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25/08/2022 | FRANCE | N°20/02134

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 25 août 2022, 20/02134


ARRÊT N°



N° RG 20/02134 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HZDW



LM



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

26 juin 2020

RG:18/01670



[X]

Société [V]



C/



[P]

Association ASSOCIATION PROTESTANTE DE SERVICES





























Grosse délivrée

le

à Me Pomies Richaud

SCP AKCIO















COUR D'APPEL DE NÎM

ES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 25 AOUT 2022





APPELANTS :



Monsieur [V] [X]

né le 25 Mai 1940 à SFAX (TUNISIE)

[Adresse 1]

Barqueroute

[Localité 2]



Représenté par Me Georges BANTOS de la SELARL JURIS-THALES, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

Représenté par Me Geo...

ARRÊT N°

N° RG 20/02134 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HZDW

LM

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

26 juin 2020

RG:18/01670

[X]

Société [V]

C/

[P]

Association ASSOCIATION PROTESTANTE DE SERVICES

Grosse délivrée

le

à Me Pomies Richaud

SCP AKCIO

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 25 AOUT 2022

APPELANTS :

Monsieur [V] [X]

né le 25 Mai 1940 à SFAX (TUNISIE)

[Adresse 1]

Barqueroute

[Localité 2]

Représenté par Me Georges BANTOS de la SELARL JURIS-THALES, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

SCI [V] immatriculée au RCS de NIMES sous le N° 350 537 726 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis Bât. [Adresse 10] et actuellement chez son gérant

Monsieur [V] [X],

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentée par Me Georges BANTOS de la SELARL JURIS-THALES, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

Madame [J] [P] divorcée [X]

assignée à étude d'huissier le 26 octobre 2020

née le 14 Novembre 1951 à [Localité 11]

[Adresse 7]

[Localité 3]

L'ASSOCIATION PROTESTANTE DE SERVICES, Association immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 491 946 158, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Pascale COMTE de la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 17 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre,

Mme Catherine Ginoux, conseillère,

Madame Laure Mallet, conseillère,

GREFFIER :

Mme Céline Delcourt, greffière, lors des débats et Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 05 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 02 Juin 2022 prorogé à ce jour

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre et Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, le 25 août 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

L'association Protestante de Services a acquis le 4 juin 2015 de la SCI [V] représentée par son gérant [B] [X], un ensemble immobilier consistant dans l'ensemble des lots de copropriété d'un immeuble dépendant de la copropriété Pépinières d'entreprises située [Adresse 6].

Le bien vendu correspond à la totalité des lots du bâtiment F, soit les lots n° 323 à 344.

Ces lots étaient antérieurement à usage de bureaux et avaient fait l'objet de différents baux.

Au cours de la première année d'occupation, l'association Protestante de Services a constaté des infiltrations provenant du toit-terrasse.

Elle a fait intervenir la société Sud Étanchéité qui a procédé à une réparation ponctuelle et alerté son donneur d'ordre sur le fait « que l'isolant thermique situé sous l'isolant était humide ce qui prouve qu'une importante quantité d'eau était passée au travers de l'étanchéité ».

L'association a fait établir le 3 décembre 2015 par la SCP Belin-Laurent un constat mettant en évidence l'état du toit-terrasse et les multiples réparations qui y ont été effectuées.

Par acte du 19 septembre 2016, elle a fait assigner le SCI [V] devant le juge des référés de Nîmes aux fins de solliciter une mesure d'expertise.

Par ordonnance de référé du 09 novembre 2016 réputée contradictoire, M. [D] a été désigné en qualité d'expert.

Le rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 16 octobre 2017.

Par actes des 19 et 26 mars 2018, l 'association Protestante de Services a fait assigner la SCI [V], M. [V] [X] à titre personnel et Mme [J] [P] divorcée [X] devant le tribunal judiciaire de Nîmes sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Par jugement contradictoire du 28 juin 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes a :

- condamné la SCI [V] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 57.436 euros H.T. au titre des travaux de reprises majorée du taux de TVA applicable ainsi que la somme de 1.000 euros H.T., majorée du taux de TVA applicable pour les travaux de remise en état intérieur.

