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24/11/2022 | FRANCE | N°21/00941

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 24 novembre 2022, 21/00941


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 21/00941 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H7BS



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

05 janvier 2021

RG:18/02406



[S]



C/



[F]

Société CAPMA-CAPMI





































Grosse délivrée

le

à S

CP Bastias

Me Pomiès Richaud

Selarl Rochelemagne













COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 05 Janvier 2021, N°18/02406





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00941 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H7BS

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

05 janvier 2021

RG:18/02406

[S]

C/

[F]

Société CAPMA-CAPMI

Grosse délivrée

le

à SCP Bastias

Me Pomiès Richaud

Selarl Rochelemagne

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 05 Janvier 2021, N°18/02406

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Novembre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

Monsieur [M] [S]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 13] ([Localité 13])

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représenté par Me Laurence BASTIAS de la SCP BASTIAS-BALAZARD, Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représenté par Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, Plaidant, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMÉES :

Madame [R] [F]

née le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 11] ([Localité 9])

[Adresse 14]

[Adresse 12]

[Localité 10]

Représentée par Me Carine REDARES de la SELARL RS AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Société CAPMA-CAPMI société d'assurances mutuelle sur la vie à cotisations fixes identifiée sous le n° SIREN 775 670 482, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Florence ROCHELEMAGNE de la SELARL ROCHELEMAGNE-GREGORI-HUC.BEAUCHAMPS, Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Isabelle THOLLON MARTIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 01 Septembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière le 24 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE :

Vu le jugement rendu le 5 janvier 2021 par le tribunal judiciaire d'Avignon, ayant statué ainsi qu'il suit :

' rejette les fins de non-recevoir soulevées par la société CAPMA et CAPMI et déclare l'action de Monsieur [S] recevable,

' dit que Monsieur [S] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un trouble mental des époux [K] au moment de l'acte,

' dit que l'article L 116-4 du code de l'action sociale et des familles ne peut recevoir application,

' rejette les demandes principales et subsidiaires de Monsieur [S],

' condamne reconventionnellement Monsieur [S] à payer à Madame [F] la somme de 500 € pour procédure abusive, la somme de 1500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens.

Vu l'appel interjeté contre cette décision par Monsieur [S] le 8 mars 2021.

Vu les conclusions de Monsieur [S] en date du 4 juin 2021, demandant de :

' réformer le jugement sauf en ce qu'il a rejeté les fins de non recevoir,

' en conséquence, dire nul le rachat du contrat d'assurance-vie par les époux [K] [S], dire que Monsieur [M] [S] est le seul bénéficiaire du contrat,

' condamner solidairement les requis à lui payer la somme de 55'476,40€,

' à titre subsidiaire, dire que l'assureur a commis une faute en manquant à son devoir de conseil et de mise en garde en procédant au rachat de leur contrat alors que les époux [K] étaient en état de faiblesse et de vulnérabilité,

' dire que Madame [F] a commis une faute en abusant de l'état de faiblesse des époux [K] [S] pour capter par la fraude les sommes au titre du contrat d'assurance-vie, qu'elle a commis une faute en recevant illégalement des sommes d'argent de la part du couple auprès duquel elle était en service, que ces fautes ont causé un préjudice à Monsieur [S] qui a perdu le bénéfice du contrat d'assurance-vie,

' en conséquence, condamner solidairement les requis à lui payer la somme de 55'476,40 € à titre de dommages et intérêts,

' dans tous les cas, condamner solidairement les requis à lui payer la somme de 5000 € au titre de son préjudice moral, la somme de 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

Vu les conclusions de la société CAPMA et CAPMI en date du 2 septembre 2021, demandant de :

' à titre principal, accueillir la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité pour agir de Monsieur [S],

' rejeter la demande de Monsieur [S] tendant à l'annulation de sa demande de rachat,

' confirmer le jugement et y ajoutant,

' condamner Monsieur [S] à lui payer la somme de 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les conclusions de Madame [F] en date du 22 juillet 2021, demandant de :

' confirmer le jugement,

' condamner Monsieur [S] à lui payer la somme de 3000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Vu l'ordonnance de clôture du 1er septembre 2022 .

