La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2022 | FRANCE | N°21/00998

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 06 octobre 2022, 21/00998


ARRÊT N°



N° RG 21/00998 - N°Portalis DBVH-V-B7F-H7GM



ET-AB



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

04 février 2021

RG:18/01375



[B]



C/



[C]

[C]























Grosse délivrée

le 06/10/2022

à Me Philippe HILAIRE-LAFON

à Me Suzanne STOPPA BOCCALEONI

















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE>
1ère chambre



ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2022







APPELANTE :



Madame [T] [B]

née le 12 Août 1975 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 7]



Représentée par Me Philippe HILAIRE-LAFON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉES :



Madame [M] [C]

née le 14 Décembre 1971 à [Localité...

ARRÊT N°

N° RG 21/00998 - N°Portalis DBVH-V-B7F-H7GM

ET-AB

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

04 février 2021

RG:18/01375

[B]

C/

[C]

[C]

Grosse délivrée

le 06/10/2022

à Me Philippe HILAIRE-LAFON

à Me Suzanne STOPPA BOCCALEONI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2022

APPELANTE :

Madame [T] [B]

née le 12 Août 1975 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Philippe HILAIRE-LAFON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

Madame [M] [C]

née le 14 Décembre 1971 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Suzanne STOPPA BOCCALEONI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/4008 du 05/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Madame [G] [C]

née le 19 Juin 1978 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Suzanne STOPPA BOCCALEONI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Patricia CARDIN, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre,

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,

Mme Séverine LEGER, Conseillère,

GREFFIER :

Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,

DÉBATS :

À l'audience publique du 17 Mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 30 Juin 2022 et prorogé au 06 Octobre 2022,

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère, en l'absence du Président légitimement empêché, le 06 Octobre 2022, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET PRETENTIONS

Mme [T] [B] et M. [U] [C] se sont mariés le 23 décembre 2002 sous le régime de la séparation de biens, le contrat de mariage ayant été passé par devant Maître [N] [H], notaire le 10 mai 2003.

D'une précédente union de M. [C] avec Mme [P] [W] sont nées :

- Mme [M] [C] ;

- Mme [G] [C].

[U] [C] est décédé le 13 mai 2016 à [Localité 8] (Suisse), laissant à sa survivance sa conjointe et ses héritières réservataires.

Par actes du 27 juin 2017, Mmes [M] et [G] [C] ont assigné Mme [B] et Maître [L] [Z] devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins de voir notamment, sur le fondement des articles 815, 1240 et 1360 du code civil, ordonner le partage des biens dépendant de la succession de [U] [C], désigner, avant dire droit, un expert afin d'estimer la valeur de l'immeuble dépendant de la succession, commettre un notaire pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession.

Par jugement du 13 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Nîmes :

- s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande en nullité de l'acte introductif d'instance délivré par acte d'huissier du 27 juin 2017 ;

- a prononcé la nullité de l'acte introductif d'instance délivré par acte d'huissier du 27 juin 2017, et a dit en conséquence Mmes [M] et [G] [C] irrecevables en leur demandes;

- a condamné solidairement [M] et [G] [C] à payer à Mme [T] [B] la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a condamné in solidum Mmes [M] et [G] [C] aux entiers dépens ;

- a rejeté les demandes plus amples ou contraires.

Par arrêt du 28 novembre 2019, la cour d'appel de Nimes a :

- déclaré l'appel recevable ;

- confirmé le jugement sauf en ce qu'il a déclaré Mmes [M] et [G] [C] irrecevables en leurs demandes ;

- debouté Mme [T] [B] de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

- condamné solidairement Mmes [G] et [M] [C] à payer à Mme [T] [B] et à Mme [L] [Z] la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mmes [M] et [G] [C] aux dépens d'appel.