- condamné la SCI [V] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la SCI [V] aux dépens,

-ordonné l'exécution provisoire,

Par déclaration du 27 août 2020, la SCI [V], et M. [V] [X] ont relevé appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 17 mars 2022, auxquelles il est expressément référé, la SCI [V] et M. [V] [X], demandent à la cour de :

Vu l'article 16 du code de procédure civile

Vu l'article 478 et l'article 659 du code de procédure civile,

Vu les articles 1641 et suivants du code civil

Déclarant l'appel de la SCI [V] et de M. [X] recevable,

Réformer le jugement dont appel en tant qu'il a :

- condamné la SCI [V] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 57.436 euros H.T. au titre des travaux de reprises majorée du taux de TVA applicable ainsi que la somme de 1.000 euros H.T. majorée du taux de TVA applicable pour les travaux de remise en état intérieur.

- condamné la SCI [V] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 2.000 euros au titre de l'Article 700 du code de procédure civile,

-condamné la SCI [V] aux dépens,

-ordonné l'exécution provisoire,

Et qui a dans les motifs du jugement a,

- rejeté les demandes de la SCI [V] et de M. [X] tendant à voir constater la prescription de l'action,

-rejeté la demande de sursis à statuer dans l'attente de communication de pièces,

- refusé de constater le caractère non avenu de l'ordonnance de référé rendue le 9 novembre 2016 et l'inopposabilité du rapport d'expertise,

-a incidemment rejeté la demande de nouvelle expertise.

Statuant de nouveau,

A titre principal,

Relevant le caractère non avenu de l'ordonnance de référé et l'atteinte porté au contradictoire dès la délivrance de l'assignation en référé du 19 septembre 2016,

-constater la forclusion de l'action engagée par l'association Protestante de Services sur le fondement de garantie des vices cachés,

-débouter en tout état de cause l'association Protestante de Services de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contre la SCI [V] sur le fondement de la garantie des vices cachés ,

A titre subsidiaire, et si la cour devait considérer que la garantie des vices cachés est applicable,

-constater que l'ordonnance de référé est non avenue et, en conséquence,

-dire et juger que le rapport d'expertise ne peut de ce fait être invoqué,

-débouter l'association Protestante de Services de ses demandes, et notamment au titre de la clause d'exonération de garantie des vices cachés figurant à l'acte de vente du 04 juin 2015,

En tout état de cause,

-dire et juger que la SCI [V] ne saurait être tenue de prendre en charge les travaux de remise en état du bien au regard du caractère commun du toit terrasse, ces frais devant être assumés par le syndicat des copropriétaires,

A titre infiniment subsidiaire et si cour de céans devait considérer que les requis sont tenus de prendre en charge lesdits travaux de reprise,

-constater que l'ordonnance de référé est non avenue et, en conséquence,

-dire et juger que le rapport d'expertise ne peut de ce fait être invoqué.

-ordonner une nouvelle expertise avec la même mission que celle précédemment ordonnée,

En toute hypothèse,

-confirmer le jugement dont appel en tant qu'il a rejeté les demandes de l'association Protestante de Services formulées à l'encontre de M. [X],

-rejeter l'appel incident de l'association Protestante de Services en ce qu'elle demande que, réformant le jugement rendu le 26 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Nîmes en ce qu'il a rejeté la demande de préjudice de jouissance formulée par l'association Protestante de Services, il soit de nouveau statué et que soit condamnée la SCI [V] prise en la personne de son gérant M. [V] [X], à payer à l'association Protestante de Services la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice de jouissance subi et, condamner la SCI [V] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

-rejeter plus généralement toutes les autres demandes de l'association Protestante de Services,