Motifs

Monsieur et Madame [K] avaient souscrit, les 7 juin 1991 et 25 mars 1992, auprès de la société CAPMA et CAPMI deux contrats d'assurance-vie.

Le contrat numéro 21 00 77 était ouvert avec un dépôt de 641,96 euros et il contenait une somme de 1060,89 € le 12 mai 2013.

Le contrat numéro 21 28 54 était ouvert avec une somme de 7931,92 euros et il contenait, à cette même date, une somme de 55'476,40 €.

Sur la demande de rachat formulée par Monsieur et Madame [K] le 12 mai 2013, la société d'assurances a effectué le 25 juin 2013 le virement de ces sommes sur le compte bancaire de Monsieur et Madame [K].

Madame [K] est décédée le [Date décès 4] 2014 et Monsieur [K] est décédé le [Date décès 2] 2017.

Monsieur [M] [S], neveu des souscripteurs, avait été désigné bénéficiaire desdits contrats.

Monsieur [S], prétendant en substance que les époux [K] ne disposaient pas de toutes leurs facultés mentales et qu'ils étaient victime de la part de leur assureur d'une faute professionnelle et de la part de Madame [F] d'un abus de faiblesse, les a fait assigner dans le cadre de la présente instance, leur réclamant, sur divers fondements, le montant des sommes ainsi libérées .

Le jugement déféré a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité en considérant que Monsieur [S] avait la qualité d'héritier, que par ailleurs, il avait introduit avant le décès de Monsieur [K] du souscripteur une action aux fins d'ouverture d'une mesure de protection et qu'il pouvait, de toute façon, se prévaloir des conséquences d'un manquement contractuel sur le fondement de la responsabilité délictuelle dès lors que ledit manquement invoqué lui avait causé un dommage.

Sur le fond et le moyen tiré de l'état insanité d'esprit des souscripteurs, les époux [K], le tribunal a considéré que la preuve n'en était pas rapportée au vu des certificats médicaux produits et de la chronologie des actes ; que par ailleurs, il n'était pas établi que Madame [F] avait bénéficié des sommes provenant du rachat des contrats d'assurance-vie et qu'elle n'était pas non plus soumise à une incapacité de recevoir.

Enfin, ce qui concerne le manquement de la société d'assurance à son obligation de conseil, société à laquelle il est reproché d'avoir procédé à la demande de rachat du contrat d'assurance-vie sans s'assurer du consentement libre de ses clients, âgés, il a été jugé que le seul fait que les souscripteurs soient âgés ne suffisaient pas à établir qu'ils étaient dans un état de faiblesse et dans l'incapacité de consentir en connaissance de cause au rachat ; également qu'il n'apparaissait pas qu'au vu des demandes formulées, la société était tenue de procéder à des vérifications plus poussées pour s'assurer du consentement des époux [K].

Au soutien de son recours, Monsieur [S] fait essentiellement valoir qu'il est recevable à agir, ayant qualité et intérêt ; que lors de la demande de rachat des contrats d'assurance-vie, les époux [K] ne disposaient pas de toutes leurs facultés mentales ; que Monsieur [K] faisait l'objet de lourds traitements médicamenteux fortement sédatifs, que Madame [Z], malade depuis des années, était en fin de vie puisqu'elle décédait le [Date décès 4] 2014 ; que les certificats médicaux démontrent la réalité des troubles de comportement dès 2012 pour Monsieur [K] (syndrome démentiel) ainsi que l'altération de ses facultés mentales le 21 février 2014, Monsieur [K] ayant même été hospitalisé le 24 janvier 2013 et ayant été placé sous sauvegarde de justice le 4 mars 2014.

