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01/12/2022 | FRANCE | N°22/00513

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 01 décembre 2022, 22/00513


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/00513 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IK3K



AD



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS

18 décembre 2018 RG :17/02964



[B]



C/



Commune COMMUNE DE [Localité 18]





























Grosse délivrée

le

à Selarl Ortega

Selarl Lexavoue





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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A





ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de PRIVAS en date du 18 Décembre 2018, N°17/02964





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/00513 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IK3K

AD

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS

18 décembre 2018 RG :17/02964

[B]

C/

Commune COMMUNE DE [Localité 18]

Grosse délivrée

le

à Selarl Ortega

Selarl Lexavoue

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de PRIVAS en date du 18 Décembre 2018, N°17/02964

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, et Madame Laure MALLET, Conseillère, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Madame Laure MALLET, Conseillère

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 01 Décembre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [X] [B]

née le 21 Août 1928 à [Localité 15]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représentée par Me Frédéric ORTEGA de la SELARL FREDERIC ORTEGA AVOCAT, Postulant, avocat au barreau d'ALES

Représentée par Me Céline CASSEGRAIN de la SELARL RETEX AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉE :

COMMUNE DE [Localité 18] prise en la personne de son Maire en exercice dont le siège sis

[Adresse 16]

[Adresse 16]

Représentée par Me Didier CHAMPAUZAC de la SELARL CABINET CHAMPAUZAC, Plaidant, avocat au barreau de VALENCE

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 15 Septembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 01 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

Exposé':

Mme [X] [B] est propriétaire à [Localité 19] (Ardèche) des parcelles cadastrées section [Cadastre 12], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] pour les avoir acquises de Mme [W] veuve [P] par acte notarié du 15 avril 1972.

Un chemin longe les parcelles section [Cadastre 13] et [Cadastre 10].

Soutenant que la commune avait procédé à l'enlèvement d'une barrière sur ce chemin, dont elle s'estime propriétaire, Mme [B] a fait assigner, par acte d'huissier du 11 décembre 2017, la commune de [Localité 19] devant le tribunal de grande instance de Privas, lequel par jugement du 18 décembre 2018 a statué comme suit :

- dit que le chemin longeant les parcelles cadastrées section [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 10] sur la commune de [Localité 19] est un chemin rural appartenant au domaine privé de la commune,

- dit que Mme [X] [B] ne devra pas entraver le passage du chemin rural de quelque manière que ce soit et devra laisser libre l'assiette du chemin rural, sous peine d'une astreinte de 500 € par infraction constatée,

- condamne Mme [X] [B] à payer à la commune de [Localité 19] la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamne Mme [X] [B] aux dépens.

Le premier juge retient que le chemin litigieux constitue un chemin rural dès lors':

- qu'il résulte des pièces produites qu'il ne dessert pas que les parcelles [Cadastre 6], [Cadastre 5] et [Cadastre 10] appartenant à Mme [B] mais également les parcelles [Cadastre 11], [Cadastre 3], [Cadastre 2] et [Cadastre 1],

- que le titre de Mme [B], n'indique pas que le chemin litigieux fait partie de sa propriété, mais qu'au contraire, il est mentionné que «'du côté levant, la propriété vendue est bordée par un chemin qui parait être communal, sur une grande partie soit approximativement jusqu'au niveau du hangar, puis ce chemin se trouve compris dans la propriété vendue'»,

- que le chemin litigieux ne comporte pas de numéro de cadastre, contrairement à ce qu'affirme Mme [B],

- que les plans cadastraux laissent apparaître le chemin litigieux comme voie communale,

- que Mme [B] ne peut se prévaloir d'une possession trentenaire dans la mesure où dès l'achat des parcelles, l'acte mentionnait que le chemin bordant la propriété paraissait être communal,

- que le défaut d'entretien du chemin par la commune n'est pas de nature à exclure son affectation à l'usage du public,

- le non-usage du chemin par le public depuis plus de trente ans, serait-il même démontré, ne saurait conférer la propriété du chemin à Mme [B] dans la mesure où cette dernière n'apporte pas la preuve des conditions de la possession.

Par déclaration du 18 février 2019, Mme [X] [B] a relevé appel de cette décision.

