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13/10/2022 | FRANCE | N°21/01920

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 13 octobre 2022, 21/01920


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

























ARRÊT N°



N° RG 21/01920 -

N° Portalis DBVH-V-B7F-IBRH



MPF - NR



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

01 mars 2021

RG :20/01451



Association SERVICE DE SANTE AU TRAVAIL DURANCE LUBERON



C/



S.A.R.L. ESPRIT TRANQUILLE

















Grosse délivrée


le 13/10/2022

à Me Sylvie SERGENT

à Me Claire FROGER







COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre



ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 01 Mars 2021, N°20/01451



COMPOSITION DE L...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/01920 -

N° Portalis DBVH-V-B7F-IBRH

MPF - NR

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

01 mars 2021

RG :20/01451

Association SERVICE DE SANTE AU TRAVAIL DURANCE LUBERON

C/

S.A.R.L. ESPRIT TRANQUILLE

Grosse délivrée

le 13/10/2022

à Me Sylvie SERGENT

à Me Claire FROGER

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AVIGNON en date du 01 Mars 2021, N°20/01451

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère

Mme Séverine LEGER, Conseillère

GREFFIER :

Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Octobre 2022,

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Association SERVICE DE SANTE AU TRAVAIL DURANCE LUBERON - Association déclarée, immatriculée au RCS sous le numéro 783 221 526, Agissant poursuites et diligences de ses représentants en exercice domiciliés es qualité audit siège social

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SCP DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Jérémy CREPIN de la SELARL JC AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

S.A.R.L. ESPRIT TRANQUILLE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Claire FROGER de la SELAS JABERSON AVIGNON, Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Mathieu LAJOINIE, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 13 Octobre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La sarl Esprit Tranquille, adhérente de l'association Service de Santé au Travail Durance Lubéron Interentreprises (ci-après SSTI), conteste la méthode de calcul de ses cotisations laquelle serait en contradiction avec les dispositions légales en vigueur et la jurisprudence récente de la Cour de cassation. Malgré plusieurs courriers par lettre recommandée avec accusé de réception des 1er avril 2019, du 26 juin 2019, du 3 février 2020 et un entretien le 12 février 2020 avec le directeur de l'association, l'association n'a pas modifié le calcul des cotisations.

Par acte du 16 avril 2020, la société Esprit Tranquille a assigné la SSTI devant le tribunal judiciaire d'Avignon en remboursement des cotisations indûment versées au titre des années 2017 à 2019 ainsi qu'en paiement de la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par jugement réputé contradictoire du 1er mars 2021, le tribunal judiciaire d'Avignon a :

- condamné l'association le Service de Santé au Travail Durance Lubéron à payer à la sarl Esprit Tranquille les sommes de 722 euros HT de cotisations indûment versées au titre de l'année 2017, 1 834 euros au titre de l'année 2018, 1 658 euros au titre de l'année 2019, 456 euros au titre de visites médicales indûment facturées,

- débouté la Sarl Esprit Tranquille de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- condamné l'association SSTI à lui payer la somme de 1 700 euros sur Ie fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que l'association Service de Santé au Travail Durance Lubéron devra désormais appliquer la méthode de calcul pour les cotisations 2020 et à venir conformément au droit applicable

- prononcé une astreinte provisoire de 30 euros/jour de retard à défaut de paiement des sommes dues passé un délai de 15 jours après signification du jugement à intervenir, et ce pour une période de six mois ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné l'association Service de Santé au Travail Durance Lubéron aux dépens.

Par déclaration du 17 mai 2021, l'association Service de Santé au Travail Durance Lubéron a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 23 mai 2022, la procédure a été clôturée au 25 juillet 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 8 septembre 2022.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 janvier 2022, la SSTI demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société Esprit Tranquille de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, et, statuant à nouveau, de :

A titre principal,

- débouter la société Esprit Tranquille de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions comme étant infondées,

A titre subsidiaire,

- débouter la société Esprit Tranquille de ses demandes en l'absence de production de documents probants nécessaires à un éventuel recalcul,

En tout état de cause,

- débouter la société Esprit Tranquille de sa demande d'astreinte,

- condamner reconventionnellement la société Esprit Tranquille au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, tant en première instance qu'en appel.