Il souligne que l'examen des deux demandes écrites du couple pour libérer les fonds révèle une fragilité dans l'écriture et les signatures, ces écrits dénotant ainsi d'un état de faiblesse compte tenu de la fébrilité de cette écriture et de l'absence de signature franche, différente de celles figurant sur les cartes d'identité, ce qui aurait dû alerter l'assureur ; que l'assureur aurait donc dû réagir en comparant les lettres avec les cartes d'identité et qu'il aurait dû se prémunir de la certitude du consentement d'un couple qu'il savait âgé et dont l'écriture et signature révélaient la fragilité, même s'il est prétendu que l'assureur n'avait pas connaissance de l'état de santé des assurés.

Il fait également état de la faute de Madame [F] qui avait obtenu le 28 novembre 2012 et le 1er décembre 2012 les procurations du couple [K] et qui obtenait également la rédaction d'un testament en sa faveur en février 2014. Il souligne que dès janvier 2013, de nombreuses sommes ont été créditées sur les comptes du couple ; que d'importants retraits ont eu lieu au second semestre de l'année 2013 alors que le couple n'était plus en état de se déplacer et que Madame [F] a ouvert un compte épargne dans le temps où Monsieur [K] se faisait verser l'argent de son assurance-vie; qu'elle affirme que ces sommes correspondraient à la perception de loyers que cependant elle ne prouve pas ; qu'en outre, elle ne pouvait recevoir des sommes d'argent de personnes auprès desquelles elle était en service .

La société CAPMA et CAPMI oppose, en substance, le défaut de qualité à agir au visa des dispositions des articles 414-1 et 414-2 du Code civil en faisant valoir que Monsieur [S] n'a pas la qualité d'héritier de Monsieur et Madame [K], l'acte de notoriété stipulant que M [K] n'a laissé 'ni enfants, ni descendants d'eux, ni ascendants dans les lignes paternelle ou maternelle, ni frères, ni s'urs, ni descendants d'eux, ni conjoint survivant'.

Elle rappelle les conditions posées par l'article 414- 2 du Code civil et fait valoir que la demande de rachat porte une signature conforme aux pièces qu'elle détenait ; que la preuve de l'altération des facultés mentales qui incombe à Monsieur [S] n'est pas rapportée ; que les constatations médicales du 21 février 2014 qui ne sont pas contemporaines à la demande de rachat n'établissent pas l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte et qu'aucun document n'établit, non plus, en ce qui concerne Madame [K], une altération de ses facultés intellectuelles à cette date.

En ce qui concerne le manquement à son obligation de conseil, elle expose qu'elle n'a été informée du placement sous tutelle de Monsieur [K] que quelques 18 mois après la demande de rachat et qu'il ne peut lui être reproché d'avoir agi avec légèreté au regard de l'âge des souscripteurs ; que l'éventuelle appréhension de ces sommes par Madame [F] est étrangère à la société.

Madame [F] valoir que Monsieur [S] ne rapporte pas la preuve de l'altération des facultés mentales de Monsieur et Madame [K] ; que par ailleurs, il n'établit pas l'existence d'une faute à son encontre ; qu'en toute hypothèse, elle n'était pas au service des époux [K] mais s'était simplement liée d'amitié avec eux ainsi qu'en témoignent les attestations versées aux débats ; qu'elle n'a nullement bénéficié du rachat des assurances-vie effectué par Monsieur et Madame [K] et que la preuve n'en est pas rapportée, la seule concomitance entre l'ouverture de son compte épargne et le versement de l'assurance-vie de Monsieur [K] ne pouvant constituer cette démonstration .

