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05/12/2022 | FRANCE | N°22/01069

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 05 décembre 2022, 22/01069


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/01069 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IMGU



AL



PRESIDENT DU TJ DE PRIVAS

17 février 2022

RG:21/00335



[V]



C/



[W]





Grosse délivrée

le

à













COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 05 DECEMBRE 2

022





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de PRIVAS en date du 17 Février 2022, N°21/00335



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,



GREFFIER :



M...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/01069 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IMGU

AL

PRESIDENT DU TJ DE PRIVAS

17 février 2022

RG:21/00335

[V]

C/

[W]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 05 DECEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de PRIVAS en date du 17 Février 2022, N°21/00335

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 Décembre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [N] [V]

né le 11 Octobre 1984 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Frédéric DEMOLY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'ARDECHE

INTIMÉE :

Madame [O] [W] épouse [M]

née le 01 Septembre 1977 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Fleur BARON de la SCP CABINET AGUERA AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de LYON

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 26 septembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 05 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte sous seing privé du 4 avril 2018, Mme [O] [M], M. [N] [V] et M. [T] [Z] ont constitué la SCI dénommée la SCI Le Comptoir Café, dont le siège social est situé à [Localité 5], [Adresse 8], laquelle a fait l'acquisition le même jour des lots n°17 et 26 dans un ensemble immobilier à usage commercial, sis [Adresse 8] dans la même commune.

Aux termes des derniers statuts de la SCI Le Comptoir Café en date du 9 novembre 2018, Mme [O] [M] et M. [N] [V] sont les seuls associés, détenant chacun 150 parts sociales.

Le 20 novembre 2018, les deux associés ont conclu un pacte d'associés organisant leurs droits et obligations envers la société ainsi que leurs rapports entre eux.

Un bail commercial a été également conclu entre la SCI Le Comptoir Café et la SAS L'Annexe en vue de l'exploitation des locaux commerciaux à usage de restauration le 1er décembre 2018.

Des dissensions sont apparues entre les associés de la SCI Le Comptoir Café.

La question de la révocation de M. [N] [V] de ses fonctions de gérant de la SCI Le Comptoir Café par application des clauses du pacte d'associé et des statuts de la SCI ainsi que de ses conséquences a été évoquée lors d'une assemblée générale extraordinaire tenue le 15 juillet 2019.

Le 29 janvier 2020, l'assemblée générale de la SCI Le Comptoir Café a procédé à la révocation du mandat de gérant de M. [N] [V] au visa de l'article 7, 2) du pacte d'associés du 20 novembre 2018 signé conformément à l'article 33 des statuts, motifs pris d'une part de sa déclaration du 14 décembre 2017 selon laquelle il n'avait pas été condamné alors qu'il est apparu ultérieurement qu'il avait en réalité fait l'objet d'une condamnation pour crime de droit commun entraînant une incapacité d'exploiter un débit de boissons, et d'autre part de son désintéressement quant aux affaires sociales et à la situation financière de la SCI.

Par exploit d'huissier du 11 septembre 2020, Mme [O] [M] a fait assigner M. [N] [V] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de PRIVAS afin :

- d'obtenir la désignation d'un mandataire ad hoc avec mission de signer au nom et pour le compte de M. [N] [V], dans un délai maximum de 30 jours à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir, cinq exemplaires de l'acte de cession des 150 parts sociales numérotées de 1 à 50 et de 201 à 300 qu'il détient dans le capital social de la SCI Le Comptoir Café au profit de Mme [O] [M] pour le prix de 1.500 euros,

- dire et juger que les honoraires du mandataire ad hoc seront à la charge définitive de M. [N] [V], et que Mme [O] [M] pourra en faire l'avance en cas de carence de ce dernier,

- condamner M. [N] [V] à lui payer à titre provisionnel la somme de 1.500 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 janvier 2020, et au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par ordonnance contradictoire du 17 février 2022, le président du tribunal judiciaire de PRIVAS a :

- au principal, renvoyé les parties à se pourvoir comme elles en aviseront mais dès à présent,