-condamner l'association Protestante de Services à payer une somme de 3.000 € à M. [X] et une somme de 3.000 € à la SCI [V] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'une somme de 5.000 € à M. [X] et une somme de 5.000 € à la SCI [V] sur le même fondement au titre des frais irrépétibles d'appel,

-condamner l'association Protestante de Services à supporter les entiers dépens de l'expertise, de première instance et d'appel,

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 17 mars 2022 , auxquelles il est expressément référé, l'association Protestante de Services demande à la cour de :

-rejeter la fin de non-recevoir articulée sur les articles 122, 31 et 32 du code de procédure civile.

Vu le rapport d'expertise judiciaire de M. [D],

Vu les articles 1641,1642,1644, 1645, 1648, 2241, 2239 du code civil,

Vu les articles 690, 654, 655, 659 et 16 du code de procédure civile,

-confirmer le jugement rendu le 26 juin 2020 par le tribunal Judiciaire de Nîmes, en ce qu'il a

*condamné la SCI [V] prise en la personne de son gérant M. [V] [X], à payer à l'association Protestante de Services les sommes suivantes :

*57 436 € HT au titre des travaux de reprise majorée du taux de TVA applicable

*1 000 € HT au titre des remises en état intérieures majorée du taux de TVA

applicable

*2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

En conséquence,

-débouter la SCI [V] et M. [X] de la fin de non-recevoir tirée de la prétendue forclusion de l'action exercée sur le fondement de l'article 1648 du code civil par application des articles 2241 et 2239 du code civil, l'article 102 du même code et les articles 690, 654, 655, 659 du code de procédure civile ;

-débouter la SCI [V] et M. [X] de leur prétention selon laquelle le vice aurait été apparent ou connu de l'acquéreur au sens de l'article 1642 du code civil ;

-débouter la SCI [V] et M. [X] de leur demande d'exclusion de garantie tirée de l'application de la clause de non garantie pour connaissance du vice par le vendeur,

Vu le règlement de copropriété du 10 juin 1988 et son modificatif du 30 juin 1989,

-débouter la SCI [V] et M. [X] de leur demande de non garantie pour défaut de mise en cause du syndicat et/ou du syndic au regard du prétendu caractère commun du toit terrasse ;

-débouter la SCI [V] et M. [X] de leur demande aux fins de rejet des débats du rapport d'expertise ;

-débouter la SCI [V] et M. [X] de leur demande de nouvelle expertise ;

-débouter la SCI [V] et M. [X] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

-réformer le jugement rendu le 26 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Nîmes, en ce qu'il a rejeté la demande de préjudice de jouissance formulée par l'association Protestante de Services

-condamner la SCI [V] prise en la personne de son gérant M. [V] [X] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice de jouissance subi

-condamner la SCI [V] à payer à l'association Protestante de Services la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Mme [J] [P] divorcée [X], à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 26 octobre 2020, à étude, et les conclusions d'appel, le 8 mars 2021, également à étude, n'a pas constitué avocat.

La clôture de la procédure est intervenue le 5 avril 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces du dossier d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

Il convient de noter que les appelants ne formulent aux termes de leur dispositif aucune demande tendant à la fin de non-recevoir tirée du défaut d'autorisation du président de l'Association d'ester en justice.

Or, en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Par ailleurs, il y a lieu de relever que les parties ne formulent aucune critique en appel sur l'impossibilité d'agir à l'encontre de M. [X] en application de l'article 1858 du code civil et le refus de prononcer le sursis à statuer.

Enfin, aucune demande n'est dirigée à l'encontre de Mme [J] [P] divorcée [X], qui sera mise hors de cause.

Sur la recevabilité de l'action

Selon l'article 1648 alinéa 1 du code civil « l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. »

En l'espèce, le premier juge a justement retenu la date du 7 décembre 2015 comme date de découverte du vice puisque lors de l'intervention de la société Sud étanchéité, cette dernière a alerté l'acquéreur que l'étanchéité en cause avait fait l'objet de multiples réparations et qu'elle avait relevé la présence d'une grande quantité d'eau, le délai pour agir expirant donc le 7 décembre 2017.