Sur le défaut de qualité à agir :

Ce moyen est développé par la société Capma et Capmi au regard des dispositions de l'article 414 -1 et de l'article 414-2 du Code civil sur lesquels Monsieur [S] fonde notamment son action et qui prévoient que pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit, que celui qui agit en nullité pour cette cause doit prouver l'existence du trouble mental au moment de l'acte,;que de son vivant, l'action en nullité n'appartient qu'à l'intéressé et qu'après sa mort, les actes faits par lui autres que la donation entre vifs et le testament ne peuvent être attaqués par ses héritiers que dans le cas y déterminés.

La société Capma Capmi conteste la qualité à agir de M [S] en faisant état de ce qu' au vu de l'acte de notoriété du 25 avril 2019 établi suite du décès de Monsieur [K], veuf de Madame [K], née [S], il n'est pas héritier, ledit acte mentionnant au titre de la dévolution successorale que le défunt n'a laissé ni enfants, ni descendants d'eux, ni ascendants, ni frères, ni s'urs, ni descendants d'eux, ni conjoint survivant.

Il sera cependant considéré que si la société d'assurance conteste la qualité d'héritier de Monsieur [S], en revanche, elle ne conteste pas le fait qu'il soit le neveu de Madame [K], ce qu'au demeurant le notaire avait consigné en recevant l'acte de donation du 17 juillet 2009 de Monsieur et Madame [K] à Monsieur [S] relativement à la pleine propriété d'un immeuble .

Il en résulte, quand bien même l'acte de notoriété ne le mentionne pas, que M [S] a bien la qualité d'héritier que n'exclut pas la désignation d'un légataire universel.

Les pièces du dossier démontrent par ailleurs qu'une action avait été introduite avant le décès de Monsieur [K] aux fins d'ouverture d'une tutelle.

Il est ainsi satisfait aux exigences légales sus citées.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré M [S] recevable.

Sur le fond :

Les demandes de Monsieur [S] sont dirigées, d'une part, contre la société d'assurances et d'autre part, contre Madame [F].

Elles sont développées au visa des articles 1129 et suivants du Code civil, 414-1 du Code civil, 1240 et suivants du Code civil, L 116- 4 du code de l'action sociale et des familles.

Sur les demandes formulées contre la société d'assurance :

A titre principal, elles tendent à la nullité de la demande de rachat du contrat d'assurance-vie et à titre subsidiaire, elles sont fondées sur le manquement au devoir de conseil et de mise en garde.

Au titre de la nullité, Monsieur [S] invoque à la fois les dispositions des articles 414-1et suivants du Code Civil et également, le moyen tiré d'un abus de faiblesse constitutif d'un dol à l'origine d'un consentement qui ne serait pas libre et éclairé ou qui aurait été extorqué.

Seul, le texte de l' article 414-1 sera cependant considéré, dès lors que l'article 1129, issu de l'ordonnance du 10 février 2016, n'est pas applicable à l'espèce et que l'article 414-1 également visé par Monsieur [S] rappelle, en toute hypothèse, l'exigence y énoncée que pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit.

En droit et au visa de ce texte, il appartient donc à celui qui agit en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte.

La demande de rachat a, d'abord, été formulée le 10 avril 2013, mais elle ne portait alors que la signature de Monsieur [K].

Elle a donc été renvoyée par la société d'assurances, s'agissant des contrats signés en co adhésion.

Une seconde demande, signée par les deux époux, a, par suite, été formulée le 12 mai 2013 et le virement des sommes a été fait le 26 juin 2013 sur le compte bancaire ouvert au nom de Monsieur et Madame [K].

La question qui se pose est donc de savoir si la preuve est rapportée par M [S] de l'existence d'un trouble mental au moment de la demande de rachat.

Il sera à cet égard retenu, au vu des pièces versées, que les signatures y portées sont conformes à celles en possession de l'assureur et figurant sur la carte d'identité des souscripteurs, et qu'en ce qui concerne la signature de Monsieur [K] elle est également conforme à un document à visée fiscale du 8 janvier 2014 ; que de surcroît, le médecin de Monsieur [K] atteste que son écriture est difficile à cause des déformations neuro rhumatismales de ses mains, ce qui explique le tracé incertain desdires signatures.