Par arrêt avant dire droit du 23 juillet 2020, la cour a':

- ordonné une expertise,

- commis pour y procéder M. [F] [T] avec pour mission, les parties et leurs conseils, étant convoqués par ses soins de :

* se rendre sur les lieux, en dresser un plan,

* fournir à la cour tous éléments permettant de dire si le chemin litigieux est affecté à l'usage du public de manière générale et continue,

* dans l'affirmative, préciser s'il s'agit d'une voie de passage,

* préciser le tracé de ce chemin et les parcelles qu'il dessert, déterminer s'il se poursuit au delà de la ferme [B],

* donner à la cour tous éléments permettant de déterminer si le chemin apparaissant sous la dénomination « chemin dit de Devès à le Gral » dans le tableau de classement des chemins ruraux de la commune suivant délibération du 17 novembre 1976 est le chemin litigieux,

* rechercher si les décisions des 22 mai 1943 et 26 janvier 1966 (dont il appartiendra à Mme [B] de produire des copies lisibles) s'appliquent aux parcelles, propriété de Mme [B] ou de ses auteurs, ou à d'autres parcelles situées dans le périmètre des lieux,

* rechercher à partir de quelle date, Mme [B] a obstrué le passage,

* examiner le titre de propriété de Mme [B],

* entendre les parties en leurs dires et explications,

- sursis à statuer sur l'ensemble des demandes dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise,

- renvoyé le dossier à l'audience de mise en état du 3 novembre 2020 et dit que l'affaire sera retirée du rôle et qu'elle pourra être rétablie à la demande de la partie la plus diligente dès que la cause du sursis aura disparu,

- réservé les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 31 août 2020, le magistrat chargé du contrôle de l'expertise a désigné, en remplacement de M. [F] [T] empêché, M. [N] [R] avec la mission spécifiée dans la décision du 23 juillet 2020.

L'expert a rendu son rapport le 12 octobre 2021.

Vu les conclusions de Mme [B] en date du 5 septembre 2022 demandant de':

Vu les articles cités,

Vu la jurisprudence visée,

Vu les présentes conclusions et ses pièces jointes,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 décembre 2018 par le tribunal de grande instance de Privas,

Et, statuant à nouveau :

- débouter la commune de [Localité 18] de l'intégralité de ses demandes,

- dire que la commune de [Localité 18] ne dispose d'aucune propriété sur le tènement immobilier de Madame [B], cadastré section [Cadastre 14], [Cadastre 5] et [Cadastre 6], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10],

- condamner la commune de [Localité 18] à rétablir le portail qu'elle a déposé sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,

- condamner la commune de [Localité 18] à verser à Madame [B] une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

- condamner la commune de [Localité 18] à payer à Madame [B] une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la commune de [Localité 18] aux entiers dépens.

L'appelante soutient en substance qu'elle est propriétaire du chemin qui longe sa propriété le long du canal au droit des parcelles section [Cadastre 13] et [Cadastre 10]'; que ce chemin ne dessert que sa propriété, dans lequel il se termine, que les parcelles situées après ne sont desservies qu'en vertu de décisions de justice reconnaissant un droit de passage à la famille [H], qu'il n'y a donc pas d'usage public et général de ce chemin.

L'appelante estime qu'elle a subi un préjudice consécutif à l'atteinte à son droit de propriété constituant une voie de fait de la part de la commune qui a procédé à la dépose de la barrière servant à clore et protéger sa propriété, d'autant qu'elle est âgée et qu'elle souffre de cécité la rendant invalide à 100%, la commune devant, en conséquence, être condamnée à replacer le portail sous astreinte et à lui payer des dommages-intérêts en raison des tracas liés au procès.

Elle sollicite le rejet de la demande de la commune tendant à sa condamnation pour procédure abusive, n'ayant fait qu'user de son droit d'agir, la seule constatation du caractère infondé des prétentions n'étant pas de nature à caractériser une faute.

