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30/08/2022 | FRANCE | N°22/00314

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 30 août 2022, 22/00314


ARRÊT N°



N° RG 22/00314 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IKLT



CJP



PRESIDENT DU TJ D'AVIGNON

13 décembre 2021

RG :21/00362



[R]



C/



[K]

[C]



Grosse délivrée

le

à

















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 30 AOUT 2022





APPELANT :



Monsieur [S] [G] [R]

né le 08 Février 1957 à [

Localité 13]

[Adresse 3]

[Localité 14]



Représenté par Me Benjamin BERBEZIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON





INTIMÉS :



Madame [J] [B], [H] [K] divorcée [C]

née le 27 Mars 1947 à MONTFAVET (84140)

[Adresse 1]

[Localité 13]



Représentée par Me Christelle MARQUIS,...

ARRÊT N°

N° RG 22/00314 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IKLT

CJP

PRESIDENT DU TJ D'AVIGNON

13 décembre 2021

RG :21/00362

[R]

C/

[K]

[C]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 30 AOUT 2022

APPELANT :

Monsieur [S] [G] [R]

né le 08 Février 1957 à [Localité 13]

[Adresse 3]

[Localité 14]

Représenté par Me Benjamin BERBEZIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉS :

Madame [J] [B], [H] [K] divorcée [C]

née le 27 Mars 1947 à MONTFAVET (84140)

[Adresse 1]

[Localité 13]

Représentée par Me Christelle MARQUIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Monsieur [P] [E], [I] [C]

né le 24 Octobre 1970 à MONTFAVET (84140)

[Adresse 12]

[Localité 13]

Représenté par Me Christelle MARQUIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 13 juin 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère

Mme Elisabeth GRANIER, Conseillère

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 20 Juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 30 Août 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 30 Août 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.

M. [S] [R] est propriétaire dans un lotissement dénommé « les jardins » situés sur la commune de [Localité 13] (84), de deux parcelles cadastrées section AV n° [Cadastre 8] et [Cadastre 9]. Une maison d'habitation est édifiée sur la première parcelle. Il est également propriétaire indivis, pour 90/ millièmes des parties communes, de la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 4], qui constitue une voie privée dénommée « rue des lucioles » desservant le lotissement.

Mme [J] [K] est usufruitière de la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 2], sur laquelle est édifiée une maison d'habitation qu'elle occupe. M. [P] [C], son fils, détient la nue-propriété de ce bien.

Par acte du 12 juillet 2021, M. [S] [R] a assigné Mme [J] [K] devant le président du tribunal judiciaire d'Avignon, statuant en référé aux fins de voir ordonner à celle-ci de cesser de passer de quelque manière que ce soit sur les parcelles cadastrées section AV n° [Cadastre 9] et [Cadastre 4] lui appartenant, sous astreinte de 100 € par manquement constaté, passé un délai de six mois à compter de la signification de l'ordonnance, outre une condamnation au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

M. [P] [C] est intervenu volontairement à l'instance.

Par ordonnance contradictoire du 13 décembre 2021, le président du tribunal judiciaire d'Avignon a :

-déclaré recevable l'intervention volontaire de M. [P] [C],

-déclaré recevable l'action intentée par M. [S] [R],

-débouté M. [S] [R] de ses demandes et prétentions,

-débouté Mme [J] [K] et M. [P] [C] de leurs demandes reconventionnelles,

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Par déclaration du 25 janvier 2022, M. [S] [R] a interjeté appel de cette ordonnance, en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes et prétentions, a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et a laissé à chacune des parties la charge ses propres dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 18 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, M. [S] [R], appelant, demande à la cour, au visa des articles 544 et 2278 du code civil et 835 alinéa 1 du code de procédure civile, de réformer les dispositions de l'ordonnance entreprise qui lui font grief et, statuant à nouveau, de :

-ordonner à Mme [J] [K] de cesser de passer, de quelque manière que ce soit, sur les parcelles cadastrées section AV n° [Cadastre 4] et [Cadastre 9], sur la commune de [Localité 13], lui appartenant,

-ordonner que la décision soit assortie d'une astreinte de 100 € par manquement constaté, passé un délai de un an à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