Que les documents médicaux produits relativement à la situation de Monsieur et Madame [K] ne révèlent par ailleurs pas l'existence pas d'une altération de leurs facultés mentales au jour de la demande de rachat, aucun des certificats versés n'étant contemporain de l'acte en cause et la démarche d'ouverture de tutelle pour M [K] n'ayant été faite qu'à partir du mois de février 2014 au vu d'un certificat médical du mois de février 2014, soit entre 9 et 10 mois après les demandes de rachat .

Que les seules prescriptions médicamenteuses concernant également M [K], qui consistent dans des neuroleptiques et anxiolytiques, ainsi que la circonstance qu'il a été noté une dépendance physique au déplacement et une dépendance psychique ne permettent pas plus de caractériser l'altération de ses facultés cognitives et que le document médical du 26 octobre 2012, qui évoque cette dépendance de Monsieur [K] ainsi qu'une cécité de l'oeil gauche, avec des troubles du comportement (de type agressivité, repli sur soi, ou refus alimentaire) est également impropre à prouver cette altération des facultés mentales requise au moment de l'acte critiqué, le médecin y consignant au demeurant que ces derniers sont alors en cours d'évolution favorable.

Enfin, le décès de Madame [K] le [Date décès 4] 2014 ne démontre ni qu'au jour de l'acte en cause, elle n'avait pas un consentement libre et éclairé, ni qu'elle n'était pas saine d'esprit, son seul âge ne pouvant constituer une telle situation.

Aucun des autres documents médicaux produits par Monsieur [S] ne venant constituer la preuve de l'existence d'un trouble mental au moment de la demande de rachat du contrat d'assurance-vie, la demande de nullité fondée, tant sur l'article 414-1 du Code Civil que sur un dol résultant d'un abus de faiblesse qui n'est, dans ces conditions, pas plus établi, ne peut qu'être rejetée ainsi que celles tendant à voir dire qu'il est le seul bénéficiaire du contrat d'assurance-vie et qu'il devrait lui être payé la somme de 55'476,40 €.

En ce qui concerne la mise en 'uvre de la responsabilité de l'assureur pour manquement à son obligation de conseil et de mise en garde, il convient de relever que la société d'assurances a, dans un premier temps, remarqué que la demande de rachat n'avait été signée que par seulement l'un des époux ; qu'elle leur a également demandé la communication d'une copie de la carte d'identité de Madame [K] pour vérification de la signature apposée ; qu'elle a versé les fonds sur un compte commun de Monsieur et Madame [K] suivant le relevé bancaire qui lui avait été communiqué ; qu'elle n'a été informée du placement sous tutelle que bien postérieurement à la demande ; qu'il n'est pas démontré, alors que tous les échanges ont eu lieu par correspondance, qu'elle aurait pu être avertie d'un état de faiblesse ou de vulnérabilité qui au demeurant n'est pas caractérisé; que les éléments en sa possession n'étaient, dans ces conditions, pas susceptibles de l'alerter d'un souci de ce point de vue ou de la nécessité de vérifications plus amples ou d'une mise en garde particulière, le seul grand âge des assurés ne pouvant constituer cette circonstance ; que la bonne foi se présume et que le paiement fait de bonne foi à celui qui est en possession de la créance est valable.

La société d'assurance s'est donc valablement libérée sans commettre de faute.

Sur les demandes formées contre Madame [F] :

Ces demandes sont fondées, d'une part, sur la faute de Mme [F] qui aurait abusé de l'état de faiblesse de M et Mme [K], d'autre part, sur une incapacité à recevoir.