Cependant, l'assignation en référé expertise intervenue le 19 septembre 2016 a interrompu le délai, et un nouveau délai de forclusion de 2 ans a commencé à courir à compter de la fin de l'instance, ce qui correspond en référé expertise à la date de l'ordonnance désignant l'expert, soit en l'espèce à compter du 19 novembre 2016, le délai pour agir expirant dès lors le 19 novembre 2018, tandis que les assignations ont été délivrées les 19 et 26 mars 2018.

Les appelants contestent l'effet interruptif de l'assignation en référé expertise soutenant que les significations de l'assignation en référé et de l'ordonnance de référé sont nulles et par suite rendent non avenue l'ordonnance de référé pour ne pas avoir été signifiée dans les six mois en application de l'article 478 du code de procédure civile.

L'analyse du procès-verbal de signification selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile de l'assignation en référé à la SCI [V] en date du 19 septembre 2016 révèle qu'elle a été faite au siège social de la SCI [V] sis [Adresse 5], siège social indiqué dans l'acte de vente et au registre du commerce et des sociétés conformément à l'article 690 du code de procédure civile, étant noté qu'il résulte des pièces 14 et 14 ter produites par les appelants que la SCI n'a effectué le transfert de son siège social à [Adresse 9] que tardivement en mars 2021 et bien après la vente du bien et l'assignation en référé.

Les appelants ne peuvent dès lors reprocher à l'Association Protestante de Services leur propre négligence .

Quant aux diligences de l'huissier, elles ont été réalisées. Le procès-verbal de signification indique qu'à l'adresse du siège, il n'y avait ni boîtes aux lettres ni sonnette, qu'une personne présente a déclaré ne pas connaître le destinataire. Il n'a pas non plus été constaté la présence d'un homonyme pour la SCI ou le gérant. Enfin, l'huissier indique que les diverses administrations étant par ailleurs tenues au secret professionnel, toutes les autres recherches entreprises, y compris sur l'annuaire électronique (Internet), sont restées infructueuses.

La signification de l'assignation en référé à la SCI [V] est dès lors régulière et a pu valablement interrompre le délai d'action.

Quant à la signification de l'ordonnance de référé, l'huissier instrumentaire a effectivement dressé un procès-verbal de difficultés le 5 mai 2017, l'adresse du domicile du gérant en exercice à cette date, M. [B] [X], étant trop imprécise, le quartier [Adresse 13] à [Localité 12] s'étendant sur plusieurs kilomètres et étant constitué d'ensembles de maisons et d'immeubles, et alors même que les recherches sur pages blanches se révélaient infructueuses.

Or, cette adresse est bien celle figurant sur l'acte de vente du 4 juin 2015.

Dès lors, c'est en raison de la délivrance d'information imprécise par le gérant que la signification de l'ordonnance de référé n'a pu avoir lieu.

Les appelants ne peuvent se prévaloir encore une fois de leur propre turpitude.

Dès lors qu'une ordonnance, fut-elle non avenue pour défaut de signification dans les six mois, conserve son effet interruptif, le moyen tiré de l'application de l'article 478 du code de procédure civile est sans portée

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté le moyen d'irrecevabilité de l'action.

Sur le fond

Selon l'article 1641 du code civil « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui en diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.»

Selon l'article 1642 du code civil « le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ».

Il appartient à l'acquéreur de rapporter la preuve du vice, de son antériorité, de sa gravité, de son caractère caché, et l'impropriété à la destination ou la diminution de l'usage.

En application de l'article 1643 du code civil, le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

La mauvaise foi du vendeur doit être établie par l'acquéreur et fait obstacle au jeu de la clause exonératoire .