-confirmer l'ordonnance déférée pour le surplus,

-débouter Mme [J] [K] et M. [P] [C] de toutes leurs demandes,

-condamner Mme [J] [K] à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de son appel, M. [S] [R] expose :

-que pour accéder à la voie publique depuis sa parcelle cadastrée AV [Cadastre 2], Mme [J] [K] bénéficie d'une servitude de passage conventionnelle sur les parcelles cadastrées AV [Cadastre 7], [Cadastre 6], [Cadastre 5], [Cadastre 10] et [Cadastre 11] ; qu'en 2006, dans le but d'agrandir leur jardin et de gagner du terrain, les propriétaires d'une partie de ces parcelles ont procédé à la clôture de celles-ci et ont ainsi barré le passage à Mme [J] [K] sur ces parcelles ; que dès lors pour rejoindre la voie publique, au lieu de faire respecter sa servitude de passage, Mme [J] [K] a décidé unilatéralement de passer sur les parcelles voisines cadastrées AV [Cadastre 4] et [Cadastre 9], sans aucune autorisation, ce à quoi il s'est aussitôt opposé ;

-que le premier juge a commis une erreur dans l'appréciation des faits de la cause, puisqu'il a retenu que Mme [J] [K] faisait partie du lotissement 'Les jardins' et n'a donc pas pris en compte le passage sur la parcelle indivise cadastrée AV [Cadastre 4] pour statuer sur la demande ; que pour autant la parcelle de Mme [J] [K] ne fait pas partie du lotissement et elle ne dispose donc d'aucun droit de passage sur la parcelle cadastrée AV [Cadastre 4] ;

-que le fait de passer quotidiennement sur les parcelles lui appartenant pour rejoindre la voie publique, sans disposer de servitude de passage à cet effet, et alors qu'au contraire elle bénéficie d'une servitude de passage conventionnelle sur d'autres parcelles, constitue un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser ; que Mme [J] [K] ne peut sérieusement prétendre que sa parcelle est en état d'enclave ;

-que la partie adverse ne peut soutenir qu'il n'a pas qualité à agir, s'agissant de la parcelle indivise cadastrée AV [Cadastre 4], dès lors qu'un indivisaire peut agir individuellement contre le tiers auquel il reproche d'avoir troublé sa possession sur l'immeuble dont la jouissance est commune ;

-que Mme [J] [K] ne saurait se prévaloir de l'autorisation de certains indivisaires pour passer sur la parcelle cadastrée AV [Cadastre 4], une telle autorisation requérant l'unanimité des indivisaires ; que l'acte constitutif du lotissement a fixé la destination de cette parcelle qui est « affectée à l'usage collectif de tous les occupants du groupe » ;

-que s'agissant des demandes reconventionnelles adverses, Mme [J] [K] ne disposant pas de titre lui donnant un droit de passage sur ses parcelles, elle ne peut exercer aucune action possessoire ; qu'elle ne peut également solliciter qui lui soit ordonné de cesser de passer sur sa parcelle et ce alors que depuis le 12 mai 2020 il a donné son accord sur ce sujet et qu'il ne passe plus aujourd'hui sur sa propriété ; que le portail dont il est demandé la suppression est scellé et constitue désormais une paroi fixe inamovible.

Mme [J] [K] et M. [P] [C], en leur qualité d'intimés et d'appelants sur incident, par conclusions en date du 15 mars 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, demandent à la cour, au visa des articles 544, 545, 1240 du code civil, 835 du code de procédure civile, 815'2 et 815'3 et 1278 du Code civil, de :

-déclarer infondé l'appel principal de M. [S] [R] et de le rejeter,

-déclarer recevable et fondé leur appel incident partiel,

-confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a débouté M. [S] [R] de ses demandes,

-infirmer partiellement l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré l'action de M. [S] [R] recevable et en ce qu'elle les a déboutés de leurs demandes reconventionnelles,

-statuant à nouveau, in limine litis, déclarer l'action engagée par M. [S] [R] irrecevable pour défaut de qualité à agir,

