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20/10/2022 | FRANCE | N°21/02398

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 20 octobre 2022, 21/02398


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 21/02398 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICZI



AD



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

08 avril 2021 RG :19-000123



[U]



C/



[Z]



















Grosse délivrée

le

à Selarl Mazarian

Me Vinstock









COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE C

IVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de carpentras en date du 08 Avril 2021, N°19-000123



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, a entendu les plaid...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02398 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICZI

AD

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

08 avril 2021 RG :19-000123

[U]

C/

[Z]

Grosse délivrée

le

à Selarl Mazarian

Me Vinstock

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de carpentras en date du 08 Avril 2021, N°19-000123

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre

Madame Laure MALLET, Conseillère

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Octobre 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Madame [P] [U]

née le 03 Mars 1970 à [Localité 13]

[Adresse 7]

[Localité 10]

Représentée par Me Christian MAZARIAN de la SELARL MAZARIAN-ROURA-PAOLINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

INTIMÉE :

Madame [B] [Z]

née le 21 Avril 1960 à [Localité 12]

[Adresse 8]

[Localité 9]

Représentée par Me Isabelle VINSTOCK, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 30 Mai 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière le 20 Octobre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Carpentras le 8 avril 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

' entérine les conclusions du rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [X] en date du 24 septembre 2020 et fixe, en conséquence, les limites séparatives des parcelles de Madame [U] et de Madame [Z] conformément au plan de bornage annexé à ce rapport,

' constate l'absence de mitoyenneté du mur séparatif,

' condamne, en conséquence, Madame [U] à supprimer tout appui sur ce mur sous une astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai de deux mois courant à compter de la signification de la décision et pendant une période de trois mois, au-delà de laquelle il sera à nouveau fait droit en tant que de besoin par la juridiction qui se réserve le droit de liquider l'astreinte,

' condamne Madame [U] à réduire la taille de ses cyprès à la hauteur maximale de 2 m et à élaguer en tant que de besoin les branches empiétant sur la propriété de Madame [Z] sous une astreinte de 50 € par jour de retard dans les mêmes conditions que ci-dessus,

' condamne Madame [U] à payer à Madame [Z] la somme de 750 € pour le trouble de jouissance, celle de 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamne chacune des parties à supporter par moitié les dépens,

' rappelle que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Vu l'appel interjeté le 23 juin 2021 par Madame [U] .

Vu les conclusions de l'appelante en date du 16 septembre 2021, demandant de :

' infirmer le jugement,

' rejeter les demandes de Madame [Z] tendant à voir ramener sa haie de cyprès à une hauteur inférieure à 2 m,

' dire l'action sur le trouble anormal de voisinage prescrite,

' à défaut, rejeter sa demande de dommages et intérêts,

' juger le mur de clôture mitoyen et en conséquence, juger que le bornage du point A au point B aura pour limite le milieu du mur mitoyen et qu'elle pourra s'y accrocher pour clôturer sa propriété,

' condamner Madame [Z] à payer la somme de 5000 € en l'état de l'atteinte récurrente à sa propriété,

' la condamner à payer la somme de 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise.

Vu les conclusions de Madame [Z], en date du 3 avril 2022, demandant de :

' confirmer le jugement qui a homologué le procès-verbal bornage sur les limites de propriété, qui a jugé que le mur sud lui appartient et qui a ordonné à Madame [U] de supprimer tout appui sur ce mur sous astreinte,

' confirmer le jugement sur la question de la haie de cyprès,

' à titre subsidiaire, si l'action était prescrite, juger que l'appelante sera tenue de réduire la hauteur de sa haie à 5 m maximum sous la même astreinte que celle du jugement, qu'elle devra l'entretenir à cette hauteur et de façon à ce que les branches ne dépassent pas sur sa propriété,

' confirmer le jugement sur les dommages et intérêts alloués au titre du trouble anormal de voisinage et à titre subsidiaire, prononcer la même condamnation sur le fondement de l'article 1242-2 du Code civil,

' rejeter toutes les demandes de l'appelante,

' la condamner à 2500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

' partager par moitié les dépens de première instance y compris l'expertise,

' condamner l'appelante aux dépens d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture du 30 mai 2022.