- désigné Me [G], demeurant [Adresse 4] à [Localité 6], en qualité d'administrateur ad hoc, pour une durée de trente jours à compter de la signification de la décision, pour procéder à la signature au nom et pour le compte de M. [N] [V] en cinq exemplaires de l'acte de cession de ses 150 parts sociales numérotées de 1 à 50 et de 201 à 300 qu'il détient dans le capital de la SCI Le Comptoir Café au profit de Mme [O] [M] pour le prix de 1.500 euros,

- dit que la rémunération de l'administrateur ad hoc sera supportée par Mme [O] [M],

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision présentée par Mme [O] [M],

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

Par déclaration en date du 20 mars 2022, M. [N] [V] a interjeté appel de cette ordonnance, en ce qu'elle l'a débouté de sa demande tendant au rejet de l'ensemble des prétentions de Mme [O] [M] et à la condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 29 mars 2022, M. [N] [V], appelant, demande à la cour, au visa des articles 835 alinéa 2 du code de procédure civile et des articles 1124, 1902 et 1904 du code civil, de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel régularisé à l'encontre de l'ordonnance de référé du 17 février 2022,

- réformer ladite ordonnance,

- juger que les prétentions de Mme [O] [M] se heurtent à des contestations sérieuses.

- débouter en conséquence Mme [O] [M] de l'intégralité de ses prétentions,

- condamner Mme [O] [M] à verser à M. [N] [V] une somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de son appel, M. [N] [V] fait tout d'abord valoir qu'il n'a pas été révoqué sur le fondement de l'article 1851 du code civil ou des statuts du 9 novembre 2018, mais en vertu d'un pacte d'associés établi postérieurement, le 20 novembre 2018, qui en son article 7 énonce les motifs et conditions de révocation du gérant, et organise par ailleurs la cession des parts de l'associé gérant révoqué. Il précise que ce pacte d'associés permet de retirer tout droit au propriétaire des parts sociales par le seul fait de le révoquer unilatéralement de son mandat de gérant et qu'en se fondant sur ce pacte, Mme [O] [M] a organisé la perte de tous ses droits dans la SCI Le Comptoir Café.

Il ajoute que ledit pacte d'associés n'ayant pas date certaine pour ne pas avoir été enregistré, il n'est pas justifié qu'il ait été établi et signé avant le 24 novembre 2018, de sorte que la preuve n'étant pas rapportée que ce document a été établi avant l'échéance prévue à l'article 33 des statuts, il ne saurait avoir de portée juridique.

Il poursuit en indiquant que la contestation de la validité du pacte d'associés du 20 novembre 2018, ainsi que des assemblées générales extraordinaires des 15 juillet 2019 et 29 janvier 2020 rendent en conséquence sérieusement contestables les prétentions de l'intimée qui, sur un motif illégitime, lui imposerait, au mépris des dispositions des articles 1845 et suivants du code civil, de céder ses parts sociales à leur valeur nominale plutôt qu'à la valeur réelle du bien dont est propriétaire la SCI Le Comptoir Café. Il explique encore qu'étant propriétaire de la moitié des parts sociales de la SCI, il ne peut pas en être dépossédé sans valorisation de ses droits, non pas selon la valeur nominale des actions, mais bien selon la valeur de l'actif net de la société, après déduction de ses dettes.

Au vu de ces éléments, il considère que seuls les statuts d'origine ainsi que le procès-verbal d'assemblée générale du 4 avril 2018 ont une valeur juridique, et soutient que les statuts du 9 novembre 2018 ne peuvent pas dès lors lui être opposés, ne correspondant manifestement pas à la situation des parties à cette date.

Par ailleurs, il conteste les motifs de révocation invoqués par l'intimée. Ainsi, il soutient que celle-ci a eu connaissance de son passé pénal et que dès l'origine des relations contractuelles, elle a organisé les moyens juridiques lui permettant de l'évincer à sa guise après avoir profité de la valorisation du patrimoine de la SCI qu'il a apportée, et fait valoir que le grief tenant à un désintérêt de ses fonctions et des affaires sociales n'est donc aucunement fondé.