Vu les conclusions de la commune de [Localité 18] en date du 9 septembre 2022, demandant de':

Vu les articles L. 161-1, L. 161-2 et L. 161-3 du code rural et de la pêche maritime,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,

- confirmer, le jugement du tribunal de grande instance de Privas du 18 décembre 2018 en ce qu'il a':

* dit que le chemin longeant les parcelles cadastrées numéro [Cadastre 6], [Cadastre 5] et [Cadastre 10] sur la commune de [Localité 18] est un chemin rural appartenant au domaine privé de ladite commune,

* dit que Mme [B] ne devra pas entraver le passage du chemin rural de quelque manière que ce soit et devra laisser libre l'assiette du chemin rural, sous peine d'une astreinte de 500 euros par infraction constatée,

* condamné Mme [B] à payer à la commune de [Localité 18] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [B] aux entiers dépens,

- débouter, Mme [B] de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires,

- juger que le chemin litigieux est un chemin rural appartenant au domaine privé de la commune de [Localité 18],

- condamner Mme [B] à laisser libre l'assiette du chemin du Devès à Le Gral à l'avenir, sous astreinte de 500 € par infraction constatée,

- faire droit à l'appel incident et réformer le jugement du tribunal de grande instance de Privas du 18 décembre 2018 en ce qu'il rejette la demande de la commune tendant à ce que soit dit et jugé que la procédure intentée par Mme [B] est abusive de nature à engager sa responsabilité ; la condamner en conséquence, au titre de la réparation du préjudice subi à payer à la commune de [Localité 18] la somme de 3'000'€ à titre de dommages-intérêts,

- condamner Mme [B] à payer à la commune de [Localité 18] la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel, avec distraction au profit de Me Emmanuelle Vajou, Lexavoué, avocat au Barreau de Nîmes, sous couvert de l'article 699 code de procédure civile.

L'intimée soutient en substance que le chemin, qui longe la propriété de Mme [B] le long du canal au droit des parcelles section [Cadastre 13] et [Cadastre 10], est un chemin rural, que ce chemin dit « de Devès à le Gral » apparaît au classement des chemins ruraux de la commune après délibération du 17 novembre 1979, qu'il est ouvert à la circulation publique, qu'il dessert les deux propriétés au niveau de la fourche, mais également, les propriétés agricoles situées après la propriété de Mme [B], et au delà du passage à gué'; qu'une servitude peut être constituée sur un chemin rural, de sorte que le fait que le chemin litigieux constitue une servitude n'est pas incompatible avec sa nature de chemin rural'; que ce n'est pas parce que le chemin rural ne desservirait pas d'autres parcelles que celles appartenant à Madame [B] et Monsieur [H] qu'il ne serait pas un chemin rural dans la mesure où le chemin du Devès au Gral est affecté à l'usage du public comme voie de passage'; que l'acte de vente du 15 avril 1972 de Madame [B] n'indique pas que le chemin litigieux fait partie de la propriété de celle-ci'; que l'appelante n'a pas prescrit l'assiette du chemin, ni suivant une prescription trentenaire, ni par 10 ans.

Vu l'ordonnance de clôture du 15 septembre 2022.

MOTIFS

En suite du dépôt de son rapport par l'expert judiciaire, Mme [B], qui a acquis sa propriété en 1972 de [P], expose essentiellement que le chemin litigieux n'est pas identifié comme un chemin rural'vu notamment les mentions figurant sur la décision de classement du 17 novembre 1979, invoquée par la commune ; qu'elle est la propriétaire exclusive du chemin qui longe sa propriété le long du canal au droit des parcelles [Cadastre 13] et [Cadastre 10], qu'il n'est donc pas la propriété de la commune, qu'il ne se poursuit pas après sa propriété, qu'elle bénéficie d'un titre ainsi que de la prescription acquisitive trentenaire, ce à quoi la commune qui revendique sa qualification de chemin rural lui oppose qu'elle rapporte la preuve de ce qu'elle est propriétaire et se comporte comme tel depuis des décennies.

Aux termes de l'article L 161 ' 1du code rural et de la pêche maritime, les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes affectés à l'usage du public qui n'ont pas été classés en voie communale; ils font partie du domaine privé de la commune.

Selon l'article L 161 ' 2 du même code, l'affectation à l'usage du public est présumée par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale, la destination du chemin pouvant être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade ou de randonnée.

Selon l'article L 161 ' 3 tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé.

