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06/10/2022 | FRANCE | N°21/03057

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 06 octobre 2022, 21/03057


ARRÊT N°



N° RG 21/03057 - N°Portalis DBVH-V-B7F-IET3



SL-AB



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

05 juillet 2021 RG:20/01139



[P]



C/



[N]



















Grosse délivrée

le 06/10/2022

à Me Guillaume DE PALMA

à Me Nadia MAHJOUB















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

1ère chambre



ARRÊT DU 06 OCTOBRE 202

2







APPELANT :



Monsieur [O] [P]

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représenté par Me Guillaume DE PALMA de la SCP D'AVOCATS INTER-BARREAUX DE PALMA-COUCHET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON





INTIMÉ :



Monsieur [F] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représenté par Me Na...

ARRÊT N°

N° RG 21/03057 - N°Portalis DBVH-V-B7F-IET3

SL-AB

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON

05 juillet 2021 RG:20/01139

[P]

C/

[N]

Grosse délivrée

le 06/10/2022

à Me Guillaume DE PALMA

à Me Nadia MAHJOUB

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2022

APPELANT :

Monsieur [O] [P]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Guillaume DE PALMA de la SCP D'AVOCATS INTER-BARREAUX DE PALMA-COUCHET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

INTIMÉ :

Monsieur [F] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Nadia MAHJOUB, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000281 du 09/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère

Mme Séverine LEGER, Conseillère

GREFFIER :

Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,

DÉBATS :

à l'audience publique du 28 Juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Octobre 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 06 Octobre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET PROCÉDURE

M. [O] [P] est propriétaire d'une maison d'habitation et d'un terrain attenant de 6 000 m² situés [Adresse 3] à [Localité 4], à proximité desquels se situe un hangar à usage d'expédition de fruits et légumes sis [Adresse 2], appartenant à M. [U] [Z] et loué par M. [F] [N].

Le 1er août 2016, la propagation d'un feu a causé des dommages importants sur la parcelle de M. [P]. Ce dernier a alors informé son assureur du sinistre et une expertise amiable a été mise en place le 3 novembre 2016. Après avoir vainement tenté de trouver une solution amiable avec M. [N], M. [P] a sollicité une mesure d'expertise judiciaire par acte du 28 avril 2017.

Par ordonnance du 2 octobre 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Avignon a désigné M. [S] [M] en qualité d'expert, puis M. [O] [K] par ordonnance du 27 mars 2019, le précédent expert n'ayant pas rendu compte de ses opérations. L'expert a établi son rapport le 26 août 2019 au contradictoire de M. [P], M.[Z], M. [N] et la société Groupama Méditerranée, partie intervenante et assureur de M. [Z].

Par acte du 17 avril 2020, M. [P] a assigné M. [N] devant le tribunal judiciaire d'Avignon aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Retenant que, la seule localisation du départ de l'incendie, à savoir la parcelle louée par M. [N], ne suffisait pas à remplir la condition prévue à l'alinéa 2 de l'article 1242 du code civil, et, en conséquence, que la responsabilité de M. [N] ne pourrait pas être engagée au regard de l'absence de preuve d'une faute imputable à ce dernier ou aux personnes dont il est responsable, le tribunal judiciaire d'Avignon, par jugement contradictoire du 5 juillet 2021, a :

- débouté M. [O] [P] de sa demande en paiement des sommes de 45 262 et 18 491 euros;

- débouté des demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [O] [P] aux dépens ;

- rappelé l'exécution provisoire du présent jugement.

Par déclaration du 6 août 2021, M. [O] [P] a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 16 mars 2022, la procédure a été clôturée le 14 juin 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 28 juin 2022 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 6 octobre 2022.

EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 13 juin 2022, l'appelant, demande à la cour de :

- le recevoir en ses demandes ;

- dire que M. [N] est responsable des dommages par lui subis ;

- infirmer purement et simplement le jugement dont appel de ce chef ;

En conséquence,

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 45 262 euros au titre de la remise en état du jardin ;

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 18 491 euros au titre de l'indemnisation des pertes au titre du matériel automobile ;

- infirmer purement et simplement le jugement dont appel en ce qu'il a été débouté de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 3 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance, et les frais d'expertise.

Il fait essentiellement valoir, sur le fondement de l'article 1242 du code civil et en considération des conclusions expertales, qu'il est établi que l'incendie du 1er août 2016 est entièrement imputable à M. [N]. Il précise que la cause de l'incendie est anthropique et n'est pas liée à un impact de foudre, M. [N] ayant à tout le moins laissé le feu se perpétrer en contravention des dispositions de la circulaire du 18 novembre 2011, de l'article 84 du règlement de santé publique et de l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2013. Par conséquent, il engage sa responsabilité et doit réparer les préjudices qu'il a subis.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 14 juin 2022, l'intimé, demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris ;

- juger que sa faute n'est pas démontrée ;

- juger que conformément aux conclusions du rapport d'expertise judiciaire, rien ne permet de déterminer la cause exacte de l'incendie survenu le 1er août 2016, de sorte que sa responsabilité ne peut pas être engagée ;

- débouter M. [P] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner M. [P] à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il soutient que l'existence d'un lien de causalité n'est pas établie puisque les causes de l'incendie ne sont pas déterminées. Il considère qu'il ne saurait être déclaré responsable d'un incendie dans lequel il n'a eu aucune participation, active ou passive, ajoutant que l'accès aux lieux totalement ouvert aux tiers permet d'envisager une pluralité d'hypothèses sans lien avec lui. Par conséquent, il indique que M. [P] est défaillant dans l'administration de la preuve et que les conditions de l'article 1242 du code civil ne sont pas réunies en l'espèce.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité au titre de l'incendie :

Aux termes de l'article 1242 alinéa 2 du code civil, celui qui détient à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou de biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable.