-débouter celui-ci de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-dire n'y avoir lieu à référé à défaut d'urgence, à défaut de trouble manifestement illicite, à défaut de dommage imminent et au surplus vu l'existence d'une contestation sérieuse,

-déclarer leur action possessoire recevable,

-ordonner à M. [S] [R] de les maintenir dans la possession du droit de passage exercé sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 4] et de leur laisser un passage suffisant à pied et par véhicule automobile sur cette parcelle pour accéder à leur parcelle cadastrée section AV n°[Cadastre 2] depuis la voie publique,

-condamner le même à supprimer l'ouverture pratiquée sur sa parcelle cadastrée AV [Cadastre 8] lui permettant d'avoir accès à leur parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 2],

-ordonner à M. [S] [R] de cesser et faire cesser le passage à pied et/ou par tous véhicules sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 2] leur appartenant,

-ordonner que cette double condamnation soit assortie d'une astreinte de 100 € par jour de retard concernant la suppression de l'ouverture et d'une astreinte du même montant par manquement constaté concernant l'utilisation du passage, passé un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt,

-condamner l'appelant à leur payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Mme [J] [K] et M. [P] [C] font valoir :

-que la parcelle cadastrée AV [Cadastre 4] est une parcelle indivise et que l'action de M. [S] [R] excède le cadre d'une simple action conservatoire et exige une autorisation de tous les co-indivisaires ou au moins des deux tiers en application des articles 815'2 et 815'3 du code civil ; que M. [S] [R] ne démontre pas, ni même n'allègue que son action vise à protéger les intérêts de l'indivision, bien au contraire puisqu'il est en désaccord avec tous les autres indivisaires, ni d'une urgence qui le priverait de recourir au régime normal de la gestion du bien indivis ;

-que sur le fond, il est démontré par la production d'un procès-verbal de constat d'huissier, que cette parcelle dispose d'une issue suffisante à partir du chemin situé sur le fond cadastré AV [Cadastre 2] et les parcelles AV [Cadastre 10] et [Cadastre 11] pour accéder directement à la parcelle cadastrée AV [Cadastre 4] sans empiéter sur la parcelle AV [Cadastre 9] appartenant à M. [S] [R] ;

-qu'il est versé aux débats des témoignages démontrant qu'elle utilise la parcelle cadastrée AV [Cadastre 4] depuis de nombreuses années sans s'être heurtée à l'opposition des propriétaires indivis ; qu'elle dispose d'autorisation écrite de tous les indivisaires de la parcelle AV [Cadastre 4], à l'exception de M. [S] [R] ; que ce dernier n'interdit d'ailleurs pas aux autres riverains non propriétaires de la parcelle AV [Cadastre 4] de passer ;

-qu'il leur est impossible de faire autrement, dès lors qu'il n'y a pas d'autres chemins ni d'autres accès à la voie publique possible ; qu'en effet le chemin sur lequel une servitude conventionnelle avait été constituée n'existe plus depuis au moins 2007, des constructions ayant été édifiées sur ces parcelles ; qu'il est de principe constant en jurisprudence qu'il n'y a pas de trouble manifestement illicite lorsque le passage contesté est utilisé depuis plusieurs années, sans violence ni voie de fait ; qu'il résulte de l'aveu même de l'appelant qu'elle passe sur lesdites parcelles depuis 2006 ; qu'ainsi, M. [S] [R] ne justifie non seulement pas d'un trouble manifestement illicite, mais également pas d'une urgence ;

-que l'action et l'argumentation de M. [S] [R] constituent bien un trouble possessoire justifiant leur demande reconventionnelle ; qu'ainsi, il apparaît que leur propriété ne dispose pas d'une issue sur la voie publique et qu'ils utilisent un passage de manière continue et paisible sur la parcelle AV [Cadastre 4] indispensable à la desserte de leur fonds ; que les conditions sont réunies pour recueillir leur action possessoire et la demande reconventionnelle d'être maintenus dans la possession du droit de passage exercé sur la parcelle de M. [S] [R] ;

-qu'il est également établi que M. [S] [R] a créé une ouverture au nord de sa propriété, consistant en un portail blanc avec ouverture automatique qu'il utilise pour accéder au chemin situé sur la parcelle section AV [Cadastre 2] qui constitue un chemin privé leur appartenant ; que ce passage est illicite et qu'il doit être ordonné sa cessation.