Motifs

Sur la question de la mitoyenneté ou non mitoyenneté du mur :

Il n'est pas contesté que les deux propriétés en cause sont contiguës.

La propriété [Z] est constituée des parcelles A [Cadastre 4] et [Cadastre 3]; la propriété [U] est constituée des parcelles A [Cadastre 2] et [Cadastre 5].

Les conclusions de l'expert qui l'ont amené, après description et arpentage des terrains concernés, confrontation des titres, du cadastre et de la possession, à un bornage sur le nu extérieur sud du mur séparatif n'ont été critiquées par aucun document ou argumentaire technique étayé de Madame [U] qui par ailleurs n'a pas sollicité de contre expertise.

Il en résulte que le mur est sur la propriété de Madame [Z].

Devant la cour, la contestation par l'appelante de cette délimitation consiste notamment à faire état de ce qu'elle a en partie payé la surélévation du mur.

L'attestation qu'elle produit à cet égard n'est cependant pas suffisante pour démontrer sa participation financière aux travaux dès lors d'une part, qu'elle n'est pas établie dans les formes du Code civil, d'autre part, qu'elle n'est corroborée par aucun document, notamment, comptable, de nature à attester la réalité d'un quelconque paiement par Madame [U] alors que qu'elle émane d'un entrepreneur dont Madame [Z] affirme qu'il s'agit d'un cousin de Madame [U] .

L'appelante invoque également une acquisition de la mitoyenneté par prescription ainsi que les présomptions légales et les présomptions du fait de l'homme, faisant état, au titre des présomptions légales, des dispositions des articles 666 et 653 du Code civil.

Les présomptions y édictées n'ont cependant qu'une valeur énonciative et il appartient au juge du fond d'en apprécier souverainement la valeur.

À cet égard, il n'est pas contesté que le mur litigieux a été édifié en 1984 par M [Z], seul et qu'il n'a pas fait l'objet de contestations entre 1985 et 2015, date de début de ce litige, étant de ce chef considéré que Mme [Z] l'a initié en se plaignant des désagréments causés par la haie de cyprès de Madame [U] à laquelle elle reproche sa hauteur supérieure à 2 m avec une implantation à une distance inférieure à 2 m par rapport à la limite séparative qu'elle situe, pour sa part, au pied du mur et que Madame [U] lui a alors opposé que la limite séparative se situant au milieu du mur, aucun grief ne pouvait lui, être fait quant à la haie de cyprès.

Le plan d'arpentage de 1984 établi par Monsieur [F] n'a, pour sa part, pas été établi relativement à la limite en cause, l'expert notant que ' ce document a divisé les parcelles d'origine section A [Cadastre 6],[Cadastre 11] et [Cadastre 1] situées au nord de la limite litigieuse, sans concerner celle-ci'et qu'il n'est pas utile à sa définition.

Par ailleurs, le plan de morcellement ne possède pas les caractéristiques d'un relevé régulier selon l'expert et le plan établi en 1974 n'a jamais donné lieu à un bornage, n'ayant été établi qu''en conformité d'un piquetage effectué sur le terrain'.

Il en résulte que c'est à bon droit que l'expert judiciaire, après s'être déplacé sur les lieux, avoir recueilli les éléments sur la date de construction du mur , les conditions de sa surélévation et les rapports des deux voisins à ce sujet, a pu conclure que ce mur se trouvait être privatif à la propriété [Z], dépourvu de mitoyenneté, ces éléments permettant de combattre les présomptions purement énonciatives des textes susvisés du Code civil.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a fixé la limite séparative des deux propriétés conformément au plan de bornage annexé au rapport de l'expert judiciaire, a constaté l'absence de mitoyenneté du mur et a condamné, en conséquence, Madame [U] à supprimer toute appui sur ce mur dans les conditions de l'astreinte y prononcée.

Sur les conséquences de la non mitoyenneté en ce qui concerne les demandes relatives à la haie de cyprès :

Il résulte des constatations circonstanciées de l'expert que la haie de cyprès se situe à 1,85 m du mur et que sa hauteur est supérieure à 2 m.

Aucun autre élément, malgré les allégations contraires de l'appelante, ne vient démontrer que la haie respecte pour son implantation les prescriptions légales compte tenu de sa hauteur.