Il appartient donc à la commune pour bénéficier de la présomption d'affectation à l'usage du public, qu'exige la qualification de chemin rural, de démontrer, soit que le chemin est utilisé comme une voie de passage, ce qui implique une circulation ou un passage général, continu et actuel, soit qu'il y a des actes de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale, l'inscription du chemin sur le plan départemental des itinéraires de promenade ou randonnée, participant également de cette destination, les critères énoncés à ce texte étant alternatifs et non cumulatifs.

En ce qui concerne l'affectation du chemin à l'usage du public en ce qu'il sert de passage, le simple passage d'une catégorie très restreinte d'usagers ne caractérise pas l'affectation à l'usage du public ; en revanche, le chemin qui est conçu pour la circulation et la desserte de lieux publics et qui ainsi remplit une fonction de communication entre différentes voies ou lieux publics relève d'une destination à l'usage du public.

Lorsque cette affectation est reconnue, le chemin est donc présumé appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il se situe, la présomption pouvant néanmoins être renversée par la partie adverse par un titre ou la démonstration d'une possession acquisitive.

Au regard des observations ainsi préalablement posées, les éléments contenus au rapport d'expertise, qui a précisément étudié les actes, les plans et les lieux, permettent de retenir que le chemin en cause n'est utilisé que par Madame [B] dont il dessert la propriété et par Monsieur [H] qui l' utilise car sa propre propriété est enclavée par celle de Madame [B], l'expert ayant noté que les décisions de justice ayant octroyé à M [H] la servitude de passage grevant celui de l'auteur de Madame [B] au profit de son terrain correspond bien à l'emprise foncière du chemin litigieux et la cour observant que ces décisions supposaient la propriété de Mme [B] sur l'assiette de cette servitude.

Que le chemin n'est actuellement ouvert au public que dans la mesure où le portail posé par Madame [B] a été retiré et qu'il est difficile d'affirmer que la partie litigieuse est affectée à l'usage du public de manière générale et continue, l'expertise concluant : « la partie litigieuse ne dessert que la propriété de Madame [B] après l'avoir traversée et se poursuit plus au sud pour ne desservir au final que la propriété [H] et les parcelles limitrophes situées sur la commune de [Localité 17]'» et que la commune qui allègue le contraire, ne démontre pas la réalité d'un usage offert et fréquenté par un public autre que les parcelles privées citées par l'expert .

L'examen des plans permet également de retenir que ce chemin n'a pas de fonction de communication pour relier des lieux ou des voies publics puisqu'il ne dessert que des propriétés privées, et se termine en 'cul de sac''; en outre, que sur le plan cadastral napoléonien ancien, le chemin qui fait partie intégrante de la parcelle sur laquelle est édifiée la maison [B], est précisément «'fermé'» à son origine au nord et «'ouvert'» au sud au niveau de la maison [B].

La commune n'allègue, ni ne démontre que le chemin serait inscrit sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée.

En ce qui concerne la preuve d'actes réitérés de surveillance et de voirie de la part de la commune, celle-ci fait seulement état de ce qu'elle a réparé en 2013 une passerelle.

Il lui est opposé que cette passerelle ne concerne pas la portion litigieuse du chemin, mais se situe sur une voie ouverte à la circulation automobile dont la commune à la charge, ce qui est exact au vu des plans.

En outre, l'exigence du texte est celle d'actes réitérés de surveillance ou de voirie et cette seule intervention ne saurait y satisfaire.

Enfin, le moyen tiré de ce que le chemin «'du Devès à Le Gral'» apparaît au tableau de classement des voies rurales de la commune en suite d'une délibération du 17 novembre 1979 est inopérant dans la mesure où l'expert confirme qu'il s'agit du chemin pour arriver à la portion litigieuse en cause laquelle se trouve entre les points D et F de son plan'; que ce chemin est mentionné dans ledit tableau avec une longueur de 390 m, qu'en reportant ces 390m sur la carte et en suivant le tracé existant, il arrive précisément au point E se situant à l'entrée du domaine du Mas de Lamothe alors que la longueur entre ses points D et F est de 80m.