L'appelante fait grief au tribunal d'avoir fait une interprétation erronée des dispositions légales qui ne font pas référence à la notion d'effectif équivalent temps plein, mais bien à la notion de nombre de salariés pour calculer les cotisations dues au service de santé. Elle considère donc qu'elle a fait une exacte application des dispositions légales applicables puisqu'elle a calculé les cotisations dues par rapport au nombre de salariés de l'entreprise. Elle considère que l'intimée ne peut se fonder ni sur la circulaire DGT n° 13 du 9 novembre 2012 laquelle est devenue sans objet suite à l'entrée en vigueur de la loi du 8 août 2016 et le décret du 27 décembre 2016, ni sur la décision contra legem rendue par la Cour de cassation dans un arrêt du 19 septembre 2018 (n°17-16.219, P+B+R+I) de sorte que le critère de l'effectif équivalent temps plein n'a aucune valeur juridique. L'association SSTI fait observer qu'en tout état de cause, l'intimée ne rapporte pas la preuve de son effectif réel.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 novembre 2021, la société Esprit Tranquille, intimée, demande à la cour de confirmer le jugement dont appel sauf en ce qu'il a débouté la Sarl Esprit Tranquille de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et sur le montant de l'astreinte. Elle demande à la cour de statuer à nouveau sur ces deux points, de lui allouer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et d'assortir la décision d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à défaut de paiement des sommes dues, passé un délai de huit jours courant à compter de la signification du jugement à intervenir.

L'intimée rappelle que la décision n°2021-931 (QPC), rendue par le Conseil Constitutionnel conforte la jurisprudence constante de la Cour de cassation en affirmant avec force que l'effectif doit s'apprécier en équivalent temps plein et qu'aucune différence de traitement entre les employeurs n'est créée de ce fait, les mêmes règles de calcul des effectifs s'imposant à tous les employeurs. L'appelante n'ayant pas respecté la méthode de calcul applicable devra lui restituer le trop perçu soit la somme totale de 5 056,80 euros TTC pour les années 2017, 2018 et 2019 outre la somme de 2 932 euros TTC pour l'année 2020. Elle estime par ailleurs qu'en application des dispositions de la circulaire du 9 novembre 2012, la SSTI n'était pas fondée à facturer, en plus de la cotisation annuelle, les visites médicales et devra lui rembourser la somme de 556 euros pour les visites médicales d'embauche facturées en 2016, 2017 et 2018. L'intimée estime qu'en opposant un silence fautif aux nombreux courriers qui lui ont été adressés, l'association SSTI a commis une faute lui ayant causé un préjudice. Ce même comportement justifie, au regard des dispositions de l'article L. 131-1, al. 1 er du code des procédures civiles d'exécution, qu'elle soit condamnée à une astreinte de 100 euros par jour de retard à défaut de paiement dans un délai de huit jours suivant la signification du jugement à intervenir.

MOTIFS:

Sur le calcul des cotisations :

L'article L.4622·6 du code du travail dans sa version applicable au présent litige dispose que les dépenses afférentes aux services de santé au travail sont réparties proportionnellement au nombre de salariés de chaque entreprise adhérente.

Se fondant sur les dispositions de la circulaire du 9 novembre 2012 et sur un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 18 septembre 2018, les premiers juges ont estimé que la méthode de calcul appliquée par l'association était erronée pour calculer les cotisations en fonction du nombre de salariés employés par l'entreprise au lieu de les calculer en fonction du nombre d'équivalent temps plein (ETP), tous les salariés n'étant pas employés à temps plein et l'effectif pouvant compter un certain nombre de salariés employés à temps partiel. Le tribunal a donc considéré qu'en 2017, la SSTI avait multiplié le montant de la cotisation annuelle de 95 euros par l'effectif de 32 salariés, soit une cotisation appelée de 3 040 euros (32 x 95), alors qu'en multipliant le montant de cette cotisation par l'effectif de salariés ETP, soit 24, 4 , la cotisation appelée aurait dû être seulement de 2 318 euros (24,4 x 95). La même correction a été appliquée aux cotisations litigieuses perçues en 2018 et en 2019.

L'appelante fait grief au tribunal d'avoir retenu cette méthode de calcul alors que les dispositions légales en application desquelles sont calculées les cotisations dues au service de santé au travail ne font pas référence à la notion d'effectif équivalent temps plein mais au nombre de salariés de sorte que le calcul par rapport au nombre de salariés de la société n'est pas erroné et qu'il est parfaitement conforme au droit en vigueur. L'association SSTI estime en effet que la circulaire du 9 novembre 2012 évoquée par le tribunal a ajouté le critère de l'effectif équivalent temps plein que la loi n'avait pas prévu et qu'elle est devenue sans objet pour avoir été prise pour l'application la loi du 20 juillet 2011 qui n'est plus en vigueur pour avoir été remplacés par la loi du 8 août 2016. Elle critique pour les mêmes motifs l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 septembre 2018 qui ajoute à la loi un nouveau critère pour le calcul des cotisations et qui serait selon elle donc une jurisprudence contra legem. L'appelante ajoute que l'article L.4622·6 du code du travail a été réformé par la loi n° 2120-1018 du 02 août 2022 laquelle prévoit expressément une répartition des cotisations proportionnelle au nombre de salariés sans référence à leur durée du travail. A compter de l'entrée en vigueur de cette nouvelle disposition le 31 mars 2022, la cotisation deviendra donc proportionnelle au nombre de salariés comptant chacun pour une unité.