La clôture de la procédure est intervenue le 13 juin 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 22 juin 2022 pour être mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 30 août 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

1) Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de M. [S] [R] :

M. [S] [R] a saisi le juge des référés aux fins de voir Mme [J] [K] cesser de passer sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 9] lui appartenant en pleine propriété et sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 4] dont il est propriétaire indivis à hauteur de 90/millièmes.

Les intimés contestent sa qualité à agir s'agissant de la parcelle indivise.

Aux termes de l'article 815-2 alinéa 1 du code civil, tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence.

En application de ces dispositions, un indivisaire peut passer seul les actes matériels et juridiques ayant pour objet de soustraire les biens indivis à un péril quelconque sans compromettre sérieusement le droit des autres indivisaires. Contrairement à ce que soutiennent les intimés, la démonstration d'une urgence n'est pas nécessaire, dès lors qu'un acte est nécessaire à la conservation d'un bien indivis, il est de l'intérêt commun de l'indivision que tout indivisaire puisse l'accomplir seul, non seulement sans attendre l'accord de tous, mais aussi, le cas échéant, en cas d'opposition d'un ou plusieurs indivisaires.

L'action en justice engagée par M. [S] [R] peut parfaitement constituer un acte conservatoire au sens susvisé, dès lors, d'une part, qu'elle a pour objet de soustraire le bien indivis à un péril éventuel se manifestant selon le requérant par un passage non autorisé d'un tiers à l'indivision sur le bien indivis et, d'autre part, qu'elle ne compromet pas le droit des autres indivisaires.

Il en résulte que M. [S] [R] a qualité pour agir à l'encontre des intimés et ce tant s'agissant du bien lui appartenant en totalité que s'agissant du bien indivis. La décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la fin de non recevoir sera, en conséquence, confirmée.

2) Sur la demande de cessation du trouble manifestement illicite formée par M. [S] [R] :

La cour est saisie, comme le juge de première instance, sur le fondement de l'article 835 du code de procédure civile, qui dispose que, même en présence d'une contestation sérieuse, il peut toujours être prescrit des mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Elle ne dispose pas du pouvoir de statuer, en référé, sur le fond du droit, mais seulement de prendre des dispositions conservatoires ou des mesures de remise en état, si l'une des conditions prévues par ce texte légal est remplie.

Le trouble manifestement illicite peut se définir comme « toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit ».

Comme relevé par le premier juge, l'atteinte aux droits de propriété constitue par elle-même une voie de fait et cause un trouble manifestement illicite. L'ordonnance entreprise a, cependant, retenu que M. [S] [R] ne démontrait pas la superficie et les limites de la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 9] dont il est propriétaire et le passage de Mme [J] [K] sur cette parcelle. Dès lors, à défaut de démontrer l'existence d'un trouble manifestement illicite, M. [S] [R] a été débouté de ses demandes.

En cause d'appel, M. [S] [R] soutient, à nouveau, que les intimés portent atteintes à son droit de propriété en passant sur les parcelles cadastrées section AV n° [Cadastre 9] et [Cadastre 4] et ce sans autorisation ni titre pour ce faire. À l'appui de ses prétentions, il verse, outre son titre de propriété, uniquement un schéma sur lequel est tracé par ses soins le passage emprunté par Mme [J] [K] pour rejoindre la voie publique. Aucune pièce ne vient conforter ce schéma et démontrer qu'en empruntant ce passage, Mme [J] [K] empiète effectivement sur sa propriété et plus particulièrement sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 9]. Le premier juge a également constaté, à juste titre, que M. [S] [R] ne démontrait pas l'emplacement et la superficie exacte de la parcelle litigieuse. Celui-ci n'apporte pas davantage cette démonstration devant la cour.