Il en résulte que ces métrés qui selon l'expert ne peuvent provenir d'une erreur matérielle lors du classement, porteraient à 470m la longueur du chemin rural tel que prétendu par la commune, ce qui vide de toute portée le moyen de la commune .

La seule circonstance que le chemin qui longe la parcelle de Madame [B] prolonge le chemin «'du Devès à Le Gral'» et que tous deux soient matérialisés de la même façon sur le cadastre ne suffit pas , non plus',à démontrer qu'il appartiendrait à la commune et serait un chemin rural.

Il en est de même du courrier de la préfecture de l' Ardèche en date du 30 juin 1999, les chemins y cités ne pouvant être situés par rapport au chemin en cause.

Le fait que Mme [B] se soit clôturée ne saurait être assimilé à la preuve de ce qu'il constituait un passage fréquenté dès lors que ce portail pouvait ne répondre qu'à une nécessité personnelle à l'usage et à la sécurité propres de Mme [B].

Enfin, aucun élément ne saurait être tiré par la commune du titre de propriété de Madame [B] de 1972, ses mentions relativement à la question du chemin y étant consignées en des termes dubitatifs': «'la propriété est bordée par un chemin qui paraît être communal'» , l'expert relèvant également que le rapport [D] produit par le conseil de la commune conclut'sur le mode conditionnel, dubitatif : «'ce chemin pourrait être rural ou d'exploitation'».

En revanche, l'acte mentionne, au titre de la désignation, qu'il est vendu « une maison à usage d'habitation avec construction à proximité à usage du hangar et terrain attenant et canal d'amenée d'eau, le tout situé en bordure de la rivière La Boulogne »'; il ne désigne le confront Est que par la mention « [G] » en précisant que les mentions de cette désignation résultent d'un document d'arpentage déposé au bureau des hypothèques, document qui figure précisément le chemin litigieux ainsi que le canal d'amenée d'eau le longeant sur le côté Est de la parcelle [Cadastre 6] en spécifiant d'une part, qu'il est cadastré [Cadastre 8], d'autre part, qu'il constitue avec les parcelles [Cadastre 4],[Cadastre 5],[Cadastre 6],[Cadastre 9] et [Cadastre 10] les références cadastrales du bien vendu sans qu'il ne soit stipulé ni établi que cette référence ne concernerait qu'une partie du canal longeant la propriété.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a qualifié le chemin de chemin rural, la cour retenant que la commune ne dispose d'aucun droit sur le chemin figurant entre les points D et F du plan de l'expert judiciaire, page 11 de son rapport, et qu'elle doit être déboutée de sa demande de ce chef.

Madame [B] sollicite par ailleurs l'infirmation du jugement en ce qui concerne sa demande de dommages et intérêts, faisant état de ce que la commune a violé son droit de propriété en procédant, sans autorisation, à la dépose de la barrière qui servait à la protéger et à la clore.

La commune ne conteste pas la réalité de cette initiative qui a privé Mme [B] d'un élément mis en place pour préserver sa sécurité sur un chemin sur lequel la commune n'a donc pas de droit .

Il en résulte effectivement un préjudice pour Mme [B] et la commune sera, en conséquence, condamnée à lui verser de ce chef la somme de 1000 € .

La commune sera également condamnée à procéder au rétablissement du portail qu'elle a déposé dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision sans qu'il y ait lieu, à ce stade, d'ordonner une astreinte.

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme le jugement et statuant à nouveau':

Dit que la commune de [Localité 18] ne dispose d'aucun droit sur le chemin figurant entre les points D et F du plan de l'expert judiciaire, page 11 de son rapport, et rejette sa demande tendant à le voir qualifier de chemin rural,

Condamne la commune de [Localité 18] à remettre en place le portail qu'elle a déposé dans le délai de deux mois suivant la signification du présent jugement

Condamne la commune de [Localité 18] à verser à titre de dommages et intérêts à Madame [B] la somme de 1000 €,

Condamne la commune de [Localité 18] à verser, par application de l'article 700 du code de procédure civile, à Madame [B], la somme de 2000 €,

Rejette les demandes plus amples de la commune des parties,

Condamne la commune de [Localité 18] aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel, y compris les frais de l'expertise judiciaire.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 22/00513
Date de la décision : 01/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-01;22.00513 ?
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