Par actes des 14 et 15 février 2018, Mmes [M] et [G] [C] ont à nouveau assigné Mme [T] [B] et Me [L] [Z], notaire, devant le tribunal de grande instance de Nîmes, aux fins qu'il soit ordonné le partage des biens dépendant de la succession avec expertise, et qu'il soit enjoint à Maître [L] [Z] de communiquer l'original de la reconnaissance de dette établie le 26 juin 2003 par Mme [T] [B] au profit des héritiers réservataires.

Par jugement contradictoire du 4 février 2021, le tribunal judiciaire de Nîmes a :

- déclaré que la responsabilité de Maître [L] [Z] n'est pas engagée ;

- débouté en conséquence Mmes [M] et [G] [C] de leurs demandes indemnitaires formées à l'encontre de Maître [L] [Z] ;

- déclaré recevable la demande d'injonction de communication du document intitulé « reconnaissance de dette » ;

- rejeté les demandes de Mmes [M] et [G] [C] visant à ce qu'il soit fait injonction à Mme [T] [B] de communiquer sous astreinte l'original de l'acte intitulé « reconnaissance de dette » du 26 juin 2003 et l'original du testament établi par Mme [T] [B] le 26 juin 2003 ;

- déclaré recevable l'action visant à l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de [U] [C] ;

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [U] [C] né le 23 février 1949 à San Severo (Italie) et décédé le 13 mai 2016 à [Localité 8] (Suisse) ;

- ordonné préalablement à la liquidation de la succession la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux [C]-[B] afin d'évaluer le montant des créances entre les époux [C]-[B] et de reconstituer le montant de la masse successorale ;

- commis pour y procéder Mme le président de la chambre des notaires du ressort du Gard, avec faculté de délégation, excepté Maître [F] [E], notaire associé au sein de la Selarl [F] [E] à Connaux ;

- précisé que le notaire commis aura pour mission celle précisée aux articles 1365 et suivants du code de procédure civile, à savoir :

convoquer les parties,

se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,

rendre compte au juge commis des difficultés rencontrées et solliciter toute mesure de nature à en faciliter le déroulement,

en cas de défaillance de l'un des copartageants, procéder à sa mise en demeure selon les dispositions de l'article 841 '1 du Code civil, et à défaut de présentation du copartageant ou de son mandataire à la date fixée par la mise en demeure, en dresser procès-verbal à transmettre au juge commis aux fins de désignation d'un représentant au copartageant défaillant,

si la consistance des biens le justifie, s'adjoindre un expert choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut désigné par le juge commis,

- dit que le notaire commis devra prendre en compte les donations réalisées, l'éventuel dépassement de la quotité disponible, établir le montant de rapports éventuels,

- précisé qu'il appartiendra aux parties de fournir toutes pièces utiles et au notaire de recueillir tous les éléments de nature à reconstituer les masses actives et passives, au besoin en interrogeant le fichier Ficoba ;

- dit que, dans le délai d'un an, le notaire devra dresser un état liquidatif établissant les comptes entre les copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir ;

- rejeté la demande de Mme [B] visant à prononcer la nullité de l'acte intitulé « reconnaissance de dette » en date du 23 mai 2013 ;

- déclaré concernant les opérations de comptes que Mme [T] [B] est redevable d'une créance envers la succession de [U] [C] d'un montant égal aux deux tiers de la valeur à la date du 13 mai 2016 du terrain lui appartenant et situé [Adresse 2] ;

- précisé concernant les créances entre époux que le notaire devra prendre en compte le financement par [U] [C] d'une partie de la construction de la maison de Mme [B] située [Adresse 2] ;

- dit qu'il devra pour ce faire tenir compte de l'engagement souscrit par [U] [C] au titre des emprunts souscrits conjointement et qu'il devra évaluer la créance selon les règles prévues à l'article 1543 du code civil ;

- dit que pour ce faire le notaire devra se faire communiquer par Mme [B], et à défaut par le CIC, copie des contrats de prêts souscrits par le défunt ;

- déclaré recevable la demande d'expertise avant-dire droit visant à l'évaluation de la valeur du bien situé [Adresse 2] formée par Mmes [M] et [G] [C] mais l'a rejetée en l'état ;