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise judiciaire :

-que le revêtement d'étanchéité du toit-terrasse incriminé du bâtiment F est en général, que ce soit en partie courante ou sur les acrotères, dans un état qualifié de vétuste causé et aggravé par une absence totale d'entretien normal pendant plus de 27 ans et par des réparations « bricolées » pendant environ les 5 à 10 dernières années avant la vente,

-que les réparations effectuées ne sont ni conformes ni efficaces,

-que l'isolant situé sous le complexe d'étanchéité est humide, le taux d'humidité dépassant le maximum de l'appareil testeur d'humidité, que de l'eau en quantité inconnue mais pouvant être très importante si uniformément répartie est passée sous l'étanchéité par des orifices ou déchirures de celle-ci,

-que le toit-terrasse reste affecté, outre sa vétusté causée par un manque ou une insuffisance d'entretien régulier, de fragilité chronique pour résister au soleil d'été, aux épisodes pluvieux, et renferme sous sa couche extérieure apparente des résidus d'eau qui croupit, ronge les matériaux, et « percole » pour finalement s'infiltrer à l'intérieur des locaux,

-que ces désordres constituent des vices qui ne rendent pas l'ensemble de l'immeuble impropre à l'usage auquel il est destiné, mais qui diminuent de façon importante cet usage dans les locaux concernés.

Dès lors, l'existence du vice et sa gravité sont établies.

Les appelants sollicitent que le rapport d'expertise de M. [D] soit écarté des débats, l'expertise ayant été faite au détriment du principe du contradictoire, de manière partiale, outre que l'ordonnance non avenue entraîne la caducité dudit rapport .

Outre le fait qu'aux termes de leur dispositif les appelants se contentent de demander que le rapport d'expertise soit écarté des débats et non sa « caducité » ou sa nullité, il résulte des pièces produites aux débats et des circonstances de la cause :

-que les appelants par leur propre négligence sont à l'origine de la signification selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile de l'assignation en référé expertise et de l'impossibilité de signifier l'ordonnance de référé,

-que la convocation pour le premier accedit a été adressée par l'expert à la SCI [V] en la personne de M. [B] [X], par lettre recommandée avec accusé de réception, ce dernier ayant été signé par le destinataire le 26 avril 2016,

-que le pré-rapport a bien été adressé en lettre recommandée avec accusé de réception à la SCI Saint-Marc, l'accusé de réception mentionnant « pli avisé et non réclamé ».

Par ailleurs et en toute hypothèse, le caractère non avenue d'une ordonnance de référé n'a pas pour conséquence de rendre caduc le rapport d'expertise.

Au demeurant, le rapport a été soumis à la libre discussion des parties et est corroboré par d'autres éléments, à savoir le procès-verbal de constat d'huissier du 3 décembre 2015 et les constatations de la société Sud Étanchéité.

Enfin, la partialité de l'expert n'est pas démontrée, ce dernier ayant seulement répondu aux chefs de mission, à savoir la préexistence des désordres à la vente, le caractère visible par un acheteur non professionnel, et l'impropriété de l'immeuble à l'usage auquel il est destiné ou diminuant de façon importante cet usage, ces conditions relevant en toute hypothèse in fine de l'appréciation de la cour.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'écarter le rapport d'expertise judiciaire et d'ordonner une nouvelle mesure expertale, l'absence des appelants aux opérations d'expertise ne résultant que de leur fait.

Les appelants font valoir d'une part que les vices étaient apparents lors de la vente et d'autre part opposent la clause de non garantie insérée à l'acte de vente en soutenant qu'étant de bonne foi elle doit recevoir pleinement application.

Il ressort du rapport d'expertise que si l'acquéreur a pu accéder au toit du bâtiment, il aurait été interpellé par l'état mais n'aurait pas pu seul en tirer les conséquences techniques.