Il en résulte la violation des articles 671 et suivants du Code civil et le bien-fondé de la demande de Madame [Z], au regard de ces textes, à voir ordonner la réduction de cette haie à la hauteur maximale de 2 m, ainsi qu'à élaguer les branches empiétant sur sa propriété .

L'appelante lui oppose cependant la prescription acquisitive en faisant valoir que cette haie existait dès 1983 et même en 1950 sur le site géo portail. Elle ajoute que ces arbres ont une croissance rapide de 4 ou 5 m au bout de 10 ans et que dès lors, ils ne peuvent qu'avoir dépassé 2 m en 1983.

À cet égard la cour relève :

- d'une part, et alors que Madame [U] avait déclaré, au cours de l'expertise du cabinet Amarine organisée par les assureurs, que la haie de cyprès avait été plantée en 1967, qu'il n'est pas démontré que la haie telle qu'elle existe actuellement existait dans ces mêmes conditions en 1950 ou même en 1983 et 1984,

- d'autre part, que le point de départ de la prescription trentenaire se situe à la date à laquelle l'arbre a dépassé la hauteur permise,

- de troisième part, qu'aucun élément n'est versé ni de ce chef, ni relativement à son maintien pendant une telle durée à une hauteur précisément évaluée, supérieure à 2 mètres; que l'expert écrit (page 46 de son rapport) que 'la haie était déjà en place en 1984, mais qu'il 'est impossible de définir de façon précise' sa hauteur à cette époque; que d'ailleurs, Mme [Z] a affirmé à l'expert judiciaire que pendant un temps, il y avait eu un accord entre les parties sur la taille desdits cyprès, de sorte qu'il n'est pas démontré que la haie en cause est restée à une hauteur supérieure à 2m de façon constante depuis 30 années à la date de l'assignation introductive du présent litige.

Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a ordonné à Madame [U] de réduire la taille de ses cyprès dans les conditions y prononcées avec l'astreinte y définie.

Sur le trouble anormal de voisinage :

Nul ne peut causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage.

En invoquant ce fondement, Madame [Z] sollicite la condamnation indemnitaire de l'appelante au titre du trouble anormal consistant dans une perte d'ensoleillement subie dans sa propriété qu'elle impute à la présence de la haie de cyprès.

L'action de ce chef, qui est soumise à la prescription de 5 ans est recevable, dès lors que Mme [Z] se plaint d'un trouble actuel qui résulte des constatations objectives et motivées de l'expert, appuyées sur une étude notamment de la course du soleil, ayant retenu qu'il y avait une perte d'ensoleillement réelle, évaluée pour l'ensemble de la terrasse en deux points différents, l'un à 25 % de l'ensoleillement annuel et l'autre à 17 %, soit une moyenne de 21% et pour la façade à 17%, cette perte résultant de l'importance des arbres situés sur le terrain de Madame [U].

Le moyen tiré du caractère pré-existant de la situation est vainement invoqué dès lors qu'il n'est pas établi qu' au moment de l'achat de la propriété par Monsieur et Madame [Z], la situation dont ils se plaignent à ce jour pré-existait.

L'expert relève par ailleurs exactement que la présence d'un mûrier devant la terrasse de Mme [Z] n'est pas préjuciciable à l'ensolleillement l'hiver car l'arbre perd ses feuilles.

Le moyen également invoqué quant à la présence d'un store est également inopérant dès lors que le store est, selon l'expert, rétractable et qu'il n'est pas établi qu'il en soit usé l'hiver dans des conditions de nature à créer ou aggraver la perte d'ensoleillement.

Enfin , le moyen tiré de la configuration du mur de façade dont il est avancé par Mme [U] dit qu'il n'a pas de fenêtres, est vain, la perte d'ensoleillement étant, en elle-même, de nature à créer de l'humidité pour la façade, ce qui est préjudiciable à l'immeuble, peu important qu'elle porte, ou non, des ouvertures.

Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Vu les articles 696 du code de procédure civile et la succombance de Madame [U].

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Rejette toutes les demandes de Madame [U] et confirme le jugement en toutes ses dispositions,

y ajoutant :

Condamne Madame [U] à payer, par application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1800 euros à Mme [Z],

Condamne Madame [U] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

la greffière, la présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/02398
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;21.02398 ?
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