- dit qu'il appartiendra au notaire commis d'évaluer la valeur du terrain de [Localité 7] à la date du 13 mai 2016, date du décès de [U] [C] et d'évaluer la valeur de la maison de [Localité 7] au jour de la liquidation et qu'il lui appartiendra dans l'exercice de sa mission de conciliation d'obtenir des parties un accord sur l'évaluation du bien ;

- dit que le notaire commis devra solliciter deux agences immobilières et établir une moyenne des évaluations transmises ;

- précisé qu'en tant que de besoin, le notaire commis pourra s'adjoindre un expert choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis ;

- dit qu'en cas de désaccord des copartageants sur le projet d'état liquidatif, le notaire transmettra au juge commis un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties, ainsi que le projet d'état liquidatif, lequel fera rapport au tribunal des points de désaccord subsistants, le cas échéant après une tentative de conciliation devant le juge commis ;

- désigné le président de la troisième chambre civile en qualité de juge commis pour surveiller les opérations de partage et en faire rapport en cas de difficultés ;

- précisé qu'en cas d'empêchement du notaire ou des juges commis, il sera pourvu à leur remplacement par ordonnance sur requête ;

- débouté Mme [T] [B] de sa demande indemnitaire reconventionnelle pour procédure abusive ;

- condamné Mme [G] [C] à régler à Maître[L] [Z], notaire, la somme de 750 euros au titre des frais irrépétibles ;

- condamné Mme [M] [C] à régler à Maître [L] [Z], notaire, la somme de 750 euros au titre des frais irrépétibles ;

- rejeté les demandes formées par Mme [M] [C], par [G] [C] et par Mme [T] [B] veuve [C] au titre des frais irrépétibles ;

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

Les premiers juges ont jugé que la demande de communication sous astreinte de l'original du document intitulé 'reconnaissance de dette' en date du 26 juin 2003 et de l'original du testament établi par Mme [B] le 26 juin 2003 devait être rejeté, dès lors qu'il n'y avait pas de débat sur la teneur du premier document ni sur son auteur, et que la requise pouvait s'opposer à toute demande de communication s'agissant du testament dans la mesure où la volonté de disposer relevait de celle exclusive du testateur.

Ils ont retenu l'absence de faute commise par Maître [Z], qui était dépositaire du document établi par Mme [B] et tenu à ce titre au secret de manière absolue à son égard, Mmes [G] et [M] [C] ne justifiant pas davantage d'un préjudice.

Sur l'action en partage, ils ont considéré que la fin de non-recevoir opposée par Mme [B] était non fondée, puisque le partage amiable n'avait pas pu aboutir et que les demanderesses avaient précisé leurs intentions.

Ils ont par voie de conséquence ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision dépendant de la succession de [U] [C], nul n'étant tenu de demeurer dans l'indivision et alors que les rapports entre héritiers sont manifestement conflictuels.

Sur la question de la propriété du bien de [Localité 7], la juridiction de première instance a retenu que la propriété du bien dont s'agit, qui est un bien personnel de Mme [B], ne fait pas échec aux demandes relatives aux sommes qui pourraient être dues à la succession et qui auraient trait à ce bien notamment. Elle a estimé, concernant le document intitulé 'reconnaissance de dette' et que Mme [B] ne conteste pas avoir rédigé, que la demande de cette dernière en nullité de l'acte devait être rejetée et qu'il y avait lieu d'ordonner l'évaluation de la créance dépendant de la succession de [U] [C] et due par Mme [B] au titre du financement du terrain sis [Adresse 2] notamment acquis avant mariage, Mme [B] s'étant engagée par cet acte à rembourser les 2/3 de la valeur de la maison de Connaux en contrepartie du financement de la totalité du terrain par [U] [C].

Elle a par ailleurs considéré que les demanderesses était bien fondées à faire valoir l'existence d'une créance de la succession au titre du financement de la maison de [Localité 7] et devait être évalué selon les règles prévues à l'article 1543 du code civil.