La cour reprendra, de ce chef, ses précédents développements sur l'absence de démonstration par Monsieur [S] de ce que les époux [K] se seraient trouvés dans un état de vulnérabilité ou de faiblesse ou d'insanité mentale au moment de leur demande de libération des fonds sur les contrats d'assurance-vie, en considérant, en outre, que Monsieur [S], qui a déposé plainte auprès de la police le 17 août 2018 du chef d'abus frauduleux de l'ignorance de la faiblesse d'une personne vulnérable pour la conduire à un acte préjudiciable, n'apporte aucun élément sur la suite qui lui a été réservée.

Il sera par ailleurs ajouté :

Que la circonstance que Madame [F] a obtenu la procuration sur leur compte à la fin de l'année 2012, celle tirée de ce que le compte du couple a été crédité d'importantes sommes en janvier 2013 ou encore, que Monsieur [K] ait rédigé un testament en sa faveur en 2014 alors qu'il était placé sous sauvegarde de justice ne suffisent pas à établir qu'elle aurait profité d'une telle situation au moment de la demande de rachat.

Que la concomitance dans le temps de l'ouverture d'un compte épargne par Madame [F] et de la réception des sommes de l'assurance-vie par Monsieur et Madame [K] ne peut, non plus, démontrer qu'il s'agirait d'une man'uvre de sa part pour recevoir les fonds de l'assurance-vie.

Que la remise du chèque invoqué de 3000 € remontant au mois de janvier 2013 est inopérante, car antérieure aux démarches faites sur le déblocage de l'assurance-vie, étant observé que Madame [F] ne s'en est pas cachée et qu'elle fait état d'un cadeau d'usage, possible au regard des ressources du couple [K] et des circonstances de la remise de ce chèque en début d'année 2013 ( 12 janvier 2013).

Que Monsieur [S] ne peut par ailleurs lui reprocher de ne pas justifier de l'origine des fonds qui ont transité sur son propre compte entre le mois d'avril 2013 et le mois de décembre 2013 alors qu'il ne produit pas d'éléments sur l'existence de virements réalisés à partir du compte [K] au bénéfice du compte de Madame [F] dont il allègue ainsi vainement qu'il aurait reçu de façon suspecte des sommes importantes .

Que Monsieur [S] ne saurait se prévaloir des bordereaux de retraits d'espèces datés sur le compte des époux [K] d'août à novembre 2013, aucun élément ne permettant de les imputer à Madame [F].

Qu'enfin, il n'y a pas, non plus, de man'uvres susceptibles d'être à l'origine d'un dol démontré, ni d'actes de violence de nature à constituer un vice susceptible d'avoir entaché le consentement de Monsieur et Madame [K] ou d'être à l'origine, ainsi que Monsieur [S] l'allègue, à l'origine d'un consentement « extorqué » .

Sur le fondement tiré d'une incapacité de Mme [F] à recevoir, il n'est démontré ni que Madame [F] serait susceptible d'être concernée par les dispositions de l'article L 116-4 du code de l'action familiale des familles, ni qu'elle puisse être considérée comme ayant été employée au service de Monsieur et Madame [K] .

Monsieur [M] [S] sera donc débouté des fins de son recours et le jugement sera confirmé, sauf en ce qu'il a condamné M [S] en dommages et intérêts pour procédure abusive .

Cette demande sera, en effet, rejetée dès lors que l'action en justice est un droit qui ne dégénère en abus que lorsqu'est prouvée une intention malveillante ou une erreur équipollente au dol et que tel n'est pas le cas en l'espèce.

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Rejette les demandes de Monsieur [M] [S] et confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné M [S] en dommages et intérêts pour procédure abusive et statuant à nouveau de ce chef

Rejette toute demande,

y ajoutant :

Condamne Monsieur [M] [S] à verser, d'une part, à la société CAPMA et CAPMI la somme de 1800 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et d'autre part, la même somme de 1800 €, sur le même fondement, à Madame [F],

Condamne Monsieur [M] [S] aux dépens d'appel avec distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Rochelemagne.

Arrêt signé par la présidente et la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/00941
Date de la décision : 24/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-24;21.00941 ?
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