Si les intimés ne contestent pas passer sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 4] pour rejoindre la voie publique, ils réfutent, en revanche, tout passage sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 9] et versent au dossier pour en justifier un procès-verbal de constat d'huissier, établi le 2 septembre 2021, permettant de constater que Mme [J] [K] dispose pour rejoindre la voie publique de la possibilité de passer sur un chemin gravillonné d'une largeur de 4,80 mètres, situé à coté de la parcelle litigieuse. La largeur de ce chemin, au regard des constatations faites par huissier de justice, permet le passage y compris d'un véhicule, sans empiéter sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 9] appartenant à l'appelant. À l'inverse, M. [S] [R] ne démontre aucunement que les intimés passent, à pied ou avec un véhicule, sur ladite parcelle.

S'agissant de la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 4], comme indiqué plus avant, il n'est pas contesté par les intimés que Mme [J] [K] emprunte le chemin situé sur cette parcelle, précisant qu'au regard de la configuration actuelle des lieux, elle ne dispose d'aucun autre accès et ajoutant qu'elle dispose de l'accord de tous les co-indivisaires, à l'exception de M. [S] [R].

Il appartient à M. [S] [R] de démontrer que le passage sur cette parcelle indivise constitue un trouble manifestement illicite. Or les éléments du dossier permettent de relever, d'une part, que l'intimée emprunte ce passage depuis de nombreuses années, M. [S] [R] indiquant lui-même dans un courrier à l'attention de Mme [J] [K] qu'il avait accepté ce passage depuis 2006. Or, à l'exception d'un différend né récemment entre les parties, l'appelant n'indique pas en quoi le passage de Mme [J] [K] sur la parcelle AV [Cadastre 4], toléré jusque-là, constitue désormais un trouble qu'il convient de faire cesser. D'autre part, au regard des nombreuses attestations versées par les intimés, il apparaît qu'une grande partie des co-indivisaires n'est pas opposée au passage de Mme [J] [K] sur cette parcelle indivise, ce qui, à nouveau, vient atténuer la notion de trouble manifestement illicite invoqué par l'appelant. En outre, il n'apparaît pas davantage démontrer un péril pour l'indivision du fait de ce passage toléré par une partie importante des indivisaires.

Force est de constater que le trouble manifestement illicite invoqué par l'appelant n'est pas démontré en l'espèce. Il n'y, en conséquence, pas lieu à référé sur cette demande formulée par M. [S] [R]. La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

3) Sur la demande reconventionnelle de Mme [J] [K] et M. [P] [C] relative au passage sur les parcelles appartenant à M. [S] [R] :

Au visa de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile et de l'article 2278 du code civil, aux termes duquel la possession est protégée sans avoir égard au fond du droit contre le trouble qu'il l'affecte ou la menace et la protection possessoire est par ailleurs accordée au détenteur contre tout autre que celui duquel tient ses droits, Mme [J] [K] et M. [P] [C] souhaitent voir la cour accueillir leur action possessoire et dire qu'ils doivent être maintenus dans la possession du droit de passage exercé sur la parcelle indivise AV [Cadastre 4]. Ils soutiennent que Mme [J] [K] emprunte le passage situé sur la parcelle AV [Cadastre 4] depuis plusieurs années et qu'elle justifie donc d'une possession continue et paisible. Ils ajoutent que l'action et l'argumentation de M. [S] [R] génèrent un trouble possessoire en ce que ce dernier a pour objectif de les empêcher de passer sur ladite parcelle, ce qui constitue un trouble manifestement illicite.

Cependant, si l'action en justice de M. [S] [R] avait effectivement pour objectif d'empêcher Mme [J] [K] de passer sur la parcelle indivise, celui-ci étant opposé à ce passage, le fait de saisir la justice et de formuler des demandes pour faire cesser ce passage ne saurait en soi constituer un trouble manifestement illicite. Les intimés ne démontrent pas l'existence d'un acte matériel ayant pour effet d'empêcher tout passage sur le chemin litigieux.

De plus, les intimés formulent une action possessoire aux fins d'être maintenus dans la possession du droit de passage exercé sur une parcelle indivise, et ce alors que n'ont été attrait à la cause qu'un seul des indivisaires. Le fait que plusieurs autres indivisaires attestent être d'accords pour que Mme [J] [K] passe sur ladite parcelle ne saurait suffire pour régulariser sa demande et ce d'autant qu'il n'est pas démontré qu'elle produit les attestations de l'ensemble des indivisaires. Ainsi, la demande de Mme [J] [K] et M. [P] [C] formulée à l'encontre d'un seul des co-indivisaires, et ce alors que cette demande génère des conséquences à l'encontre de l'ensemble de l'indivision, n'est pas fondée.