Enfin, elle a rejeté la demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour procédure abusive formée par Mme [B], observant que malgré des propos désobligeants tenus sur Facebook par Mmes [G] et [M] [C], ces dernières ont formulé des excuses sur ce même site.

Par déclaration du 11 mars 2021, Mme [B] a interjeté appel de cette décision.

La clôture de l'instruction est en date du 3 mai 2022.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 26 avril 2021, l'appelante demande à la cour de :

- déclarer recevable et fondé son appel à l'encontre du jugement entrepris;

Constatant :

que l'assignation ne précise pas les intentions des demanderesses quant à la répartition des biens à partager ;

que l'assignation n'indique pas les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable ;

qu'aucune démarche n'a été entreprise en vue de parvenir à un partage amiable;

qu'aucune régularisation n'est intervenue ;

- déclarer irrecevable la demande en partage formée à son encontre ;

Subsidiairement, au fond,

- prononcer la nullité du document intitulé 'reconnaissance de dette' au visa des articles 214, 722 nouveau, 943, 1130 et 1131 ancien, 1326 ancien et 1389 du code civil ;

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré qu'elle est redevable d'une créance envers la succession de [U] [C] d'un montant égal aux 2/3 de la valeur à la date du 13 mai 2016 du terrain lui appartenant et situé [Adresse 2] ;

- juger qu'il n'existe aucune créance entre époux, et infirmer sur ce point la décision entreprise;

Par voie de conséquence, infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré que concernant les créances entre époux que le notaire devra prendre en compte le financement par [U] [C] d'une partie de la construction de sa maison située [Adresse 2] ;

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré que concernant les créances entre époux que le notaire devra tenir compte de l'engagement souscrit par [U] [C] au titre des emprunts souscrits conjointement et qu'il devra évaluer la créance selon les règles prévues à l'article 1543 du code civil ;

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré qu'il appartiendra au notaire commis d'évaluer la valeur du terrain de Conneaux à la date du 13 mai 2016, date du décès de [U] [C] et d'évaluer la valeur de la maison de [Localité 7] au jour de la liquidation et qu'il lui appartiendra dans l'exercice de sa mission de conciliation d'obtenir des parties un accord sur l'évaluation du bien ;

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré que le notaire commis devra solliciter deux agences immobilières et établir une moyenne des évaluations et qu'en tant que de besoin, le notaire commis pourra s'adjoindre un expert choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis ;

- condamner in solidum Mlles [M] et [G] [C] à lui porter et payer la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner sous la même solidarité aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 avril 2022, Mme [G] [C], demande à la cour de :

- confirmer la décision entreprise ;

- débouter Mme [B] de ses demandes ;

- ordonner l'évaluation de la créance et de la récompense dépendant de la succession de M. [U] [C] ;

- commettre tel notaire qu'il plaira à la cour, excepté Maître [F] [E], notaire, afin :

d'estimer l'immeuble dépendant de la succession aux fins d'évaluer la créance s'y rapportant résultant du financement de l'édification de la maison par le défunt;

de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession dont s'agit ;

- commettre tel juge qu'il plaira à la cour de désigner pour suivre les opérations de partage ;

- dire qu'en cas d'empêchement du jugement, du notaire, il sera procédé à leur remplacement par ordonnance rendue sur requête conformément à l'article 969 alinéa 2 du code de procédure civile;

- condamner Mme [T] [B] à lui payer la somme de 5 000 euros, ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Suzanne Stoppa-Boccaleoni, avocat sur ses affirmations de droit.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 2 juillet 2021, Mme [M] [C] demande à la cour de confirmer le jugement déféré, débouter Mme [B] de toutes ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1-L'appelante fait grief aux premiers juges d'avoir déclaré recevable l'assignation en partage alors qu' en l'absence d'intentions de partage et de renseignements concernant les diligences faites en vue d'obtenir ou de tenter d'obtenir un règlement amiable, l'assignation est irrecevable au regard des exigences de l'article 1360 du code de procédure civile.

