privée d'électricité pendant une durée de 16 jours.

Si la réalité de cette coupure ne peut être contestée, l'appelant ne produit aucune pièce permettant d'apprécier le bien-fondé de sa demande et l'existence d'un préjudice notamment quant à l'exploitation de son activité commerciale. Le simple constat de la réalité de cette coupure ne peut suffire à faire droit à la demande de provision.

Par ailleurs, s'agissant du chauffage, si les parties s'opposent quant au rétablissement des fonctionnalités du thermostat, l'appelant produit un procès-verbal de constat daté du 12 septembre 2022 relevant que « le thermostat ne déclenche pas le chauffage même lorsqu'il est en commande forcée avec un maximum de 30 degrés' et que les tableaux électriques, dans leur partie visible, sont inchangés depuis mon précédent constat du 29 mars 2022 ».

Il s'ensuit que si les constatations faites par l'huissier de justice le 12 septembre 2022 sont identiques à celles opérées le 29 mars 2022 s'agissant des fonctionnalités du thermostat pouvant traduire le non-respect de l'ordonnance déférée, pour autant la société Grizly ne justifie pas d'un préjudice particulier.

L'existence d'un éventuel préjudice constitue une contestation sérieuse qu'il n'appartient pas au juge des référés, juge de l'évidence, de trancher.

Tenant l'existence d'une contestation sérieuse concernant la demande d'indemnisation du préjudice, il convient d'écarter cette demande et de dire n'y avoir lieu à référé de ce chef. La décision déférée sera, en conséquence, confirmée de ce chef.

-Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement réglé par le premier juge.

En cause d'appel, la cour confirmant en son entier l'ordonnance déférée, l'équité commande de faire droit à la demande formulée par l'intimé sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de lui allouer la somme de 500 euros.

Pour les mêmes motifs, la société Grizly conservera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance de référé rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Carpentras le 15 avril 2022, excepté en ses dispositions fixant l'astreinte 'jusqu'au rétablissement de l'électricité et au système de chauffage',

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Fixe l'astreinte relative au rétablissement de l'électricité et au système de chauffage sur une durée maximale d'une année, au terme de laquelle il devra être à nouveau statué,

Déboute la SARL Grispy de la demande tendant à voir dire et juger que M. [V] produise les factures mentionnant l'énergie consommée par la SARL Grispy ainsi que le mode de calcul basé sur le prorata de la surface louée et ce, avant de procéder à toute régularisation, et dire et juger qu'à défaut de présentation de tels justificatifs, la SARL Grispy sera fondée à refuser de s'acquitter de toute somme supplémentaire à celle fixée par le contrat de bail soit 170 euros,

Condamne la SARL Grisly à payer à M [L] [V] la somme de 500 euros sur le fondement de de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Grisly aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/01550
Date de la décision : 05/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-05;22.01550 ?
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