La SCI [V] et M. [V] [X] soutiennent que l'acquéreur a obtenu une réduction de prix eu égard à l'état du bien, que le toit-terrasse était parfaitement accessible et que l'Association Protestante de Services était assistée lors de l'établissement du procès-verbal de constat d'huissier et même avant la vente d'un architecte pour préparer un projet de réhabilitation de l'immeuble.

Cependant, même s'il n'est pas contesté que le toit-terrasse ait été accessible, la simple observation des multiples réparations ne permettait pas à l'acquéreur de se convaincre de l'état de délabrement de la toiture, d'autant que seule l'intervention de la société Sud étanchéité suite aux infiltrations constatées postérieurement à la vente a mis en évidence une humidité importante sous l'étanchéité et qu'une expertise judiciaire a été nécessaire pour en déterminer l'ampleur et les causes.

Il convient de rappeler que la charge de la preuve du caractère apparent du vice pèse sur le vendeur et qu'il doit être apprécié au moment de la vente.

Dès lors la présence d'un architecte lors de l'établissement du procès-verbal postérieur à celle-ci est inefficace.

Les appelants soutiennent que l'architecte mandaté par l'Association a nécessairement visité le toit-terrasse lors de ses visites dans l'année précédant l'acquisition mais ne le démontrent pas, et aucun élément ne permet d'établir, que l'architecte mandaté avait décelé le vice.

En toute hypothèse, même la découverte d'un vice par un architecte mandaté par l'acquéreur serait insuffisante pour conclure à la connaissance personnelle du vice par l'acquéreur profane.

Au demeurant, il ressort de la pièce 19 produite par l'Association que les travaux effectués après la vente ne concernent nullement la toiture et la simple mention « achat et réhabilitation du siège en ville active avec organisation du déménagement entre juin 2015 et janvier » dans le procès verbal d'assemblée générale de l'association en date du 15 juin 2016 dans le cadre du rapport d'activité au paraphe « événements marquants de l'année 2015», sans aucune précision sur la nature des travaux engagés, ne renseigne nullement sur la localisation des travaux réalisés.

Enfin, comme l'a pertinemment indiqué le premier juge, il n'est pas démontré que l'acquéreur ait obtenu une réduction de prix en raison de l'état de la toiture.

En effet, les données de l'observatoire de l'immobilier sont relatives à l'ensemble d'un marché et non spécifiques à un immeuble et elles ne peuvent dès lors, à elles seules, déterminer la présence d'une réduction de prix en lien avec l'état de l'immeuble acquis, aucun autre élément n'étant communiqué afin d'établir la cause de la réduction du prix revendiqué par le vendeur.

Il y a donc lieu de considérer le vice comme caché.

Quant à la connaissance du vice par le vendeur, il ne conteste pas les multiples réparations destinées inévitablement à remédier à des infiltrations puisqu'il prétend même que le vice était apparent.

D 'ailleurs, il ne conteste pas avoir réalisé les diverses reprises.

Même si le vendeur n'a pas tenté de dissimuler le vice, il n'en demeure pas moins qu'il en avait connaissance avant la vente, condition nécessaire mais suffisante pour écarter l'application de la clause de non garantie stipulée à l'acte.

Les appelants considèrent qu'aucuns travaux urgents n'ont été décidés par le cabinet [F], syndic principal et syndic secondaire.

L'analyse du règlement de copropriété et de ses modificatifs révèle que la toiture du bâtiment F est une partie commune particulière dont les charges incombent aux copropriétaires des lots compris dans chaque bâtiment au prorata de leur quote-part de copropriété.

En effet, l'article 33 du règlement du 10 juin 1988 stipule : «Les charges particulières à chacun des bâtiments comprennent les frais d'entretien, de réparations, de réfection et de reconstruction relatifs aux éléments porteurs de chacun des bâtiments, ses murs et sa toiture, ainsi que tous les éléments horizontaux participant à la structure dudit bâtiment.»

L'article 34 stipule : « les charges énumérées à l'article précédent seront réparties entre les copropriétaires des lots compris dans chaque bâtiment au prorata de quote part de copropriété des parties communes attachées à chacun de ces lots.'