Les intimées lui opposent que dans la mesure où l'assignation contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions des demanderesses quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable, elle est recevable. Elles énumèrent ainsi à l'appui de leur argumentation l'ensemble des courriers et échanges qu'elles ont eu avec le notaire pour parvenir à un partage amiable et la position de refus de leur leur belle-mère.

En application de l'article 1360 du code de procédure civile à peine d'irrecevabilité, l'assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable.

La description du patrimoine doit comporter les éléments aussi bien actifs que passifs qui le composent. Cette exigence s'apprécie en fonction des difficultés pratiques, voire des obstacles que le demandeur peut rencontrer.

S'agissant de la justification des diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable, celle-ci peut résulter de tout document établissant que le demandeur a entrepris des démarches pour parvenir à un partage amiable (courrier, attestation d'avocat ou de notaire').

Enfin, si la fin de non-recevoir prévue par ce texte est susceptible de régularisation en application de l'article 126 du code de procédure civile s'agissant de l'omission de tout ou parties des mentions prévues, il n'en est pas de même s'agissant des diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable, celles-ci devant avoir été engagées préalablement à la délivrance de l'assignation.

En l'espèce, il ressort de l'assignation litigieuse que par courrier du 5 décembre 2016 les intimées ont demandé au notaire désigné par Mme [B] Me [E], de reconstituer l'actif de la succession en y intégrant les éléments de la reconnaissance de dette dont elles détenaient une copie remise par leur père, les prêts contractés pour construire la maison de [Localité 7], les indemnités maladie réglées par le FIVA à leur père et l'inventaire des meubles, lequel leur a répondu que l'actif étant inférieur à 50 000 euros, il n'y avait pas lieu à déclaration de succession et que la maison appartenant à leur belle-mère, il n'y avait pas non plus lieu de l'évaluer, enfin qu'elle ne prouvait pas l'efficacité juridique du document dénommé 'reconnaissance de dette' .

Elles ont également mentionné que n'obtenant pas de réponse sur leur demande de production des documents sollicités et dont elles estiment qu'ils sont de nature à démontrer que l'actif de la succession de leur père ne se limite pas aux seuls comptes bancaires aux montants dérisoires, elles ont sollicité par courrier du 24 décembre 2016 adressé à Me [E] de les convoquer pour établir un procès-verbal de difficulté. Ce dernier les a convoquées pour le 6 mars 2017 par lettre du 24 janvier 2017 aux fins de procéder aux opérations d'ouverture de la succession et a rappelé qu'il n'avait pas de réponse de Me [Z] au sujet du document dénommé 'reconnaissance de dette' malgré ses relances.

Enfin, par lettre du 31 mars 2017 Me [Z] a indiqué qu'elle ne communiquerait pas le document sauf si Mme [B] qui en était la signataire en faisait la demande.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments qu'elles rapportent la preuve de leur tentative de contacts avec Mme [B] par différents courriers adressés au notaire désigné par cette dernière et que leur désaccord sur l'actif de la succession a rendu d'emblée tout partage amiable voué à l'échec, leur belle-mère refusant que soit prise en compte le document dénommé 'reconnaissance de dette' pour le calcul de l'actif de la succession. Le fait que les intimées n'aient pas adressé leurs courriers à Mme [B] n'est que le reflet des rapports difficiles entre les parties qui rendaient extrêmement aléatoire dés le départ, tout accord entre elles.

Ainsi, il ne peut être exigé au cas d'espèce, la justification d'une tentative de règlement amiable dés lors que les circonstances démontrent qu'elle était vouée à l'échec, compte tenu de la mésentente régnant entre les parties. De même, l'élaboration préalable à l'assignation d'un projet de partage amiable refusé par les cohéritiers ne saurait être exigée pour déclarer recevable la demande en partage au regard de ces circonstances.