L'appelant fait grief au tribunal d'avoir écarté la responsabilité du locataire de la parcelle sur laquelle l'incendie a pris naissance aux motifs de l'absence de preuve d'une faute de ce dernier en affirmant que le feu a été allumé par un de ses employés pour procéder au brûlage de palettes à même le sol, ce qui a été à l'origine d'importants dégâts causés sur sa propriété.

Il se prévaut à cet égard des conclusions de l'expert ayant mis en évidence l'existence d'une zone noircie par de fréquents feux et des témoignages versés aux débats attestant du brûlage régulier de produits dégageant une forte fumée par M. [N] ou ses employés.

L'intimé considère que les conditions d'engagement de sa responsabilité sur le fondement des dispositions de l'article 1242 alinéa 2 du code civil ne sont pas réunies en l'absence de preuve d'une quelconque faute qui lui soit imputable ou aux personnes dont il est responsable au regard des circonstances de l'incendie litigieux dont les causes n'ont pas été précisément déterminées par l'expert et alors que lui-même était à l'étranger le jour des faits et qu'aucun de ses employés n'était présent, l'entreprise étant alors en congés annuels.

Le rapport d'expertise indique que :

'Les traces de carbonisation laissées sur les arbres ainsi que sur les matériaux, tels que clôture ou grillage, permettent d'identifier la zone d'éclosion puis de développement du feu. Il s'agit d'une zone située sur la propriété de M. [Z] louée par M. [N].

Bien que cette zone soit identifiée, rien ne permet d'en déterminer la cause. Elle reste pour autant anthropique. En effet aucun impact de foudre n'a été relevé ce jour là.

Il est rappelé que la combustion lente de combustibles tels que palettes ou cagettes peut miner plusieurs jours sans la présence de flammes.

La zone identifiée d'une dizaine de mètres carrés, couverte de graviers est marquée au sol d'une forte carbonisation, ce qui démontre la présence fréquente de feux. Les traces ont été faites par le potentiel calorifique élevé.

L'expert note la présence de palettes entreposées à proximité immédiate de la zone noircie par de fréquent feux'.

Il est ainsi avéré que le feu a effectivement pris naissance sur la parcelle louée par M. [N], que l'origine de l'incendie est due à une action humaine et que les constatations matérielles effectuées sur la parcelle ont mis en évidence l'existence de traces révélant une zone de brûlage fréquent alors que la réglementation en interdit l'usage.

Aucun élément objectif ne permet cependant d'établir de manière certaine que l'incendie qui s'est déclaré le 1er août 2016 à 15 heures 30 a été causé par le fait personnel de M. [N] ou de l'un de ses employés.

L'attestation d'intervention des pompiers fait état d'un feu de broussailles et d'une prise en charge intervenue le 1er août 2016 à 15 heures 41.

La fiche de main courante établie le même jour par la police municipale d'[Localité 4], dépêchée sur les lieux, relève l'absence du locataire et de toute autre personne sur le terrain à l'origine du départ de feu.

Si les témoignages versés aux débats par l'appelant, et notamment ceux de M. et Mme [V], attribuent expressément l'origine de l'incendie à M. [N], ces affirmations ne sont pas corroborées par des éléments objectifs de nature à établir avec certitude le lien entre l'incendie du 1er août 2016 et le comportement de l'intéressé ou de ses employés.

M. [N] fournit la photocopie de son passeport attestant de sa présence à l'étranger du 26 juillet 2016 au 30 août 2016 ainsi qu'une attestation de son cabinet comptable établissant la période de congés annuels du 25 juillet au 30 août chaque année.

Il produit également un témoignage de M. [A] attestant de la fermeture du local le jour de l'incendie du 1er août 2016 pour cause de vacances.

Il se prévaut par ailleurs de la fréquence des feux de broussaille au cours de l'été 2016 dans le département de Vaucluse et expose avoir été lui-même victime d'un incendie de véhicule sur son terrain le 2 octobre 2017.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que les conditions d'engagement de la responsabilité de M. [N] au titre de l'incendie ayant pris naissance sur la parcelle louée par ses soins n'étaient pas réunies en l'absence de preuve d'une faute qui lui soit personnellement imputable ou aux personnes dont il est responsable.

La décision déférée sera donc confirmée.

Sur les autres demandes :

Succombant en son appel, M. [P] sera condamné à en régler les entiers dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle, M. [N] étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale.

Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [N] qui sera débouté de sa prétention de ce chef, tout comme l'appelant en ce qu'il succombe.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme la décision déférée dans l'intégralité de ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne M. [O] [P] à régler les entiers dépens de l'appel, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle, M.[F] [N] étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ;

Déboute les parties de leur prétention respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme FOURNIER, Présidente de chambre et par Mme RODRIGUES, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/03057
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;21.03057 ?
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