Le modificatif d'état descriptif du 25 avril 1989 stipule en page 30 : « Que dans les bâtiments A, D, E et F le gros-oeuvre, la toiture ainsi que les halls d'entrée des rez-de-chaussée avec toilettes, sanitaires, montées d'escaliers, les paliers des 1er étage avec toilettes et sanitaires, les câbles, gaines, canalisations qui desservent les différents lots ainsi que les conduits de fumées, aérations, sont considérés comme des parties communes particulières aux bâtiments. »

Ainsi, la SCI [V], qui est l'unique propriétaire du bâtiment F, devait prendre seule en charge l'entretien de la toiture, la mise en cause du syndicat des copropriétaires étant dès lors d' aucune utilité.

Quant à la mise en cause du cabinet [F] en sa qualité administrateur du bien selon mandat du 1er août 1989, il appartenait à la SCI [V] de la mettre en cause si elle estimait que sa responsabilité était engagée.

L'article 1644 du code civil dispose que dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire.

Le choix offert à l'acheteur par l'article 1644 s'exerce sans que cet acheteur ait à le justifier.

L'association Protestante de Services a choisi d'exercer l'action estimatoire.

Il ressort du rapport d'expertise que les travaux pour mettre fin aux désordres consistent au remplacement intégral de l'étanchéité pour un coût de 57 436 € HT outre les remises en état intérieures pour la somme de 1 000 € HT.

Le premier juge a justement fixé les travaux à ces sommes outre la TVA applicable correspondant à la diminution de prix. Il y a lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef sauf à préciser que la somme de 58 436 € sera majorée de la TVA applicable au jour du paiement.

L'action estimatoire n'interdit pas à l'acheteur d'obtenir, outre, la diminution de prix, des dommages et intérêts fondés sur l'article 1645 du code civil si le vendeur est de mauvaise foi.

La mauvaise foi de la SCI [V] a été démontrée ci -avant.

L'association Protestante de Services réclame la somme de 5 000 € au titre du préjudice de jouissance.

Il est constant aux termes du rapport d'expertise que des infiltrations se sont produites dans les faux plafonds et une partie des parois de certains bureaux du premier étage en septembre 2015 occasionnant un trouble de jouissance mais l'acquéreur n'établit pas que de nouvelles infiltrations aient eu lieu postérieurement.

Infirmant le jugement déféré, il lui sera alloué la somme de 1 000 € en réparation de son préjudice.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la SCI [V], qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise judiciaire.

Il n'est pas équitable de laisser supporter à l'Association Protestante de Services ses frais irrépétibles de première instance et d'appel. Il lui sera alloué la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser supporter à M. [V] [X] ses frais irrépétibles de première instance et d'appel. Il sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, par défaut, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension,

Constate que la cour n'est pas saisie de la fin de non-recevoir tenant au défaut d'autorisation du président de l'Association d'ester en justice,

Met Mme [J] [P] divorcée [X] hors de cause,

Dans la limite de sa saisine,

Déclare recevable l'action en garantie fondée sur les vices cachés de l'Association Protestante de Services,

Dit n'y avoir lieu à écarter des débats le rapport d'expertise de M. [D] en date du 16 octobre 2017,

Déboute la SCI [V] et M. [V] [X] de leur demande de nouvelle expertise,

Condamne la SCI [V] à payer à l'Association Protestante de Services la somme de 58 436 € majorée de la TVA applicable au jour du paiement au titre de la diminution de prix,

Condamne la SCI [V] à payer à l'Association Protestante de Services la somme de 1 000 € au titre du préjudice de jouissance,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SCI [V] à payer à l'Association Protestante de Services la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Déboute M. [V] [X] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Condamne la SCI [V] aux dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise judiciaire,

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 20/02134
Date de la décision : 25/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-25;20.02134 ?
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