La fin de non recevoir tirée de la violation des dispositions de l'article 1360 du code civil sera écartée et le jugement de première instance confirmé de ce chef.

2- Subsidiairement, l'appelante demande à la cour de prononcer la nullité du document dénommé 'reconnaissance de dette' en ce qu'il viole les dispositions de l'article 1326 du code civil. Elle soutient qu'aucune somme n'est portée sur ce document que ce soit en chiffres ou en lettres, de sorte qu'il ne saurait valoir ni reconnaissance de dette, ni commencement de preuve par écrit en l'absence d'engagement chiffré.

Elle soutient encore que la nullité est encourue s'agissant d'un pacte sur succession future au regard des dispositions de l'article 722 du code civil puisque c'est le décès de leur père qui créé leur droit.

Mmes [M] et [G] [C] lui opposent que la reconnaissance post-mortem de dette établie le 26 juin 2003 est valide, puisqu'elle n'a fait que confirmer à leur profit un droit déjà né payable au décés portant d'une part, sur la valeur des deux tiers de la maison construite sur un terrain appartenant à M. [U] [C], et d'autre part sur les fonds déposés sur les comptes bancaires ouverts à la caisse d'épargne au nom de Mme [B], dont les montants sont précisés sur le testament auquel était annexée cette reconnaissance de dette.

Suivant un document établi le 26 juin 2003 dont la copie est produite aux débats, Mme [T] [B] a reconnu devoir aux deux filles de M.[C] :

- les 2/3 de la valeur de la maison de [Localité 7],

- le montant des sommes déposées sur ses comptes bancaires Caisse d'épargne n° 04195046603, 00195046687,05195046679.

Elle a indiqué que l'exécution de ce document prendrait effet un an après le décès de [U].

Des explications données par les parties, ce document dont les intimées détiennent la copie remise par leur père et dont il n'est pas contesté qu'il a été rédigé chez le notaire, a été restitué à Mme [B] par le notaire et elle est la seule à le détenir à ce jour. Pour autant, elle n'en conteste ni l'existence et sa signature, ni le contenu.

Les filles de M.[C] au décès de leur père ont réclamé le paiement de la créance dans le cadre de la liquidation de la succession de leur père, estimant qu'elle constitue un élément de l'actif successoral et Mme [B] a soulevé en premier lieu, la nullité de cette reconnaissance de dettes au motif qu'elle constitue un pacte sur succession future.

Aux termes de l'article 722 du Code civil les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d'une succession non encore ouverte ou d'un bien en dépendant ne produisent effet que dans des cas autorisés par la loi.

Pour qu'il y ait pacte sur succession future il faut qu'il y ait un pacte portant sur une succession ayant pour objet de créer des droits ou d'y renoncer. Il faut en outre qu'il porte sur une succession non ouverte.

Or en l'espèce, Mme [B] étant propriétaire en propre du terrain acquis en indivision suite à la cession de la part de M.[C] par acte notarié et de la maison de [Localité 7] par accession, elle s'est engagée à rembourser des sommes d'argent aux filles de son époux et héritières réservataires, un an après la mort de ce dernier.

Cet engagement constitue non pas un pacte sur succession future qui engagerait la succession de M.[C] mais une promesse post mortem au profit de la succession de M.[C], valable parce qu'en sa qualité de promettant Mme [B] épouse du défunt s'est déclarée tenue dès la promesse d'une obligation de paiement de sommes dont elle a seulement différé l'exécution mais qui a conféré aux bénéficiaires mentionnées dès la promesse, un droit né et actuel (soit dés le mois de juin 2003).

Ce n'est donc pas le décès de son époux qui a créé les droits des Mmes [C]. Il a simplement rendu déterminable l'exécution de l'engagement pris par Mme [B].

Par ailleurs, et en deuxième lieu comme justement rappelé par les premiers juges, les règles énoncées par l'article 1326 du Code civil dans sa version en vigueur au cas d'espèce, et au cas d'espèce, le défaut de mention de la somme en lettres et en chiffres, n'est pas susceptible d'être sanctionné par la nullité de l'acte.