En outre, il allègue que Mme [O] [M] a commis des man'uvres frauduleuses à son égard ainsi que des fautes dans la gestion de la SCI Le Comptoir Café, confondant manifestement son intérêt personnel et celui de la société. Il explique notamment que le choix de Mme [O] [M] de fermer le restaurant l'Annexe le 9 juin 2019, et de ne pas poursuivre cette société en paiement du loyer avant la régularisation d'un contrat de location-gérance du fonds de commerce et la régularisation vraisemblable, sans qu'il en soit informé, d'un nouveau bail entre la SCI Le Comptoir Café et l'EURL au Rendez Vous du Château, constituent des fautes de gestion générant un important préjudice à la SCI Le Comptoir Café puisque celle-ci ne bénéficie plus de revenus.

Enfin, il expose avoir saisi le tribunal judiciaire de Privas, par acte du 25 mars 2022, d'une action en nullité du pacte d'associés et des assemblées générales extraordinaires de la SCI Le Café Comptoir des 15 juillet 2019 et 29 janvier 2020 ainsi que d'une action en responsabilité dirigée à l'encontre de Mme [O] [M].

Mme [O] [W] épouse [M], en sa qualité d'intimée et appelante incidente, par conclusions du 29 avril 2022, demande à la cour, au visa des articles 1845 et suivants du code civil, de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a désigné Me [J] [G] en qualité d'administrateur ad hoc, pour une durée de trente jours à compter de la signification de l'ordonnance, pour procéder à la signature au nom et pour le compte de M. [N] [V], en cinq exemplaires, de l'acte de cession de ses 150 parts sociales numérotées de 1 à 50 et de 201 à 300 qu'il détient dans le capital de la SCI Le Comptoir Café au profit de Mme [O] [M] pour le prix de 1.500 euros,

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

« dit que la rémunération de l'administrateur ad hoc sera supportée par Mme [O] [M],

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision présentée par Mme [O] [M],

dit ny avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [O] [M],

laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens ».

et statuant à nouveau :

- condamner M. [N] [V] à payer à titre provisionnel, en deniers ou quittances, à Mme [O] [M] née [W] la somme de 1.500 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 janvier 2020,

- condamner M. [N] [V] à payer à titre provisionnel à Mme [O] [M] née [W] la somme de 3.600 EUR en remboursement des honoraires dus à M. [G] au titre de sa mission,

- condamner M. [N] [V] à payer à Mme [O] [M] née [W] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la première instance et l'appel,

- condamner M. [N] [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- débouter M. [N] [V] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.

A l'appui de sa demande de confirmation de la désignation de Me [G] en qualité de mandataire ad hoc, Mme [O] [M] soutient que cette désignation n'est que l'application pure et simple des termes du pacte d'associés, parfaitement valable, dûment signé par M. [N] [V], lequel stipule qu'en cas de révocation des fonctions de gérant de l'un des associés, l'associé révoqué s'oblige à vendre ses titres aux autres associés à un prix déterminé par l'article 6 dudit pacte.

A ce propos, elle fait valoir que dès lors qu'il n'existe aucune contestation sérieuse à l'obligation faite au débiteur de signer l'acte de cession des parts sociales qu'il détient dans le capital social d'une société au profit du créancier, le juge des référés peut designer un mandataire ad hoc avec mission de signer, au nom et pour le compte du débiteur, l'acte de cession desdites parts sociales.

Elle précise que lors de l'assemblée générale de la SCI Le Comptoir Café du 29 janvier 2020, elle a voté la révocation de M. [N] [V] de ses fonctions de cogérant, conformément à l'article 7.2 du pacte d'associés du 20 novembre 2018, signé en application de l'article 33 des statuts, permettant la révocation d'un gérant par un seul des associés. Elle ajoute qu'en raison du refus de ce dernier de signer les actes de cession, elle est donc bien fondée, l'obligation de M. [N] n'étant pas sérieusement contestable, en sa demande de confirmation de l'ordonnance.