L'intimée rappelle que le Conseil constitutionnel a validé la jurisprudence de la Cour de cassation jugée contraire à la loi par l'appelante. De plus, saisi par la Cour de cassation d'une QPC sur la conformité à la constitution de l'article L 4622-6 du code du travail, les parties requérantes prétendant que le mode de calcul par ETP créerait une différence de traitement injustifiée entre les employeurs selon la proportion des salariés à temps plein et à temps partiel au sein de l'entreprise, alors même que tous les salariés bénéficient des mêmes services de santé, le Conseil Constitutionnel a estimé que la disposition critiquée était conforme à la constitution.

La répartition proportionnelle des dépenses des SSTI au nombre de salariés des entreprises adhérentes telle que prévue par les dispositions de l'article L 4622-6 du Code du travail dans sa version applicable au présent litige a donné lieu à des interprétations divergentes de la notion de salarié.

Alors que les associations considéraient que chaque salarié, employé à temps plein ou à un temps partiel, devait être pris en compte comme une unité, la circulaire du 9 novembre 2012 de la Direction Générale du Travail a estimé que la notion de salarié devait s'entendre, conformément à l'article L1111-2 du code du travail, d'un salarié temps plein, autrement dit selon un calcul en ETP.

Cette circulaire, contrairement à ce qu'affirme l'appelante, n'est pas devenue sans objet lors de l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, la partie controversée de l'article L 4622-6 ' « proportionnellement au nombre de salariés »- n'ayant pas été modifiée par la loi nouvelle.

Le 19 septembre 2018, la Cour de cassation, amenée à interpréter l'article L. 4622-6 du code du travail, a retenu que seul le nombre de salariés en équivalents temps plein pouvait être pris en compte dans la fixation de la cotisation versée par l'employeur au service de santé au travail interentreprises (SSTI).

Dans sa décision n° 2021-931 QPC du 23 septembre 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les mots « proportionnellement au nombre des salariés » figurant au deuxième alinéa de l'article L. 4622-6 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016.

Sa motivation est la suivante: «  '.Les dispositions contestées prévoient que la contribution versée par l'employeur pour couvrir les frais du service de santé au travail interentreprises dont il est adhérent est calculée proportionnellement au nombre des salariés de l'entreprise. Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que ce nombre doit s'apprécier en équivalent temps plein. Ces dispositions soumettent tous les employeurs à la même règle de calcul des effectifs pour la détermination de leur contribution aux frais afférents à un service de santé au travail interentreprises, sans distinguer selon qu'ils emploient des salariés à temps plein ou à temps partiel. Ce faisant, elles n'instituent, par elles-mêmes, aucune différence de traitement entre les employeurs. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi doit donc être écarté... »

Sous l'empire des dispositions de l'article L 4622-6 dans sa version applicable au présent litige, si un salarié à temps plein équivalait à une unité, les salariés à temps partiel devaient donc être pris en compte au prorata de leur temps de travail.

A la période à laquelle les cotisations litigieuses ont été prélevées ' 2017,2018, 2019, 2020 ' la méthode de calcul appliquée par la SSTI n'était pas conforme aux dispositions de l'article L 4622 -6 du code du travail alors en vigueur. Certes, la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 a modifié l'article L. 4622-6 du code du travail pour prévoir que les services de prévention et de santé au travail interentreprises sont financés par « une cotisation proportionnelle au nombre de travailleurs suivis comptant chacun pour une unité », disposition par laquelle le législateur a conservé une règle de calcul en fonction de l'effectif mais mis un terme à la computation en « équivalents temps plein », mais cette nouvelle version de l'article L 4622-6 du code du travail n'est entrée en vigueur que le 31 mars 2022 et n'est donc pas applicable au présent litige.

Le tribunal a donc à juste titre considéré que l'association SSTI avait utilisé une méthode de calcul erronée pour déterminer le montant des cotisations dues par la sarl Esprit Tranquille au titre de l'année 2017, 2018 et 2019. L'intimée démontre de surcroît que pour l'année 2020, la SSTI lui a réclamé des cotisations calculées selon la même méthode erronée et lui est donc redevable de la somme de 2 932 euros.

Le montant des cotisations litigieuses n'étant pas conforme à la disposition légale alors en vigueur, l'argument selon lequel leur principe et leur montant avait été voté souverainement par toutes les entreprises adhérentes sans que l'intimée n'ait émis de contestation est inopérant.