Il sera observé que les mentions portées à l'acte litigieux permettent de déterminer non seulement le montant des créances à partir de la valorisation du bien à une date qui est fixée à 'un an après le décès de son époux' mais également la date de leur exigibilité . Le décès de M.[C] étant intervenu le 13 mai 2016, la date peut être déterminée au 13 mai 2017.

Enfin, en troisième lieu s'agissant de la nullité pour absence de cause de la convention, il sera retenu que les créances trouvent chacune leur contre-partie dans d'une part, le financement en totalité du terrain de [Localité 7] par M.[U] [C], élément rappelé en entête de la promesse, et d'autre part, dans le versement de sommes appartenant en propre à ce dernier, élément également rappelé dans l'acte litigieux, sur les comptes Caisse d'épargne de son épouse.

Peu importe, que les actes notariés de vente du terrain des 5 janvier et 1er février 2001, et de cession de la part de M.[U] [C] sur le terrain du 23 décembre 2002, fassent état de paiement de sommes par 'l'acquereur' vocable générique comprenant Mme [B] ou par le cessionnaire, l'origine des fonds versés au notaire aux termes de ces actes n'étant pas mentionnée et en toute hypothèse, étant déclarative. Le notaire n'indiquant pas qu'il a vérifié lui même la réalité de l'origine des fonds, les mentions de l'acte qui porteraient sur l'origine des fonds ne bénéficient pas de la force probante que Mme [B] croit pouvoir lui donner.

De plus, les mentions de l'acte de reconnaissance litigieux qu'elle ne conteste pas avoir rédigé, viennent par ailleurs démontrer le contraire de ce qu'elle déclare .

Ainsi, Mmes [C] n'ont pas comme le soutient à tort Mme [B], à démontrer autrement que par la production de ce document, l'origine des fonds qui donne une cause à l'acte.

Il s'en déduit que l'engagement n'est pas sans cause et que la décision de première instance mérite confirmation en ce qu'elle a débouté Mme [B] de sa demande de nullité de l'acte litigieux et a ordonné l'évaluation de la créance due par Mme [B] qui implique l'évaluation de la maison de [Localité 7] à la date d'exigibilité de la créance.

3-S'agissant des créances entre époux

Mme [B] fait grief au jugement déféré d'accueillir la demande des héritières réservataires au titre du financement du logement de la famille lui appartenant, alors que dans le cadre du régime matrimonial de la séparation de biens, le financement de l'emprunt sur le logement de famille relève de l'exécution de l'obligation de la contribution aux charges du mariage, peu importe que logement soit un bien propre .

Elle fait ainsi valoir que le paiement de l'emprunt eut-il été fait par M.[U] [C] ce qu'elle conteste puisque du fait de sa maladie les échéances ont été prises en charge par l'assurance, ne donne pas droit à récompense.

Elle ajoute que sur les dernières années de sa vie, les revenus de M.[C] étaient nettement inférieurs aux siens et qu'elle supportait de ce fait, la majorité des charges du ménage.

Mmes [C] font valoir pour leur part, que les capacités contributives de leur père avaient été altérées par sa maladie et que pour autant, il avait largement contribué à payer le bien appartenant en propre à Mme [B]. Elles considèrent qu'il est ainsi établi une surcontribution de la part de leur père aux charges du mariage, justifie l'évaluation de sa créance dont est débitrice son épouse.

Il est constant que dans un régime de séparation de biens, le bien appartient à celui des époux qui figure au titre comme propriétaire quelque soit celui qui l'a financé, mais ce dernier a une créance sur l'époux propriétaire pour l'avoir financé.

La Cour de cassation retient toutefois que les règlements opérés par l'un des époux relatifs à des emprunts qui financent en totalité ou partiellement l'acquisition par l'autre d'un bien constituant le logement de la famille, participent de l'exécution de l'obligation de contribuer aux charges du mariage.