Par ailleurs, elle soutient, en réponse aux moyens soulevés par M. [N] [V], que le pacte d'associés comporte bien une date de signature, à savoir le 20 novembre 2018, apposée par les parties elles-mêmes sans aucune contrainte et en toute capacité, de sorte que sa date est certaine et ne saurait être sérieusement contestée, et rappelle à ce propos que la conclusion d'un pacte d'associés n'est soumise à aucune formalité particulière en termes de publication et n'a donc pas besoin d'être enregistré auprès du greffe. Elle souligne encore, s'agissant du caractère léonin des clauses qui est allégué, que la clause visée ne crée aucun déséquilibre absolu entre les parties et ne lui attribue pas non plus la totalité des bénéfices, étant précisé que la SCI Le Comptoir Café ne dégage aucun bénéfice mais des pertes. En outre, elle considère qu'aucune atteinte au droit de propriété n'est caractérisée dès lors que M. [N] [V] a, volontairement et valablement, signé le pacte d'associés et accepté expressément les effets qui en découlent.

Concernant la contestation des motifs de révocation, elle entend indiquer que l'appelant ne formule aucune contestation sérieuse sur la demande de désignation d'un mandataire ad hoc et qu'il n'appartient pas à la juridiction des référés saisie d'une demande de désignation d'un mandataire ad hoc en application des termes clairs d'un pacte d'associés, parfaitement valable et dûment signé et accepté par M. [N] [V], de se prononcer sur l'existence ou non d'un juste motif ayant permis la révocation de son mandat de gérant. Elle ajoute qu'au demeurant, la contestation des motifs de révocation ouvrirait uniquement droit à une indemnisation mais aucunement à la nullité de la révocation elle-même.

Par ailleurs, elle explique qu'aux termes de l'article 7.2 du pacte d'associés, « l'incapacité à gérer la SCI entraînant le désaccord entre les associés et la mise en danger de la SCI » constitue un juste motif de révocation, et considère donc que la découverte a posteriori d'une condamnation pénale pour crime, prononcée à l'encontre de M. [N] [V] antérieurement à l'immatriculation de la SCI Le Comptoir Café, ayant entraîné son incapacité à gérer le débit de boisson exploité par la SAS L'Annexe, constitue un motif plus que légitime et juste de révocation de ses fonctions de gérant.

Aux termes de ses écritures, Mme [O] [M] réfute également avoir commis des fautes de gestion et précise qu'elle a assumé seule la gestion de la SCI et pris seule à sa charge les difficultés financières de la société. Elle ajoute que M. [N] [V] ne s'est jamais intéressé à la gestion de la SCI et que les travaux qu'il prétend avoir accomplis ont été réalisés, en réalité, par des tiers.

Enfin, elle expose que la somme de 3.600 euros correspond au montant des honoraires TTC du mandataire ad hoc et que la somme de 1.500 euros représente un prêt consenti amiablement à M. [N] [V] qui n'est pas sérieusement contestable.

La clôture de la procédure est intervenue le 26 septembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 3 octobre 2022 pour être mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 5 décembre 2022.

MOTIFS

SUR LA RECEVABILITÉ

L'appel formé par M. [N] [V] à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 17 février 2022 est recevable.

SUR LA DÉSIGNATION D'UN MANDATAIRE AD HOC

Il ressort de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le pacte d'associés qui porte la date du 9 novembre 2018 et que M. [N] [V] reconnaît avoir signé, prévoit la faculté pour chaque associé de révoquer unilatéralement le gérant dans un certain nombre d'hypothèses limitativement définies dans l'acte et notamment en cas d'« Incapacité à gérer la SCI entraînant le désaccord entre les associés et la mise en danger de la SCI ». En outre, il stipule que lorsque tel est le cas, l'associé dont le mandat de gérant est révoqué concède aux autres associés, chacun à proportion de sa participation au capital de la société, la faculté d'acquérir ou de faire acquérir la pleine propriété des titres. Il ajoute que cette promesse est irrévocable et que l'option d'achat est consentie pour une durée de 12 mois commençant à courir à compter du jour où la révocation est devenue définitive. Il précise encore qu'en cas de levée de l'option, l'associé révoqué s'oblige à donner, dès sa notification, tous concours et signatures nécessaires en vue de la réalisation de la cession, et qu'en cas de défaillance de l'intéressé ou de ses héritiers et ayants droit, il pourra être fait désigner en justice un mandataire avec mission de constater la cession de parts sociales et de signer tous actes et pièces nécessaires pour rendre la cession opposable à la société.