L'intimée justifie par ailleurs de son effectif temps plein par la production de sa pièce n°17 (déclaration de liste nominative 2020 et déclaration des effectifs).

Le jugement sera donc confirmé sauf à ajouter que la SSTI sera condamnée à payer à la sarl Esprit Tranquille la somme de 2932 euros en remboursement des cotisations indues au titre de l'année 2020.

Sur les visites médicales d'embauche :

Le tribunal a considéré que l'association SSTI avait indûment facturé des visites médicales d'embauche au visa des dispositions suivantes de la circulaire du 9 novembre 2012: «le montant de la cotisation appliquée à l'entreprise couvre l'ensemble des contreparties mentionnées dans le document initial remis au moment de son adhésion ... ceci inclut ... les dépenses liées au suivi individuel de l'état de santé des salariés de l'entreprise, ce qui inclut notamment la réalisation des examens médicaux d'embauche périodiques et complémentaires. Ces dépenses ne peuvent donc pas faire l'objet d'une facturation complémentaire».

L'appelante considère comme erronée l'interprétation par le tribunal des dispositions légales lesquelles n'interdiraient pas au service de santé au travail de facturer une cotisation supplémentaire lors de l'embauche d'un nouveau salarié en cours d'année. Elle soutient que la circulaire évoquée par les premiers juges est dénuée de valeur juridique et que conformément aux dispositions légales et à son règlement intérieur, elle avait le droit de procéder à une facturation supplémentaire lors de l'embauche d'un nouveau salarié en cours d'année.

L'intimée soutient à l'inverse qu'en l'état des dispositions particulièrement claires de la circulaire du 9 décembre 2012, les services de santé au travail ne peuvent facturer, en plus de la cotisation annuelle les visites médicales. Elle en conclut qu'elle a indûment payé la somme totale de 456 euros HT correspondant aux prestations suivantes:

-3 visites médicales d'embauche facturées en 2016 x 76 euros HT = 228,00 euros HT ;

-2 visites médicales d'embauche facturées en 2017 x 76 euros HT = 152,00 euros HT ;

-1 visite médicale d'embauche facturée en 2018 x 76 euros HT = 76,00 euros HT.

Les dispositions précitées de la circulaire DGT 13 du 9 novembre 2012 régulièrement publiées au Bulletin officiel du Ministère du Travail sont des dispositions impératives et ont donc valeur réglementaire.

En procédant à la facturation supplémentaire des visites médicales d'embauche alors que la circulaire DGT 13 du 9 novembre 2012 disposait que les dépenses liées aux examens médicaux d'embauche étaient comprises dans la cotisation due par l'entreprise et ne pouvait pas faire l'objet d'une facturation complémentaire, l'appelante a violé les dispositions impératives de la circulaire précitée: la somme totale de 456 euros HT a donc été versée indûment par l'intimée.

Le jugement qui a condamné l'association SSTI au paiement de cette somme sera donc confirmé.

Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive :

Les démarches de la société Esprit Tranquille pour obtenir le remboursement des sommes indûment versées sont antérieures à la décision du Conseil Constitutionnel, lequel, saisi par la Cour de cassation, s'est prononcé le 23 septembre 2021 sur la conformité à la constitution de la disposition légale dont l'interprétation était controversée. En l'état des nombreux recours exercés pour fixer l'interprétation des dispositions de l'article L 4622-6 du code du travail, la persistance de l'appelante à appliquer la méthode de calcul en considérant que chaque salarié comptait pour une unité quelle que soit la durée de son travail ne relève pas de la mauvaise foi.

Le jugement qui a rejeté la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive sera donc confirmé.

Sur l'astreinte :

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a assorti la condamnation au remboursement des sommes indûment payées d'une astreinte, aucune circonstance particulière ne justifiant de contraindre l'association SSTI à s'acquitter volontairement des sommes dues.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner en cause d'appel l'association SSTI à payer la somme de 3 000 euros à la sarl Esprit Tranquille laquelle a multiplié les démarches amiables puis exposé des frais de justice pour obtenir restitution de fonds indûment versés pendant quatre ans.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme le jugement en ce qu'il a prononcé une astreinte provisoire de 30 euros/jour de retard à défaut de paiement des sommes dues passé un délai de 15 jours après signification du jugement à intervenir, et ce pour une période de six mois ;

Statuant à nouveau sur ce point,

Déboute la sarl Esprit Tranquille de sa demande tendant à prononcer une astreinte pour assurer l'exécution du présent arrêt,

Confirme pour le surplus le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Condamner l'association Service de Santé au Travail Durance Lubéron Interentreprises à payer la somme de 3 000 euros à la sarl Esprit Tranquille sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01920
Date de la décision : 13/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-13;21.01920 ?
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