Il convient donc de rechercher, en l'espèce, si le paiement par un époux des échéances de l'emprunt destiné à l'acquisition du logement familial participe ou non de son obligation de contribuer au charges du mariage en fonction de ses facultés, étant observé que le paiement par l'assureur invalidité de l'un des emprunteurs, en l'espèce M.[C], des échéances du ou des prêts, ne peut d'emblée comme le prétend Mme [B] évincer celui-ci sous prétexte qu'il ne serait pas le payeur effectif. Ce paiement par l'assureur s'étant substitué au paiement de celui sur lequel l'assurance est assise mais également en l'espèce au paiement de la part du co-emprunteur ; Mme [B] indiquant que les échéances et le solde ayant été payés par l'assureur l'assurance a forcément été souscrite à 100% sur la personne de M.[C].

Il résulte des pièces versées aux débats que M.[C] plus âgé que son épouse ( de 26 ans) travaillant régulièrement dans le cadre de son activité de restauration tel que cela résulte des attestations produites et Mme [B] ne travaillant pas avant 2010 ou ne justifiant pas de revenus personnels avant 2010, a contribué aux charges du mariage en assumant la vie quotidienne du couple. Cette contribution était justement proportionnée à ses facultés contributives puisqu'il était le seul à travailler jusqu'en 2010, de sorte que le financement du bien immobilier appartenant à son épouse par les emprunts auprès de la banque CIC dont il n'est pas contesté qu'ils étaient souscrits par M.[C] et Mme [B] ensemble soit à minima un financement par M.[C] à hauteur de 50%, excédait sa contribution aux charges du mariage, venant s'ajouter aux sommes déjà versées pour assurer la vie du foyer lorsqu'il était en activité. Ensuite, le paiement par l'assureur des échéances et du solde, lié au risque invalidité qu'il avait souscrit et qui s'est réalisé, ne peut pas bénéficier qu'à Mme [B]. L'invalidité subie qui a entraîné comme souligné par les premiers juges, une altération considérable de ses revenus, n'a pas supprimé toutes contributions de ce dernier puisqu'il a perçu une pension d'invalidité et un capital d'indemnisation du FIVA qui sont venus alimentés les ressources du foyer, ce qui n'a fait que confirmé sa surcontribution.

Il s'en déduit que M.[C] disposait bien à ce titre d'une créance envers Mme [B], au titre du financement de la maison de cette dernière située à [Localité 7] dont il convient d'apprécier au préalable le montant dans le cadre des opérations de comptes liquidation partage des intérêts patrimoniaux des époux suivant les règles de l'article 1543 du Code civil renvoyant aux articles 1479 et 1469 du même code, et ensuite de la faire figurer à l'actif de la succession du de cujus.

La décision de première instance mérite ainsi confirmation en toutes ses dispositions.

4-Sur les autres demandes

Les intimées sollicitant la confirmation du jugement elles ont abandonné devant la cour leur demande d'expertise judiciaire de la maison de [Localité 7] et ont accepté les modalités décrites au dispositif de la décision qui seront confirmées.

De même, Mme [B] ne sollicite pas à hauteur d'appel de dommages et intérêts pour procédure abusive ni la condamnation des intimées à quelconque somme de chef.

Ainsi partie perdante, Mme [T] [B] sera condamnée à supporter les dépens de l'instance d'appel et nécessairement déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Leur recouvrement direct sera ordonné au profit du conseil qui en a fait la demande conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Enfin, l'équité commande d'allouer à chacune des intimées la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles que Mme [T] [B] sera condamnée à leur verser.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [T] [B] à supporter la charge des dépens de l'instance d'appel et ordonne leur recouvrement direct au profit du conseil qui en a fait la demande conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [T] [B] à payer à Mmes [G] et [M] [C] la somme de 2000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Arrêt signé par Mme TOULOUSE, Conseillère, par suite d'un empêchement du Président et par Mme RODRIGUES, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00998
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;21.00998 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award