Aux termes de ses écritures, M. [N] [V] remet en cause la validité du pacte d'associés ainsi que les motifs de sa révocation pour conclure à l'existence d'une contestation sérieuse faisant obstacle à la désignation d'un mandataire ad hoc. En revanche, il ne discute pas le fait que la procédure prévue par le pacte d'associés a bien été respectée et aucune discussion n'existe quant à l'authenticité des signatures qui y sont portées. En outre, si l'appelant conteste le motif de révocation invoqué par Mme [O] [M] en prétendant que celui-ci n'est pas constitué, il est acquis cependant que ce motif, à savoir l'existence d'une « Incapacité à gérer la SCI entraînant le désaccord entre les associés et la mise en danger de la SCI » figure bien parmi les cas limitativement prévus par le pacte d'associés permettant la révocation du gérant à l'initiative d'un seul associé.

Aussi, en l'état de ces éléments, les contestations soulevées par M. [N] [V], dont le bien fondé relève de la seule appréciation du juge du fond qui en a d'ailleurs été saisi selon l'exploit introductif d'instance du 25 mars 2022, ne sont pas suffisamment sérieuses pour faire obstacle en référé à la mise en 'uvre des modalités prévues par le pacte d'associés qui doit par conséquent trouver application.

L'ordonnance de référé, dont il importe de rappeler le caractère provisoire et l'absence d'autorité de chose jugée au principal en application de l'article 484 du code de procédure civile, sera donc confirmée en ce qu'elle a désigné Me [G] en qualité d'administrateur ad hoc ou mandataire ad hoc, les deux dénominations recouvrant le même office, avec la mission précisée à son dispositif.

Dans son ordonnance, le juge des référés a laissé à la charge de Mme [O] [M] les frais de rémunération du mandataire ad hoc.

Même si, en l'état, le recours à un mandataire ad hoc a été rendu nécessaire par le refus de M. [N] [V] d'exécuter spontanément le protocole d'accord, il n'appartient pas au juge des référés de statuer sur la charge définitive de ces honoraires, qui devront être tranchés par les juges du fond, Mme [M] en ayant seulement fait l'avance. L'ordonnance déférée sera donc confirmée sur ce point.

SUR LA DEMANDE DE PROVISION

Le pacte d'associés signé par les parties précise que Mme [O] [M] a prêté la somme de 1.500 euros à M. [N] [V] pour que celui-ci puisse entrer dans le capital social de la SCI. Cette indication n'est pas discutée par l'intéressé dans ses écritures.

L'existence d'un prêt de 1.500 euros, qui ne se confond pas avec le prêt consenti par Mme [O] [M] à l'appelant au titre de son apport en numéraires dans la SAS L'Annexe, est donc établie.

Toutefois, il sera relevé que les modalités de remboursement de ce prêt ne sont pas précisées dans le pacte d'associés et qu'aucun terme n'est prévu. Comme l'a indiqué à bon droit le premier juge, il n'appartient pas au juge des référés de fixer, par application de l'article 1900 du code civil, le terme du prêt, cette fixation ainsi que la détermination des modalités de remboursement relevant du juge du fond.

Aussi, l'ordonnance déférée sera confirmée sur ce point.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

L'ordonnance déférée sera confirmée en ce qu'elle a dit qu'il n'y avait pas lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties et a laissé à la charge de chacune d'elles ses dépens.

En cause d'appel, M. [N] [V], qui succombe dans le soutien de ses prétentions sera condamné aux dépens. Il sera mis à sa charge le paiement d'une somme de 1 000 euros en contrepartie des frais irrépétibles que Mme [M] a dû engager dans l'instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, en dernier ressort et rendue par mise à disposition au greffe,

Dit M. [N] [V] recevable en son appel formé à l'encontre de l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Privas du 17 février 2022,

Confirme l'ordonnance du 17 février 2022 en toutes ses dispositions,

Condamne M. [N] [V] à payer à Mme [O] [M] la somme de 1 000 euros en l'application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [N] [V] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/01069
Date de la décision : 05/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-05;22.01069 ?
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