Tenant ces éléments, il convient de dire n'y avoir lieu à référé sur cette demande reconventionnelle.

4) Sur les demandes reconventionnelles de Mme [J] [K] et M. [P] [C] relatives à l'ouverture pratiquée sur la parcelle cadastrée section AV n°[Cadastre 8] et au passage de M. [S] [R] sur la parcelle cadastrée section AV n°[Cadastre 2] :

L'ordonnance déférée a constaté, d'une part, que l'ouverture contestée n'empiétait pas sur le fonds de Mme [J] [K] et M. [P] [C] et, d'autre part, qu'il n'était pas démontré que M. [S] [R] passait sur leurs parcelles, à pied ou en véhicule, pour accéder à ce garage. Dès lors, en l'absence de trouble manifestement illicite démontré, ces demandes ont été rejetées.

Les intimés, sur appel incident, réitèrent ses demandes soutenant que l'ouverture automatique installée par M. [S] [R] est utilisée pour accéder au chemin situé sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 2] leur appartenant et qu'il convient donc de le condamner à remettre les choses en l'état en supprimant la dite ouverture et en lui interdisant tout passage sur leurs parcelles.

Le procès-verbal de constat d'huissier versé au dossier par Mme [J] [K] et M. [P] [C] met effectivement en exergue que M. [S] [R] a installé sur un immeuble lui appartenant un portail automatique lui permettant d'accéder au chemin situé sur la parcelle des intimés. Cependant, aucune des constatations faites par l'huissier de justice ne permet de dire que ce portail empiète sur la propriété des intimés ou qu'il contrevient aux obligations résultant des articles 675 à 680 du Code civil sur les jours et vues. Mme [J] [K] et M. [P] [C] ne démontrent ni n'allèguent, d'ailleurs, un empiétement sur leur propriété du fait de l'installation de ce portail. C'est, en conséquence, à bon droit que le premier juge a considéré qu'il n'existait aucun trouble manifestement illicite résultant de l'installation de ce portail.

S'agissant du passage de M. [S] [R] sur le chemin situé sur la parcelle appartenant aux intimés, Mme [J] [K] et M. [P] [C] versent au dossier plusieurs attestations desquelles il résulte que celui-ci passe sur ce chemin litigieux. Aucune de ces attestations, cependant, ne permet de dire s'il s'agit d'une utilisation ancienne ou si elle est toujours actuelle. Les éléments du dossier, en revanche, permettent de constater que si M. [S] [R] a effectivement utilisé ce passage pendant une certaine période, ensuite d'un accord entre les parties, celui-ci a indiqué dans un courrier en date du 17 avril 2021, compte-tenu du différend né entre eux récemment, qu'il cesserait tout passage. Les intimés ne démontrent pas que cet engagement n'a pas été respecté et donc que leur voisin continue de passer sur leurs parcelles. Le trouble manifestement illicite n'apparaît, en conséquence, pas démontré.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu à référé sur les demandes reconventionnelles de Mme [J] [K] et M. [P] [C] et que la décision déférée doit, également, être confirmée de ces chefs.

5) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement réglé par le premier juge.

En cause d'appel, chacune des parties succombant dans ses prétentions, il convient de dire de la même manière qu'en première instance que chacune des parties conservera la charge ses propres dépens et se verra débouter de sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance de référé rendue le 13 décembre 2021 par le président du tribunal judiciaire d'Avignon, en toutes ses dispositions portées à la connaissance de la cour,

Et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur l'action possessoire Mme [J] [K] et M. [P] [C],

Déboute M. [S] [R] de sa demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute Mme [J] [K] et M. [P] [C] de leur demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chaque partie conservera la charge ses propres dépens.

Arrêt signé par Madame GIRONA, Présidente et par Madame PELLISSIER, Greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/00314
Date de la décision : 30/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-30;22.00314 ?
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